Champion 7GCB, C-FPTR
Immatriculation privée
et
Cessna 172M, C-GEDC
Immatriculation privée
Aérodrome municipal d'Arnprior/South Renfrew (Ontario), 12 NM ENE
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Déroulement des vols
Le 14 juin 2020, vers 14 h 05Note de bas de page 1, un aéronef Champion 7GCB sous immatriculation privée (immatriculation C-FPTR, numéro de série 149), muni de flotteurs, a quitté le lac Golden (Ontario) pour un vol de jour selon les règles de vol à vue (VFR) en direction de l’hydroaérodrome du lac Constance (CNQ5) (Ontario). Le pilote était seul à bord.
Après le départ, l’aéronef a atteint une altitude de 2600 pieds au-dessus du niveau de la mer (ASL) et a suivi une trajectoire directe vers la région de Braeside (Ontario), le long de la rivière des Outaouais, à environ 3,5 milles marins (NM) au nord-ouest de l’aérodrome municipal d’Arnprior/South Renfrew (CNP3) (Ontario). Le pilote était à l’écoute de la fréquence en route (126,7 MHz) et a transmis un compte rendu de position en survolant la ville de Renfrew (Ontario). Alors que le Champion approchait de Braeside, le pilote a syntonisé la fréquence de trafic d’aérodrome de CNP3 (122,7 MHz) et a signalé son intention de rester le long de la rive ontarienne de la rivière des Outaouais en direction de CNQ5.
À l’approche des chutes des Chats sur la rivière des Outaouais, le pilote a amorcé une descente à 1500 pieds ASL. Sur la fréquence 122,7 MHz, il a signalé qu’il quittait la zone de CNP3 et a ensuite syntonisé une fréquence de zone d’entraînementNote de bas de page 2 (123,35 MHz). Le pilote a transmis un compte rendu de position en survolant l’île Mohr du côté ontarien de la rivière des Outaouais.
Le Champion suivait un cap d’environ 085° vrais, à 1500 pieds ASL.
Vers 14 h 35, un aéronef Cessna 172M sous immatriculation privée (immatriculation C-GEDC, numéro de série 172-65285) a décollé de CNP3, avec le pilote et 3 passagers à bord, pour un vol VFR de jour à l’est de la région de Constance Bay.
Après son départ de CNP3, le Cessna a atteint une altitude de 1500 pieds ASL. Le pilote était à l’écoute de la fréquence de trafic d’aérodrome de CNP3 (122,7 MHz) sur quelque 5 NM avant de syntoniser la fréquence de la zone d’entraînement (123,35 MHz) et de signaler la position de l’aéronef ainsi que ses intentions de vol. Le Cessna a maintenu une altitude de 1500 pieds ASL, soit environ 1000 pieds au-dessus du sol (AGL).
Après avoir effectué quelques tours à des fins touristiques au-dessus d’une région située tout juste à l’est de Fitzroy Harbour, le Cessna suivait un cap d’environ 050° vrais, parallèle à la route Galetta Side Road, en direction de Buckham’s Bay (Ontario), sur la rivière des Outaouais. L’aéronef a maintenu une altitude de 1500 pieds ASL.
Vers 14 h 46, les 2 aéronefs sont entrés en collision alors qu’ils survolaient la rivière des Outaouais près de Buckham’s Bay, à quelque 12 NM à l’est-nord-est de CNP3 (figure 1).
Le Champion a subi des dommages à l’empennage, a amorcé un virage en descente vers la gauche, a percuté la surface de l’eau et s’est renversé. Le pilote est sorti de l’aéronef et a été secouru par des plaisanciers qui se trouvaient à proximité. Le pilote a subi des blessures légères.
Le Cessna a subi des dommages à l’hélice, au carénage de roue avant et au capot moteur. Le pilote du Cessna a vu le Champion percuter la surface de l’eau. Il a effectué quelques tours pour confirmer que le pilote du Champion avait été secouru, et a émis un signal de détresse Mayday. Il est ensuite retourné à CNP3 et a atterri sans autre incident.
Renseignements sur les pilotes
Les dossiers indiquent que les 2 pilotes possédaient les certifications et les qualifications requises pour effectuer les vols conformément à la réglementation en vigueur.
Le pilote du Champion détenait une licence de pilote privé et était titulaire d’un certificat médical valide de catégorie 3. Il avait accumulé environ 1195 heures de vol au total à bord d’avions. Selon son carnet personnel, au cours des 365 jours précédant l’accident, le pilote avait accumulé 20,7 heures de vol.
Le pilote du Cessna détenait une licence de pilote privé et était titulaire d’un certificat médical valide de catégorie 3. Il avait accumulé environ 6247 heures de vol au total à bord d’avions. Selon son carnet personnel, au cours des 365 jours précédant l’accident, le pilote avait accumulé 44,2 heures de vol.
Renseignements météorologiques
Les conditions météorologiques au moment et à l’emplacement de l’accident étaient propices au vol VFR, et elles ne sont pas considérées comme un facteur contributif dans cet événement.
Renseignements sur les aéronefs
Le Champion 7GCB est un avion monomoteur à 2 sièges en tandem fabriqué par la Champion Aircraft Company. Le Champion dans l’événement à l’étude a été construit en 1962. Le pilote du Champion avait, dans le poste de pilotage, un traceur SPOT, soit un dispositif portatif de messagerie par GPS (système de positionnement mondial), qui suivait son aéronef à des fins de suivi des vols. Le BST a pu utiliser ces données GPS pour confirmer la position de l’aéronef avant la collision.
Le Cessna 172M est un avion monomoteur à 4 places fabriqué par la Cessna Aircraft Company. Le Cessna dans l’événement à l’étude a été construit en 1975. Le pilote du Cessna avait en sa possession une tablette pouvant servir de GPS (application ForeFlight). Même si la tablette était à bord de l’aéronef, le pilote ne l’utilisait pas pendant le vol à l’étude.
Les dossiers indiquent que les 2 aéronefs étaient certifiés, équipés et entretenus conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.
Renseignements sur la collision et sur l’épave
Les dommages subis par les 2 aéronefs correspondent à l’angle de la collision et à la direction du vol et aux trajectoires convergentes.
Dommages subis par le Champion
Au cours de la séquence de collision, une hélice du Cessna a heurté le dessus de l’aile droite du Champion : le Champion a subi un coup près de l’extrémité de l’aile, le long du bord de fuite de l’aile, et un autre sur l’aileron droit. L’empennage a subi des dommages considérables au cours de la collision (figure 2). Les dommages ont fait perdre au pilote la capacité de maîtriser l’aéronef à l’aide des ailerons, du stabilisateur horizontal ou de la gouverne de direction. Il a toutefois pu contrôler l’assiette de l’aéronef en utilisant la puissance du moteur. L’augmentation de la puissance du moteur permet d’adopter une position d’assiette en cabré, tandis qu’une diminution de la puissance engendre une assiette en piqué.
Dommages subis par le Cessna
Les dommages causés au Cessna ont consisté en quelques stries et marques de peinture sur les deux pales de l’hélice, en dommages au carénage de roue avant et en quelques dommages au capot moteur gauche et à la partie inférieure gauche du fuselage, immédiatement derrière la cloison pare-feu (figure 3). Les dommages n’ont entraîné aucun problème de maîtrise de l’aéronef par le pilote.
Radiobalise de repérage d’urgence
La radiobalise de repérage d’urgence de 406 MHz à bord du Champion s’est déclenchée au moment de la collision, et le signal a été reçu par le Centre canadien de contrôle des missions, à la base des Forces canadiennes à Trenton (Ontario).
La radiobalise de repérage d’urgence à bord du Cessna ne s’est pas déclenchée.
Procédures en route concernant l’espace aérien et la radio
La collision s’est produite dans un espace aérien non contrôlé de classe G « [...] à l’intérieur duquel l’ATC [contrôle du trafic aérien] n’a pas l’autorité ni la responsabilité de contrôler la circulation aérienneNote de bas de page 3 ». Le Manuel d’information aéronautique de Transports Canada stipule que
[l]es pilotes en vol VFR en route dans l’espace aérien non contrôlé ou en vol VFR sur une voie aérienne devraient être continuellement à l’écoute de la fréquence 126,7 MHz lorsqu’ils ne communiquent pas sur la MF [fréquence obligatoire] ou l’ATF [fréquence de trafic d’aérodrome], et devraient, dans la mesure du possible, diffuser leurs identifications, position, altitude et intentions sur cette même fréquence pour avertir les autres aéronefs en vol VFR ou IFR [règles de vol aux instruments] qui peuvent se trouver dans les parages. Bien qu’en vols VFR ou VFR-OTT [au-dessus de la couche] l’écoute de la fréquence 126,7 MHz et la diffusion de comptes rendus ne soient pas obligatoires, les pilotes sont encouragés à les pratiquer pour leur propre protectionNote de bas de page 4.
Dans la région de contrôle terminal d’Ottawa, le secteur où la collision s’est produite est désigné comme étant une zone d’entraînement en deçà de 4000 pieds d’altitude. La carte de procédures terminale VFRNote de bas de page 5 de la région de contrôle terminal d’Ottawa indique que les aéronefs d’entraînement doivent être à l’écoute de la fréquence 123,35 MHz lorsqu’ils sont dans cette zone, sous 4000 pieds ASL.
Les deux pilotes connaissaient bien la région et ont indiqué avoir transmis un compte rendu de position sur la fréquence 123,35 MHz en entrant dans la zone d’entraînement désignée. Toutefois, aucun des pilotes ne se souvient d’avoir entendu des émissions radio concernant d’autres aéronefs à proximité.
Possibilités de survie
Formation sur l’évacuation subaquatique
La formation sur l’évacuation permet aux pilotes d’hydravion d’acquérir des connaissances et des techniques susceptibles de leur sauver la vie en cas de situation nécessitant une évacuation subaquatique. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une exigence réglementaire, le pilote du Champion avait suivi une formation sur l’évacuation subaquatique et il a fait appel à ses connaissances issues de cette formation pour sortir de son hydravion renversé et partiellement submergé.
Vêtements de flottaison individuels
Bien qu’il ne s’agisse pas d’une exigence réglementaire, le pilote du Champion portait un vêtement de flottaison individuel au moment de la collision. Il a estimé qu’il n’était pas nécessaire de gonfler le vêtement de flottaison après être sorti de l’aéronef, étant donné la proximité des plaisanciers qui se sont portés à son secours.
Surveillance visuelle
Comme l’indique le Manuel d’information aéronautique de Transports Canada,
[l]es pilotes qui évoluent en VFR ou en IFR dans des conditions VMC [conditions météorologiques de vol à vue] ont l’entière responsabilité de voir et d’éviter les autres aéronefs. Il est nécessaire de combiner la surveillance visuelle et l’écoute des fréquences afin d’accroître la sécurité des vols dans le voisinage des aérodromes non contrôlésNote de bas de page 6.
Le principe « voir et éviter » constitue la méthode de base d’évitement des collisions en vol VFR, méthode fondée sur un balayage visuel actif de même que sur la capacité de détecter des aéronefs en conflit et de prendre les mesures qui s’imposent pour les éviter. La méthode a été examinée dans le cadre d’un certain nombre d’autres enquêtes du BSTNote de bas de page 7, et le BST a déterminé qu’« [é]tant donné ses limites, le principe voir et éviter ne doit pas être le seul moyen utilisé pour prévenir les collisions d’aéronefs qui volent selon les règles de vol à vueNote de bas de page 8 ».
D’après la circulaire d’information AC 90-48D publiée par la Federal Aviation Administration des États-Unis [traduction] : « Les pilotes doivent toujours être attentifs à la circulation aérienne dans leur champ de vision, et périodiquement balayer du regard l’espace visible en dehors de leur aéronef pour s’assurer de détecter tout aéronef en conflitNote de bas de page 9 ». La méthode la plus efficace pour percevoir les conflits potentiels consiste à balayer rapidement l’espace visible en petites sections à la fois (de 10° à 15° de large) pour détecter des mouvementsNote de bas de page 10.
Comme les 2 aéronefs sont à aile haute, la visibilité aurait donc été semblable, sans obstruction évidente.
Absence de mouvement relatif sur la trajectoire de collision
Dans son rapport sur les limites du principe voir et éviter, l’Australian Transport Safety Bureau a fourni les explications suivantes [traduction] :
L’œil humain est particulièrement sensible à la détection des mouvements, mais il est moins efficace pour détecter les objets stationnaires. Malheureusement, en raison de la géométrie des trajectoires de collision, un aéronef qui suit une trajectoire de collision apparaît habituellement comme un objet stationnaire dans le champ visuel du pilote.
Si deux aéronefs convergent vers un point d’impact sur des trajectoires de vol droites à des vitesses constantes, l’orientation de chaque aéronef par rapport à l’autre demeure constante jusqu’au point de collision [...].
Du point de vue de chaque pilote, l’aéronef qui converge devient plus gros, tout en restant fixe à un point particulier du pare-briseNote de bas de page 11.
Temps nécessaire pour cerner la menace et prendre des mesures d’évitement
Événement | Secondes |
---|---|
Voir l’objet | 0,1 |
Reconnaître l’aéronef | 1,0 |
Prendre conscience de la trajectoire de collision | 5,0 |
Décision de tourner à gauche ou à droite | 4,0 |
Réaction musculaire | 0,4 |
Temps de réaction de l’aéronef | 2,0 |
TOTAL | 12,5 |
L’AC 90-48DNote de bas de page 12 de la Federal Aviation Administration des États-Unis fournit des données (tableau 1) concernant l’attention portée aux déplacements du trafic et au temps de réaction à l’égard de celui-ci. L’AC déclare entre autres ce qui suit [traduction] :
Des recherches ont démontré que le temps de réaction d’une personne moyenne est de 12,5 secondes. Cela signifie qu’un petit objet ou un objet se déplaçant à grande vitesse pourrait constituer une menace grave si des moyens de détection autres que voir et éviter ne sont pas utilisés, puisque le temps de réaction serait beaucoup trop élevé pour réagir afin d’éviter une collision.
Cependant, dans son rapport sur les limites du principe voir et éviter, l’Australian Transport Safety Bureau a émis la mise en garde suivante [traduction] :
Ainsi, pour que les pilotes aient une bonne chance d’éviter une collision, ils doivent pouvoir repérer un aéronef en conflit au moins 12,5 secondes avant le moment de l’impact. Cependant, comme les temps de réaction varient d’une personne à une autre, dans le cas de pilotes plus âgés ou moins expérimentés, ce délai sera probablement supérieur à 12,5 secondesNote de bas de page 13.
Systèmes anticollision
Le Champion et le Cessna étaient tous deux munis de transpondeurs mode C. Ni l’un ni l’autre des aéronefs n’était muni d’un système anticollision embarqué, quel qu’il soit, et la réglementation n’exigeait pas qu’ils le soient.
Les technologies d’évitement des collisions continuent de se perfectionner et un certain nombre de dispositifs sont offerts pour les aéronefs de l’aviation générale afin d’améliorer les mesures de protection contre les collisions en vol. Ces dispositifs comprennent notamment :
- les alarmes de vol de marque FLARM ou PowerFLARMNote de bas de page 14;
- les émetteurs-récepteurs du système de surveillance dépendante automatique en mode diffusion;
- les systèmes d’avis de trafic;
- les dispositifs anticollision portables.
Messages de sécurité
Les 2 aéronefs à l’étude étaient en vol VFR dans un espace aérien non contrôlé. Aucun des pilotes n’a aperçu l’autre aéronef avant la collision en vol, en partie à cause des limites inhérentes au principe voir et éviter. Se fier uniquement à la détection visuelle augmente le risque de collision dans un espace aérien non contrôlé. On encourage fortement les pilotes à transmettre leurs intentions et à demeurer à l’écoute pendant qu’ils se trouvent dans un espace aérien non contrôlé, conformément aux procédures de communication VFR de Transports Canada, même s’ils ne sont pas tenus de le faire.
Plusieurs systèmes d’évitement de collisions sont actuellement offerts, et certains sont conçus tout particulièrement pour le marché de l’aviation générale. Ces technologies pourraient considérablement réduire les risques de collision en vol.
Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .