Rupture de gazoduc et incendie
NOVA Gas Transmission Ltd.
Conduite principale Grande Prairie de 36 po
Près d’Edson (Alberta)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu. Les pronoms et les titres de poste masculins peuvent être utilisés pour désigner tous les genres afin de respecter la Loi sur le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports (L.C. 1989, ch. 3).
Résumé
Le 16 avril 2024, vers 10 h 45, heure avancée des Rocheuses, un gazoduc de 36 po (914 mm) appartenant à NOVA Gas Transmission Ltd. et transportant du gaz naturel non corrosif s’est rompu à environ 36,5 km au nord-ouest d’Edson (Alberta). À la suite de la rupture, le gaz naturel s’est enflammé, ce qui a provoqué une explosion et un incendie. Environ 5 980 000 m3 de gaz naturel ont été rejetés. Il n’y a eu aucun blessé, et aucune évacuation des membres du public n’a été requise.
1.0 Renseignments de base
1.1 L’événement
Le 16 avril 2024, vers 10 h 45Les heures sont exprimées en heure avancée des Rocheuses., un gazoduc de 36 po (914 mm) appartenant à NOVA Gas Transmission Ltd.Le 14 mai 2024, l’entité NOVA Gas Transmission Ltd. (NGTL) a été dissoute et la propriété du gazoduc a été transférée à NGTL GP Ltd. pour le compte de NGTL Limited Partnership. Puisque l’événement s’est produit avant la date de transition, on utilisera NGTL dans l’ensemble du rapport. Le système de NGTL est exploité par TransCanada PipeLines Limited (TCPL), ci-après appelée par son nom commercial, TC Énergie. (NGTL)—la conduite principale Grande Prairie d’un diamètre nominal (NPS) de 36 po (conduite principale Grande Prairie NPS 36)— s’est rompu à la borne kilométrique 36,5. Le gaz naturel non corrosif qui s’est échappé s’est enflammé et a brûlé jusqu’à ce que l’incendie s’éteigne de lui-même à 13 h 45. L’écoulement de gaz vers le tronçon rompu a été interrompu en fermant les vannes en amont, à la station de compression Emerson Creek, et en aval de la rupture.
L’événement s’est produit sur une emprise utilisée par NGTL (figure 1). La ville la plus près du lieu de l’événement est Edson (Alberta), située à environ 36,5 km au sud-est.
Outre la conduite principale Grande Prairie NPS 36, l’emprise compte 2 autres gazoducs parallèles de NGTL : un gazoduc de 42 po et un autre de 48 po qui transportent du gaz naturel dans la même direction. Une conduite de 8 poLa conduite de 8 po appartient à Peyto Exploration and Drilling. et une conduite de 3 poLa conduite de 3 po appartient à Secure Energy. appartenant à des compagnies tierces sont également parallèles aux conduites de NGTL.
Le lieu de l’événement est entouré de terres publiques dans un rayon de plus de 5 km. Le site de la station de compression Emerson Creek (situé à 2,5 km au nord-ouest du lieu de l’événement) comportait un camp de travail qui était inoccupé depuis le 1er avril 2024 et qui était en cours de démontage au moment de l’événement. On ne trouve aucune habitation dans un rayon de 2 km du lieu de l’événement.
Environ 5 980 000 m3 de gaz naturel non corrosif ont été rejetés. Le feu de forêt qui s’en est suivi a brûlé une superficie de 60,19 hectares. Il n’y a eu aucun blessé, et aucune évacuation des membres du public n’a été requise.
Au moment de la rupture, la pression de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 au lieu de l’événement était de 8110 kPa, ce qui était conforme à sa pression maximale d’exploitation autorisée de 8270 kPa. Le débit était de 35 000 000 m3 par jour, et la température du gaz était de 32 °C. La station de compression en amont la plus près, Emerson Creek, avait été mise en service normal le 1er avril 2024. La station est équipée de 2 compresseurs et peut fournir de la pression et un écoulement de gaz aux 3 gazoducs parallèles de NGTL qui sont exploités dans l’emprise de la conduite principale Grande Prairie. La configuration des compresseurs en service et le parcours d’écoulement sont choisis en fonction de la demande de gaz et d’autres facteurs opérationnels. Au moment de l’événement, la station de compression était configurée de manière à ce que les deux compresseurs fonctionnent et fournissent de la pression aux 3 gazoducs NGTL simultanément. La température ambiante était d’environ 2 °C et les vents soufflaient du nord-ouest à 32 km/h.
1.1.1 Séquence des événements
Le matin du 16 avril 2024, la station de compression Emerson Creek fonctionnait avec son 1er compresseur, A1, qui était actif et son 2e compresseur, B2, qui était inutilisé. Le centre de contrôle de Calgary a amorcé la mise en service du compresseur B2 pour augmenter le débit dans la conduite principale Grande Prairie NPS 36 et dans les autres gazoducs situés dans l’emprise de NGTL. Il a également demandé aux exploitants sur place d’ouvrir et de vérifier les vannes de raccordement entre la conduite principale Grande Prairie NPS 36 et les autres gazoducs parallèles de 42 et 48 po. Le jour de l’événement, c’était la 1re fois que les 2 compresseurs fonctionnaient en tandem et fournissaient de la pression aux 3 gazoducs de NGTL en mode communEn mode commun, tous les gazoducs en aval reçoivent la même pression de refoulement de la station de compression.. Le tableau 1 décrit la chronologie de la mise en service du compresseur B2 et de la rupture au lieu de l’événement.
Heure | Description | Pression dans la conduite principale Grande Prairie NPS 36* |
---|---|---|
8 h 09 | La vanne de raccordement au gazoduc de 42 po est ouverte | 7756 kPa |
9 h 40 | Le compresseur B2 commence à fournir de la pression au réseau de gazoducs | 7602 kPa |
10 h 06 | La vanne de raccordement au gazoduc de 48 po est ouverte | 8088 kPa |
10 h 45 | Rupture de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 | 8110 kPa |
* La pression de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 a été mesurée à la station de compression Emerson Creek.
1.1.2 Signalement de l’événement et intervention
En raison de la mise en service du compresseur B2, le centre de contrôle de Calgary surveillait activement la pression dans le gazoduc de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 et à la station de compression Emerson Creek. À l’aide du système d’acquisition et de contrôle des données, le régulateur de gaz de service au centre de contrôle de Calgary a surveillé l’augmentation graduelle de la pression de refoulement à la station de compression Emerson Creek et a remarqué à 10 h 48 que la pression baissait. À 10 h 50, une opératrice à la station de compression a appelé le centre de contrôle de Calgary pour signaler une explosion et un incendie et a indiqué qu’elle soupçonnait une rupture de la conduite principale Grande Prairie NPS 36. Après avoir reçu cet appel, le régulateur de gaz de TC Énergie a décidé de fermer et d’isoler le tronçon du gazoduc sur lequel la rupture était soupçonnée.
TC Énergie a établi une zone de planification d’urgence de 800 m autour du lieu de l’événement pour limiter l’accès à celui-ci. Au moment de l’événement, 21 membres du personnel de TC Énergie et de l’entrepreneur, les seules personnes présentes dans cette zone, ont été évacués.
1.1.2.1 Isolement du gazoduc
À la suite de la décision prise de fermer le gazoduc, le personnel de la station de compression a commencé à fermer la vanne en amont du lieu de la rupture. Des techniciens ont été dépêchés aux vannes en aval pour terminer l’isolement du tronçon rompu du gazoduc. La chronologie de l’isolement du gazoduc est présentée dans le tableau 2. Un schéma de l’isolement est présenté à la figure 2.
Heure | Description |
---|---|
10 h 45 (approximativement) | La conduite principale Grande Prairie NPS 36 se rompt à la borne kilométrique 36,5 |
10 h 48 | Un régulateur du centre de contrôle de Calgary remarque que la pression de refoulement de la station de compression Emerson Creek diminue |
10 h 50 | Une opératrice de TC Énergie qui se trouve à la station de compression Emerson Creek appelle le centre de contrôle de Calgary pour signaler une explosion et un incendie survenus près de la station |
10 h 52 | Tous les compresseurs de la station de compression Emerson Creek sont fermés |
10 h 59 | La vanne GPM21-0-D1 située en amont du lieu de la rupture est fermée |
11 h 06 | Des techniciens sont dépêchés sur les lieux des vannes en aval |
11 h 14 | On confirme que les vannes OBN10-M-2MVO-GPM et OBN10-M-1MVO-GPM sont fermées |
12 h 21 | On confirme que la vanne GPM21-0-BV est fermée |
12 h 24 | Les vannes GPM20-0-BV et GPM20-0-U1 sont fermées |
12 h 36 | La vanne NHC10-0-1SVO-GPM est fermée* |
13 h 45 | L’incendie du gazoduc s’éteint de lui-même |
* Le client en amont de cette vanne était déjà isolé de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 au moment de l’événement
1.1.3 Remise en service
Le tronçon rompu du gazoduc a été remplacé le 15 mai 2024, et la conduite principale Grande Prairie NPS 36 a été remise en service le 27 mai 2024 à une pression d’exploitation réduiteL’Ordonnance d’inspecteur JB-001-2024, émise par la Régie de l’énergie du Canada, exigeait que la conduite principale Grande Prairie NPS 36 fonctionne à une pression ne dépassant pas 80 % de la pression maximale atteinte pendant les 60 jours précédant l’incident ou 80 % de la pression maximale d’exploitation, selon la moins élevée..
1.2 Examen des lieux
La rupture et l’explosion ont créé un cratère de 7 m de profondeur d’environ 40 m sur 20 m (figure 3). La zone à l’étude se trouve sur une pente progressive sud-est, dans une emprise herbeuse entourée d’une forêt de conifères. Le sol superficiel est minéral et organique, avec un sous-sol minéral composé de particules fines et grossières. Le matériau provenant de l’intérieur du cratère était composé de petits cailloux et de roches d’un diamètre de 1 à 5 cm, de blocs rocheux, d’argile et de schiste provenant de profondeurs supérieures à 5 m.
La conduite principale Grande Prairie NPS 36 était exposée aux extrémités en amont et en aval du tronçon rompu. Trois gros morceaux de conduiteLes morceaux ont été identifiés comme les morceaux 1, 2 et 3. éjectés lors de la rupture ont été retrouvés dans les environs du cratère (figure 4). Toute la matière du gazoduc éjectée, faisant environ 20 m, a été récupérée. Le plus gros morceau, qui comprenait le point d’origine de la rupture, a été retrouvé à 200 m à l’est du lieu de l’événement (figure 5). On n’a signalé aucun dommage à d’autres infrastructures de NGTL ou de tiers dans les environs.
1.3 Conduite principale Grande Prairie NPS 36
La conduite principale Grande Prairie NPS 36 fait partie du réseau de NGTL, un réseau de collecte et de transport de gaz naturel situé en Alberta et dans le nord-est de la Colombie-Britannique. Le réseau de NGTL collecte et transporte le gaz naturel produit dans le bassin sédimentaire de l’Ouest canadien vers des marchés du Canada et des États-Unis. Le réseau de NGTL compte environ 25 400 km de gazoducs en exploitation, avec environ 1100 points de réception et plus de 300 points de livraison.
1.3.1 Description du gazoduc
La conduite principale Grande Prairie NPS 36 commence à la station de compression Gold CreekLa station de compression Gold Creek se trouve à l’emplacement de la vanne GPM80. et prend fin à la station de comptage EdsonLa station de comptage Edson se trouve à l’emplacement de la vanne GPM10., pour une longueur totalisant 205 km (figure 6). On trouve 4 stations de compression le long du tracé du gazoduc : Gold Creek, Latornell, Berland River et la station Emerson Creek récemment mise en service qui est située à 2,5 km en amont du lieu de l’événement. Au moment de l’événement, la Régie de l’énergie du Canada (REC) et l’exploitant n’avaient imposé aucune restriction de pression au gazoduc.
1.3.2 Construction du gazoduc
La construction de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 a été terminée le 6 mai 1981. Elle a été conçue et construite conformément aux dispositions applicables de la norme Z184 de l’Association canadienne de normalisation (CSA) et présente les spécifications suivantes :
- pression maximale d’exploitation : 8270 kPa;
- zone d’emplacement : Zone 1;
- type : conduite à joint longitudinal et à soudage à l’arc sous flux en poudre, double passe;
- épaisseur nominale de la paroi : 9,79 mm;
- nuance de l’acier : CSA Z245.2-M1979 GR.483;
- limite d’élasticité minimale spécifiée : 483 MPa.
Le revêtement extérieur était constitué d’un ruban de polyéthylène appliqué à la machine pendant la construction.
Avant sa mise en service, la conduite principale Grande Prairie NPS 36 avait été soumise à un essai hydrostatique de 24 heures jusqu’à une pression de 10 343 kPa. Aucune défaillance n’avait été signalée à la suite des essais hydrostatiques.
1.3.3 Station de compression Emerson Creek
Le 1er avril 2024, la station de compression Emerson Creek a été mise en service et a commencé à être exploitée. Cette station avait été conçue pour augmenter la pression en aval afin d’accroître le débit du réseau de gazoducs. Une évaluation des impacts de cette station sur les gazoducs en aval a été réalisée en 2021 par TC Énergie. Au moment de l’évaluation, la pression d’exploitation établieLa pression d’exploitation établie est la pression à laquelle un tronçon de gazoduc est normalement exposé. de la conduite en aval de la station proposée était de 7808 kPa. Selon l’évaluation, la pression maximale d’exploitation prévue était de 8270 kPa, ce qui correspond à la pression maximale d’exploitation autorisée pour ce gazoduc. L’évaluation a tenu compte des effets de l’augmentation de la pression et de la température et a permis de déterminer que cela n’entraînait pas de risque supplémentaire pour la conduite principale Grande Prairie NPS 36 en aval de la station.
1.3.4 Système de protection cathodique
La conduite principale Grande Prairie NPS 36 est protégée par un système de protection cathodique par courant imposé. Le système comprend 104 points de surveillance et 2 déversoirs d’anodes influents le long de l’emprise de la conduite principale Grande PrairieLes déversoirs d’anodes sont situés à Berland River et à Edson.. Le système de protection cathodique est inspecté chaque année pour en surveiller la performance.
L’inspection de la protection cathodique de 2022 n’a révélé aucune lacune en matière de protection cathodique à proximité du lieu de l’événement.
L’inspection de la protection cathodique de 2023 a obtenu une lecture moins électronégative que les critères de TC Énergie à un poteau d’essai situé à 1,77 km du lieu de l’événementLa lecture était moins négative que celle de -850 mV enregistrée à la station d’essai 1120400+038.428-TS.. Une liaison électrique a été installée au début de 2024 au poteau d’essai où la mesure inférieure aux critères avait été prise lors de l’inspection, ce qui a permis de rétablir le niveau de protection cathodique.
1.4 Examen en laboratoire
Trois morceaux de conduite éjectés ont été récupérés et protégés sur le lieu de l’événement. Des tronçons de conduite, y compris ceux où la rupture a cessé de se propager, ont été excavés et coupés. Les tronçons de conduite récupérés provenaient des joints de conduiteUn joint de conduite est un tronçon de conduite situé entre 2 soudures circulaires. Les joints de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 sont identifiés par le numéro de la soudure circulaire en amont. 148030 à 148070 (figure 7). Les morceaux projetés, les tronçons de conduite coupés et les échantillons de sol ont été envoyés à Acuren Laboratories, à Edmonton (Alberta), pour déterminer les propriétés mécaniques du gazoduc et son mode de défaillance.
1.4.1 Essais sur les matériaux
La composition chimique et les propriétés de traction des tronçons de conduite non déformés étaient conformes aux exigences des normes CSA Z245.2-M1979 et CSA Z245.1‑2022 pour la nuance 483, telles que précisées.
Les diamètresLe diamètre extérieur précisé de la conduite était de 914,4 mm (36 po). des tronçons de conduite non déformés examinés étaient tous conformes aux exigences de la norme CSA Z245.2-M1979 en vigueur au moment de la fabrication des conduites et à la norme CSA Z245.1-2022 actuelle. Les épaisseurs mesurées de la paroi de tous les tronçons de conduite étaient également conformes aux exigences préciséesL’épaisseur nominale précisée de la paroi était de 9,79 mm., y compris à l’emplacement de la rupture, où elle était de 10,08 mm.
1.4.2 Fissuration et corrosion
Les composants de la conduite examinés ont révélé la présence de corrosion générale et de fissuration par corrosion sous contrainte (FCC). L’analyse en laboratoire a permis de déterminer que la défaillance de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 était le résultat d’une fissuration axiale par FCC à pH quasi neutre. La fissure à l’emplacement de la rupture se trouvait entre 8,96 m et 9,33 m en aval de la soudure circulaire 148050. Toutes les autres cassures étaient des cassures ductiles, qui découlaient de la force de la rupture de la conduite. De la corrosion externe était présente dans la zone locale à proximité du lieu de la rupture (figure 8).
La profondeur maximale de la fissure, y compris la corrosionToutes les profondeurs mesurées incluent la corrosion., à l’emplacement de la rupture était de 6,67 mm, soit 67 % de l’épaisseur de la paroi de la conduite (figure 9).À proximité de la fissure la plus profonde, l’épaisseur moyenne estimée de la paroi était de 10,08 mm. Les fissures les plus profondes suivantes sur le joint 148050 ont été trouvées à des profondeurs maximales de 3,86 mm et 2,02 mm respectivement. Les fissures présentes sur le joint 148070 avaient une profondeur maximale de 1,03 mm à 1,25 mm; toutes les autres fissures avaient des profondeurs mesurées inférieures à 1,00 mm.
La corrosion externe avait tendance à être relativement peu profonde. La corrosion la plus profonde a été observée sur le morceau 1. La profondeur maximale des piqûres était de 3,51 mm le long de la surface de rupture; cette profondeur était directement liée à la fissure à l’emplacement de la rupture. Quelques zones isolées à l’intérieur de la corrosion adjacente au lieu de la rupture avaient une profondeur supérieure à 3 mm.
1.4.3 Revêtement de la conduite
Le revêtement de la conduite a été analyséL’analyse a été réalisée par spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier. et il a été déterminé qu’il s’agissait d’un revêtement en ruban de polyéthylène à haute densité. Le revêtement en ruban à double couche était initialement lié à l’aide de polyisobutylène et de minéraux silicatés. Le revêtement en ruban a été évalué par balayage laser tridimensionnel. La conduite a été balayée avec le revêtement de ruban restant encore en place, suivi d’un balayage où le ruban décollé a été enlevé. Un dernier balayage a été effectué après que la conduite a été passée au jet de sable pour enlever tout le revêtement de ruban restant et révéler la surface corrodée de la conduite. Un exemple de balayage d’évaluation du revêtement est présenté à la figure 10. Là où le ruban est resté sur les tronçons de conduite récupérés, une superficie considérable a été retrouvée décollée. La corrosion, lorsqu’elle était présente, avait tendance à suivre les zones de décollement du revêtement et les lignes d’enroulement du ruban.
1.4.4 Essais du sol
Des échantillons de sol ont été prélevés sur les lieux et analysés. La résistivité du sol a été mesurée entre 7580 et 23 300 ohms-cm, et son pH moyen était de 6,85.
Une analyse bactériologique a également été effectuée sur les échantillons de sol. Les résultats ont permis de déterminer que les 2 types de microbes présents et la quantité détectée constituaient un risque relativement élevé de corrosion d’origine microbienneLa corrosion d’origine microbienne désigne la détérioration des matériaux métalliques qui est accélérée ou modifiée par la présence de micro-organismes..
1.5 Fissuration par corrosion sous contrainte à pH quasi neutre
La FCC à pH quasi neutre sur les gazoducs résulte de la combinaison d’un matériau métallique vulnérable et d’un milieu propice et se propage sous une contrainte de traction appliquée ou résiduelle, comme les contraintes circonférentielles. Ce mécanisme s’amorce sur la surface externe des conduites vulnérables et peut se développer en profondeur et en longueur (dans le sens de la circonférence ou de la longueur de la conduite).
Le type et l’état du revêtement externe jouent un rôle clé dans la formation de FCC à pH quasi neutre sur la surface externe des gazoducs. Le revêtement de ruban de polyéthylène était largement utilisé dans les années 1960 et 1970 pour la construction de nouveaux gazoducs. Ce type de revêtement a tendance à se décoller de la conduite. Le temps entre l’installation du gazoduc et le décollement du revêtement de ruban varie largement et est difficile à déterminer avec exactitude. Le revêtement de ruban peut se décoller peu après la construction s’il n’est pas appliqué correctement, ou des années plus tard en raison de la nature du sol ou d’autres conditions environnementales.
La défaillance du revêtement de ruban permet à l’environnement externe – y compris les eaux souterraines, qui ont un pH quasi neutre – d’entrer en contact avec la surface de la conduite tout en empêchant le courant de protection cathodique de l’atteindre. La FCC peut alors se former au hasard. Une fois que la FCC est amorcée, une partie de celle-ci continuera à se développer en raison de l’environnement à pH quasi neutre et des forces mécaniques, telles que la contrainte circonférentielleCes contraintes sont exercées par la substance sous pression contenue dans la conduite. dans une conduite, et pourra former des colonies de fissures. Les colonies de fissures qui sont longues dans le sens longitudinal et étroites dans le sens circonférentiel peuvent se fusionner, ce qui accélère le taux de propagation de la FCC et augmente le potentiel de rupture.
Au cours des 28 années écoulées depuis la publication du rapport sur l’Enquête publique sur la fissuration par corrosion sous tension des oléoducs et gazoducs canadiensLe 28 août 2019, l’Office national de l’énergie est devenu la Régie de l’énergie du Canada (REC). Le terme « Office national de l’énergie » sera utilisé dans tout le rapport pour désigner les activités menées avant la date de transition. de l’Office national de l’énergieOffice national de l’énergie, Enquête publique sur la fissuration par corrosion sous tension des oléoducs et gazoducs canadiens : rapport de l’enquête, MH-2-95 (1996), à l’adresse https://publications.gc.ca/collections/Collection/NE23-58-1996F.pdf (dernière consultation le 22 septembre 2025). et des recommandations qui en découlent, de nombreuses mesures ont été prises par le secteur pipelinier et les organismes de réglementation pour aider à résoudre le problème de la FCC. Parmi ces mesures, on compte l’élaboration et la publication de pratiques recommandées par l’industrie ainsi que la mise à jour de la réglementation fédérale et des normes sur les gazoducs. De nouvelles exigences ont également été instaurées concernant l’élaboration et la mise en œuvre de systèmes de gestion et de programmes de gestion de l’intégrité, ce qui a permis aux exploitants de gazoducs canadiens d’améliorer la gestion de la FCC.
Les exploitants de gazoducs gèrent les risques relatifs à la présence de FCC par un programme de gestion de la FCC. De tels programmes nécessitent une méthode systématique de gestion des tronçons de conduite sur lesquels la FCC à pH quasi neutre est identifiée comme un danger, font appel à des connaissances spécifiques sur les gazoducs gérés (conception, construction, exploitation et historique d’inspection) et appliquent les pratiques exemplaires de l’ensemble de l’industrie.
1.6 Inspection interne
L’inspection interne est un examen non destructif au cours duquel des outils sont déplacés à l’intérieur du gazoduc pour déterminer l’état de la conduite. Ces outils sont équipés de capteurs qui servent à détecter les fissures, les défauts, la corrosion, le décollement du revêtement et les anomalies de géométrie. Les données sont enregistrées et analysées de manière à cerner les anomalies d’intérêt. Une fois que les anomalies d’intérêt sont cernées, les exploitants du gazoduc peuvent planifier les mesures à prendre pour y remédier, qui peuvent comprendre des réparations ou le remplacement de la conduite.
Normalement, les gazoducs sont conçus avec une infrastructure de lancement et de réception afin de faciliter l’utilisation des outils d’inspection interne. Pour gérer l’intégrité des gazoducs, les types d’outils les plus couramment utilisés sont les transducteurs électromagnétiques acoustiques (EMAT) qui visent la détection des fissures, et les pertes de flux magnétique qui visent les anomalies liées à la dégradation du métal, telles que la corrosion.
1.6.1 Technologie d’inspection interne par transducteur électromagnétique acoustique
Lors d’une inspection interne par EMAT, un signal ultrasonique est induit dans la paroi de la conduite de manière électromagnétique et détecté par l’outil. Contrairement aux transducteurs piézoélectriques à ultrasons conventionnels, les outils EMAT ne comptent pas sur la transduction d’ondes ultrasoniques du capteur à la conduite à travers un liquide de couplage. Parce qu’aucun liquide de couplage n’est nécessaire, les outils EMAT sont idéaux pour l’inspection des gazoducs.
Les anomalies de la paroi de la conduite, comme les fissures et la corrosion, entraîneront des réflexions du signal ultrasonique induit. Ces réflexions seront détectées par un capteur récepteur et enregistrées. Les caractéristiques du signal et son temps d’acquisition, lorsqu’ils sont combinés à ceux d’autres capteurs, fournissent des renseignements sur le type, la taille, la profondeur et l’emplacement d’une anomalie donnée. Une inspection typique génère des centaines de milliers de signaux de réflexion, dont seul un petit nombre correspond à des anomalies devant être signalées.
1.6.2 Probabilités de détection et d’identification
Les fissures et autres anomalies d’intérêt détectées par les outils d’inspection interne ne sont pas mesurées directement, mais plutôt déduites des signaux des capteurs. Le document de référence de l’industrie pour qualifier la capacité d’un outil à détecter des défauts et à quantifier l’incertitude d’une mesure d’un outil d’inspection interne est la norme API 1163 de l’American Petroleum InstituteAmerican Petroleum Institute (API), API Standard 1163, In-line Inspection Systems Qualification (3e édition, septembre 2021)..
La probabilité qu’un outil d’inspection donné détecte une anomalie d’intérêt (la probabilité de détection) est déterminée par les capacités physiques de l’outil et par la taille du défaut. La norme exige que les spécifications de performance indiquent clairement les seuils de détection et les probabilités de détection.
La probabilité qu’un signal de capteur soit correctement identifié comme un type d’anomalie en particulier est appelée la probabilité d’identification. Les spécifications de performance d’un outil d’inspection interne doivent indiquer clairement une probabilité d’identification provenant d’un calcul statistique. De même, un outil d’inspection doit indiquer une exactitude de dimensionnement provenant d’un calcul statistique.
À l’aide des critères définis par l’exploitant du gazoduc, ces probabilités et l’exactitude de dimensionnement des fissures sont combinées afin de produire la probabilité totale que des anomalies d’intérêt soient signalées; cette probabilité est appelée la probabilité de signalement (figure 11).
1.6.3 Outil d’inspection interne utilisé sur la conduite principale Grande Prairie NPS 36
La conduite principale Grande Prairie NPS 36 est munie d’installations de lancement et de réception qui rendent possible l’utilisation d’outils d’inspection interne pour nettoyer et inspecter le gazoduc. Toutes les inspections par EMAT précédentes sur la conduite principale Grande Prairie NPS 36 ont été effectuées par un tiers, Baker Hughes. Baker Hughes est un fournisseur mondial de services de gazoduc qui a inspecté des milliers de kilomètres de gazoducs au Canada à l’aide de ses outils d’inspection interne EMAT au cours des 10 dernières années. L’outil d’inspection interne utilisé par Baker Hughes est l’outil EMATScanCD.
La technologie EMAT de Baker Hughes a été mise au point à l’origine entre 2007 et 2010. La mise au point et le peaufinage du matériel, du logiciel et des procédures d’analyse de l’outil ont nécessité des essais à grande échelle avec des anomalies artificielles créées pour démontrer la viabilité de la technologie. Les spécifications d’inspection de l’outil EMATScanCD pour la probabilité de détection, la probabilité d’identification et le dimensionnement des anomalies ont été élaborées à partir de ces travaux fondamentaux.
Depuis 2010, la surveillance continue de la performance de l’outil EMATScanCD, y compris la probabilité de détection, la probabilité d’identification et les prévisions de dimensionnement, est réalisée à mesure que l’outil est utilisé sur le terrain. Les exploitants communiquent les résultats des excavations de vérification d’intégrité afin de vérifier les anomalies telles qu’elles sont observées sur le terrain. Des tronçons de gazoduc coupés présentant des anomalies connues ont également été fournis à Baker Hughes par des exploitants de gazoduc afin de peaufiner les algorithmes de l’outil et de mettre à jour les lignes directrices relatives à la classification. Les probabilités de détection et d’identification sont dérivées de la norme API 1163 à l’aide d’un ensemble de données qui comprend des anomalies artificielles et réelles.
Certaines spécifications de l’outil EMATScanCD sont présentées dans le tableau 3.
Spécification* | Valeur |
---|---|
Profondeur minimale de la fissure | 2 mm |
Longueur minimale de la fissure | 50 mm |
Probabilité de détection (à la longueur et la profondeur minimales) | 90 % |
Probabilité d’identification | 80 % |
Exactitude du dimensionnement de la profondeur | +/- 1,1 mm avec une certitude de 80 % +/- 1,5 mm avec une certitude de 90 % |
* La spécification évalue les éléments à un niveau de confiance de 95 %.
1.6.4 Processus d’analyse des données
Après les activités d’inspection interne par EMAT sur le terrain, un contrôle de la qualité des données est réalisé afin de vérifier si les capteurs fonctionnent correctement et si l’ensemble des données est complet. Une fois que ce contrôle est terminé, un processus automatisé initial permet d’identifier dans les données les configurations de signaux qui peuvent indiquer une anomalie d’intérêtLes anomalies d’intérêt sont classifiées par Baker Hughes comme [traduction] « anomalie s’apparentant à une fissure », « colonie de fissures » et « anomalie dans la soudure continue ». Parmi les types d’anomalies n’ayant pas à être signalées, on trouve notamment [traduction] « dégradation du métal », « inclusion » et « raccord ».. Ce processus automatisé génère un grand nombre de ces indications, dont chacune est reliée aux mesures axiales et circonférentielles de la conduite.
Une fois que le processus automatisé est terminé, une équipe d’analystes des données travaillant indépendamment les uns des autres analyse les configurations de signaux afin de déterminer si l’une ou l’autre des indications représente une anomalie d’intérêt. Chaque analyste examine des milliers d’indications à l’aide de lignes directrices relatives à la classification élaborées par Baker Hughes. Le contrôle de la qualité de ce travail est effectué par des analystes ayant plus d’ancienneté. La majeure partie des indications relevées pendant une inspection représentent des anomalies non préjudiciables, des inclusions de matériaux et des raccords soudés, qui sont tous écartés à ce stade. Les configurations de signaux qui indiquent la présence de fissures potentielles se voient attribuer une taille estimée et sont incluses dans une liste qu’un comité d’examen examinera plus à fond.
Le comité d’examen est composé de 4 analystes principaux qui examinent la liste des fissures potentielles de façon indépendante. La composition du comité d’examen n’est pas fixe et est déterminée pour chaque projet. Au cours d’une réunion du comité d’examen, chaque anomalie fait l’objet d’une discussion et une décision est prise quant aux fissures qui seront incluses dans le rapport final au client et celles qui seront déclassées en tant qu’anomalie n’ayant pas à être signalée. Selon le projet, il y aura 1 ou 2 séries de réunions du comité d’examen. La décision de déclasser une anomalie doit être prise à l’unanimité; si un analyste estime que l’anomalie est une fissure atteignant le seuil de signalementLe seuil de signalement d’une anomalie d’intérêt est une taille minimale prédéfinie au-delà de laquelle l’anomalie sera signalée., l’anomalie sera incluse dans le rapport final.
Bien que les décisions finales issues des réunions du comité d’examen soient consignées, le contenu des discussions et la justification des décisions ne sont pas consignés systématiquement dans les documents du comité d’examen ni communiqués au client. À la fin des réunions du comité d’examen, les anomalies qui n’atteignent pas le seuil de signalement ou qui sont déclassées en anomalies n’ayant pas à être signalées sont retirées de la liste finale. Seulement les types d’anomalies et les fissures qui atteignent le seuil de signalement sont inclus dans le rapport.
Les anomalies signalées lors d’inspections précédentes du même gazoduc sont examinées pour les comparer aux fins de l’inspection actuelle. De même, les nouvelles anomalies à signaler qui ont été recensées lors de l’inspection la plus récente sont examinées par rapport aux données d’inspection historiques. Ces renseignements sont présentés sous forme de tableau dans le rapport d’inspection qui est remis au client. Outre la comparaison avec les anomalies déjà signalées, aucun renseignement sur les types d’anomalies n’ayant pas à être signalées et sur les fissures qui n’atteignent pas le seuil de signalement n’est inclus dans le rapport d’inspection.
L’utilisation des données d’inspection antérieures au cours de l’analyse de routine n’est pas systématique, et ces données ne sont utilisées que de manière ponctuelle, lorsqu’un analyste a besoin de plus de contexte. Les données historiques ne sont généralement pas consultées afin d’éviter d’introduire un biais chez l’analyste au moment de cerner et de classifier les anomalies s’apparentant à une fissure.
1.6.5 Historique d’inspection interne
Depuis sa construction, la conduite principale Grande Prairie NPS 36 a fait l’objet de plusieurs inspections au moyen de divers types et différentes générations de technologies d’inspection interne, à commencer par les outils de perte de flux magnétique en 1997. La conduite a d’abord été inspectée en recherchant des fissures à l’aide d’un outil EMAT en 2013, puis inspectée à nouveau en 2018 et en 2022.
La fissure à l’emplacement de la rupture avait été détectée lors d’inspections internes précédentes du gazoduc (tableau 4). Cependant, elle n’était pas à signalerAux termes du processus établi, les anomalies qui n’atteignent pas le seuil de signalement ne sont pas signalées aux utilisateurs finaux. dans aucun des rapports fournis à TC Énergie.
Cycle d’inspection | Classification | Profondeur de l’anomalie | Remarques |
---|---|---|---|
EMAT de 2013 | « Fêlures » | 1-2 mm | Sous le seuil de signalement |
EMAT de 2018 | « Fêlures » | 1-2 mm | Sous le seuil de signalement |
1.6.6 Inspection interne de 2022
L’inspection par EMAT la plus récente a été entreprise le 13 octobre 2022, et le rapport final a été remis à TC Énergie le 12 janvier 2023. Sur les 205 km de la conduite principale Grande Prairie NPS 36, 191 km de gazoduc ont été inspectésLes sections de gazoduc qui n’ont pas été inspectées avaient une paroi plus épaisse, qui n’entrait pas dans les spécifications de l’outil EMATScanCD.. Tous les capteurs de l’outil EMATScanCD ont fonctionné correctement, et aucun problème n’a été signalé en ce qui concerne la qualité des données. Neuf anomalies au total ont été signalées à TC Énergie.
Un résumé du processus d’analyse est présenté dans le tableau 5.
Étape du processus | Nombre d’indications |
---|---|
Détection automatisée des anomalies | Plus de 2 millions |
Examen par comité* | Plus de 600 |
Signalé à TC Énergie | 9 |
* Comprend des anomalies relevées par 2 comités d’examen distincts.
Au cours de la phase automatique de l’analyse des données, une configuration de signaux indiquant une anomalie d’intérêt potentiel a été détectée à l’emplacement de l’anomalie où une défaillance s’est produite pendant l’événement à l’étudeCette configuration avait été identifiée comme l’ensemble d’anomalies 337-007945.. L’examen réalisé par un analyste a inclus cette anomalie en tant que fissure potentielle. Lors du contrôle de la qualité, l’anomalie a été classifiée comme « fêlures » d’une profondeur estimée à 3,2 mm. L’anomalie a ensuite été incluse dans une liste d’anomalies à examiner par le comité d’examen.
1.6.6.1 Comité d’examen
Cette anomalie a été examinée par un comité d’examen composé de 4 personnes dans le cadre du processus d’analyse de Baker Hughes. Au cours de leurs examens indépendants ayant préalablement eu lieu avant la réunion, 3 des 4 analystes ont choisi de déclasser cette anomalie. Pendant la discussion, le comité d’examen a finalement décidé de déclasser cette anomalie, qui était auparavant classée comme « fêlures » à signaler, en une anomalie « dégradation du métal » n’ayant pas à être signalée. Dans le cadre de ce processus décisionnel, l’anomalie n’a pas été comparée aux indications observées lors des inspections de 2018 ou 2013, et on n’était pas tenu de le faire. La décision du comité d’examen de déclasser l’anomalie a été prise à l’unanimité après une discussion. Toutefois, la justification de cette décision n’a pas été consignée. Après l’accident, Baker Hughes a effectué un examen des données de signaux qui a indiqué que l’anomalie aurait dû être classifiée comme « colonie de fissures ». Avec une classification « colonie de fissures », l’anomalie où la rupture s’est produite aurait été signalée en tant que fissure d’une profondeur estimée à 3,4 mm.
1.6.7 Formation et expérience des analystes des données d’outils d’inspection interne
La formation et la certification du personnel de Baker Hughes affecté aux inspections internes comprennent une formation formelle en salle de classe, une formation en cours d’emploi et des examens de certification.
Baker Hughes prévoit une pratique écrite pour le personnel affecté aux inspections internes, conformément aux dispositions de la norme ANSI/ASNT ILI-PQThe American Society for Nondestructive Testing, Inc., In-Line Inspection Personnel Qualification and Certification (2017). applicables au personnel affecté aux inspections internes dans l’industrie des gazoducs. Cette pratique écrite décrit les exigences applicables aux opérateurs sur le terrain et aux analystes des données pour les niveaux de certification I, II et III. Ces niveaux correspondent au niveau d’expérience, d’ancienneté et de responsabilité attendu pour le rôle. Le personnel doit renouveler sa certification tous les 3 ans par l’intermédiaire d’une formation et d’un examen, ce qui s’applique aussi au même niveau de qualification.
L’analyse initiale des indications d’anomalies s’apparentant à une fissure est effectuée par des analystes de niveau I et II, le contrôle qualité étant réalisé par des analystes de niveau II ou III. Les comités d’examen sont composés des analystes de niveau III ayant le plus d’ancienneté.
1.7 Variabilité de la performance humaine
La variabilité est une caractéristique inhérente à tous les aspects du fonctionnement humain, du niveau moléculaire aux systèmes sociotechniques complexesT. J. Smith, R. A. Henning, M. G. Wade et T. Fisher, Variability in Human Performance (États-Unis : CRC Press) (2014), p. xiii-5.. Au moment d’aborder la variabilité de la performance humaine, ce concept peut être interprété de 2 manières différentes [traduction] :
- « Des différences dans la performance d’une personne ou d’un système à un moment donné »Ibid., p xiii.
- « Une variation de la performance chez ou entre des personnes ou des systèmes au fil du temps »Ibid.
Dans divers domaines, critères et catégories, la performance humaine s’inscrit dans une répartition de résultats possibles, dont chacun peut se manifester en fonction des variables présentes qui interagissent pour influencer la performance d’une personne.
Bien que la variabilité de la performance humaine ait toujours été considérée sous un angle négatif et comme une cause d’accidents, elle est aujourd’hui mieux comprise comme un atout, car elle nous permet de gérer des systèmes de travail complexes qui ne peuvent pas être décrits en détail et qui nécessitent une adaptation quotidienne de la part des opérateurs humainsE. Hollnagel, Safety-I and Safety-II: The Past and Future of Safety Management (États-Unis : CRC Press) (2014), p. 44 à 45 et 118 à 122.. Quelle que soit la façon dont elle est perçue, la variabilité de la performance humaine constitue un élément de la performance du système qui doit être reconnue et prise en compte dans la gestion des risques, car elle peut influencer les opérations de maintes façons.
1.8 Exigences réglementaires pour la gestion de l’intégrité
Le Règlement de la Régie canadienne de l’énergie sur les pipelines terrestres (le règlement) oblige les compagnies à élaborer, à mettre en œuvre et à maintenir un système de gestion et divers programmes de protection, dont un programme de gestion de l’intégrité (PGI). Le règlement exige en outre que les exploitants de gazoducs, par une incorporation par référence, se conforment aux dispositions obligatoires applicables de la dernière édition de la norme Z662Association canadienne de normalisation, CSA Z662 : Réseaux de canalisations de pétrole et de gaz (2023). de la CSA, qui énonce les exigences minimales relatives à la conception, à la construction, à l’exploitation, à l’entretien, à la mise hors service et à la cessation d’exploitation d’un gazoduc.
Même si la REC, dans ses Notes d’orientation concernant le Règlement de la Régie canadienne de l’énergie sur les pipelines terrestresRégie de l’énergie du Canada, Notes d’orientation concernant le Règlement de la Régie canadienne de l’énergie sur les pipelines terrestres (2013), à l’adresse https://www.cer-rec.gc.ca/fr/regie/lois-reglements/loi-regie-canadienne-lenergie-reglements-notes-dorientation-documents-connexes/pipelines-terrestres/notes-dorientation-concernant-le-reglement-de-la-regie-canadienne-de-lenergie-sur-les-pipelines-terrestres.html (dernière consultation le 23 septembre 2025)., fournit des directives sur l’élaboration d’un PGI, les compagnies réglementées disposent d’une souplesse et d’un pouvoir discrétionnaire pour élaborer le contenu de leurs plans. En général, les compagnies réglementées mettent au point des PGI adaptés à leurs activités particulières et prennent des mesures correctives au besoin, conformément aux dispositions et critères applicables établis par la norme CSA Z662.
La REC attend des compagnies, dans le cadre de leur PGI, qu’elles déterminent de manière proactive et surveillent continuellement les dangers particuliers associés à leurs gazoducs et leurs installations connexes, et qu’elles mettent à jour leur programme immédiatement lorsque de nouveaux dangers sont cernés.
Les compagnies réglementées par la REC sont tenues responsables d’assurer une exploitation sécuritaire à toutes les étapes du cycle de vie d’un gazoduc. La REC surveille en permanence l’efficacité du programme de chaque compagnie en exécutant des audits et d’autres activités de vérification de la conformité afin de s’assurer que les gazoducs et les installations connexes sont en état de fournir continuellement un service sécuritaire, fiable et respectueux de l’environnement.
La REC ne réglemente pas les fournisseurs de services d’inspection interne, mais elle se tient au courant des progrès les plus récents réalisés dans l’industrie. La REC rencontre régulièrement les exploitants de gazoducs au cours de réunions annuelles d’échange de renseignements qui comprennent des discussions sur la technologie d’inspection interne et son rôle dans les PGI des exploitants de gazoducs.
1.8.1 Pratiques exemplaires en matière de gestion de la fissuration par corrosion sous contrainte
Les pratiques recommandées par l’industrie pour la gestion de la FCC à pH quasi neutre sont énoncées dans la norme CSA SPE 225.7Association canadienne de normalisation, Managing near-neutral pH stress corrosion cracking (2022). Ce document a été élaboré à l’origine par le groupe de travail sur l’intégrité des gazoducs sous l’égide de l’Association canadienne de pipelines d’énergie (CEPA), une association industrielle bénévole sans but lucratif qui représentait les principales compagnies canadiennes du réseau de gazoducs de distribution. La propriété de ce document a été transférée au Groupe CSA en novembre 2021, peu avant que la CEPA mette fin à ses opérations. et la norme API RP 1176American Petroleum Institute (API), Recommended practice 1176: Assessment and Management of Cracking in Pipelines (2016).. Les éléments de base de la gestion de la FCC à pH quasi neutre sont les suivants :
- Évaluation de la vulnérabilité – Évaluation d’un tronçon de gazoduc en fonction d’attributs tels que l’âge, le diamètre, le type de revêtement, la pression d’exploitation et le type de sol.
- Enquête pour détecter la présence de FCC.
- Caractérisation et atténuation de la FCC – si une enquête révèle la présence de FCC, la gravité de la FCC est classifiée afin de pouvoir prendre une décision concernant les mesures d’atténuation adéquates et la détermination de l’intervalle de réévaluation.
- Consigner, apprendre et signaler – consigner les processus décisionnels utilisés pour évaluer la vulnérabilité et l’efficacité des activités d’atténuation.
- Surveillance de l’état – surveillance de l’état du gazoduc visant à détecter tout changement qui pourrait influencer la vulnérabilité à la FCC.
1.9 Programme de gestion de l’intégrité du gazoduc
Le PGI de TC Énergie s’appuie sur une évaluation des risques élaborée par TC Énergie : l’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau. L’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau crée un jumeau numérique du réseau de gazoducs de TC Énergie. Le jumeau numérique est divisé en tronçonsLes tronçons ont une longueur moyenne de 70 m, avec un maximum de 200 m. qui sont analysés individuellement.
Le risque est déterminé par la probabilité d’une défaillance du gazoducLe principal type de défaillance qui influe sur les niveaux de risque dans le modèle est la rupture du gazoduc. et par les conséquences de cette défaillance. Le modèle d’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau comprend 2 critères de risque : le risque individuel et le risque collectif. Le critère de risque individuel sert à protéger les personnes qui peuvent vivre, travailler ou se trouver occasionnellement à proximité du gazoducLa disposition B.6.1.2.1 de l’annexe B de la norme CSA Z662 : Réseaux de canalisations de pétrole et de gaz (2023) de l’Association canadienne de normalisation stipule : « Le seuil de risque individuel largement acceptable est de 1×10-6/an et le seuil de risque individuel maximal toléré est de 1×10-4/an. ». Le critère de risque collectif est pour sa part destiné à protéger les populations vivant le long du gazoduc contre les événements pouvant faire de multiples victimesIbid., disposition B.6.1.2.2 : Risque collectif.. La norme CSA Z662, annexe BIbid., annexe B., offre des lignes directrices pour l’évaluation quantitative des risques touchant les gazoducs.
Les menaces énumérées dans la norme B31.8S de The American Society of Mechanical Engineers (ASME),The American Society of Mechanical Engineers, B31.8S: Managing System Integrity of Gas Pipelines (2022). ainsi que les autres menaces identifiées par TC ÉnergieCorrosion externe, corrosion interne, fissuration par corrosion sous contrainte, fissuration par corrosion sous contrainte circonférentielle, défaut de fabrication des soudures continues, points durs, ingérence externe par les premières et deuxièmes parties, ingérence externe par de tierces parties, défauts de construction, déformation, forces extérieures attribuables aux conditions météorologiques, défaillance de l’équipement et opérations incorrectes, et dilatation thermique., sont prises en compte au cours de l’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau. Les menaces telles que la corrosion externe et la FCC peuvent interagir entre elles, et ces interactions sont également prises en compte.
Les résultats globaux au chapitre des risques sont comparés aux critères applicables au risque individuel et au risque collectif. Si l’un des critères de risque global est dépassé, les menaces les plus importantes sont abordées dans le cadre du PGI de TC Énergie, ce qui donne lieu à des mesures préventives, d’évaluation, de contrôle ou d’atténuation spécifiques à la menace. Les données issues des activités d’intégrité visant à évaluer l’état du réseau de gazoducs sont utilisées comme données d’entrée au cours de l’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau.
Les menaces peuvent être dépendantes du facteur temps, comme la corrosion externe et les menaces statiques ou résidentes comme les défauts liés à la fabrication, ou elles peuvent être indépendantes du facteur temps, comme l’ingérence externe. Chaque menace est gérée par une équipe de gestion des menaces.
Les fissures signalées à la suite de l’inspection interne et des excavations de vérification d’intégrité sont aussi intégrées au processus d’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau afin de déterminer le risque de défaillance. Une évaluation des risques dans l’ensemble du réseau est effectuée sur chaque tronçon pour calculer le risque global pour toutes les menaces.
1.9.1 Exigences de TC Énergie applicables aux technologies d’inspection interne
TC Énergie a établi des exigences relatives aux technologies d’inspection interne. Dans le cas des inspections par EMAT, les exigences prévoient que les outils d’inspection doivent détecter, identifier et mesurer les fissures avec une probabilité de détection d’au moins 90 % et une probabilité d’identification d’au moins 80 % pour les anomalies répondant aux spécifications minimales de longueur et de tolérance de profondeur de l’outil.
En ce qui concerne les fissures plus profondes que 5 mm ou de plus de 50 % de l’épaisseur de la paroi de la conduite,Cette exigence s’applique aux fissures d’une longueur minimale de 75 mm pour les gazoducs de 36 po. TC Énergie exige que les outils d’inspection détectent et identifient ces fissures dans 100 % des cas, conformément à la spécification de rendement de l’inspection interne.
1.9.2 Gestion des menaces de fissuration
Conformément au PGI de TC Énergie, la FCC est examinée chaque année au cours du cycle d’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau de TC Énergie. Ce processus combine l’ensemble des connaissances et des renseignements disponibles au moment de l’évaluation. L’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau tient compte de toutes les menaces, y compris la FCC, et établit les priorités d’évaluation dans le cadre du PGI de TC Énergie.
TC Énergie dispose de critères pour déterminer si un tronçon de gazoduc est vulnérable à la FCC. Parmi les critères utilisés pour déterminer la vulnérabilité, mentionnons l’âge de la conduite, le type de revêtement, la pression d’exploitation et la question de savoir si une FCC a déjà été découverte.
La conduite principale Grande Prairie NPS 36 répond aux critères de vulnérabilité à la FCC de TC Énergie pour les raisons suivantes :
- la possibilité de décollement du revêtement en raison de sa faible performance;
- un délai de plus de 10 ans depuis la construction;
- les découvertes précédentes de FCC dans ce gazoduc;
- une pression d’exploitation supérieure à 60 % de la limite d’élasticité minimale spécifiée (LEMS).
L’inspection interne par EMAT est la principale méthode d’évaluation utilisée par TC Énergie pour détecter les risques de fissuration sur ses gazoducs, y compris la conduite principale Grande Prairie NPS 36. TC Énergie fait appel à 2 fournisseurs de services d’inspection interne pour effectuer ces inspections : on choisit soit Baker Hughes, soit Rosen pour entreprendre une inspection donnée en fonction de la disponibilité des outils et de considérations opérationnelles. Toutes les anomalies signalées par l’un ou l’autre des fournisseurs de services sont transmises dans un format normalisé et évaluées par TC Énergie conformément à sa procédure pour l’analyse des inspections internes par EMAT.
Toutes les fissures signalées sont évaluées afin de déterminer les anomalies qui exigent des mesures immédiates. Les fissures signalées à TC Énergie après une inspection interne sont évaluées comme nécessitant une mesure immédiate si elles présentent une profondeur supérieure à 50 % de l’épaisseur de la paroi de la conduite ou si les pressions de rupture prévues sont en deçà des seuils acceptables des facteurs de sécurité. Les mesures immédiates peuvent comprendre une restriction de pression auto-imposée et/ou un projet de gestion de l’intégrité visant à excaver l’emplacement de la fissure et à effectuer des réparations, au besoin. Dans le processus d’évaluation, les fissures signalées sont mesurées en tenant compte de la tolérance de l’outil. Un taux de croissance est appliqué à toutes les fissures signalées pour déterminer quand des mesures s’imposeront et quand un tronçon de gazoduc devra être inspecté à nouveau. Les résultats de l’évaluation de la fissure constituent également un intrant pour l’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau. Le modèle de risque présume la présence de fissures non détectées en s’appuyant sur la vulnérabilité du tronçon à la FCC. On présume que les fissures non détectées ont la taille maximale d’une fissure non détectée aux seuils de signalement nominaux de l’outil EMAT. Pour les tronçons de gazoduc qui n’ont pas d’inspection interne à jour, on présume que ces fissures non détectées croissent continuellement jusqu’à ce qu’une nouvelle inspection soit réalisée. Pour la conduite principale Grande Prairie NPS 36, TC Énergie utilise un taux de croissance des fissures de 0,3 mm/an, et la prochaine inspection était prévue pour 2025L’intervalle maximal entre les nouvelles inspections est de 7 ans, conformément à la procédure d’ingénierie de TC Énergie intitulée TEP-IN-EMAT-G Analysis of EMAT In-line Inspection Data for CDN Pipelines (CDN)..
Dans le cadre de la gestion de la FCC, TC Énergie effectue des excavations de vérification d’intégrité en réaction aux conclusions des inspections internes, de même que des inspections opportunes lorsque des tronçons de gazoduc sont excavés pour d’autres raisons.
Depuis 2013, les inspections internes par EMAT de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 ont incité TC Énergie à effectuer 32 excavations de vérification d’intégrité. Toutes les anomalies excavées se sont révélées conformes aux tolérances de l’outil ou surdimensionnéesLe surdimensionnement indique que l’outil a prédit une taille de fissure supérieure à la taille réelle.. TC Énergie communique aux fournisseurs de services d’inspection interne par EMAT les résultats des activités d’excavation de vérification d’intégrité dans le but d’améliorer continuellement la technologie EMAT, y compris les algorithmes et les procédures d’analyse des données des outils.
1.9.2.1 Fissuration dans la corrosion
La FCC représente une menace que TC Énergie reconnaît comme pouvant interagir avec la corrosion externe. En 2017, TC Énergie et Baker Hughes ont mené une étude sur le dimensionnement des fissures qui se forment dans la corrosion. L’étude a révélé que l’outil EMAT de Baker Hughes était capable de prédire la profondeur absolue des fissures lorsque celles-ci coïncidaient avec de la corrosion externe. L’ensemble de données de 169 anomalies a démontré que les prédictions de la taille et de la profondeur des fissures étaient plus précises que les spécifications indiquées de l’outil.
1.9.3 Défaillances précédentes attribuables à la fissuration par corrosion sous contrainte sur les gazoducs de TC Énergie
Les défaillances attribuables à la FCC sur les gazoducs de TC Énergie ont donné lieu à des enquêtes de l’Office national de l’énergie en 1993 et en 1995. Ces enquêtes ont contribué à la compréhension de la FCC et à la gestion de ses effets. Depuis, la technologie EMAT s’est développée au point de devenir le principal outil utilisé par TC Énergie et le reste de l’industrie des gazoducs pour gérer la FCC. La fréquence des défaillances attribuables à la FCC a diminué depuis l’adoption de cette technologie. Après une période de validation, TC Énergie a accepté, en 2018, l’utilisation de l’inspection interne par EMAT en tant que principal outil de gestion de la FCC. L’événement à l’étude est le premier cas de défaillance d’un gazoduc de TC Énergie à avoir fait l’objet d’une inspection par un outil EMAT (figure 12).
1.10 Rapports de laboratoire du BST
Le BST a produit le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :
- LP122/2024 – Failure Analysis of Natural Gas Pipeline Rupture and Fire (Review of Acuren Laboratory Report) [Analyse de la rupture d’un gazoduc et de l’incendie (examen du rapport du laboratoire d’Acuren)]
2.0 Analyse
L’analyse portera sur l’état de la conduite lorsqu’elle est soumise à une pression d’exploitation accrue, l’identification des fissures au cours du processus d’analyse des données d’inspection interne, l’évaluation des fissures, et l’évaluation des risques utilisée pour gérer la menace de fissuration par corrosion sous contrainte (FCC). L’intervention à la suite de l’incident s’est déroulée en temps opportun et n’a pas été jugée comme ayant contribué aux conséquences de l’accident.
2.1 L’événement
Le 16 avril 2024, la conduite principale Grande Prairie d’un diamètre nominal (NPS) de 36 po (conduite principale Grande Prairie NPS 36) s’est rompue à la borne kilométrique 36,5, environ 2,5 km en aval de la station de compression Emerson Creek. Ce matin-là, le compresseur B2 avait été mis en service et configuré pour fournir de la pression au réseau de gazoducs en tandem avec le compresseur A1, qui fonctionnait déjà.
Avant la mise en service de la station de compression Emerson Creek le 1er avril 2024, le gazoduc, situé sur les lieux où est survenu l’événement, avait été soumis à une pression d’exploitation moyenne d’environ 7808 kPa. La nouvelle station de compression avait été conçue et installée pour augmenter la pression du gazoduc, ce qui a augmenté le débit de gaz dans la conduite principale Grande Prairie NPS 36 et les 2 gazoducs parallèles de NOVA Gas Transmission Ltd. (NGTL). La pression en aval de la station était censée atteindre la pression maximale d’exploitation du gazoduc, soit 8270 kPa.
À 9 h 40 le jour de l’événement, alors que les 2 compresseurs fonctionnaient, la pression dans le gazoduc a été augmentée à 8110 kPa; la rupture s’est produite environ 5 minutes plus tard. Bien que l’augmentation prévue de la pression respectait la limite maximale d’exploitation de 8270 kPa pour ce gazoduc, la pression enregistrée lors de la rupture était la pression d’exploitation la plus élevée à avoir été enregistrée au lieu de l’événement depuis la construction du gazoduc. Avant la mise en service de la station de compression, une évaluation menée par TC Énergie avait permis de déterminer qu’une augmentation de la pression ne poserait aucun risque pour l’intégrité du gazoduc.
2.2 Fissuration par corrosion sous contrainte à pH quasi neutre
La FCC à pH quasi neutre sur les gazoducs résulte de la combinaison d’un matériau métallique vulnérable, d’une contrainte de traction appliquée ou résiduelle et d’un milieu propice. Ce mécanisme s’amorce sur la surface externe des conduites vulnérables et peut se développer en profondeur et en longueur.
L’analyse en laboratoire a permis de déterminer que la fissure à l’origine de la rupture était le résultat d’une FCC à pH quasi neutre qui s’était produite dans un sillon de corrosion externe. La profondeur maximale de la fissure mesurée, corrosion incluse, était de 6,67 mm, soit 67 % de l’épaisseur de la paroi. La longueur totale de l’anomalie était d’environ 370 mm.
L’examen en laboratoire du tronçon de la conduite qui a connu une défaillance a également révélé que le revêtement extérieur en ruban de polyéthylène de la conduite principale Grande Prairie NPS 36, à proximité du lieu de l’événement, s’était dégradé et que de la corrosion était présente aux endroits où le revêtement s’était décollé de la surface de la conduite. Lorsque le revêtement en ruban de polyéthylène se décolle de la surface de la conduite, il peut réduire l’efficacité locale du système de protection cathodique du gazoduc. Les essais effectués sur le sol ont révélé une activité microbiologique susceptible de corroder l’acier du gazoduc. Le revêtement externe étant compromis, l’acier du gazoduc était exposé à l’environnement extérieur, là où la corrosion était possible.
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
La pression d’exploitation de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 a augmenté jusqu’à ce qu’une fissure existante se rompe. Le gazoduc s’est alors rompu, provoquant une explosion et un incendie.
Les conditions du sol, le revêtement décollé du gazoduc, qui exposait la surface en acier, et la pression interne du gaz ont provoqué une FCC à pH quasi neutre à l’emplacement de la rupture.
2.3 Inspection interne
La conduite principale Grande Prairie NPS 36 avait été inspectée à plusieurs reprises à l’aide d’un outil transducteur électromagnétique acoustique (EMAT) depuis sa mise en service, dans le cadre du programme de gestion de l’intégrité de TC Énergie destiné à gérer le risque de fissuration. La plus récente inspection par EMAT, réalisée en 2022 par Baker Hughes, avait révélé 9 anomalies dépassant les critères de 2 mm de profondeur et 50 mm de longueur. Toutefois, la fissure à l’origine de la rupture ne faisait pas partie du rapport issu de cette inspection.
Le processus d’analyse de Baker Hughes fait appel à des analystes qualifiés et chevronnés qui suivent des lignes directrices relatives à la classification pour interpréter les configurations de signaux générées par une inspection interne et en déterminer la signification. Les lignes directrices relatives à la classification sont de nature qualitative, et le processus d’analyse repose sur l’interprétation humaine pour déterminer si une configuration de signaux représente une fissure ou un autre type d’anomalie.
La configuration de signaux générée par l’anomalie à l’origine de la rupture a été détectée au stade du processus automatisé de traitement des données et incluse dans une liste d’indications à soumettre à un traitement approfondi. À ce stade, un analyste a d’abord identifié l’anomalie comme étant une fissure, ce qui a entraîné son inclusion dans une liste d’anomalies devant faire l’objet d’un examen plus approfondi par un comité d’examen. Chacun des 4 analystes principaux du comité d’examen a examiné de façon indépendante chaque anomalie figurant sur cette liste, selon sa propre interprétation des lignes directrices relatives à la classification. Le comité s’est ensuite réuni et a discuté de chaque anomalie pour déterminer si elle devait être incluse dans le rapport final à remettre à l’exploitant du gazoduc.
Lors de la réunion du comité d’examen, l’anomalie à l’origine de la rupture a fait l’objet d’une discussion. Trois des 4 analystes principaux avaient d’abord déterminé que l’anomalie n’était pas une fissure. Après une discussion, le comité d’examen a déterminé à l’unanimité que cette anomalie devait être reclassée en tant que « dégradation du métal » n’ayant pas à être signalée. Les données découlant des inspections internes précédentes, réalisées en 2013 et 2018, n’ont pas été consultées pendant les discussions qui ont mené à la déclassification. La décision finale du comité d’examen a été consignée, mais la justification de cette décision n’a pas été étayée dans le processus d’analyse.
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
L’anomalie à l’origine de la rupture, qui avait été causée par une FCC et qui avait été détectée lors d’une inspection interne réalisée en 2022, a été classifiée comme n’ayant pas à être signalée par le fournisseur de services d’inspection. En conséquence, elle n’a été incluse ni dans le processus d’analyse de l’inspection interne ni dans l’évaluation des risques de TC Énergie pour la conduite principale Grande Prairie NPS 36.
2.4 Variabilité de la performance humaine dans l’analyse des données
TC Énergie a fait appel aux inspections par EMAT de Baker Hughes pour de nombreux gazoducs de son réseau. TC Énergie fournit à Baker Hughes des rapports sur les anomalies excavées afin d’aider la compagnie à améliorer sa technologie et ses processus. Les données colligées à la suite des inspections des gazoducs que Baker Hughes a réalisées pour le compte de TC Énergie démontrent que la performance de l’outil EMAT dépasse systématiquement les spécifications du fournisseur de services en ce qui concerne la détection et le dimensionnement des fissures. La technologie EMAT est physiquement capable de détecter les fissures, y compris celles qui se produisent dans la corrosion, comme celle ayant causé la défaillance dans l’événement à l’étude.
Bien que la technologie EMAT soit devenue un outil indispensable pour gérer l’intégrité des gazoducs, le processus d’inspection repose encore largement sur l’interprétation humaine de grands volumes de données générées afin d’identifier les anomalies qui atteignent le seuil de signalement aux clients. Ces interprétations sont fondées sur des critères d’évaluation de nature qualitative, ce qui signifie qu’elles fournissent des fourchettes et décrivent des attributs généraux des anomalies, sans toutefois donner de réponse claire pour chaque cas. Même si le travail est effectué par du personnel chevronné qui a été formé et certifié conformément aux pratiques exemplaires de l’industrie, ces évaluations qualitatives sont soumises à la variabilité naturelle de la performance humaine qui est inhérente à la façon dont les humains accomplissent la plupart des tâches.
Ce risque lié à la variabilité de la performance humaine est atténué par les multiples niveaux de contrôle et d’examen des données EMAT, notamment par un comité d’examen composé de 4 analystes principaux. Pendant un examen par le comité, n’importe lequel des 4 analystes du comité peut choisir d’inclure une anomalie dans un rapport final; il n’est pas nécessaire d’obtenir un consensus.
Depuis la mise en place du processus d’inspection de Baker Hughes, l’événement à l’étude est le seul cas où une anomalie mal identifiée lors d’une inspection par EMAT a conduit à la défaillance d’un gazoduc, ce qui témoigne de la fiabilité du processus d’inspection de Baker Hughes.
Dans l’événement à l’étude, le comité d’examen a déterminé à l’unanimité que la configuration de signaux correspondant à l’anomalie à l’emplacement de la rupture n’indiquait pas une fissure et a reclassé l’anomalie en tant que type n’ayant pas à être signalé. Bien que l’inspection interne par EMAT soit fiable pour détecter les fissures, la variabilité de la performance humaine introduit la possibilité qu’une fissure ne soit pas signalée dans le cadre d’une inspection donnée.
Fait établi quant aux risques
La variabilité de la performance humaine au cours de l’analyse des données de l’inspection interne par EMAT introduit la possibilité qu’une fissure présente dans un gazoduc ne soit pas détectée, ce qui prive de la possibilité de gérer cette fissure.
2.5 Gestion de l’intégrité des gazoducs fondée sur les risques
Le programme de gestion de l’intégrité de TC Énergie est guidé par une évaluation des risques dans l’ensemble du réseau, qui consiste à estimer le risque individuel ou collectif associé à toutes les menaces pour un emplacement donné de son réseau de gazoducs. Si un risque est jugé supérieur à un niveau acceptable, les menaces les plus importantes sont abordées à l’aide de mesures préventives, d’évaluation, de contrôle ou d’atténuation.
TC Énergie a recours aux inspections internes par EMAT pour gérer la menace de FCC. Afin d’améliorer les capacités des outils et l’analyse des données connexes, TC Énergie fournit continuellement aux fournisseurs de services d’inspection des renseignements sur la taille des fissures découvertes sur le terrain. D’après les données d’excavation de TC Énergie, les outils EMAT ont toujours dépassé les spécifications relatives à l’exactitude du dimensionnement des fissures, et, depuis 2018, TC Énergie utilise ce type d’inspection comme principale méthode de gestion de la FCC sur ses gazoducs. Malgré les améliorations continues de la technologie, les exploitants de gazoducs sont conscients que la probabilité de détection, d’identification, de dimensionnement et de signalement des fissures à l’aide d’une inspection par EMAT est soumise à des incertitudes inhérentes aux capacités de l’outil et à l’analyse des données d’inspection.
Les rapports d’inspections internes par EMAT produits par les fournisseurs de services sont présentés sous forme de liste d’anomalies qui dépassent un seuil de signalement établi. Toutefois, en analysant les données EMAT en vue de produire ces rapports, les fournisseurs de services d’inspection disposent également d’une grande quantité de renseignements sur les anomalies qui n’atteignent pas le seuil de signalement ou qui sont jugées comme n’ayant pas à être signalées. Ce genre de renseignements ne sont généralement pas inclus dans les rapports fournis aux exploitants de gazoducs.
La liste des anomalies et leur emplacement sur le gazoduc, qui figure dans les rapports d’inspection, fournit aux exploitants de gazoducs des renseignements leur permettant d’orienter leurs activités de gestion de l’intégrité sur le terrain. Aux fins de l’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau, le calcul de la probabilité de défaillance attribuable à la FCC dépend de si l’inspection interne a donné lieu au signalement d’une fissure dans un tronçon de conduite. Si des fissures sont signalées pour un tronçon de conduite, la probabilité de défaillance de ce tronçon est la probabilité de défaillance combinée de l’ensemble des fissures existant dans ce tronçon. Étant donné que les rapports d’inspections internes ne fournissent normalement aucun renseignement sur les anomalies jugées comme n’ayant pas à être signalées, le modèle de risque présume la présence de fissures non détectées en se fondant uniquement sur la vulnérabilité du tronçon à la FCC. En l’absence de renseignements particuliers sur leur emplacement et leurs attributs, les incertitudes liées à la présence possible d’anomalies non signalées dans un tronçon donné ne sont pas correctement cernées dans le cadre de l’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau. Par conséquent, l’évaluation des risques dans l’ensemble du réseau peut ne pas évaluer correctement la possibilité que des anomalies non signalées ne soient présentes ni de la probabilité de leur défaillance dans un tronçon de gazoduc donné.
Fait établi quant aux risques
Si une évaluation des risques liés aux gazoducs ne comprend pas de renseignements sur l’emplacement et les attributs des anomalies n’ayant pas à être signalées après une inspection interne, les probabilités de défaillance calculées pour le tronçon de conduite évalué pourraient ne pas représenter avec exactitude l’état de la conduite.
3.0 Faits établis
3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
Il s’agit des facteurs qui ont causé l’événement ou qui y ont contribué.
- La pression d’exploitation de la conduite principale Grande Prairie d’un diamètre nominal de 36 po a augmenté jusqu’à ce qu’une fissure existante se rompe. Le gazoduc s’est alors rompu, provoquant une explosion et un incendie.
- Les conditions du sol, le revêtement décollé du gazoduc, qui exposait la surface en acier, et la pression interne du gaz ont provoqué une fissuration par corrosion sous tension à pH quasi neutre à l’emplacement de la rupture.
- L’anomalie à l’origine de la rupture, qui avait été causée par une fissuration par corrosion sous contrainte et qui avait été détectée lors d’une inspection interne réalisée en 2022, a été classifiée comme n’ayant pas à être signalée par le fournisseur de services d’inspection. En conséquence, elle n’a été incluse ni dans le processus d’analyse de l’inspection interne ni dans l’évaluation des risques de TC Énergie pour la conduite principale Grande Prairie d’un diamètre nominal de 36 po.
3.2 Faits établis quant aux risques
Il s’agit des facteurs dans l’événement qui présentent un risque pour le système de transport. Ces facteurs peuvent, ou non, avoir causé l’événement ou y avoir contribué, mais ils pourraient présenter un risque dans le futur.
- La variabilité de la performance humaine au cours de l’analyse des données de l’inspection interne par transducteur électromagnétique acoustique introduit la possibilité qu’une fissure présente dans un gazoduc ne soit pas détectée, ce qui prive de la possibilité de gérer cette fissure.
- Si une évaluation des risques liés aux gazoducs ne comprend pas de renseignements sur l’emplacement et les attributs des anomalies n’ayant pas à être signalées après une inspection interne, les probabilités de défaillance calculées pour le tronçon de conduite évalué pourraient ne pas représenter avec exactitude l’état de la conduite.
4.0 Mesures de sécurité
4.1 Mesures de sécurité prises
4.1.1 TC Énergie
En réaction à l’événement, TC Énergie a instauré des restrictions de pression sur la conduite principale Grande Prairie d’un diamètre nominal (NPS) de 36 po (conduite principale Grande Prairie NPS 36), conformément à la directive de la Régie de l’énergie du Canada énoncée dans l’Ordonnance d’inspecteur JB-001-2024. Une évaluation technique a été réalisée afin de remettre en service le tronçon de gazoduc entre les vannes GPM21 et GPM20, à une pression d’exploitation réduite.
En mai 2024, une excavation de vérification d’intégrité a été réalisée sur le doublement de la conduite principale adjacente Grande Prairie NPS 42, près du lieu de l’événement, afin de vérifier qu’il n’y avait aucun dommage au revêtement externe de la conduite. L’inspection a été réalisée et a confirmé qu’il n’y avait eu aucun impact sur le revêtement du gazoduc adjacent.
En juin 2024, une inspection par transducteur électromagnétique acoustique (EMAT) a été réalisée sur la conduite principale Grande Prairie NPS 36, au moyen de l’outil EMAT d’un autre fournisseur de services d’inspection interne. Une inspection circonférentielle de pertes de flux magnétique a également été réalisée. En réaction aux inspections internes de 2024, des excavations de vérification d’intégrité ont été entreprises sur la conduite principale Grande Prairie NPS 36, conformément aux procédures de gestion de la fissuration par corrosion sous contrainte (FCC) de TC Énergie.
4.1.2 Baker Hughes
Baker Hughes a mené une enquête interne et a communiqué ses résultats à TC Énergie et au BST.
Baker Hughes a communiqué avec les exploitants de gazoducs au Canada et à l’étranger qui auraient pu être touchés afin de partager et de mettre en œuvre les leçons tirées de l’événement survenu sur la conduite principale Grande Prairie NPS 36.
Baker Hughes a également mis en œuvre des étapes au cours du processus afin de veiller à la consignation obligatoire de la justification des décisions de déclassement pendant l’examen en comité des étapes d’analyse des données EMAT dans les documents du système de gestion de la qualité du projet EMAT, pour l’apport de toute modification à la classification des anomalies.
4.1.3 Régie de l’énergie du Canada
Le 6 mai 2024, la Régie de l’énergie du Canada (REC) a émis l’Ordonnance d’inspecteurLes ordonnances d’inspecteur émises par la REC peuvent être modifiées ou annulées en fonction de la progression des mesures prises par l’exploitant du gazoduc. JB-001-2024 à la dirigeante responsable de NOVA Gas Transmission Ltd. (NGTL), ordonnant à NGTL de ne pas exploiter les tronçons de la conduite principale Grande Prairie NPS 36 à une pression supérieure à 80 % de la pression maximale enregistrée sur une période de 60 jours dans le tronçon concerné avant l’événement à l’étude, ou à 80 % de la pression maximale d’exploitation, selon la moins élevée.
La REC a réalisé l’inspection d’une excavation de vérification d’intégrité afin de vérifier si les procédures de la compagnie respectaient les exigences du Règlement de la Régie canadienne de l’énergie sur les pipelines terrestres et de la norme CSA Z662 : Réseaux de canalisations de pétrole et de gaz de l’Association canadienne de normalisation.
Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le 27 août 2025. Le rapport a été officiellement publié le 9 octobre 2025.