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Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien A20Q0015

Impact sans perte de contrôle
Service aérien gouvernemental du Québec
Bell 206L-4 (hélicoptère), C-GSQA
Lac Saint-Jean (Québec)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le matin du 22 janvier 2020, 2 hélicoptères du Service aérien gouvernemental du Québec ont décollé de l’aéroport de Montréal/St-Hubert (CYHU) (Québec) à 7 h 50, heure normale de l’Est, à destination de Saint-Henri-de-Taillon (Québec) afin d’offrir un soutien aérien à des recherches visant à retrouver des motoneigistes portés disparus la veille.

En début d’après-midi, l’un des 2 hélicoptères, le Bell 206L-4 (immatriculation C-GSQA, numéro de série 52060), a été libéré de son affectation, et le pilote, seul à bord, a décollé de Saint-Henri-de-Taillon à 14 h 02 à destination de l’aérodrome de La Tuque (CYLQ) (Québec). Environ 7 minutes après le décollage, l’hélicoptère est entré en collision avec la surface gelée et enneigée du lac Saint-Jean. L’aéronef a été détruit mais n’a pas pris feu. Malgré ses blessures graves, le pilote a été capable de s’extraire de l’aéronef et de téléphoner au répartiteur du Service aérien gouvernemental pour l’informer de l’accident.

Le répartiteur a averti le pilote du 2e hélicoptère participant aux recherches, qui, accompagné de 2 secouristes, s’est rendu sur le lieu de l’accident. L’hélicoptère a atterri vers 14 h 45 et a ensuite redécollé pour évacuer le pilote blessé au centre hospitalier de Roberval (Québec).

La radiobalise de repérage d’urgence de l’hélicoptère accidenté s’est déclenchée. Le signal a été reçu à 14 h 10 min 34 s par le Centre canadien de contrôle des missions à Trenton (Ontario).

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Vers 6 hNote de bas de page 1, le matin du 22 janvier 2020, le répartiteur du Service aérien gouvernemental (SAG) du Québec a communiqué avec le pilote d’hélicoptère de l’événement pour l’informer qu’il devait se rendre à Saint-Henri-de-Taillon (Québec), en compagnie d’un autre hélicoptère, afin d’apporter un soutien aérien à des recherches visant à retrouver des motoneigistes portés disparus la veille. Le pilote a effectué une planification avant le vol et a embarqué l’équipement de sauvetage requis dans l’hélicoptère Bell 206L-4 (immatriculation C-GSQA, numéro de série 52060).

Les 2 hélicoptères du SAG ont décollé de l’aéroport de Montréal/St-Hubert (CYHU) (Québec) à 7 h 50 avec chacun le pilote et 1 passager à bord, ont fait une escale à l’aérodrome de La Tuque (CYLQ) (Québec) pour se ravitailler en carburant, et sont arrivés à destination à 10 h 25.

Entre 11 h 30 et 12 h 19, le pilote de l’événement a effectué des recherches à très basse altitude, c’est-à-dire à moins de 100 pieds au-dessus de la surface gelée du lac Saint-Jean, dans le secteur des îles près du lac de La Grande Décharge (figure 1).

Figure 1. Carte générale de la région où s’est produit l’événement, avec grossissement en encadré (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Carte générale de la région où s’est produit l’événement, avec grossissement en encadré (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

Une fois les recherches terminées, le pilote est allé faire le plein de carburant à l’aéroport d’Alma (CYTF) (Québec), où il a atterri à 12 h 30, avant de revenir se poser à Saint-Henri-de-Taillon à 13 h 25.

En début d’après-midi, un seul aéronef étant requis pour la suite des recherches et la porte coulissante arrière de l’hélicoptère de l’événement fermant difficilement, il a été décidé de renvoyer l’aéronef à CYHU.

À 14 h 02, le pilote a décollé, seul à bord, en direction de CYLQ, en limitant volontairement sa vitesse pour respecter la vitesse maximale autorisée pour l’ouverture en vol de la porte coulissante, soit 90 nœuds, au cas où la porte s’ouvrirait accidentellement en vol. Environ 7 minutes après le décollage, l’hélicoptère a percuté la surface gelée et enneigée du lac et s’est immobilisé sur le flanc gauche. L’aéronef a été détruit mais n’a pas pris feu.

Au moment où l’impact s’est produit, le pilote croyait être en vol de croisière à environ 500 pieds au-dessus du sol (AGL) lorsque, soudainement, il a ressenti une décélération longitudinale rapide, a entendu les moteurs s’emballer et a été désorienté par une rotation perçue vers la gauche.

Le pilote, bien que grièvement blessé, a pu s’extraire de l’aéronef et a téléphoné au répartiteur pour l’informer de l’accident. À 14 h 12, ce dernier a alors appelé le pilote du 2e hélicoptère resté à Saint-Henri-de-Taillon pour lui demander d’aller porter secours au pilote blessé. Deux secouristes de la Sûreté du Québec (SQ) ont été prévenus et l’ont accompagné. L’aéronef s’est posé sur les lieux de l’accident à 14 h 45. Il a ensuite redécollé à 15 h avec le pilote blessé à bord, à destination de l’aéroport de Roberval (CYRJ) (Québec), où une ambulance attendait pour transporter le blessé au centre hospitalier de la ville.

Le Centre canadien de contrôle des missions à Trenton (Ontario) a reçu le signal de détresse provenant de la radiobalise de repérage d’urgence (ELT) à 14 h 10 min 34 s et a prévenu le Centre conjoint de coordination de sauvetage (également à Trenton), qui a envoyé un hélicoptère de type Griffon sur les lieux de l’accident. L’hélicoptère s’est posé à 15 h 04 et a attendu l’arrivée des policiers.

1.2 Personnes blessées

Le pilote était seul à bord de l’hélicoptère.

Tableau 1. Personnes blessées
Gravité des blessures Membres d’équipage Passagers Personnes ne se trouvant pas à bord de l’aéronef Total selon la gravité des blessures
Mortelles 0 0
Graves 1 1
Légères 0 0
Total des personnes blessées 1 1

1.3 Dommages à l’aéronef

L’aéronef a été détruit par l’impact avec la surface gelée du lac Saint-Jean.

1.4 Autres dommages

Sans objet.

1.5 Renseignements sur le personnel

Tableau 2. Renseignements sur le personnel
  Commandant de bord
Licence de pilote Licence de pilote de ligne — hélicoptère (ATPL)
Date d’expiration du certificat médical 1er mars 2020
Heures de vol total 7291
Heures de vol sur BH06 (BH06T)* 1050 (158,3)
Heures de vol au cours des 7 jours précédant l’événement 0
Heures de service avant l’événement 8,3
Heures hors service avant la période de travail 17

*La qualification de type BH06 correspond à tous les modèles du Bell 206 monomoteur alors que celle du BH06T correspond au Bell 206 bimoteur.

Le pilote était titulaire d’une licence de pilote de ligne — hélicoptère et possédait les qualifications de vol de nuit et de vol aux instruments de groupe 4, pour lesquelles il avait effectué une formation et un renouvellement en 2019. Il travaillait au SAG depuis 2005. Il avait reçu un entraînement en vol sur l’aéronef de l’événement le 25 septembre 2019 dans le cadre de la formation annuelle des pilotes donnée par le SAG. Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur.

1.6 Renseignements sur l’aéronef

Tableau 3. Renseignements sur l’aéronef
Constructeur Bell Textron Canada Ltd.
Type, modèle et immatriculation Bell 206L-4 (conversion bimoteur), C-GSQA
Année de construction 1994
Numéro de série 52060
Date d’émission du certificat de navigabilité 25 avril 1994
Total d’heures de vol cellule 5883,25
Type de moteur (nombre de moteurs) Turbine Rolls-Royce 250-C20R (2)
Type de rotor (nombre de pales) Rotor semi-rigide (2)
Masse maximale admissible au décollage 4550 lb (2064 kg)
Type(s) de carburant recommandé(s) Jet A, A-1, B
Type de carburant utilisé Jet A-1

Le SAG avait acquis cet aéronef en 1994 à l’état neuf et modifié en vertu du certificat de type supplémentaire (CTS) SH01-30 approuvé par Transports Canada (TC). Ce CTS comprend, entre autres, l’installation de 2 moteurs Rolls-Royce 250-C20R et d’une boîte d’engrenages de transfert.

Les dossiers techniques indiquent, qu’en décembre 2019, la boîte de transmission principale ainsi que la boîte d’engrenages de transfert avaient été retirées et avaient fait l’objet d’une révision générale planifiée, dans un atelier approuvé. Le SAG en a alors profité pour inspecter le mât du rotor principal, les 2 moteurs ainsi que plusieurs autres composants. Au moment de l’accident, l’aéronef avait effectué 8,5 heures de vol depuis sa remise en service le 20 décembre 2019 sans qu’aucune anomalie ne soit détectée.

Les dossiers techniques indiquent que l’aéronef était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur.

1.6.1 Altimètres

L’aéronef était équipé d’un radioaltimètre et d’un altimètre conventionnel.  

Le radioaltimètre émet un signal radio vers le sol et capte le retour de ce même signal après sa réflexion au sol. Il mesure le temps écoulé entre l’émission et la réception du signal radio pour calculer la hauteur AGL de l’aéronefNote de bas de page 2, qui est alors indiquée sur le cadran.

Figure 2. Radioaltimètre de l’aéronef de l’événement (Sources : BST [image principale] et brochure du fabricant [image en vignette])
Radioaltimètre de l’aéronef de l’événement (Sources : BST [image principale] et brochure du fabricant [image en vignette])

Un sélecteur de hauteur de décision permet au pilote de choisir une hauteur minimale (figure 2). Si l’aéronef descend au-dessous de la hauteur minimale sélectionnée, un voyant s’allume et une alarme retentit afin de prévenir le pilote. Le sélecteur de hauteur de décision du radioaltimètre retrouvé sur les lieux de l’accident était réglé à 0 pied.

Contrairement au radioaltimètre, l’altimètre conventionnel utilise la pression atmosphérique du moment pour obtenir une indication de l’altitude au-dessus du niveau de la mer (ASL) et non AGL. Pour que l’indication d’altitude soit précise, l’altimètre doit être calibré manuellement et régulièrement en fonction de la pression atmosphérique locale du moment, car celle-ci varie constamment. Si la valeur de la pression atmosphérique utilisée pour régler l’altimètre (calage altimétrique) est plus élevée que la pression atmosphérique réelle, il y aura une surestimation de l’altitude indiquéeNote de bas de page 3, et vice versa.

Figure 3. Altimètre conventionnel de l’aéronef de l’événement (Source : BST)
Altimètre conventionnel de l’aéronef de l’événement (Source : BST)

Le calage altimétrique de l’altimètre conventionnel de l’aéronef de l’événement indiquait 30,13 pouces de mercure (inHg) (figure 3). La pression atmosphérique à CYTF au moment de l’accident était de 30,08 inHg, ce qui représente une surestimation de l’altitude indiquée de 50 pieds.

Les tests effectués sur l’altimètre conventionnel au Laboratoire d’ingénierie du BST à Ottawa (Ontario) ont démontré que la marge d’erreur de l’indication d’altitude était de 20 pieds ou moins pour des altitudes simulées inférieures à 500 pieds et respectait la marge d’erreur acceptable pour cet instrument selon la norme 571 du Règlement de l’aviation canadien (RAC)Note de bas de page 4.

1.7 Renseignements météorologiques

La prévision de zone graphique « Nuages et temps » émise à 12 h 31 était valide à partir de 13 h et prévoyait, pour le lac Saint-Jean, les conditions météorologiques suivantes :

La prévision de zone graphique « Givrage, turbulence et niveau de congélation » pour la même période prévoyait un courant-jet à basse altitude de 60 nœuds occasionnant de la turbulence modérée, et une possibilité de givrage modéré mixte en raison de précipitations locales de bruines verglaçantes entre la surface et 3000 pieds ASL.

Les messages d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) des stations météorologiques de CYRJ et de l’aéroport de Bagotville (CYBG) (Québec) étaient les messages disponibles provenant des stations les plus près du site de l’accident, soit à 16 milles marins (NM) à l’ouest et à 36 NM à l’est, respectivement. Les conditions météorologiques rapportées à ces 2 stations à 14 h sont indiquées dans le tableau 4.

Tableau 4. Conditions météorologiques rapportées aux aéroports de Roberval (CYRJ) et de Bagotville (CYBG) à 14 h
Aéroport Conditions météorologiques
CYRJ
  • visibilité de 25 SM
  • ciel couvert à 1700 pieds AGL
  • vents de surface soufflant du 170° vrai (V) à 11 nœuds avec des rafales à 18 nœuds, direction variable entre 160°V et 220°V
  • température de −3 °C, point de rosée de −7 °C
  • calage altimétrique de 30,00 inHg
CYBG
  • visibilité de 25 SM
  • plafond de nuages fragmentés à 3000 pieds AGL, avec couche supplémentaire de nuages fragmentés à 22 000 pieds AGL
  • vents de surface soufflant du 110°V à 6 nœuds
  • température −6° C, point de rosée −9° C
  • calage altimétrique de 30,09 inHg

Aucune précipitation de neige n’a été rapportée par ces 2 stations après 9 h, et les informations recueillies ont permis d’établir qu’il n’y avait eu aucune précipitation ni givrage durant le vol à l’étude. Les conditions météorologiques étaient favorables au vol selon les règles de vol à vue (VFR).

Le système automatisé d’observations météorologiques (AWOS) de CYTF, situé à environ 8 NM à l’est du lieu de l’accident, n’a enregistré aucune donnée. Cependant les informations recueillies à l’aéroport ont permis de déterminer que le calage altimétrique indiqué par l’AWOS à 14 h 19 le jour de l’accident était de 30,08 inHg.

1.7.1 Luminosité

La lumière diffuse le jour de l’accident a réduit les ombres et le contraste sur la surface enneigée du lac (figure 4). De plus, l’accident s’étant produit autour de 14 h, soit un peu plus de 2 heures avant le coucher du soleilNote de bas de page 5, la luminosité avait déjà commencé à diminuer à cette heure-là, ce qui rendait la perception des détails plus difficile.

Figure 4. Photos du lieu de l'accident prises le jour de l’accident et le lendemain (Sources : Sûreté du Québec [22 janvier] et BST [23 janvier])
Photos du lieu de l'accident prises le jour de l’accident et le lendemain (Sources : Sûreté du Québec [22 janvier] et BST [23 janvier])
1.7.1.1 Lumière plate et voile blanc

La lumière plate peut se définir comme [traduction]

la condition dans laquelle une lumière diffuse se produit en raison d'un ciel nuageux, en particulier lorsque le sol est enneigé, ce qui réduit ou élimine le contraste et les ombresNote de bas de page 6.

Le manuel d’information aéronautique (AIM) publié par la Federal Aviation Administration (FAA) aux États-Unis définit la lumière plate comme suit [traduction] :

La lumière plate est une illusion d’optique, également connue sous le nom de « voile blanc partiel ou sectoriel » [caractères gras dans l’original]. Elle n'est pas aussi grave que le « voile blanc », mais ce phénomène fait que les pilotes perdent la profondeur de champ et le contraste de leur vision. Les conditions de lumière plate sont généralement accompagnées d'un ciel couvert empêchant de bien voir tout indice visuel.[…] La lumière plate peut complètement obscurcir les caractéristiques du terrain, ce qui rend les distances et les vitesses de rapprochement impossibles à apprécier exactementNote de bas de page 7.

Toujours dans son AIM, la FAA définit le phénomène apparenté du voile blanc, dont elle distingue 2 types [traduction] :

Voile blanc (white out) : Dans le domaine de la météorologie, le voile blanc correspond à la situation au cours de laquelle une personne se retrouve enveloppée dans une lueur uniformément blanche liée à la présence de poudrerie, de poussière, de sable, de boue ou d'eau. Dans des conditions de voile blanc, les ombres, l'horizon, les nuages, et aussi toute profondeur de champ et orientation sont imperceptibles. Par ailleurs, l’absence totale de repères visuels fait du voile blanc une situation dangereuse.

Voile blanc autoprovoqué (self-induced white out) : Cet effet se produit généralement lorsqu'un hélicoptère décolle ou atterrit sur une surface enneigée, au moment où la déflexion du souffle rotor vers le bas soulève les particules et les rabat vers le sol. L'effet peut varier en intensité en fonction de la lumière à la surface. Ce phénomène peut se produire les journées très ensoleillées et très lumineuses, lorsque les contrastes sont évidents. Cependant, lorsque cela se produit, la perte d'indices visuels peut être complèteNote de bas de page 8.

Dans un document conçu pour compléter la formation au pilotage dans des conditions de lumière plate et de voile blanc, la FAA précise que les définitions qu’elle fournit pour lumière plate et voile blanc ne sont pas des [traduction] « explications scientifiques officielles. Elles constituent simplement des définitions opérationnelles, adaptées à la communauté aéronautique pour répondre aux besoins de cette formation. » Elle précise aussi que « ces deux termes ne sont pas interchangeablesNote de bas de page 9. »

De plus, la FAA met les pilotes en garde sur le fait que la présence de bons repères visuels ne signifie pas qu’il n’est pas dangereux de continuer le vol.

[Traduction] Lorsqu’un vol est effectué le long des rives d’un lac, servez-vous de celles-ci comme points de référence. Même si vous voyez l’autre rive, soyez conscient que votre perception de profondeur peut être mauvaise et il est alors facile de percuter la surface. Si vous devez traverser un lac, vérifiez fréquemment votre altimètre et maintenez une altitude sécuritaire tant que les repères visuels sont bons. Ne poursuivez pas le vol sous cette altitudeNote de bas de page 10.

Au Canada, le Manuel d’information aéronautique de Transports Canada (AIM de TC) ne fait aucune mention du terme lumière plate et parle uniquement du voile blanc. L’AIM de TC décrit le voile blanc dans la section des opérations hivernales de la façon suivante :

Le voile blanc est défini au Glossaire de météorologie publié par l’American Meteorological Society comme :

« Un phénomène optique atmosphérique des régions polaires qui fait que l’observateur semble enveloppé dans une lueur blanchâtre uniforme. On ne peut discerner l’horizon, ni les ombres, ni les nuages; on perd le sens de la profondeur et de l’orientation et on ne peut voir que les objets très sombres situés tout près. Le voile blanc se produit si la couche de neige au sol est intacte et le ciel au-dessus est uniformément couvert lorsque, grâce à l’effet de clarté de la neige, la lumière venant du ciel est à peu près égale à celle qui vient de la surface de la neige. La présence d’un chasse-neige peut accentuer ce phénomène. »

La lumière achemine au cerveau les messages de perception de la profondeur sous la forme de couleur, d’éclat, d’ombre, etc. Tous ces éléments ont un point commun, à savoir, ils sont tous modifiés par la direction de la lumière et les variations d’intensité de la lumière. Lorsque nous voyons des ombres se former sur l’un des côtés d’un objet, nous en déduisons inconsciemment que la lumière vient du côté opposé. Ainsi la nature nous fournit un grand nombre d’indices visuels qui nous aident à discerner les objets et à évaluer les distances. Mais que se passe-t-il si l’on supprime tous ces indices? Supposons que les objets et le sol sur lequel ils reposent soient tous entièrement blancs. De plus, supposons qu’ils soient éclairés par une lumière diffuse, filtrée par la couche nuageuse, réfléchie dans toutes les directions par la surface blanche, de sorte que toute ombre disparaît. Il n’y a virtuellement plus aucun indice visuel sur le terrain et l’œil ne discerne plus les détails de la topographie du terrain.

À cause de l’extrême diffusion de la lumière, il est probable que le terrain et le ciel se confondront, l’horizon ayant disparu. Le vrai danger du voile blanc est que le pilote ne soupçonne pas le phénomène car il vole en air clair. Dans de nombreux accidents dus au voile blanc, le pilote a percuté la surface recouverte de neige sans se douter qu’il avait descendu et [était] confiant qu’il pouvait voir le sol. Par conséquent, chaque fois qu’un pilote se trouve en présence des conditions de voile blanc décrites ci-dessus ou qu’il soupçonne simplement qu’il est en présence de ces conditions, il devrait immédiatement monter s’il se trouve à bas niveau ou se mettre en palier et se diriger vers un endroit où les détails de la typographie du terrain sont très évidents. Le pilote ne doit pas continuer le vol sauf s’il est préparé à traverser la zone de voile blanc aux instruments et s’il a la compétence voulue pour le faire.

De plus, les phénomènes suivants peuvent donner lieu au voile blanc et on doit les éviter dans la mesure du possible :

  1. a) Voile blanc avec brouillard produit par de minces nuages de gouttelettes d’eau très froide qui entrent en contact avec la surface froide de la neige. Dans ces conditions, la visibilité peut être extrêmement réduite voire nulle, selon les dimensions et la répartition des gouttelettes d’eau.
  2. b) Voile blanc avec poudrerie produite par des vents de 20 kt ou plus qui soulèvent la neige fine de la surface. La lumière du soleil est réfléchie et diffusée et la visibilité devient nulle.
  3. c) Voile blanc avec précipitations produites par des petits cristaux de neige tombant de nuages bas et emportés par le vent et sur lesquels le soleil brille. La réflexion de la lumière est aggravée par la réflexion spectrale des flocons de neige et les points de repère peuvent être obscurcis par la neige qui tombe au point que la visibilité est réduite et la perception des distances est nulle. Dans la mesure du possible, les pilotes doivent éviter ces conditions sauf s’ils disposent des instruments appropriés à bord de leur appareil et ont suffisamment d’expérience pour utiliser une technique de présentation à basse vitesse et faible taux de descente pour atterrir en toute sécuritéNote de bas de page 11.

L’AIM de TC incorpore le phénomène de lumière plate dans la description du voile blanc, ce qui rend difficile la distinction entre les 2 phénomènesNote de bas de page 12. En effet, la lumière plate et le voile blanc peuvent survenir quand la visibilité est bonne; cependant, les conditions dans lesquelles chacun de ces phénomènes peut se produire et le risque qu’ils représentent diffèrent.

Dans un souci de clarté et de précision, le terme lumière plate, tel que le définit la FAA, sera utilisé dans le présent rapport pour décrire la condition de luminosité qui prévalait la journée de l’événement.

1.8 Aides à la navigation

L’aéronef était équipé d’un GPS (système de positionnement mondial) intégré au tableau de bord pour la navigation. Aucune donnée de vol n’a pu être récupérée, car le type de GPS en question ne permet pas d’en conserver.

1.8.1 Cartes aéronautiques de navigation selon les règles de vol à vue

Généralement, le principal outil de navigation des pilotes effectuant des vols VFR est la carte aéronautique de navigation VFR (VNC), qu’elle soit utilisée sous sa forme papier ou numérique (avec l’application ForeFlight, par exemple). Celle-ci comporte, entre autres, une représentation topographique de la surface avec l’altitude topographique du relief. Cependant, cette altitude n’y est pas indiquée pour les grands lacs comme le lac Saint-Jean. Or, le lac Saint-Jean a une altitude topographique d’environ 322 pieds, et non de 0 pied, comme les autres grandes étendues d’eau que sont les océans et les mers.

L’altitude topographique du relief inscrite sur les cartes est principalement utilisée pour la planification avant le vol et ne sert pas à déterminer l’altitude AGL durant les vols. Cependant, un pilote en vol risque inconsciemment d’associer une altitude topographique de 0 pied à toute grande étendue d’eau et d’interpréter ainsi l’altitude indiquée sur l’altimètre conventionnel comme une altitude AGL lorsque l’aéronef est au-dessus de l’eau.

En revanche, les pilotes d’hélicoptère qui effectuent des vols à des altitudes inférieures ou égales à 500 pieds AGL estiment et maintiennent leur altitude visuellement en suivant le relief au lieu de maintenir une altitude précise indiquée sur l’altimètre conventionnel.

Dans l’événement à l’étude, le pilote avait en sa possession les cartes VNC pertinentes aux vols effectués, tel que l’exige le SAG Note de bas de page 13, mais il ne s’en est pas servi lors du vol de retour. Tout au long de la journée, le pilote a estimé son altitude AGL visuellement sans utiliser l’indicateur d’altitude du radioaltimètre.

1.9 Communications

Sans objet.

1.10 Renseignements sur l’aérodrome

Sans objet.

1.11 Enregistreurs de bord

L’aéronef n’était équipé ni d’un enregistreur de données de vol (FDR), ni d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR), et la réglementation en vigueur n’exigeait ni l’un ni l’autre. En l’absence de FDR, il n’a pas été possible de déterminer avec exactitude à quel moment la descente a débuté ni quel a été le profil de descente de l’aéronef jusqu’à ce qu’il percute la surface du lac.

Toutefois, l’aéronef était équipé d’un système de suivi des vols par satellite dont les données ont pu être récupérées à partir du site internet de suivi et de gestion d’aéronefs du SAG. Ce système a enregistré la position GPS, l’altitude et la vitesse-sol de l’aéronef toutes les 2 minutes (figure 5).

Figure 5. Représentation du vol du matin (ligne pointillée) et du vol de l’événement (ligne continue) (Source : Google Earth, avec annotations du BST reposant sur les données du système de suivi des vols)
Représentation du vol du matin (ligne pointillée) et du vol de l’événement (ligne continue) (Source : Google Earth, avec annotations du BST reposant sur les données du système de suivi des vols)

Le matin, pour le vol aller, les pilotes des 2 hélicoptères, dont celui de l’événement, avaient décidé de longer la rive est du lac Saint-Jean en direction de Saint-Henri-de-Taillon à cause du manque de contraste au-dessus du lac.

Pour son vol de retour en après-midi, le pilote de l’événement avait prévu d’effectuer le vol à basse altitude, soit à environ 500 pieds AGL en raison du vent de face qui soufflait. À 14 h 02, l’aéronef a décollé de Saint-Henri-de-Taillon et s’est établi sur une trajectoire approximativement parallèle à la rive est du lac. À 14 h 06, l’aéronef, qui était à une altitude de 305 pieds AGL et à une distance latérale de 1 NM de la rive, s’approchait d’un groupe d’îles situées à 1,3 NM devant lui. Il a ensuite bifurqué vers la droite pour passer à l’ouest des îles. À 14 h 08, l’aéronef était à une distance latérale de 2,4 NM de la rive et à une altitude de 330 pieds AGL. L’impact avec la surface du lac est survenue environ une minute plus tard, soit approximativement 1,34 NM plus loin. L’angle entre la hauteur de la dernière position enregistrée à 14 h 08 et le point d’impact était d’environ 2,3°.

1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact

1.12.1 Généralités

L’épave a été examinée sur les lieux de l’accident et de nouveau au Laboratoire d’ingénierie du BST en présence des représentants du constructeur de l’aéronef, du constructeur des moteurs et du propriétaire de l’aéronef.

1.12.2 Lieu de l’accident

Les principaux débris sur le lieu de l’accident étaient dispersés sur une distance approximative de 260 pieds, suivant une traînée en ligne droite qui correspondait à la direction de vol indiquée par le système de suivi des vols, c’est-à-dire sud-sud-ouest. L’étendue des débris indique que la vitesse horizontale au moment de l’impact était probablement importante et que l’angle auquel l’aéronef a percuté la surface gelée du lac devait être peu élevé, ce qui est caractéristique d’un accident lié à un impact sans perte de contrôle (CFIT) plutôt que d’un accident lié à une perte de maîtrise (généralement associé à une vitesse horizontale moindre en raison d’une descente verticale plus prononcée)Note de bas de page 14.

Seuls l’extrémité de la queue et son rotor ainsi que le mât et le rotor principal se trouvaient loin de la traînée de débris (figure 6). Lors d'un impact, les pales du rotor principal d'un hélicoptère peuvent être projetées sur une grande distance dans toutes les directionsNote de bas de page 15 en raison, entre autres, de l’énergie cinétique et de l’inertie gyroscopique créées par la rotation des pales.

Figure 6. Vue aérienne du lieu de l’accident illustrant la distribution des débris et la distance par rapport au fuselage (Source : Sûreté du Québec, avec annotations du BST)
Vue aérienne du lieu de l’accident illustrant la distribution des débris et la distance par rapport au fuselage (Source : Sûreté du Québec, avec annotations du BST)

Aucune trace d’impact au sol n’était visible lorsque les enquêteurs sont arrivés sur les lieux le lendemain, les vents ayant balayé la surface enneigée. Cependant, les informations recueillies indiquent qu’une trace nette de patin avait été observée à l’arrivée des premiers intervenants le long de la traînée de débris, à une distance estimée à 230 pieds du fuselage. L’orientation observée de la trace de patin indiquait que le nez de l’aéronef pointait vers la gauche par rapport à la ligne de débris. Toutefois, la trace n’étant plus visible lorsque les enquêteurs sont arrivés sur les lieux, il n’a pas été possible d’effectuer des mesures pour confirmer l’orientation précise ni de vérifier si d’autres traces de patins étaient présentes dans la neige. La patte d’oursNote de bas de page 16 du patin de droite a été retrouvée à 195 pieds du fuselage, près de débris provenant d’une des pales du rotor principal et du stabilisateur horizontal gauche de la poutre de queue.

L’aéronef reposait sur le flanc gauche et la partie avant avait été fortement endommagée. Le nez ainsi que le tableau de bord étaient presque entièrement détachés du fuselage au niveau du plancher du poste de pilotage. Les portes et le toit de la cabine de pilotage avaient été arrachés. Les fixations du siège du pilote avaient cédé. La porte coulissante arrière était toujours solidement attachée à son rail et l’intégrité de la cabine arrière n’avait pas été compromise. Le fuselage comportait plusieurs signes de gauchissement et de déformation structurale au plafond. La partie supérieure du fuselage où se trouvaient les composants hydrauliques et les systèmes de commande de vol était écrasée. Aucune fuite de carburant n’a été constatée.

1.12.3 Examen de l’épave en laboratoire

L’épave a été transportée au Laboratoire d’ingénierie du BST pour un examen plus approfondi.

Le côté droit du fuselage ne présentait aucun dommage, ce qui indique qu’il n’est pas entré en contact avec la surface gelée du lac au cours de la séquence de l’accident. Les commandes de vol comportaient de multiples ruptures en surcharge liées à l’impact; toutefois, la continuité des composants du groupe motopropulseur Note de bas de page 17 et des commandes de vol a pu être confirmée. Aucun signe d’anomalie préexistante de ces différents composants n’a été observé. L’examen des voyants lumineux du panneau d’avertissement n’a révélé aucune information notable. Les 2 moteurs ont été envoyés à un centre agréé d’entretien et de révision des moteurs Rolls-Royce aux États-Unis où ils ont été soumis à des tests. Ces tests n’ont révélé aucune anomalie mécanique ou autre qui aurait pu contribuer à l’accident.

Une analyse des dommages et des déformations observés sur le fuselage et sur le train d’atterrissage a été effectuée. D’un point de vue de la structure, elle a permis de constater que ces dommages et déformations s’étaient produits au moment où l’aéronef avait percuté fortement la surface gelée du lac et qu’il était à l’endroit, le patin de gauche ayant heurté la surface avant le patin de droite. Les rayures, les bosses et la fente relevées sur la partie inférieure du fuselage indiquaient que l’aéronef se déplaçait latéralement sur la gauche au moment où il a percuté la surface du lac. Rien n’indique qu’un mouvement de lacet était présent au moment de cet impact. Les attaches qui retenaient les traverses tubulaires au fuselage ont cédé, et le train d’atterrissage s’est détaché du fuselage.

Une pale du rotor principal a sectionné la poutre de queue à la hauteur du stabilisateur horizontal à un angle approximatif de 7,5°, ce qui indique que le disque rotor était probablement incliné vers la gauche à ce moment. Ce contact a provoqué la séparation du mât rotor au niveau de l’entrée dans la boîte de transmission principale.

Cet examen a permis de constater que ces dommages et déformations ont été causés par un choc au moment où l’aéronef a percuté la surface gelée du lac pendant la phase initiale de l'accident. Toutefois, il est possible qu’un autre impact se soit produit peu de temps avant l’impact principal, mais que celui-ci n’ait pas causé de dommages.

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

Rien n’indique que la performance du pilote ait été affectée par des facteurs médicaux, pathologiques ou physiologiques.

1.14 Incendie

Aucun incendie ne s’est déclaré après l’impact.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

L’aéronef était muni d’une ELT, qui a fonctionné comme prévu en transmettant le signal de détresse ainsi que la dernière position GPS relevée de l’aéronef.

Le pilote portait un casque de vol même si le SAG n’oblige pas le port du casque pour les vols effectués sur les Bell 206. Certains pilotes du SAG optent plutôt pour les écouteurs de vol lorsqu’ils pilotent les Bell 206 en raison du faible dégagement au-dessus de la tête avec le casque de vol et de l’étroitesse de la cabine de pilotage.

Figure 7. Traces de choc sur le dessus du casque du pilote (Source : SAG, et annotations du BST)
Traces de choc sur le dessus du casque du pilote (Source : SAG, et annotations du BST)

Les traces retrouvées sur la partie supérieure de la coque du casque du pilote indiquent qu’un choc important s’est produit à cet endroit (figure 7). Le BST a déjà souligné l’importance du port du casque pour prévenir des blessures mortelles ou pour réduire les effets des blessures non mortelles à la tête lors d’accidents, effets qui varient de la confusion à la perte de conscience complèteNote de bas de page 18.

En plus de porter un casque, le pilote avait bouclé sa ceinture-baudrier à 4 points d’attache. Lors du choc latéral, les attaches du siège du pilote se sont brisées. Il est reconnu que l’un des facteurs les plus critiques dans la capacité physique à tolérer les forces d’un choc est la façon dont l’occupant est retenu et soutenu par son siège et son système de retenue. Une meilleure répartition des forces de décélération subies sur la surface corporelle augmente les chances de survieNote de bas de page 19.

Fait établi : Autre

Le port du casque de vol et le port de la ceinture-baudrier à 4 points d’attache ont contribué à réduire la gravité des blessures du pilote, qui a pu s’extirper de l’aéronef et appeler le répartiteur pour obtenir de l’aide rapidement.

1.16 Essais et recherche

1.16.1 Rapports de laboratoire

Le BST a produit les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :

1.17 Renseignements sur les organismes et la gestion

Le ministère des Transports du Québec, via le SAG, exploite une flotte aérienne comprenant des avions et des hélicoptères pour assurer, en collaboration avec ses partenaires, une réponse adéquate aux situations d’urgence ou aux situations nécessitant un service aérien spécialiséNote de bas de page 20. La SQ est le partenaire pour l’exploitation de la flotte d’hélicoptères, qui au moment de l’événement était composée d’un hélicoptère moyen-porteur (un Bell 412) et de 2 hélicoptères légers (un Bell 206B et le Bell 206L-4 à l’étude).

Contrairement à sa flotte d’avions qu’il exploite en vertu d’un document d’enregistrement d’exploitant privé et d’un certificat d’exploitation aérienne, au moment de l’événement, le SAG exploitait sa flotte d’hélicoptères selon les règles générales de la partie VI du RAC. Ainsi, même si les pilotes sont tenus de mettre à jour leurs connaissances en vertu de l’article 401.05 du RAC, le SAG, quant à lui, n’est pas tenu d’offrir de formation particulière à ses pilotes d’hélicoptère ni d’établir des procédures d’exploitation. Néanmoins, le SAG a mis en place un manuel d’exploitation de compagnie (MEC) et un programme de formation en se basant sur les exigences du RAC.

1.17.1 Manuel d’exploitation de compagnie du Service aérien gouvernemental du Québec

Dans son MEC, le SAG précise les procédures à suivre pour les opérations héliportées afin d’assurer la sécurité des vols et des missionsNote de bas de page 21.

Les missions exécutées à bord du Bell 412 piloté par 2 pilotes peuvent être effectuées en vol VFR ou selon les règles de vol aux instruments (IFR) alors que celles exécutées à bord des Bell 206B et 206L-4 (hélicoptères toujours pilotés par 1 seul pilote) sont effectuées en vol VFR de jour uniquement. En raison des différences opérationnelles, certaines procédures décrites dans le MEC peuvent s’appliquer seulement au Bell 412 ou seulement aux Bell 206.

1.17.1.1 Procédures relatives au radioaltimètre

La nature même des opérations VFR à 1 pilote, à bord d‘hélicoptères légers comme le Bell 206, est telle que des manœuvres sont régulièrement effectuées à basse altitude ou à proximité du sol. Par conséquent, il n’est pas toujours souhaitable, selon les circonstances, que le pilote détourne son attention de sa tâche primaire (qui est de manœuvrer l’hélicoptère visuellement près du sol et des obstacles) et porte son regard vers l’intérieur de la cabine pour surveiller sa hauteur AGL indiquée par le radioaltimètre. Ainsi, de façon générale, les exploitants aériens ne préconisent pas l’utilisation du radioaltimètre pour ce type d’opérations et par conséquent leur flotte d’hélicoptères n’en est pas équipée.

Dans le cas des opérations du SAG, les Bell 206 sont utilisés principalement pour les vols de recherches et sauvetage effectués à basse altitude au cours desquels un observateur formé pour ce type de vol est assis à l’avant côté passager.

Le MEC stipule :

Afin de réduire le risque de collision avec le relief par inadvertance, il faut appliquer les procédures suivantes :

Réglée [sic] la valeur la plus haute sur l’altimètre de l’EFIS [système d’instruments de vol électroniques] et la valeur la plus basse sur l’altimètre du panneau d’instrument.

Note : seulement la valeur la plus haute activera l’alarme sonore.

  • VFR En route : un radioaltimètre à 400 pieds et l’autre à 100 pieds;
  • VFR au-dessus de l’eau : un radioaltimètre à 400 pieds et l’autre à 50 pieds;
  • IFR au décollage : deux radioaltimètres à 400 pieds;
  • IFR En route : un radioaltimètre à 1000 pieds ou 1500 pieds dans les zones désignées montagneuses et l’autre à 100 pieds;
  • IFR En approche : un radioaltimètre sur la DA [altitude de décision] ou MDA [altitude minimale de descente] et l’autre à 100 pieds.

L’alerte d’altitude des radioaltimètres doivent être réglées [sic] à la même altitude sur les indicateurs des deux pilotes.

On peut déroger à cette procédure lors d’une situation particulière ou pour se conformer à une procédure normalisée. Cependant, avant toute dérogation, il faut en aviser l’autre membre d’équipageNote de bas de page 22.

Le Bell 412 est le seul aéronef du SAG équipé de 2 radioaltimètres. Le Bell 206L-4 n’en était équipé que d’un seul, et le Bell 206B n’en a aucun. Aucune autre procédure, en revanche, n’est indiquée pour réduire le risque de collision avec le relief par inadvertance dans le cas où l’aéronef n’est pas équipé de 2 radioaltimètres.

Les informations recueillies indiquent qu’il n’était pas pratique courante chez les pilotes du SAG d’utiliser le sélecteur de hauteur de décision du radioaltimètre dans l’aéronef à l’étude et que l’utilisation de ce sélecteur était laissée à la discrétion des pilotes. Le radioaltimètre génère une alarme sonore au moment où le pilote manœuvre volontairement sous l’altitude minimale réglée sur le sélecteur de hauteur de décision. Cette alarme était perçue comme une distraction possible pouvant devenir nuisible à la sécurité du vol.

1.17.1.2 Conditions dangereuses

Le phénomène de voile blanc est traité dans la section « Vol dans des conditions dangereuses » du MEC, qui précise :

Lorsque des conditions de voile blanc sont connues ou prévues durant le décollage et l’atterrissage, le PIC [commandant de bord] doit : [caractères gras dans l’original]

S’assurer qu’il a suffisamment de réserve de puissance pour être en vol stationnaire hors de l’effet de sol avant d’atterrir ou de décoller.

Avant l’atterrissage, stabiliser le vol stationnaire à une altitude qui permettra à la neige de se disperserNote de bas de page 23.

Toutefois, le MEC n’aborde pas le phénomène spécifique de lumière plate.

1.17.2 Formation

La formation des pilotes sert à perfectionner les connaissances et les compétences nécessaires pour gérer efficacement les divers risques associés aux vols. À cette fin, le SAG a élaboré un programme de formation basé sur les exigences du RAC, même si la réglementation ne l’exigeait pas pour ses opérations héliportées.

Son programme tient compte d’une part des types d’aéronefs qu’il utilise et d’autre part de sa zone d’exploitation. La formation annuelle sur l’aéronef à l’étude comprenait au minimum 3 heures de théorie et 1 heure de pratique en vol.

Selon le programme de formation, le voile blanc est abordé lors des exercices en vol de décollage et d’atterrissage seulement. Le phénomène de lumière plate n’est pas abordé spécifiquement dans le programme de formation du SAG.

1.17.2.1 Tests en vol

Durant leur carrière, les pilotes professionnels doivent se soumettre à divers tests en vol ou évaluations en vol annuelles pour vérifier leurs connaissances et leurs compétences lors de l’exécution de diverses manœuvres.

À cette fin, TC a publié un guide de tests en vol sur hélicoptère qui contient les « lignes directrices qui se rapportent à la tenue des contrôles de compétence pilote (CCP)Note de bas de page 24 ». Il détaille, entre autres, les exercices pratiques qu’évaluent les pilotes vérificateurs agréés ainsi que les éléments dont ils doivent tenir compte durant leur évaluation des exercices.

Selon ce guide, le voile blanc fait partie des critères d’exécution qui doivent être pris en compte par le pilote vérificateur lors de son évaluation du candidat au moment de l’exercice d’atterrissage seulementNote de bas de page 25. Par contre, la lumière plate n’est pas un critère abordé spécifiquement dans le guide. Le pilote du vol à l’étude avait régulièrement mis en pratique ses connaissances sur les risques liés au voile blanc lors de décollages et d’atterrissages dans le cadre de tests en vol avant l’événement.

1.18 Renseignements supplémentaires

1.18.1 Perception spatiale

La perception spatiale est la capacité d’une personne à être consciente de la relation qui existe entre elle-même et ce qui l’entoure. Lorsqu’une personne se déplace au sol, son cerveau utilise et traite les informations fournies par différents sens, soit la vision, le système musculo-squelettique (proprioception) et l’oreille interne (appareil vestibulaire), pour établir une perception spatiale juste.

En vol, l’interprétation de l’information reçue par les sens autres que la vision peut induire le pilote en erreur s’il ne peut pas s’orienter visuellement. Une accélération peut, par exemple, être perçue comme un cabrage de l’aéronef. Dans un contexte de vol, la vision devient donc la source principale d’information fiable pour maintenir une bonne perception spatiale. Plus la quantité d’information visuelle à traiter reçue par le cerveau est grande, plus la représentation du déplacement dans l’espace est précise.

Le manque d’informations visuelles telles que des points de repère à l’extérieur de l’aéronef peut provoquer des illusions qui affectent la perception spatiale. Par exemple, pendant un vol de nuit, qui fournit normalement moins d’information visuelle qu’un vol de jour, les lumières donnent l’impression d’être plus près qu’en réalité. La perte complète des informations visuelles provoque une désorientation spatiale. Dans ce cas, seule la référence aux instruments de vol pertinents permettra au pilote de conserver la maîtrise de l’aéronef pour autant que celui-ci ait les compétences nécessaires pour le vol aux instruments.

Entre 2010 et 2019, le BST a enquêté sur 48 événements durant lesquels des conditions reconnues comme pouvant nuire à la perception spatiale des pilotes étaient présentes (annexe A).

1.18.2 Visibilité, repères visuels et indices visuels

Les pilotes en vol VFR doivent s’assurer de maintenir un contact visuel avec la surface en tout tempsNote de bas de page 26. Pour cela, la visibilité autant que la présence de repères visuels sont nécessaires. La visibilité de jour désigne la distance à laquelle on peut identifier des objets saillants non éclairés, par exemple, le relief ou des bâtiments.

Un repère visuel correspond plutôt à un ou plusieurs éléments visibles de la surface (ou à la surface elle-même) qui aideront les pilotes à déterminer leur position et leur déplacement dans l’espace, et aussi à repérer l’horizon. Dans le vol à l’étude, la rive contrastait nettement avec le ciel couvert et la surface enneigée du lac, ce qui permettait de bien distinguer l’horizon.

Les indices visuels, quant à eux, consistent en tout élément d’information visuelle (ombres, détail de la textureNote de bas de page 27 et de la taille des objets familiersNote de bas de page 28) que traite le cerveau de façon inconsciente pour déterminer aussi bien la position que le déplacement dans l’espace. Les indices visuels sont essentiels pour permettre la perception de la profondeur, caractéristique de la vision en 3 dimensions. Dans le vol à l’étude, plusieurs cabanes de pêche se trouvaient sur le lac, mais leur nombre, leur emplacement et leur proximité avec la trajectoire de vol n’ont pas pu être déterminés.

En vol VFR, il est donc important que la visibilité permette de voir les repères visuels qui, à leur tour, doivent fournir suffisamment d’indices visuels afin de maintenir une bonne perception spatiale. Il est possible que la qualité et le nombre d’indices visuels fournis par les repères visuels soient insuffisants pour conserver une vision en 3 dimensions, comme c’est le cas lors d’un vol au-dessus d’une surface sans contraste dans des conditions de lumière plate. Lorsque les indices visuels sont insuffisants, la vision en 3 dimensions se dégrade et devient une vision en 2 dimensions. Cette dégradation peut, cependant, ne pas être perçue, ce qui fait de la lumière plate un risque insidieux et rend ce phénomène dangereux pour un pilote. En effet, généralement, le pilote voit bien car la visibilité est bonne, mais il peut ne pas se rendre compte que sa capacité de perception de la profondeur est réduite, voire nulle.

La figure 8 illustre la vue simulée de la rive depuis le poste de pilotage à 2 altitudes différentes, à 330 pieds AGL et à 50 pieds AGL, lorsque la surface n’offre pas de contraste. Les 2 images supérieures représentent la vue à l’endroit où l’accident a eu lieu, soit à 2,4 NM de la rive, et les 2 images inférieures représentent la vue à une distance plus près de la rive, soit à 0,3 NM, à titre comparatif.  

Figure 8. Vue simulée de la rive depuis le poste de pilotage à 330 pieds au-dessus du sol et 50 pieds au-dessus du sol lorsque l’aéronef se trouve à 2,4 milles marins et à 0,3 milles marins de la rive (Source : BST)
Vue simulée de la rive depuis le poste de pilotage à 330 pieds au-dessus du sol et 50 pieds au-dessus du sol lorsque l’aéronef se trouve à 2,4 milles marins et à 0,3 milles marins de la rive (Source : BST)

Lorsque l’aéronef se trouve à 2,4 NM de la rive, la rive conserve le même profil aux 2 altitudes, ce qui tend à démontrer qu’à ces 2 altitudes une distance latérale de 2,4 NM est trop grande pour pouvoir observer une perte d’altitude en utilisant la rive comme repère visuel unique. Toutefois, lorsque l’aéronef est à une distance latérale de 0,3 NM, un rétrécissement de la rive est observable avec la perte d’altitude.

1.18.3 Gestion des risques

En aviation, un risque peut être décrit comme la conséquence potentielle d’un danger qui n'est pas contrôlé ou éliminé. Pour prendre des décisions sécuritaires, il faut dans un premier temps cerner les dangers pour pouvoir évaluer le niveau de risque et ensuite déterminer les actions appropriées. À cette fin, les pilotes utilisent l’expérience et les connaissances qu’ils ont acquises, notamment lors de différentes formations, pour cerner les dangers et s'assurer qu'ils acquièrent et maintiennent une conscience de la situation juste, avant et pendant un vol.

Pour son vol de retour, le pilote avait noté que les vents provenaient du sud-sud-ouest, et que des vents de face allaient donc ralentir sa vitesse et augmenter le temps de vol nécessaire pour se rendre à destination. Étant donné que la double motorisation de l’aéronef réduisait les risques associés à une perte de puissance à basse altitude en permettant, entre autres, de conserver l’altitude ou de réduire le taux de descente, il a planifié d’effectuer le vol à environ 500 pieds AGL, ce qui lui permettait de voler de façon sécuritaire à une altitude où la force des vents est généralement plus faible.

Ce vol devait s’effectuer de jour seulement. Cependant, le crépuscule civil à CYHU était prévu à 17 h 18. Le couvert nuageux présent au moment du décollage faisait que la luminosité était réduite et déclinait plus rapidement que si la couverture nuageuse avait été partielle. Il était possible d’envisager un trajet plus direct pour gagner du temps grâce à la double motorisation de l’aéronef, qui permettait de voler à une distance de la rive supérieure à la distance de vol planéNote de bas de page 29, sans risque supplémentaire en cas de perte de puissance d’un moteur. Le pilote a tenu compte de ces contraintes opérationnelles dans ses décisions avant et pendant le vol.

Le pilote avait considéré le manque de contraste au-dessus de la surface du lac comme un risque potentiel pour les opérations de recherches effectuées à proximité du sol et lors des atterrissages et décollages tout au long de la journée. Selon ses connaissances, il associait le manque de contraste du voile blanc principalement à un risque pour les vols à proximité du sol, y compris les atterrissages et décollages, alors que la perte des repères visuels et/ou de l’horizon était associée à une mauvaise visibilité pouvant survenir à toutes les phases de vol. Étant donné que la visibilité était bonne, que la rive était visible et qu’il voyait plusieurs cabanes de pêche, le pilote n’a pas considéré que le survol du lac pendant le vol de retour à destination de CYHU était risqué à l’altitude planifiée.

La connaissance du caractère distinct et insidieux de la lumière plate est un élément important de la conscience de la situation et donc de la prise de décision du pilote. Ainsi, la principale défense pour atténuer le risque de CFIT dans toute situation similaire à l’événement à l’étude consiste à connaître les effets de la lumière plate afin d’être conscient des risques associés en vol, quelle que soit la phase de vol.

1.18.4 Rapports d’enquêtes du BST

En 1990, le BST a publié le Rapport d’étude de sécurité aéronautique 90-SP002Note de bas de page 30 portant sur le vol VFR dans des conditions météorologiques défavorables. Ce rapport révèle que 27 des 33 accidents d'hélicoptère survenus entre 1976 et 1986Note de bas de page 31 se sont produits dans des conditions de voile blanc, et que de nombreux accidents sont survenus à la suite d'une descente involontaire qui s'est poursuivie à l'insu du pilote.

En 2019, le BST a publié le Rapport d’enquête sur une question de sécurité du transport aérien (SII) A15H0001Note de bas de page 32 dont l’objectif est d’améliorer la sécurité en réduisant les risques liés aux activités de taxi aérien au Canada, un secteur qui continue de connaître plus d’accidents que tous les autres secteurs de l’aviation commerciale. Un exploitant qui effectue un travail aérien ou un service de taxi aérien (transport de passagers) doit posséder un certificat d’exploitation aérienne délivré par TC. Étant donné que le SAG est un exploitant d’État, il n’est pas tenu d’avoir un certificat d’exploitation délivré en vertu de la partie VII du RAC. Les procédures décrites dans son manuel d’exploitation se basent sur les exigences décrites dans la sous-partie 703 du RAC, qui s’applique aux opérations de taxi aérien. Puisque le contexte des opérations des hélicoptères Bell 206 du SAG est similaire aux opérations de taxi aérien par hélicoptère, il convient de considérer les discussions et les conclusions de cette enquête.

La phase 1 de la SII, qui consistait, entres autres, à examiner des rapports d’enquête du BST de 167 événements, a révélé que le plus grand nombre de pertes de vie attribuable aux accidents résulte de vols ayant commencé dans des conditions météorologiques de vol à vue, qui se sont poursuivis jusqu’à la perte des repères visuels et se sont soldés soit par un CFIT soit par une perte de maîtrise. L’analyse des données sur les accidents a révélé que les facteurs contributifs s’inscrivaient dans 2 grandes catégories :

Pendant la phase 2, les enquêteurs ont mené des entrevues auprès de l’industrie afin de mieux comprendre les pressions auxquelles l’industrie devait faire face et les problèmes rencontrés dans leurs activités quotidiennes. Les renseignements recueillis ont été classés en 19 thèmes de sécurité qui, à la suite d’une analyse supplémentaire combinée avec d’autres données, ont produit des conclusions variées. De ces 19 thèmes, les 2 thèmes suivants et leurs conclusions respectives sont pertinents au présent rapport :

La nature complexe et variable du secteur du taxi aérien et l’ampleur des pressions concurrentes engendrent des dangers et des facteurs de risque qui sont différents de ceux d’autres secteurs de l’aviation, notamment celui des lignes aériennes. La façon dont l’exploitant gère les dangers ou les risques détermine le niveau de sécurité de ses opérations. Plus les mécanismes de défense sont fragiles ou rares, plus la marge de sécurité est mince.

De nombreux exploitants adoptent une gestion proactive de la sécurité pour cerner les dangers et atténuer les risques associés à leurs activités, et nombre d’entre eux prennent des mesures qui vont au-delà des exigences réglementaires.

Les risques liés au secteur du taxi aérien persistent depuis des décennies et résistent aux mesures d’atténuation plus traditionnelles.

L’approche traditionnelle à l’égard de la gestion de la sécurité est fondée sur la conformité aux règlements et une réponse réactive aux incidents et aux accidents. Les pratiques modernes de gestion de la sécurité favorisent une recherche proactive des dangers, une identification des risques et l’adoption de meilleurs moyens de défense pour réduire les risques à un niveau acceptable.

Une analyse plus approfondie des données sur les accidents a également révélé la fragilité ou l’absence de mécanismes de défense qui, s’ils étaient renforcés ou prévus, pourraient améliorer la sécurité. De nombreux exploitants utilisent la technologie embarquée et la formation pour améliorer la sécurité de leurs opérations. Ils peuvent aller au-delà des règlements existants et appliquer les recommandations actives du BST, sans attendre les modifications réglementaires de TC pour améliorer la sécurité. Même si le respect des règlements en matière de sécurité est fondamental, les exploitants qui se limitent à se conformer aux normes établies par les règlements ne sont pas bien placés pour cerner les problèmes de sécurité émergents.

1.19 Techniques d’enquête utiles ou efficaces

Sans objet.

2.0 Analyse

Le pilote possédait la licence et les qualifications requises pour effectuer le vol. Rien n’indique que la performance du pilote ait été affectée par des facteurs médicaux, pathologiques ou physiologiques. Les conditions météorologiques qui prévalaient au moment de l’événement étaient favorables au vol selon les règles de vol à vue (VFR).

L’absence d’indication d’anomalie mécanique préexistante selon l’examen approfondi de l’épave (qui a couvert, entre autres, les commandes de vol, les commandes des moteurs, le système hydraulique, la boîte d’engrenages de transfert, le rotor principal et le rotor de queue avec leurs transmissions respectives) ainsi que le résultat des tests effectués sur les 2 moteurs indiquent qu’il est improbable qu’un problème ou bris mécanique en vol ait contribué à l’accident.

Par conséquent, l’analyse portera sur les points suivants :

2.1 Lumière plate

Lors du vol à l’étude, il n’y avait aucune précipitation et la visibilité était d’environ 25 milles terrestres (SM). La rive était visible loin devant et le ciel était couvert, ce qui produisait une lumière diffuse. Les ombres et le contraste sur la surface enneigée du lac ainsi moins prononcés ont créé des conditions de lumière plate (figure 4). De plus, une réduction de la luminosité en raison de l’heure a diminué davantage la perception des détails. L’absence de détails de la texture de la surface du lac a causé une réduction importante des indices visuels au-dessus du lac, indices essentiels à la perception de la profondeur et donc aussi à la vision en 3 dimensions.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

Même si la visibilité était de 25 SM, la lumière plate faisait en sorte que les ombres et le contraste sur la surface enneigée du lac étaient masqués, ce qui a réduit les indices visuels nécessaires à la perception de la profondeur et aussi à la vision en 3 dimensions.

Le danger de la lumière plate est lié à sa nature insidieuse. En effet, même lorsque la visibilité est bonne et que l’horizon est visible, la perte de perception de la profondeur peut ne pas être détectée par le pilote. Puisque la lumière plate est une illusion d’optique, ni l’expérience de vol ni la possession d’une qualification de vol aux instruments ne permettent de mieux déceler cette perte de la vision en 3 dimensions. Cette illusion nuit à la perception spatiale et augmente le risque d’impact sans perte de contrôle (CFIT) si elle n’est pas reconnue.

2.2 Formation

La formation est reconnue comme une mesure permettant aux pilotes d’acquérir les connaissances et compétences dont ils ont besoin pour gérer efficacement les divers risques associés à leurs opérations. Même si la réglementation ne l’exigeait pas, le Service aérien gouvernemental (SAG) du Québec avait mis en place un programme de formation basé sur les exigences requises pour les exploitants aériens.

Grâce aux diverses formations qu’il avait suivies et tests en vol qu’il avait passés au cours de sa carrière, le pilote du vol à l’étude avait eu l’occasion de mettre en pratique, lors d’atterrissages et de décollages, les connaissances acquises sur les risques liés au voile blanc, c’est-à-dire la perte de repères visuels et le manque de contraste. La mise en pratique de ces techniques à proximité du sol tend à renforcer la notion que le manque de contraste est un risque uniquement présent au décollage et à l’atterrissage. Cette notion est à son tour accentuée par le fait que le Manuel d’information aéronautique de Transports Canada (AIM de TC) ne dissocie pas le phénomène de la lumière plate du phénomène de voile blanc, dont les risques en vol dans des conditions de visibilité réduite sont bien connus. Les termes lumière plate et voile blanc ne devraient pas être utilisés de manière interchangeable, car, même si les 2 phénomènes peuvent survenir en condition de visibilité réduite, tant au décollage, à l’atterrissage, qu’en vol de croisière, la lumière plate peut, elle, survenir aussi en vol de croisière lorsque la visibilité est bonne et que les repères visuels permettent de situer l’horizon, ce qui la rend particulièrement insidieuse.

Fait établi quant aux risques

Si les documents de référence fournis par TC ne font pas de distinction claire entre le phénomène de lumière plate et celui de voile blanc, les pilotes risquent de ne pas différencier les risques spécifiques associés à chacun de ces dangers.

Lors du vol à l’étude, le pilote a reconnu le manque de contraste, mais ne l’a ni associé à la lumière plate ni reconnu comme un risque potentiel pour son vol.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

Les connaissances et la formation du pilote ne lui ont pas permis de reconnaître les risques associés au manque de contraste dû à la lumière plate, pendant qu’il était en vol de croisière et que la bonne visibilité lui permettait de voir la rive au loin.

2.3 Gestion des dangers opérationnels

Le SAG a pris les devants en adoptant des mesures pour atténuer les risques liés à ses opérations, même si la réglementation en vigueur ne l’exigeait pas. Il a incorporé des procédures d’utilisation du radioaltimètre dans son manuel d’exploitation de compagnie afin de réduire les risques de CFIT. Toutefois, ces procédures visent uniquement les opérations effectuées à bord du Bell 412 lorsqu’il est piloté par 2 pilotes, et exigent l’utilisation de 2 radioaltimètres. D’ailleurs, le radioaltimètre était rarement utilisé par les pilotes du SAG lorsqu’ils étaient aux commandes de l’aéronef à l’étude et n’était pas installé sur l’autre Bell 206, puisque la nature des opérations du SAG ne se prêtaient pas toujours à son utilisation.

De plus, le manuel d’exploitation ne prévoit pas de mesure d’atténuation du risque de CFIT pour les opérations effectuées à bord des Bell 206 en cas de conditions de lumière plate ou de voile blanc.

Le Rapport d’étude de sécurité aéronautique 90-SP002 du BST, publié en 1990, a révélé que la majorité des accidents d'hélicoptère analysés s’étaient produits dans des conditions de voile blanc, et que de nombreux accidents étaient survenus à la suite d'une descente involontaire qui s'était poursuivie à l'insu du pilote. De plus, le Rapport d’enquête sur une question de sécurité du transport aérien A15H0001 du BST, publié en 2019, a révélé que le plus grand nombre de pertes de vie attribuable aux accidents d’avion et d’hélicoptère résultait de vols ayant commencé dans des conditions météorologiques de vol à vue, qui s’étaient poursuivis dans des conditions menant à la perte des repères visuels et qui s’étaient soldés soit par un CFIT soit par une perte de maîtrise.

Cette enquête a également révélé que la fragilité ou l’absence de moyens de défense avait contribué à ces accidents. Depuis plusieurs années, l’insuffisance des moyens de défense qui ressort de nombreuses enquêtes d’accidents confirme la persistance de ces dangers et des facteurs de risque. Compte tenu du contexte similaire entre les opérations des Bell 206 du SAG et celui des exploitants de taxi aérien par hélicoptère, il convient de considérer les discussions et les conclusions de cette enquête, qui a fait ressortir la nature complexe et variable du secteur du taxi aérien. Selon l’enquête, les facteurs ayant contribué aux accidents de taxi aérien survenus entre 2000 et 2014 pouvaient être regroupés dans 2 grandes catégories, dont celle de la gestion inadéquate des dangers opérationnels.

Dans le contexte de la gestion des dangers opérationnels, l’approche traditionnelle à l’égard de la gestion de la sécurité est fondée sur la conformité aux règlements et une réponse aux incidents et aux accidents. Les pratiques modernes de gestion de la sécurité favorisent plutôt une recherche proactive des dangers, l’identification des risques et l’adoption de meilleurs moyens de défense pour réduire les risques à un niveau acceptable. Ainsi de nombreux exploitants adoptent une gestion proactive de la sécurité pour cerner les dangers et atténuer les risques associés à leurs activités. Ils ont recours à la technologie embarquée et à la formation pour améliorer la sécurité de leurs opérations. Par conséquent, la façon dont l’exploitant gère les dangers et les risques détermine le niveau de sécurité de ses opérations.

Comme nous l’avons vu précédemment, la lumière plate est particulièrement insidieuse et peut aussi survenir en vol de croisière lorsque la visibilité est bonne. Bien que la réglementation exige que la formation et les tests en vol couvrent le phénomène de voile blanc, elle n’aborde pas spécifiquement celui de la lumière plate, qui ne devrait pas être confondu avec le voile blanc. Ainsi, même si le respect des règlements en matière de sécurité est fondamental, les exploitants qui se limitent au respect des règlements ne sont pas en mesure de cerner tous les problèmes de sécurité liés à leurs opérations et de gérer adéquatement les dangers opérationnels.

Fait établi quant aux risques

Si les exploitants aériens qui exploitent des aéronefs selon les règles de vol à vue ne prennent pas des mesures proactives afin d’offrir des formations spécifiques sur la lumière plate ou sur l’utilisation de la technologie embarquée visant à améliorer la conscience de la situation, les pilotes pourraient se retrouver dans des conditions de lumière plate sans le savoir, ce qui augmenterait le risque de CFIT.

2.4 Déroulement du vol

2.4.1 Préparation avant le vol

En début d’après-midi, un seul aéronef étant requis pour la suite des recherches, et la porte coulissante arrière de l’aéronef à l’étude fermant difficilement, il a été décidé de renvoyer l’aéronef à Saint-Hubert (CYHU) (Québec).

Pour son vol de retour, le pilote a volontairement limité sa vitesse de croisière à 90 nœuds pour respecter la vitesse maximale pour l’ouverture en vol de la porte coulissante, en cas d’ouverture inopinée durant le vol.

Un ravitaillement en carburant était prévu à l’aérodrome de La Tuque (CYLQ) (Québec). Le pilote avait noté que les vents provenaient du sud-sud-ouest et que ces vents de face ralentiraient donc sa vitesse et augmenteraient le temps de vol nécessaire pour se rendre à destination. Le vol devait s’effectuer de jour seulement, ce qui impliquait un atterrissage au plus tard à 17 h 18 à CYHU, tout en sachant que la luminosité allait décliner plus rapidement à l’approche du coucher du soleil en raison du couvert nuageux. Le pilote a donc planifié d’effectuer le vol de retour à environ 500 pieds au-dessus du sol (AGL), la double motorisation de l’aéronef réduisant les risques associés à une perte de puissance à basse altitude. Il pouvait ainsi voler de façon sécuritaire à une altitude où la force des vents est généralement plus faible.

2.4.2 Exécution du vol

À 14 h 02, l’aéronef a décollé de Saint-Henri-de-Taillon (Québec) et s’est établi sur une trajectoire approximativement parallèle à la rive du lac. Il a suivi cette trajectoire pendant les 4 premières minutes du vol, durant lesquelles il a poursuivi son ascension. Le pilote a évalué sa hauteur visuellement en s’aidant de la rive et des îles devant lui.

À 14 h 06, l’aéronef était à une hauteur de 305 pieds AGL et s’approchait du groupe d’îles. Un pilote aux commandes d’un aéronef équipé de 2 moteurs n’a pas à se soucier autant de la distance de vol plané de la rive. En effet, en cas de perte de puissance d’un moteur, la double motorisation permet de conserver l’altitude ou de réduire le taux de descente. Comme la visibilité permettait au pilote de voir la rive autant sur sa gauche que devant lui, il a estimé qu’un éloignement supérieur à la distance de vol plané de la rive n’entraînait pas de risque supplémentaire.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

Compte tenu des contraintes opérationnelles liées à la vitesse et à la lumière du jour restante, et du fait que l’aéronef avait une double motorisation, le pilote, qui distinguait la rive au loin, a bifurqué vers la droite pour se placer sur une trajectoire plus directe vers sa destination, s’éloignant latéralement de la rive.

En raison de la lumière plate, les ombres et le contraste sur la surface enneigée du lac étaient masqués, ce qui a réduit les indices visuels nécessaires au pilote pour percevoir la profondeur, caractéristique de la vision en 3 dimensions. Voyant les repères visuels, et compte tenu de ses connaissances et des formations qu’il avait suivies sur le voile blanc, le pilote était sûr de pouvoir maintenir sa hauteur visuellement au-dessus de la surface enneigée du lac sans avoir à recourir aux instruments de vol, notamment le radioaltimètre.

Tant qu’il conservait une proximité latérale par rapport à la rive et qu’il voyait les îles devant lui, le pilote avait suffisamment d’indices visuels tels que la taille des objets familiers pour maintenir une vision en 3 dimensions. Par contre, une fois les îles franchies, il ne s’est pas aperçu qu’en s’éloignant de la rive une réduction de ces indices s’était produite.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

Même si la rive au loin était visible, l’éloignement latéral par rapport à la rive a provoqué, une fois les îles franchies et à l’insu du pilote, une réduction importante des indices visuels fiables au sol lui permettant d’apprécier et de maintenir sa hauteur visuellement au-dessus de la surface enneigée du lac.

2.4.3 Impact avec la surface du lac

À 14 h 08, soit environ une minute après avoir franchi les îles, l’hélicoptère était à une altitude de 330 pieds AGL. Environ une minute plus tard et 1,34 NM plus loin, l’aéronef a percuté la surface enneigée du lac. L’angle entre la hauteur de la dernière position enregistrée à 14 h 08 et le point d’impact correspond à un angle approximatif de 2,3°. À des fins comparatives, une approche effectuée à un tel angle serait considérée à faible taux de descente. Toutefois, en l’absence d’enregistreur de données de vol, il n’a pas été possible de déterminer avec exactitude à quel moment la descente a débuté ni quel a été le profil de descente de l’aéronef jusqu’à ce qu’il percute la surface du lac. Le pilote n’a ressenti aucun changement dans le profil de vol entre le moment où l’aéronef était à 330 pieds et celui où il a percuté la surface gelée du lac. Il est donc raisonnable de conclure que cette transition a été graduelle.

Selon la vue simulée de la rive depuis le poste de pilotage à 330 et à 50 pieds AGL (figure 9), en l’absence de contraste sur la surface gelée du lac et une fois les îles franchies, l’apparence de la rive change peu, car la distance latérale est trop grande pour observer une perte d’altitude à ces hauteurs en utilisant la rive comme repère visuel unique.

Figure 9. Vue simulée de la rive depuis le poste de pilotage à 330 pieds au-dessus du sol et 50 pieds au-dessus du sol lorsque l’aéronef se trouve à 2,4 milles marins de la rive (Source : BST)
Vue simulée de la rive depuis le poste de pilotage à 330 pieds au-dessus du sol et 50 pieds au-dessus du sol lorsque l’aéronef se trouve à 2,4 milles marins de la rive (Source : BST)

La nature insidieuse de la lumière plate pourrait expliquer la raison pour laquelle le pilote a conservé la forte impression qu’il était en vol de croisière à environ 500 pieds AGL, lorsque soudainement, il a ressenti une décélération longitudinale rapide, entendu les moteurs s’emballer et a été désorienté par la perception de rotation vers la gauche, désorientation qu’il a ressentie jusqu’à ce que l’aéronef s’immobilise sur son côté gauche.

Les principaux débris sur le lieu de l’accident étaient dispersés sur une distance approximative de 260 pieds, suivant une traînée en ligne droite qui correspondait à la direction de vol indiquée par le système de suivi des vols. Seuls les rotors avaient été projetés à l’écart de la traînée de débris après qu’une pale du rotor principal a sectionné la poutre de queue et causé la séparation du mât du rotor principal de la transmission. Cette distribution des débris correspond à celle qui se serait produite sous l’effet de l’énergie cinétique et l’inertie gyroscopique des rotors au moment d’un accident. La séparation des 2 rotors aurait provoqué un emballement des moteurs, ceux-ci devenant libres de toute contrainte. Cet emballement des moteurs concorde avec le bruit qu’a entendu le pilote. La dispersion linéaire des débris semble indiquer une vitesse et une composante horizontale importantes au moment de l’impact.

Une trace nette de patin, observée à l’arrivée des premiers intervenants à environ 230 pieds de l’épave, correspond au point d’impact près des premiers débris au sol. Cependant, cette trace n’était plus visible à l’arrivée des enquêteurs du BST, et il n’a pas été possible d’effectuer des mesures précises pour confirmer l’orientation de la trace rapportée comme étant plus à gauche que l’orientation de la traînée de débris.

Selon le rapport d’ingénierie sur l’analyse de l’impact du laboratoire du BST, d’un point de vue de la structure, le sectionnement de la poutre de queue à la hauteur du stabilisateur horizontal par l’une des pales du rotor principal et les déformations observées sur le fuselage et sur le train d’atterrissage se sont produits au moment où l’aéronef a percuté fortement la surface gelée du lac à l’endroit, le patin de gauche ayant heurté la surface avant le patin de droite lors de la séquence de l'écrasement. De plus, la défaillance des attaches du train d'atterrissage, les rayures, les bosses et la fente relevées sur la partie inférieure du fuselage indiquent que l’aéronef se déplaçait latéralement sur la gauche au moment où il a percuté la surface du lac. Rien n’indique qu’une forte rotation était présente au moment de l’impact.

Même si l’analyse d’impact conclut que ces dommages sont survenus au cours d’un déplacement latéral, il est possible qu’un autre impact se soit produit antérieurement, mais que celui-ci n’ait pas causé de dommages.

Le pilote, quant à lui, a initialement ressenti une forte décélération longitudinale qui ne correspond pas à ce qu’il aurait ressenti quand l’hélicoptère a percuté la surface gelée du lac fortement avec un déplacement latéral sur la gauche. Ainsi, il est possible qu’un impact plus léger soit survenu avant l’impact causant les dommages. Cependant, puisqu’aucune trace d’impact au sol n’était visible lorsque les enquêteurs du BST ont effectué l’examen du site, il n’a pas été possible de déterminer avec certitude à quel moment l’hélicoptère a percuté la surface gelée du lac.

En considérant l’événement dans son ensemble, il ressort que plusieurs des éléments recueillis ont un degré de certitude élevé, comme la présence d’une condition de lumière plate, l’étendue et la disposition linéaire des débris, ainsi que la forte impression du pilote qu’il était en vol en croisière lorsque la forte décélération longitudinale s’est produite. Par ailleurs, aucune indication d’anomalie mécanique préexistante n’était présente. Par conséquent, il a été déterminé que le scénario le plus probable est celui selon lequel une descente imprévue était survenue à l’insu du pilote au moment où l’hélicoptère survolait le lac et que cette descente imprévue s’était soldée par un accident lié à un CFIT.

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

En raison d’une réduction importante des indices visuels fiables au sol, une descente imprévue est survenue à l’insu du pilote et l’hélicoptère a percuté la surface gelée du lac. Il est hautement probable que l’hélicoptère était sous contrôle à ce moment-là.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

  1. Même si la visibilité était de 25 milles terrestres, la lumière plate faisait en sorte que les ombres et le contraste sur la surface enneigée du lac étaient masqués, ce qui a réduit les indices visuels nécessaires à la perception de la profondeur et aussi à la vision en 3 dimensions.
  2. Les connaissances et la formation du pilote ne lui ont pas permis de reconnaître les risques associés au manque de contraste dû à la lumière plate, pendant qu’il était en vol de croisière et que la bonne visibilité lui permettait de voir la rive au loin.
  3. Compte tenu des contraintes opérationnelles liées à la vitesse et à la lumière du jour restante, et du fait que l’aéronef avait une double motorisation, le pilote, qui distinguait la rive au loin, a bifurqué vers la droite pour se placer sur une trajectoire plus directe vers sa destination, s’éloignant latéralement de la rive.
  4. Même si la rive au loin était visible, l’éloignement latéral par rapport à la rive a provoqué, une fois les îles franchies et à l’insu du pilote, une réduction importante des indices visuels fiables au sol lui permettant d’apprécier et de maintenir sa hauteur visuellement au-dessus de la surface enneigée du lac.
  5. En raison d’une réduction importante des indices visuels fiables au sol, une descente imprévue est survenue à l’insu du pilote et l’hélicoptère a percuté la surface gelée du lac. Il est hautement probable que l’hélicoptère était sous contrôle à ce moment-là.

3.2 Faits établis quant aux risques

Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements.  

  1. Si les documents de référence fournis par Transports Canada ne font pas de distinction claire entre le phénomène de lumière plate et celui de voile blanc, les pilotes risquent de ne pas différencier les risques spécifiques associées à chacun de ces dangers.
  2. Si les exploitants aériens qui exploitent des aéronefs selon les règles de vol à vue ne prennent pas des mesures proactives afin d’offrir des formations spécifiques sur la lumière plate ou sur l’utilisation de la technologie embarquée visant à améliorer la conscience de la situation, les pilotes pourraient se retrouver dans des conditions de lumière plate sans le savoir, ce qui augmenterait le risque d’impact sans perte de contrôle.

3.3 Autres faits établis

Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.

  1. Le port du casque de vol et le port de la ceinture-baudrier à 4 points d’attache ont contribué à réduire la gravité des blessures du pilote, qui a pu s’extirper de l’aéronef et appeler le répartiteur pour obtenir de l’aide rapidement.

Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

Le Bureau n’est pas au courant de mesures de sécurité prises à la suite de l’événement à l’étude.

Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .

Annexes

Annexe A – Enquêtes du BST ayant fait ressortir la présence de conditions reconnues comme pouvant nuire à la perception spatiale des pilotes

Numéro de l’événement Date Renseignements de base sur l’événement Emplacement
A19P0176 2019-12-10 Perte de maîtrise et collision avec le relief

Piper Aerostar PA-60-602P, C-FQYW

Île Gabriola (Colombie-Britannique)
A19O0178 2019-11-27 Perte de maîtrise et collision avec le relief

Piper PA-32-260, N50DK

Aéroport de Kingston (Ontario), 3,5 NM N
A19Q0153 2019-09-04 Perte de maîtrise et collision avec le relief de nuit

Cargair ltée

Cessna 172M, C-GSEN

Racine (Québec)
A19W0105 2019-08-06 Impact sans perte de contrôle

Alkan Air Ltd.

Cessna 208B Grand Caravan, C-FSKF

Mayo (Yukon), 25 NM ENE
A19Q0128 2019-07-29 Perte de maîtrise et collision avec le relief

Beechcraft Bonanza V35B, N3804X

Senneterre (Québec), 7 NM NE
A19P0112 2019-07-26 Impact sans perte de contrôle

Seair Seaplanes

Cessna 208 Caravan, C-GURL

Île Addenbroke (Colombie-Britannique)
A19Q0091 2019-06-18 Perte de maîtrise au décollage et impact avec le sol

Cargair ltée

Piper PA-23-250 Aztec, C-GDUL

Aéroport de Trois-Rivières (Québec)
A19A0025 2019-05-01 Impact sans perte de contrôle

Piper PA-46-350P, N757NY

Aéroport de Makkovik (Terre-Neuve-et-Labrador), 35 NM SE
A19O0026 2019-03-04 Collision avec le relief

Robinson Helicopter Company R66 (hélicoptère), C-GAUA

Aéroport de Timmins (Victor M. Power) (Ontario), 18 NM WNW
A19C0016 2019-03-04 Impact sans perte de contrôle

Amik Aviation Ltd.

Cessna 208B Caravan, C-FAFV

Aéroport de Little Grand Rapids (Manitoba), 0,75 NM S
A18Q0186 2018-11-19 Collision avec le relief

Eurocopter EC120B (hélicoptère), C-FSII

Sainte-Agathe-des-Monts (Québec), 5 NM W
A18O0134 2018-09-25 Impact sans perte de contrôle

Essential Helicopters

Robinson R44 Raven II (hélicoptère),

C-GMCT

Aéroport municipal de Toronto/Buttonville (Ontario), 9 NM N
A18P0090 2018-06-28 Vol selon les règles de vol à vue dans des conditions météorologiques qui se dégradent et collision avec le relief

Cessna 182P, C-GKKU

Hope (Colombie-Britannique), 19 NM NE
A18Q0016 2018-02-02 Collision avec le sol pendant la nuit

Robinson R44 Raven I (hélicoptère),

C-GYMG

Saint-Joachim-de-Courval (Québec)
A17C0147 2017-12-16 Collision avec le relief

Piper PA-23-250 Aztec, C-FIPK

Baldur (Manitoba), 5 NM E
A17P0170 2017-11-26 Vol selon les règles de vol à vue dans des conditions météorologiques qui se dégradent et collision avec le relief

Mooney M20D, C-FESN

Revelstoke (Colombie-Britannique), 26 NM NE
A17O0209 2017-09-21 Collision avec un plan d’eau

Cessna 150J, C-FHPU

Goderich (Ontario)
A16P0186 2016-10-13 Perte de maîtrise et collision avec le relief

Norjet Inc.

Cessna Citation 500, C-GTNG

Aéroport de Kelowna (Colombie-Britannique), 4,5 NM NE
A16P0180 2016-10-10 Perte de maîtrise et collision avec le relief

de Havilland DHC-2 (Beaver), C-GEWG

Lac Laidman

(Colombie-Britannique), 11 NM E

A15O0188 2015-11-09 Collision avec le relief

Cessna 182H, C-GKNZ

Aéroport municipal de la région de Parry Sound (Ontario)
A15C0130 2015-09-08 Collision avec le relief

Apex Helicopters Inc.

Robinson R44, C-GZFX

Foleyet (Ontario), 17 NM S
A14O0217 2014-11-11 Collision avec le relief

Flyblocktime Incorporated

Cessna 150M, C-GJAO

Whitney (Ontario), 8 NM S
A14A0067 2014-08-16 Collision avec le relief

Manan Air Services (sous le nom Atlantic Charters)

Piper PA-31 Navajo, C-GKWE

Grand Manan (Nouveau-Brunswick)
A13H0002 2013-09-09 Collision avec un plan d’eau

Gouvernement du Canada, ministère des Transports

MBB BO 105 S CDN-BS-4 (hélicoptère),

C-GCFU

Détroit de M’Clure (Territoires du Nord-Ouest)
A13P0166 2013-08-16 Impact sans perte de contrôle

Air Nootka Ltd.

de Havilland DHC-2 (hydravion), C-GPVB

Hesquiat Lake (Colombie-Britannique), 3NM W
A13C0073 2013-07-01 Collision avec un plan d'eau

Custom Helicopters Ltd.

Bell 206B (hélicoptère), C GQQT

Lac Gull (Manitoba)
A13H0001 2013-05-31 Impact sans perte de contrôle

7506406 Canada Inc.

Sikorsky S-76A (hélicoptère), C-GIMY

Moosonee (Ontario)
A13C0014 2013-02-10 Poursuite du vol à vue dans des

conditions météorologiques de vol aux instruments - Collision avec le relief

Cessna 210C, C-FWUX

Waskada (Manitoba), 3 NM N
A13F0011 2013-01-23 Impact sans perte de contrôle

Kenn Borek Air Ltd.

de Havilland DHC-6-300 Twin Otter, C-GKBC

Mont Elizabeth (Antarctique)
A12C0141 2012-10-16 Collision avec le relief

Aerofab Inc.

Lake 250, C-GZLC

Pickle Lake (Ontario)
A12C0084 2012-07-04 Impact sans perte de contrôle

Sunrise Helicopters Inc.

Bell 206B (hélicoptère), C-GUIK

Angusville (Manitoba), 6 NM SW
A12P0079 2012-06-01 Perte des repères visuels et collision avec le relief

Bailey Helicopters Ltd.

Eurocopter AS350-B2 (hélicoptère),

C-FBHN

Terrace (Colombie-Britannique), 14 NM W
A12P0070 2012-05-13 Impact sans perte de contrôle

de Havilland DHC-2 MK 1 (Beaver) (hydravion), C-GCZA

Peachland (Colombie-Britannique), 10 NM W
A12W0031 2012-03-30 Perte de maîtrise et collision avec le relief

Kananaskis Mountain Helicopters Ltd.

Bell 206B JetRanger (hélicoptère), C-GLQI

Loder Peak (Alberta), 0,4 NM NW
A11W0180 2011-11-30 Impact sans perte de contrôle

Trek Aerial Surveys

Cessna 185E, C–FXJN

Fort St. John (Colombie–Britannique), 12 NM E
A11W0152 2011-10-05 Poursuite du vol à vue dans des conditions météorologiques de vol aux instruments et collision avec le relief

Rotorworks Inc.

Bell 206B (hélicoptère), C-FHTT

Aéroport industriel de Drayton Valley (Alberta), 1 NM S
A11W0151 2011-10-04 Impact sans perte de contrôle

Air Tindi Ltd.

Cessna 208B Caravan, C-GATV

Lutsel K'e (Territoires du Nord-Ouest), 26 NM W
A11Q0168 2011-08-27 Collision avec le sol à la suite d'un décollage de nuit

Robinson R44 Raven II (hélicoptère),

C-GEBY

Saint-Ferdinand (Québec)
A11C0100 2011-06-30 Collision au sol

Lawrence Bay Airways Ltd.

de Havilland DHC-2, C-GUJX

Buss Lakes (Saskatchewan), 2 NM SE
A11W0070 2011-05-20 Perte de contrôle – Impact avec un plan d'eau

Campbell Helicopters Ltd.

Bell 212 (hélicoptère), C–FJUR

Slave Lake (Alberta), 12 NM W
A10A0122 2010-12-14 Impact sans perte de contrôle

Aero Peninsule Ltee (sous le nom Air Optima)

Cessna 310R, C-GABL

Pokemouche (Nouveau-Brunswick), 5,5 NM WNW
A10Q0148 2010-09-01 Perte des références visuelles et collision avec des arbres

Hélicoptères Canadiens Limitée

Eurocopter AS350 B-2 (hélicoptère),

C-GHVD

Chibougamau (Québec), 12 NM NW
A10Q0132 2010-08-17 Perte de repères visuels au sol, perte de la maîtrise de l'appareil et collision avec le relief

Héli-Excel Inc.

Eurocopter AS350-BA (hélicoptère), C-GIYR

Sept-Îles (Québec), 22 NM N
A10Q0133 2010-08-16 Écrasement en mer

Universal Helicopters Newfoundland Limited de Bell 206L (hélicoptère), C-GVYM

Clyde River (Nunavut), 40 NM NW
A10A0085 2010-08-05 Impact avec un plan d'eau

Cessna 414A, C-GENG

Sydney (Nouvelle-Écosse), 13 NM ENE
A10P0244 2010-07-31 Collision avec le relief

Conair Group Inc.

Convair 580, C–FKFY

Lytton (Colombie–Britannique), 9 NM SE
A10Q0111 2010-07-16 Impact sans perte de contrôle en croisière

Air Saguenay (1980) Inc.

de Havilland DHC-2, C-GAXL

Lac Péribonka (Québec), 12 NM WSW
A10A0056 2010-05-26 Impact sans perte de contrôle

North Wind Aviation Ltd.

Piper Navajo PA31-350, C-FZSD

Cartwright (Terre-Neuve et Labrador), 60 NM W