Perte de maîtrise et collision avec le relief
du MDHI 369D C-GNMG
exploité par Sahtu Helicopters
au lac Doctor (Territoires du Nord-Ouest)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Un hélicoptère MDHI 369D (portant l'immatriculation C-GNMG et le numéro de série 300693D) exploité par Sahtu Helicopters transporte du personnel près du lac Doctor (Territoires du Nord-Ouest) lorsqu'il amorce une rotation intempestive et, à 8 h 20, heure avancée des Rocheuses, s'écrase. Il subit des dommages importants dus aux forces d'impact et à un incendie après impact. Le pilote subit des blessures graves, l'un des deux passagers subit des blessures mortelles et l'autre, des blessures légères.
Renseignements de base
D'après les dossiers, l'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. L'hélicoptère ne comportait aucune défaillance connue avant le vol en question dans cet accident. Au moment de l'accident, on a estimé que la masse de l'hélicoptère était de 2380 livres, ce qui est inférieure de 600 livres à la masse brute maximale permise, et le centrage se trouvait dans les limites prescrites. Il y avait à bord de l'hélicoptère une quantité suffisante de carburant pour effectuer le vol.
À 9 h, heure avancée des RocheusesFootnote 1, les conditions météorologiques qui prévalaient à Norman Wells (à 35 milles marins au sud-ouest) étaient les suivantes : vent du 140° vrai soufflant à 8 nœuds, quelques nuages à 700 pieds au-dessus du niveau du sol (agl) et visibilité de 30 milles terrestres. Sur les lieux de l'accident, de bonnes conditions météorologiques de vol à vue prévalaient; on a signalé un vent constant soufflant à 5 nœuds avec, à l'occasion, des rafales du sud-sud-est atteignant 10 nœuds.
Le pilote était titulaire d'une licence valide de pilote professionnel d'hélicoptère, il avait terminé le programme de formation sur le 369D de l'exploitant et il avait subi un contrôle de compétence pilote en avril 2008. Il totalisait quelque six heures de vol sur le type d'hélicoptère en question. Il totalisait quelque 820 heures d'expérience aux commandes d'hélicoptères, dont la majeure partie sur des Bell 206. Il avait été en service pendant 14 heures au cours des 24 heures qui avaient précédé et il avait piloté pendant 4,5 heures. Son quart de travail avait commencé à 6 h 30; la veille et il avait pris fin à 20 h 30.
L'hélicoptère avait décollé du camp de base, à la recherche d'un plan d'approvisionnement en eau pour un nouveau site d'opérations de forage situé à quelque 35 milles marins. Le pilote était arrivé sur le site et il volait en stationnaire face au vent, à quelque 300 pieds agl, pour déterminer le meilleur sentier entre le plan d'eau et la plate-forme d'atterrissage. C'était maintenant fait, et il était en train de descendre en volant latéralement en stationnaire vers la gauche, face au vent, vers une plate-forme d'atterrissage. Lorsque l'hélicoptère s'est trouvé à quelque 75 pieds agl, il y a eu rotation intempestive vers la droite.
Le pilote a tenté de contrer la rotation en sollicitant la pédale gauche du palonnier et il a également tenté d'atteindre une certaine vitesse vers l'avant, afin de stabiliser l'hélicoptère en girouette et d'en ralentir la rotation. Comme l'hélicoptère n'a pas réagi, le pilote a réduit les gaz, afin de diminuer la puissance, et il a abaissé le collectif. Il s'agit d'une procédure normalisée, à basse vitesse ou en stationnaire, visant à réduire la puissance totale du moteur lors d'une perte de maîtrise du rotor de queue. Ces mesures ont semblé améliorer la situation, mais, lorsque le pilote a augmenté les gaz, la rotation a recommencé. Le pilote a de nouveau réduit la puissance, mais l'hélicoptère a heurté le sol avant que le pilote ne parvienne à en reprendre la maîtrise. On n'a signalé le déclenchement d'aucune alarme sonore ni l'activation d'un voyant d'avertissement de bas régime rotor. Les voyants d'avertissement étaient complètement fondus, ce qui a rendu leur examen impossible.
Sur un hélicoptère, le couple du moteur est appliqué par l'intermédiaire du rotor principal, et il provoque une réaction égale et opposée (rotation ou lacet) sur la cellule. Ce lacet est contrecarré par le rotor de queue, lequel pousse contre les forces de rotation que génère le couple du rotor principal. Le pilote commande l'anticouple du rotor de queue au moyen des pédales du palonnier, lesquelles font varier le pas des pales du rotor de queue. Plus la puissance appliquée au rotor principal est grande, plus le pas du rotor de queue nécessaire pour contrer le couple est grand. Une perte de transmission de rotor de queue en vol stationnaire se traduit par une rotation intempestive rapide de l'hélicoptère dans le sens opposé à la rotation du rotor principal. La perte de transmission de rotor de queue se traduit également par une diminution rapide du régime du rotor de queue, en particulier si on applique le pas maximal au moyen des pédales.
Le passager avant, qui prenait place dans le siège de droite, a extirpé le pilote de l'épave avant que l'incendie n'entoure la cabine. L'autre passager prenait place dans le siège arrière de droite, et il a subi des blessures mortelles dues à l'impact avant que ne se déclare l'incendie après impact.
Sur les lieux de l'accident, des enquêteurs ont découvert que la cellule était relativement intacte, reposant au niveau sur le côté gauche, avec tous ses composants en place. Les pales du rotor principal ne présentaient pas de dommages caractéristiques d'une vitesse de rotation ou d'une puissance élevées au moment de l'impact avec le sol. Le contact des rotors avec un arbre a laissé des traces indiquant qu'il y avait transmission de puissance aux rotors principaux juste avant que l'hélicoptère ne se renverse. Les aubes mobiles du rotor du compresseur du moteur avaient heurté les surfaces extérieures en plastique et elles présentaient de légères déformations.
L'hélicoptère s'est posé avec une dérive latérale vers la gauche. La structure de soutien du train d'atterrissage gauche a perforé le réservoir carburant et la zone du réservoir carburant souple. Un incendie après impact a consumé la totalité de la cabine, vers l'avant, à partir de la cloison pare-feu. La transmission principale et la tête du rotor ont subi des dommages causés par la chaleur, mais elles n'ont pas brûlé. Une partie de la chambre d'admission de répartition d'air du moteur a été partiellement brûlée, mais sa forme de base a été conservée. Le boîtier d'entraînement des accessoires moteur a pris feu et il a fait fondre la plupart des connexions non métalliques au moteur et aux capots moteur. Au moment de l'impact, des paramètres du moteur indiquaient que ce dernier fonctionnait, mais à faible régime.
L'empennage n'avait pas brûlé. Rien n'indique que l'arbre d'entraînement du rotor de queue tournait au moment de l'impact. Il y a eu rupture de la poutre de queue, à la référence fuselage 242, et l'arbre d'entraînement ainsi que les tubes des commandes de vol ont été déformés sur quelque 90 degrés à cet endroit, où le revêtement avait subi une rotation dans le sens antihoraire sur 270 degrés. L'arbre d'entraînement ne présentait aucun signe d'effort de torsion, ni à cet endroit ni nulle part ailleurs. Les pales du rotor de queue présentaient des marques d'impact sur les côtés seulement, vers les bords d'attaque et les bords de fuite. Les bords d'attaque ne présentaient aucune marque d'impact. Les parties avant de l'arbre d'entraînement du rotor de queue ainsi que des tubes des commandes de vol étaient complètement fondues à partir de la référence fuselage 137, vers l'avant (voir la photo 1). L'entraînement du rotor de queue et les commandes de vol étaient ininterrompus en avant de ce point d'incendie. On a examiné les commandes du rotor de queue, dans la mesure du possible, et on n'a décelé aucune autre commande déconnectée. Aucun des composants du rotor de queue ne présentait de signe de rupture avant l'impact ni à l'impact. Il n'y avait aucun signe de mouvement désordonné de l'arbre d'entraînement du rotor de queue.
Le laboratoire du BST a déposé de l'épave et examiné le raccord de la partie arrière de l'arbre d'entraînement du rotor de queue, le raccord avant ainsi que des parties endommagées, afin d'établir le mode de défaillance et la présence de toute défaillance antérieure; il n'en a trouvée aucune. Il a également obtenu le même résultat en examinant le raccord K-flex de l'arbre d'entraînement du moteur.
L'inspection/la vérification de l'arbre d'entraînement du rotor de queue figurant à la rubrique 63-15-10 du Manuel de maintenance, révision 20Footnote 2, décrit en détail l'inspection par torsion de l'arbre d'entraînement du rotor de queue seulement à partir du raccord arrière, à la transmission du rotor de queue, en avant de la référence fuselage 137.5. Il n'est pas nécessaire d'inspecter en avant de ce point jusqu'au raccord de l'arbre creux de la sortie de la transmission principale.
On a envoyé quatre instruments au laboratoire du BST afin d'obtenir une confirmation des régimes auxquels tournaient le moteur et le rotor principal au moment de l'impact. Ces instruments étaient les suivants : l'instrument de mesure du régime (N1) du générateur de gaz du moteur, l'indicateur de température tuyère (TOT), le tachymètre mixte de la turbine de travail et du rotor principal ainsi que le couplemètre du moteur. Ce couplemètre indiquait quelque 22 livres au moment de l'impact, ce qui laisse croire que le moteur tournait au ralenti sol ou à un régime à peine supérieur au ralenti sol. En raison des dommages causés par la chaleur, il a été impossible d'obtenir quelque autre renseignement fiable au moyen des autres instruments.
Analyse
Ni la maintenance, ni la navigabilité aérienne de l'hélicoptère, pas plus que les conditions météorologiques, n'ont été considérées comme des facteurs contributifs à cet accident. Des marques d'impact caractéristiques constatées sur le rotor principal et le moteur confirment que ce dernier tournait au moment de l'écrasement. Le moteur n'est donc pas non plus considéré comme un facteur contributif à cet accident.
Au moment où il y a eu rotation intempestive vers la droite, l'hélicoptère volait en stationnaire latéralement vers la gauche. Le vent relatif dépassait l'azimut critiqueFootnote 3, et la rotation a recommencé après que le pilote a eu augmenté la puissance moteur. Il est donc peu probable qu'un effet d'écoulement aérodynamique ait provoqué la rotation.
D'après les dommages qu'a subis l'hélicoptère, le régime du rotor de queue était presque nul au moment de l'impact avec le sol, mais on a décelé des signes de rotation à bas régime du rotor principal. Le moteur générait de la puissance, mais cette dernière n'était pas transmise au rotor de queue. Il est fort probable que l'arbre d'entraînement du rotor de queue se soit rompu au niveau de la partie avant, mais la preuve nécessaire à la confirmation de cette rupture est disparue dans l'incendie après impact. La rupture de l'arbre d'entraînement du rotor de queue s'est traduite par une rotation intempestive de l'hélicoptère autour de l'axe vertical. La réaction de l'hélicoptère aux variations de position des manettes des gaz correspond à celle à laquelle on s'attendrait dans le cas d'une panne d'entraînement du rotor de queue. L'altitude était insuffisante pour permettre un rétablissement avant l'impact avec le sol.
L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :
- LP071/2008 – Tail Rotor Drive Examination (Examen de l'entraînement du rotor de queue)
- LP080/2008 – Aircraft Instrument Examination (Examen des instruments de l'hélicoptère)
On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.
Faits établis
Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs
- Il est probable qu'il y ait eu rupture de l'arbre d'entraînement du rotor de queue, laquelle rupture s'est traduite par une rotation intempestive de l'hélicoptère à une altitude à laquelle un rétablissement a été impossible.
Mesures de sécurité
L'exploitant a lancé un processus spécial d'inspection et de mesure de la partie avant de divers arbres d'entraînement de rotor de queue de ce modèle d'hélicoptère de sa flotte, lequel processus s'ajoute aux exigences relatives aux critères d'inspection figurant dans le Manuel de maintenance.
Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .