Language selection

Avis de sécurité du transport aérien A21W0089-D2-A1

Le 11 janvier 2023

Directeur général, Aviation civile
Transports Canada

Objet :

Avis de sécurité du transport aérien A21W0089-D2-A1
Déclarations obligatoires des médecins à Transports Canada

Le 9 octobre 2021, l’aéronef Cavalier SA102.5 de construction amateur sous immatriculation privée (immatriculation C-FBWF, numéro de série 6958) effectuait un vol récréatif local à partir de l’aérodrome de Lacombe (CEG3) (Alberta) avec 1 pilote et 1 passager à bord. Alors que l’aéronef se trouvait à 14 milles marins à l’est de l’aérodrome, il est entré en décrochage aérodynamique, ce qui a entraîné une vrille à gauche et une collision avec le relief. Le pilote, qui occupait le siège de gauche, a été mortellement blessé; le passager a été grièvement blessé. L’aéronef a été lourdement endommagé; aucun incendie ne s’est déclaré après l’impact. La radiobalise de repérage d’urgence de 406 MHz s’est activée. Un appareil de suivi portatif a également aidé à localiser l’aéronef. L’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement (A21W0089) est en cours.

Le Bureau du médecin légiste en chef de l’Alberta a déterminé que la mort était attribuable à un traumatisme contondant, et qu’une maladie cardiovasculaire était un important facteur contributif. Le médecin légiste en chef a également noté que le pilote présentait des signes de crise cardiaque, bien qu’il n’ait pas été possible de déterminer le moment exact où celle-ci s’est produite.

De septembre 2019 à juillet 2021, le pilote avait consulté son médecin de famille à 5 reprises pour une affection médicale aigüe sans lien avec la santé cardiovasculaire. En mai 2021, le pilote s’est vu prescrire 3 médicaments pour traiter cette affection, mais il semblerait qu’il n’en ait pris aucun. Il n’était pas prévu que le pilote travaille en mai 2021. Comme l’a confirmé un examen cardiologique indépendant réalisé dans le cadre de l’événement à l’étude, un de ces médicaments a d’importants effets secondaires sur le système nerveux central, notamment de la somnolence et des étourdissements, et il ne doit pas être pris dans les jours précédant un vol ou l’exécution de tâches critiques pour la sécurité. En cas de surdosage, il peut provoquer des arythmies cardiaques (irrégularités du rythme cardiaque).

Aux termes de la Loi sur l’aéronautique :

Le médecin […] qui a des motifs raisonnables de croire que son patient est titulaire d’un document d’aviation canadien assorti de normes médicales […] doit, s’il estime que l’état de l’intéressé est susceptible de constituer un risque pour la sécurité aérienne, faire part sans délai de son avis motivé au conseiller médical désigné par le ministreNote de bas de page 1.

Dans le cadre de la délivrance des licences provinciales, les médecins sont informés de leurs responsabilités provinciales et fédérales en matière de déclaration obligatoire. Les médecins reçoivent également le document de l’Association médicale canadienne intitulé Évaluation médicale de l’aptitude à conduire : Guide du médecinNote de bas de page 2, qui contient une section sur l’aviation. On trouve dans cette section des détails sur les exigences de déclaration de la Loi sur l’aéronautique, de même que cette mise en garde :

La loi oblige les médecins à déclarer aux agents régionaux en médecine aéronautique de Transports Canada tout pilote, contrôleur aérien ou mécanicien navigant qui a un problème de santé susceptible d’affecter la sécurité aérienne. Cette section énumère les problèmes courants pour lesquels la déclaration est obligatoireNote de bas de page 3.

L’enquête sur cet événement a révélé que le pilote s’était vu prescrire des médicaments qui auraient pu avoir une incidence sur sa santé cardiovasculaire, et donc sur la sécurité aérienne. Le médecin de famille n’était pas conscient de l’exigence de communiquer de tels renseignements à Transports Canada (TC); par conséquent, ni les médicaments ni l’affection pour laquelle ils ont été prescrits n’ont été déclarés à TC par le médecin de famille. Le pilote n’a pas non plus déclaré l’affection ni les médicaments à TC.

En 2011, à la suite de l’enquête du BST sur une perte de maîtrise et une collision avec le relief survenues à Miramichi (Nouveau-Brunswick) le 23 avril 2010Note de bas de page 4, le Bureau a émis la préoccupation liée à la sécurité qui suit :

Le Bureau constate avec inquiétude que les médecins praticiens ne connaissent pas toujours la nécessité ou l’importance de communiquer certains états de santé devant être déclarés et, qui plus est, qu’il existe des lacunes dans les lignes directrices servant à contrôler les risques de maladie cardiovasculaire. Par conséquent, le risque demeure que les facteurs de risque de maladie cardiovasculaire parmi les membres du personnel de l’aviation passent inaperçus.

Depuis 2000, il y a eu 8 accidents, y compris celui-ci, où des pilotes présentaient une affection médicale ayant une incidence sur la sécurité qui a été reconnue comme un fait établi quant aux risques, mais qui n’a pas été signalée à TCNote de bas de page 5. Ces accidents ont fait 10 morts et 7 blessés graves.

Comme le montre l’événement à l’étude, tous les médecins ne sont pas conscients de l’exigence de communiquer à TC les affections médicales et/ou les médicaments prescrits qui pourraient nuire à l’utilisation sécuritaire d’un aéronef. Compte tenu des conséquences importantes que pourrait entraîner le fait de certifier des pilotes ayant ces affections ou prenant ces médicaments, le BST encourage la Direction de la médecine aéronautique civile de TC, en collaboration avec l’Association médicale canadienne, à élaborer des stratégies de communication pour mieux faire connaître les exigences de déclaration imposées aux médecins en vertu de la Loi sur l’aéronautique.

Le BST souhaite être informé des mesures prises à cet égard. À l’issue de l’enquête A21W0089, le Bureau publiera son rapport sur cet événement.

Veuillez agréer, Monsieur, l’assurance de mes meilleurs sentiments.

Original signé par

Natacha Van Themsche
Directrice des enquêtes – Air

c. c.