Toucher des roues avant la piste
du Bombardier BD-700-1A11 (Global 5000) C-GXPR
exploité par Jetport Inc.
à l'aérodrome de Fox Harbour (Nouvelle-Écosse)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Le 11 novembre 2007, le Bombardier Global 5000 (immatriculé C-GXPR, numéro de série 9211) exploité par Jetport Inc. décolle de Hamilton (Ontario) à destination de Fox Harbour (Nouvelle-Écosse) avec 2 membres d'équipage et 8 passagers à son bord. Vers 14 h 34, heure normale de l'Atlantique, l'avion touche le sol 7 pieds avant le seuil de la piste 33 de l'aérodrome de Fox Harbour. Le train d'atterrissage principal de l'avion est endommagé au contact du bord de piste, et le train d'atterrissage droit s'affaisse, entraînant une perte de maîtrise en direction. L'avion sort par le côté droit de la piste et s'immobilise à 1000 pieds du point de poser initial. Tous les occupants évacuent l'appareil. Un membre d'équipage et un passager sont grièvement blessés; les 8 autres occupants de l'avion sont légèrement blessés. L'avion est lourdement endommagé.
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1.0 Renseignements de base
1.1 Déroulement du vol
Pendant le vol, le commandant de bord est le pilote aux commandes (PF)Footnote 1 en place gauche; le copilote est le pilote non aux commandes (PNF) en place droite. Comme la piste de l'aérodrome de Fox Harbour en Nouvelle-Écosse (CFH4) est une piste courte, le commandant de bord est aux commandes en raison de sa plus grande expérience sur l'avion. La partie en route du vol vers CFH4 se déroule sans problème.
À l'approche de la destination, l'équipage fait l'exposé d'approche et d'atterrissage. Comme il s'attend à une piste mouillée avec un vent de travers, l'équipage a prévu de faire un atterrissage ferme suivi du déploiement des inverseurs de poussée. Le freinage automatique peut être réglé sur basse, moyenne ou haute intensité. Pour le confort des passagers, il est réglé en mode basse intensité. Pour profiter au mieux de la distance de roulage disponible, l'équipage a prévu de toucher des roues dans les 500 premiers pieds de la piste, la même distance qu'il utilise à CFH4 avec d'autres avions de la compagnie (Annexe A – Points de toucher des roues). Le commandant a vérifié la distance d'atterrissage nécessaire et estimé, compte tenu des conditions, qu'il faut 4300 pieds pour immobiliser l'avion sur cette piste de 4885 pieds.
L'équipage exécute la liste de vérifications de descente et reçoit l'autorisation de descente du centre de Moncton (Nouveau-Brunswick) à 14 h 6Footnote 2. Il utilise le pilote automatique avec l'automanette enclenchée pour effectuer une approche RNAV (GNSS)Footnote 3 complète piste 33.
Pendant l'approche, le copilote appuie sept fois sur le bouton de son microphone pour allumer le balisage lumineux d'aérodrome télécommandé (ARCAL)Footnote 4. Ce dispositif allume les feux de seuil de piste, les feux d'extrémité de piste et les feux de bord de piste, ainsi que l'indicateur de trajectoire d'approche de précision simplifié (APAPI).
Le train d'atterrissage est sorti et les volets sélectionnés en position 30°. La vitesse cible du système de gestion de vol (FMS) est réglée sur 118 nœuds, ce qui correspond à une vitesse VrefFootnote 5 de 113 nœuds augmentée de 5 nœuds pour tenir compte des rafales de vent. Avec le pilote automatique enclenché, l'avion maintient le cap et la trajectoire verticale générée par le FMS, avec seulement quelques ajustements aux ailerons et au palonnier pour compenser le vent de travers. Il y a des turbulences à cause du vent, mais l'AT maintient la vitesse avec quelques petites fluctuations.
À 14 h 30 min 53, à 5 milles marins (nm) du seuil de la piste 33, l'aéronef survole le repère d'approche finale (FAF) à une altitude de 1680 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl). À partir de ce point, l'équipage a la piste en vue. À 4,4 nm, il voit l'APAPI. L'avion est alors en configuration d'atterrissage stabilisé sur l'approche et suit le guidage vertical du FMS.
À 14 h 33 min 27 (T-58Footnote 6), à environ 550 pieds au-dessus de l'élévation de la piste et à 1,4 nm du seuil de piste, le PF débraye le pilote automatique et fait l'approche en manuel après un bref palier.
À 14 h 33 min 38 (T-47), à environ 500 pieds au-dessus de l'élévation de la piste et à 1,1 nm du seuil de piste le PNF annonce un écart au-dessus de l'APAPI. Le PF corrige la trajectoire en augmentant le taux de descente de façon à intercepter la pente de descente de l'APAPI (Annexe B – Paramètres d'approche enregistrés par le FDR). Le PNF cesse alors de surveiller l'approche pour se concentrer sur le repérage des animaux sauvages, car la semaine précédente, de nombreux chevreuils ont été observés dans les environs de la piste et sur la piste.
À 14 h 33 min 50 (T-35), à environ 350 pieds au-dessus de l'élévation de la piste et à 0,85 nm du seuil de piste, l'avion intercepte la pente de descente de 3° de l'APAPI. Dès lors, le PF applique la technique d'approche en glissade pour atterrissage vent de travers, en inclinant l'avion à droite et en mettant du pied à gauche pour maintenir la trajectoire. À partir de ce point jusqu'au toucher des roues, le PF utilise les ailerons et le palonnier pour maintenir la trajectoire. Le vent a une composante de face de 28 nœuds et de travers de 18 nœuds.
À 14 h 33 min 57 (T-28), à environ 250 pieds au-dessus de l'élévation de la piste et à 0,7 nm du seuil de piste, la vitesse fluctue entre 105 et 120 nœuds.
À 14 h 34 min 5 (T-20), à environ 180 pieds au-dessus de l'élévation de la piste et à 0,5 nm du seuil de piste, le PF passe en visuel pour voir la piste et évaluer le profil d'atterrissage, mais l'avion descend au-dessous de la trajectoire d'approche de l'APAPI. Il demeure au-dessous de la trajectoire d'approche de l'APAPI sans qu'aucune annonce d'écart de pente ne soit faite.
À 14 h 34 min 15 (T-10), à environ 100 pieds au-dessus de l'élévation de la piste, le vent diminue légèrement et selon les valeurs calculées, il a une composante de face de 26 nœuds et de travers de 12 nœuds.
À 14 h 34 min 20 (T-5), à 830 pieds du seuil de piste, la voix synthétique du radioaltimètre annonce le passage des 50 pieds, qui est l'annonce que le pilote utilise normalement comme signal pour commencer l'arrondi. Le PF cabre progressivement l'avion avec des corrections importantes aux ailerons et au palonnier. Les deux moteurs tournent alors à 50 % de N1Footnote 7 et les valeurs calculées du vent indiquent une composante de face de 21 nœuds et de travers de 8 nœuds.
À 14 h 34 min 21 (T-4), à seulement 680 pieds du seuil de piste, le mode AT (automanette) passe de SPEED (vitesse) à RETARD (ralenti), ce qui ramène automatiquement les manettes de poussée à la position ralenti. À ce stade de l'approche, l'équipage ne se rend pas compte qu'il est sur une trajectoire dangereuse.
À 14 h 34 min 23 (T-2), à 360 pieds du seuil de piste, l'équipage sent que l'avion s'enfonce, et la vitesse diminue à 102 nœuds. La voix synthétique du radioaltimètre annonce le passage des 30 pieds. Le PF tire sur le manche jusqu'à ce que l'avion adopte une assiette en cabré de 10,6°. La poussée des moteurs est à 38 % de N1 et continue à diminuer sans aucune intervention pour l'augmenter.
À 14 h 34 min 25, l'avion touche des roues 7 pieds et 6 pouces avant le seuil de la piste 33 et 18 pouces en contrebas de la piste (Photo 1).
Le train droit s'affaisse au contact du bord de piste. Le choc initial déclenche la radiobalise de repérage d'urgence (ELT) ainsi que le contacteur à inertie de l'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR) qui cesse alors d'enregistrer les échanges entre les pilotes.
L'avion poursuit sa course sur la piste avec l'aile droite traînant au sol. À 640 pieds du point de toucher des roues, l'avion sort par le côté droit de la piste, traverse plusieurs monticules de terre et pivote de 120° à droite avant de s'immobiliser.
Bien que les cartes de consignes de sécurité de l'avion indiquent que les bretelles de sécurité doivent être attachées pour l'atterrissage, aucun des passagers ne les a attachées. De plus, les passagers ne portent pas leurs chaussures, les ayant ôtées après l'embarquement à l'aéroport de Hamilton en Ontario (CYHM).
Pour l'évacuation, le copilote essaie d'ouvrir la porte de la cabine, mais n'y arrive pas parce qu'elle a été endommagée. L'issue de secours située du côté droit de la cabine passagers est ouverte, et tous les occupants évacuent l'appareil. Le copilote a du mal à marcher en raison de blessures au dos et doit être assisté pour s'éloigner de l'appareil.
Tous les occupants se rendent à une maison située à 200 pieds environ du point où l'avion s'est immobilisé, et le copilote appelle la station d'information de vol (FSS) de Halifax (Nouvelle-Écosse) avec son téléphone portable pour signaler que l'avion s'est écrasé à CFH4.
Les services d'urgence de la ville voisine arrivent rapidement sur les lieux. Bilan, il n'y a pas eu d'incendie, mais l'avion a été lourdement endommagé. Un membre d'équipage et un passager ont été grièvement blessés; les huit autres occupants ont subi des blessures légères.
1.2 Renseignements sur l'épave et sur l'impact
1.2.1 Renseignements sur l'impact
Le train droit a touché le sol sur un terrain en pente situé à 18 pouces en contrebas de la piste, et 7 pieds et 6 pouces avant le seuil de piste. Le train d'atterrissage gauche a touché le sol 4 pieds et 10 pouces avant le seuil de piste (Annexe C – Trajectoire au sol de l'avion accidenté). Les traces au sol lors du contact initial indiquent que l'avion a touché le sol 14 pouces à droite de l'axe de piste, dans l'alignement de piste.
Les traces de pneu relevées avant la surface asphaltée de la piste avaient une profondeur de 5 pouces environ. Deux fissures semi-circulaires ont été relevées dans l'asphalte, dans l'axe du point de poser du train droit; ces fissures ont été attribuées à l'impact du train droit avec le bord de piste (Photo 2).
Deux éraflures faites par le carénage du vérin des volets extérieur et central de l'aile droite ont été relevées à 140 pieds du seuil de piste et à 27 et 37 pieds respectivement à droite de l'axe de piste. Une troisième éraflure faite par le carénage du vérin du volet intérieur droit a été relevée à 170 pieds du seuil de piste et à 18 pieds à droite de l'axe de piste, ce qui indique que le train droit était complètement affaissé à ce moment-là.
Les traces de pneu du train gauche traversent l'axe de piste à 457 pieds du seuil. Un feu de bord de piste situé à 600 pieds du seuil a été cassé. Les traces au sol indiquent que le train droit a quitté la piste à 640 pieds du seuil (Photo 3), et le train gauche à 694 pieds du seuil.
Le sol bordant le côté droit de la piste descend légèrement sur environ 20 pieds puis remonte en formant une série de monticules de terre d'une hauteur d'environ 6 à 10 pieds au-dessus du niveau de la piste. Les traces au sol indiquent que l'avion s'est mis à pivoter dans le sens des aiguilles d'une montre à environ 840 pieds du seuil de piste quand l'aile droite a commencé à s'enfoncer dans les monticules de terre.
À 893 pieds du seuil de piste, l'avion avait déjà pivoté de 90° dans le sens des aiguilles d'une montre. À cet endroit, le train avant a percuté le côté d'un conditionneur d'air situé à 89 pieds à droite du bord de piste. L'avion a encore pivoté de 30° vers la droite tout en glissant latéralement. Il a fini sa course avec le nez à 1017 pieds du seuil de piste et à 175 pieds du bord de piste.
1.2.2 Examen de l'épave
L'avion présentait des dommages importants qui ont tous été attribués à l'impact et aux événements qui ont suivi l'impact (Photo 4). La structure du fuselage et les systèmes autour des puits des atterrisseurs principaux présentaient des dommages importants dus à la rupture et au pivotement du train ayant suivi l'impact initial avec le bord de piste.
La plupart des autres dommages relevés sont survenus quand l'avion est sorti de la piste par la droite et a traversé les monticules de terre. La section du nez entre les stations 169 à 288 du fuselage présentait des plis structuraux de 6 à 8 pouces de profondeur. Le longeron auxiliaire de chaque aile et la structure adjacente présentaient des dommages importants dus au détachement du train principal. Les volets présentaient également des dommages importants. Les deux moteurs présentaient des dommages dus à l'ingestion de débris.
La porte de la cabine était voilée vers l'arrière, et les occupants n'ont pas réussi à l'ouvrir pour évacuer l'appareil. Le plancher du poste de pilotage était froissé en plusieurs endroits, et les sièges du commandant et du copilote étaient déformés et coincés dans leurs rails. Certains sièges passagers présentaient des dommages dus pour la plupart aux contraintes latérales attribuables aux événements qui ont suivi l'impact. Des verres qui étaient rangés dans l'office ont été projetés au sol, et des éclats de verre jonchaient le sol. Les dommages à l'aile gauche ont provoqué une légère fuite de carburant qui a été contenue par les premières personnes arrivées sur place.
1.3 Renseignements sur le personnel
1.3.1 Généralités
Commandant de bord | Copilote | |
---|---|---|
Licence | Pilote de ligne | Pilote de ligne |
Date d'expiration du certificat médical | 31 décembre 2007 | 30 avril 2008 |
Heures de vol totales | 9188 | 6426 |
Heures de vol sur type | 64 | 9 |
Heures de vol dans les 90 derniers jours | 88 | 104 |
Heures de vol sur type dans les 90 derniers jours | 64 | 9 |
Heures de service avant l'accident | 6.6 | 6.6 |
Heures libres avant la prise de service | 40 | 65 |
1.3.2 Commandant de bord
Le commandant de bord possède la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Au jour de l'accident, il totalise 9188 heures de vol, dont 3196 heures sur turboréacteurs. Dans son emploi précédent, il a effectué plus de 2500 heures sur Twin Otter DHC-6 en tant que commandant de bord, plus de 1000 heures sur Beechcraft B200 et plus de 1000 heures sur turboréacteur Westwind WW24 comme commandant de bord. Depuis ses débuts à Jetport Inc. (Jetport) le 24 juillet 2000, il a effectué 2196 heures sur Gulfstream G100 et sur Bombardier Challenger 604 (CL604) en tant que commandant de bord.
En juin 2007, il a suivi le cours théorique sur le Global 5000 et la formation sur simulateur de niveau D au Centre de formation de Bombardier Aéronautique à Saint-Laurent (Québec). Le 29 juin 2007, il a subi avec succès un contrôle de compétence pilote (CCP) initial en vertu de la sous-partie 704 du Règlement de l'aviation canadien (RAC) administré par un inspecteur de Transports Canada. Pendant sa formation, il a effectué 42 heures sur un simulateur de niveau D.
Bombardier, en tant que constructeur d'aéronefs, offre les services d'un pilote expérimenté pendant 14 jours afin de faciliter la mise en service d'un avion. C'est une offre de familiarisation sur l'appareil qui fait partie du contrat de vente. Jetport a profité de cette option pour donner une formation en ligne à son commandant désigné. Cette entente a débuté le 20 octobre 2007. Au cours des 14 jours suivants, le pilote instructeur a effectué 42,7 heures de vol avec le commandant sur 9 segments de volFootnote 8. Le pilote instructeur était en place droite pendant la majorité des segments de vol.
Avant le vol ayant mené à l'accident, le commandant de bord avait effectué 64 heures de vol sur le Global 5000, toutes sur l'avion accidenté (C-GXPR). Il s'était rendu à CFH4 avec d'autres aéronefs de Jetport, y compris avec le CL604, environ 75 fois dans les années précédentes. Toutefois, c'était seulement son troisième atterrissage à CFH4 aux commandes du Global 5000.
Le commandant de bord a fait son premier atterrissage à CFH4 sur le Global 5000 le 21 octobre 2007 en compagnie du pilote instructeur. La masse de l'avion à l'atterrissage lors de ce vol était de 63 032 livres, soit une masse supérieure de quelque 2000 livres à la masse de l'avion accidenté. Le plafond et la visibilité étaient bons avec des vents de l'ouest à 13 nœuds avec des rafales à 20 nœuds. Comme il y avait des turbulences, l'approche a été faite en manuel à partir d'une altitude de 1200 pieds asl avec l'automanette. Le commandant avait prévu effectuer le toucher des roues dans les 500 premiers pieds de piste, comme il le faisait d'habitude à CFH4. Il venait juste d'amorcer l'arrondi lorsque l'aéronef a touché des roues à environ 200 pieds après le seuil de piste, plus proche du seuil de piste que prévu. Le pilote instructeur lui en avait fait la remarque.
Le 7 novembre 2007, le commandant de bord a effectué un vol entre Calgary (Alberta) et CFH4 en compagnie du copilote du vol de l'accident. Au terme de ce vol, qui a eu lieu quatre jours avant le vol de l'accident, il a effectué son treizième atterrissage sur l'avion et son deuxième atterrissage sur le Global 5000 à CFH4. Lors de ce vol, la masse de l'avion à l'atterrissage était de 59 982 livres, soit une masse inférieure de 1100 livres à la masse à l'atterrissage de l'avion accidenté. Le plafond et la visibilité étaient bons avec des vents de l'ouest à 5 nœuds. L'atterrissage s'est déroulé sans problème.
1.3.3 Copilote
Le copilote possède la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Au jour de l'accident, il totalise 6426 heures de vol. Dans son emploi précédent, il a effectué plus de 2000 heures de vol sur turbopropulseurs légers et lourds. Depuis ses débuts à Jetport en 2000, il a effectué 3064 heures de vol dont 2540 heures en tant que commandant de bord sur turboréacteur Gulfstream G100 et CL604.
En juillet 2007, il a suivi la formation théorique sur le Global 5000 et la formation sur simulateur de niveau D au Centre de formation de Bombardier Aéronautique à Saint-Laurent (Québec). Le 3 août 2007, il a subi avec succès un CCP initial en vertu de la sous-partie 704 du RAC administré par un inspecteur de Transports Canada. Pendant sa formation, il a effectué 34 heures sur un simulateur de niveau D.
Après son CCP, le copilote a recommencé à voler sur le CL604 et a effectué 98,3 heures de vol. Le 6 novembre 2007, 5 jours avant l'accident, et plus de 3 mois après sa formation initiale et son CCP, il a effectué son premier vol sur le Global 5000. Au moment de l'accident, il avait fait 3 segments de vol, dont 1 vol à destination de CFH4 4 jours plus tôt.
1.4 Renseignements sur l'aéronef
1.4.1 Généralités
Constructeur | Bombardier Inc. |
Type et modèle | BD-700-1A11 |
Année de construction | 2006 |
Numéro de série | 9211 |
Certificat de navigabilité | Délivré le 30 juillet 2007 |
Heures de vol cellules et cycles | 92 heures et 26 cycles |
Moteurs | 2 moteurs BMW-Rolls Royce BR-700-710A2-20 |
Masse maximale au décollage | 87 700 lb |
Types de carburant recommandés | Jet A et Jet A-1 |
Type de carburant utilisé |
Jet A |
Le Global 5000 (Figure 1) est dérivé du Global Express, un jet d'affaires légèrement plus gros mis en service en 1996. Ses performances de décollage et d'atterrissage, contrairement à certains jets d'affaires plus anciens, lui permettent d'utiliser les pistes courtes des aérodromes plus petits. Il est principalement utilisé comme jet d'affaires, mais il est considéré comme un avion de catégorie transport.
Le C-GXPR était configuré pour transporter 14 passagers et 3 membres d'équipage. Il avait été acquis récemment par Jetport et avait rejoint la flotte le 19 octobre 2007, 3 semaines avant l'accident.
Au moment de l'atterrissage à CFH4, la masse du C-GXPR était de 61 050 livres. La masse et le centrage de l'appareil étaient dans les limites prescrites.
1.4.2 Manuels d'aéronef de Bombardier
1.4.2.1 Généralités
Le manuel de vol(aircraft flight manual ou AFM), le manuel destiné à l'équipage de conduite (Flight Crew Operating Manual ou FCOM) et les deux manuels de référence rapide (Quick Reference Handbook ou QRH) du Global 5000 étaient à bord de l'avion et l'équipage y avait accès. Ces manuels décrivent les limites et les procédures d'utilisation de l'avion ainsi que les données sur les performances de l'avion.
Le manuel de référence pour l'exploitation du Global 5000 (Operations Reference Manual ou ORM) est basé sur les procédures d'exploitation normalisées des turboréacteurs, modifiées selon les caractéristiques de vol du Global 5000. Il est fourni aux exploitants de Global 5000 qui suivent la formation initiale ou font un renouvellement dans un centre de formation de Bombardier. Il peut servir de base pour établir des procédures d'utilisation normalisées (SOP). Les responsabilités de l'équipage définies dans ce manuel peuvent être modifiées par les exploitants pour répondre à leurs besoins, tant que la sécurité et les limites d'exploitation de l'AFM sont respectées. L'ORM du Global 5000 a été fourni à Jetport, mais Jetport ne l'a pas utilisé pour établir ses SOP. Au lieu, Jetport a adapté les SOP du CL604 pour l'exploitation du Global 5000.
1.4.2.2 Calculs des distances d'atterrissage
La section Performance de l'AFM du Global 5000 fournit les renseignements nécessaires pour obtenir les performances à l'atterrissage dans différentes conditions de température, d'altitude-pression au sol et de masse selon les configurations d'approche et d'atterrissage précisées. Ces renseignements sont aussi résumés sous forme de tableaux dans le QRH qui est placé dans le poste de pilotage et qui est rapidement accessible par l'équipage à tout moment.
Lors du vol ayant mené à l'accident, le Global 5000 était exploité en vertu de la sous-partie 604 du RAC, et l'équipage n'était pas tenu de respecter les dispositions des sous-parties 704 et 705 du RAC en calculant la longueur de piste nécessaire.
La distance réelle d'atterrissage (ALD) est la distance calculée à partir d'une hauteur de 50 pieds à Vref avec les becs et les volets sortis à 30°, jusqu'à un arrêt complet sur une piste dure, lisse, sèche et plate à la température standard (ISA). Pour les avions exploités en vertu des sous-parties 704 et 705 du RAC, la longueur de piste nécessaire, appelée longueur de piste pondérée (LFL), doit être prise en compte. La longueur de piste pondérée (LFL) correspond à la distance réelle d'atterrissage (ALD) multipliée par un facteur opérationnel de longueur de piste d'atterrissage de 1/0,6. La longueur de piste pondérée (LFL) ajoute une marge de sécurité à la distance réelle d'atterrissage (ALD) pour tenir compte de la météo, des techniques d'atterrissage ou d'un problème à l'atterrissage.
Des calculs ont été faits à partir de la configuration de l'avion accidenté et des conditions du moment. La masse utilisée était de 61 050 livres avec une Vref de 113 nœuds, les becs et les volets sortis à 30°, en tenant compte d'un vent du nord à 21 nœuds. Pour une piste sèche, la distance réelle d'atterrissage (ALD) était de 2095 pieds avec une longueur de piste pondérée (LFL) correspondante de 3492 pieds.
Dans le cas d'une piste mouillée ou glissante, les sous-parties 704 et 705 du RAC stipulent que la longueur de piste disponible doit être d'au moins 115 % de la longueur de piste pondérée (LFL). Selon les données du vol ayant mené à l'accident, la distance requise pour une piste mouillée portait la distance réelle d'atterrissage (ALD) à 2409 pieds et la longueur de piste pondérée (LFL) à 4016 pieds. D'après les diagrammes de performance, le commandant avait estimé qu'en fonction des conditions, il avait besoin de 4300 pieds de piste pour atterrir sur la piste.
1.4.2.3 Corrections de la vitesse d'approche avec un vent en rafale
Le FCOM et l'ORM du Global 5000 indiquent tous les deux comment calculer les corrections de vitesse à apporter en cas de vent en rafale. Si le vent signalé comporte une rafale, la Vref d'approche normale doit être augmentée. La vitesse recommandée d'approche finale avec 30° de volets se calcule de la façon suivante :
Vref corrigée = Vref + 1/2 de la rafale (jusqu'à un maximum de 10 nœuds)
L'ORM recommande également que la vitesse d'approche corrigée soit maintenue jusqu'à l'arrondi. Une note ajoute :
[Traduction]
Les distances d'atterrissage de l'AFM sont fondées sur un franchissement du seuil de piste à 50 pieds, à la Vref, avec les manettes au ralenti et sur une pente de descente normale. Le pilote doit tenir compte des conséquences d'un atterrissage à une Vref supérieure, particulièrement sur piste courte ou lors d'un atterrissage court.
Lors du vol ayant mené à l'accident, l'équipage a utilisé la procédure spécifiée dans l'ORM du Global 5000 de Bombardier et non pas celle spécifiée dans le manuel des SOP du Global 5000 de Jetport.
1.4.2.4 Procédure d'atterrissage
La page 2-42 de l'ORM du Global 5000 décrit la procédure d'atterrissage normal :
[Traduction]
Les distances réelles d'atterrissage (ALD) dérivées de l'AFM sont fondées sur un franchissement du seuil de piste à 50 pieds, sur une pente de descente normale à la Vref, avec le train sorti et les volets à 30°. Ces distances réelles d'atterrissage (ALD) ne tiennent pas compte des corrections de Vref pour la rafale. Il faut donc s'attendre à une distance de roulage plus longue. Sur une approche stabilisée normale, à environ 30 pieds au-dessus de la zone de toucher des roues, le manche est amené en arrière progressivement afin de diminuer le taux de descente pour atterrir en douceur. Si la pente est différente de la normale, il peut être nécessaire d'amorcer l'arrondi à une hauteur légèrement différente. Par vent de travers, le fuselage est progressivement aligné sur l'axe de piste pendant l'arrondi, en utilisant les palonniers et en donnant du manche dans le vent au besoin pour contrôler la glissade. Pendant le roulage, le manche est amené graduellement à fond dans le vent à mesure que la vitesse diminue.
Cette procédure est également décrite à la page 04-08-16 du FCOM.
1.4.2.5 Technique d'atterrissage par vent de travers
Deux techniques peuvent être utilisées pour poser un avion par vent de travers. L'approche en crabe, avec les ailes à plat, est la procédure recommandée dans l'ORM du Global 5000 pour atterrir avec un vent de travers. C'est également la technique enseignée par Bombardier pendant la formation sur simulateur. Selon cette technique, le pilote corrige la dérive pendant l'approche de façon à rester centré sur l'axe de piste. Au début de l'arrondi, il aligne progressivement le fuselage sur l'axe de piste au palonnier.
La technique d'approche en glissade, avec une aile basse, demande au pilote d'incliner l'avion dans le vent en donnant du palonnier opposé afin de corriger la dérive pour rester dans l'axe de piste. Cette technique augmente le risque d'oscillations induites par le piloteFootnote 9 et par voie de conséquence, le risque de toucher la piste du bout de l'aile. En raison de l'effet de dièdre très prononcé sur le Global 5000, l'utilisation de la technique d'approche en glissade augmente considérablement la charge de travail du pilote.
Lors du vol ayant mené à l'accident, le PF a utilisé la technique d'approche en glissade en inclinant l'avion dans le vent au manche avec du palonnier opposé pour corriger la dérive et garder le fuselage aligné sur l'axe. En raison de l'amortisseur automatique de roulis intégré au système de commandes de vol, le croisement des commandes n'a pas seulement engendré une déflexion des ailerons, il a aussi commandé le déploiement des déporteurs multifonctions de l'aile droite à l'approche du seuil de piste. Une revue des paramètres de l'enregistreur de données de vol (FDR) a confirmé que l'utilisation de cette technique a déclenché la sortie des déporteurs en fin d'approche. Cela a entraîné une diminution de portance qui a rendu l'avion plus difficile à maîtriser, augmentant la charge de travail du PF déjà élevée à cause du vent en rafale et de l'angle d'approche réduit.
Le pilote de l'avion accidenté avait utilisé les deux techniques, le crabe et la glissade, lors de sa formation sur simulateur du Global 5000 et croyait que les deux techniques pouvaient être utilisées.
1.4.2.6 Guidage vertical
L'ORM de Bombardier traite de l'utilisation de la navigation verticale comme une option dans diverses situations d'approche. La navigation verticale permet aussi d'améliorer la conscience de la situation et peut générer un profil de descente constant. Le guidage vertical s'affiche sur l'écran de vol principal quand le mode de capture de trajectoire verticale est sélectionné.
La trajectoire de descente enregistrée dans le FMS permet de respecter toutes les limites d'altitude, du repère d'approche finale (FAF) jusqu'au point d'approche interrompue. Elles ne doivent pas être modifiées. Pour une approche piste 33 à CFH4, la navigation verticale aurait guidé l'avion jusqu'à une hauteur de 58 pieds au-dessus du seuil de piste avec un toucher des roues à environ 1000 pieds après le seuil de piste.
1.4.2.7 Système d'automanette
Le Global 5000 est équipé d'un double système d'automanette qui assure la gestion complète de la poussée des moteurs par positionnement automatique des manettes de poussée. Le système d'automanette permet de contrôler la poussée et la vitesse. L'écran de vol principal affiche l'état d'activation, le mode et les pannes du système d'automanette.
Le mode de contrôle de la vitesse est le mode de base de l'automanette. Ce mode suit la cible de vitesse indiquée ou de nombre de Mach choisi. La vitesse cible est sélectionnée sur le panneau de guidage du vol et modifiée par le FMS ou manuellement. Ce mode assure la protection en haute et basse vitesse. Le mode de contrôle du ralenti amène les manettes de poussée au ralenti à un rythme prédéterminé pendant l'arrondi et l'atterrissage. L'automanette reste enclenchée jusqu'au toucher des roues pour afficher la poussée de remise des gaz si le mode de remise des gaz est sélectionné. L'automanette passe en mode ralenti à une hauteur inférieure à 50 pieds au-dessus du sol (agl) au radioaltimètre quand l'avion est en configuration d'atterrissage, train sorti et volets à 16° ou plus.
Bombardier encourage les exploitants à utiliser l'automanette pour toutes les phases de vol. Toutefois, certains pilotes débrayent l'automanette dans les zones de turbulences ou quand les manettes de poussée font le va-et-vient pour essayer de maintenir la vitesse cible. Le PF a toujours la priorité sur l'automanette. Une augmentation de poussée appropriée aurait permis de sortir l'avion du régime de faible énergie cinétique dans lequel il se trouvait et aurait arrêté la perte de portance en courte finale.
1.4.3 Procédures d'exploitation normalisées de Jetport pour le Global 5000
Jetport exploitait le CL604 depuis 2001 et utilisait des SOP qui avaient évolué au fil des ans. Quand la compagnie a acquis le Global 5000, elle a adapté les SOP du CL604 pour l'exploitation du Global 5000. Il s'agit d'une pratique courante chez les exploitants qui veulent maintenir des procédures normalisées entre différents types d'aéronef.
Les SOP du Global 5000 de Jetport renferment une quantité de renseignements bien fondés, mais comportent aussi des procédures applicables au CL604 ne convenant pas au Global 5000. Ces procédures ne correspondent pas aux procédures recommandées dans l'ORM de Bombardier. On note entre autres des différences au niveau des procédures d'approche indirecte, des annonces d'écart de vitesse, et des calculs de vitesse d'approche avec des vents en rafale.
La description du profil d'atterrissage est particulièrement préoccupante. La section 5.13 des SOP du Global 5000 de Jetport décrit les procédures d'approche finale et d'atterrissage. Elle stipule notamment que :
[Traduction]
L'atterrissage se fait normalement près du point d'intersection de la pente d'approche avec la piste, ou à environ 1000 pieds après le seuil de piste. L'avion doit être posé en douceur à cet endroit et il faut éviter de le laisser flotter.
Toutefois, cet énoncé est précédé de la note suivante :
[Traduction]
En approche finale, le pilote suit la pente d'approche, l'indicateur visuel de pente d'approche (VASIS) ou autre moyen de guidage visuel disponible jusqu'au point de toucher des roues. Descendre au-dessous de la pente d'approche n'est pas une technique recommandée, et en temps normal, ce n'est pas une pratique acceptée. Il y a toutefois deux exceptions :
- par beau temps et de jour seulement, un toucher des roues en tout début de piste peut être effectué s'il permet de diminuer de façon importante le temps de roulage sans réduire la sécurité;
- sur piste courte ou lorsque le freinage est réduit par une contamination, un toucher des roues dès que les conditions le permettent est généralement considéré comme une bonne discipline aéronautique.
1.5 Enregistreurs de bord
L'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR) et l'enregistreur de données de vol (FDR) ont été retirés de l'avion. Les modules de mémoire ont été téléchargés et les données intégralement récupérées.
Le CVR est un enregistreur de marque Honeywell, modèle SSCVR, référence 980-6022-001 et numéro de série CVR120-08416. Il s'agit d'un enregistreur à semi-conducteurs avec une capacité d'enregistrement d'environ deux heures. La force de l'impact initial a déclenché le contacteur à inertie du CVR, coupant l'alimentation électrique et mettant fin à l'enregistrement.
Le FDR est un enregistreur à semi-conducteurs de marque Honeywell, modèle SSFDR, référence 980-4700-041, et numéro de série 12216. Sur le Global 5000, ce type de FDR enregistre plus de 800 paramètres selon une trame de données de 256 mots par seconde, avec une capacité d'enregistrement d'environ 25 heures. Le FDR a enregistré les paramètres du vol ayant mené à l'accident ainsi que ceux des 6 atterrissages précédents.
Les données FDR montrent qu'au cours des 4 atterrissages précédents, le pilote avait systématiquement fait l'arrondi à 1° par seconde pour prendre une assiette d'environ 5,4°. Lors de l'atterrissage ayant mené à l'accident, l'arrondi était différent en ce sens que 4 secondes avant l'impact, l'arrondi a été fait à 3,9° par seconde jusqu'à ce que l'avion prenne une assiette de 10,6°.
1.6 Renseignements météorologiques
Il n'y a pas de services météorologiques à CFH4. Les pilotes doivent extrapoler les prévisions régionales (FA), et les rapports météorologiques des stations avoisinantes. Outre la manche à vent située près du seuil de la piste 33, il n'y a pas d'instruments pour donner la vitesse et la direction du vent avec précision. Aucun employé à CFH4 n'avait reçu une formation pour évaluer et communiquer les conditions météorologiques.
Les pilotes à destination de Fox Harbour (CFH4) utilisent normalement la météo des stations avoisinantes comme Halifax (CYHZ), Moncton au Nouveau-Brunswick (CYQM) et Charlottetown à l'Île-du-Prince-Édouard (CYYG) pour évaluer les conditions météorologiques locales. Parmi ces stations, Charlottetown (CYYG) est la plus proche, située à 28 nm au nord-est de CFH4. Avant le départ de Hamilton (CYHM), l'équipage avait passé en revue les bulletins de ces stations et avait également contacté un employé à CFH4 pour obtenir la météo générale à l'aérodrome.
Avant la descente sur CFH4, l'équipage a obtenu les messages d'observations météorologiques régulières pour l'aviation (METAR) de 14 h pour Halifax (CYHZ) et Charlottetown (CYYG) puis a contacté de nouveau un employé à CFH4 avec le téléphone de bord pour avoir la météo générale à CFH4.
Le METAR de Charlottetown (CYYG) à 14 h indiquait : vent du 360°T à 21 nœuds, rafales à 33 nœuds, visibilité de 7 milles terrestres (sm) dans la pluie faible, plafond couvert à 900 pieds agl, température 3°C, point de rosée 2°C, et calage altimétrique 29,71 pouces de mercure (po Hg). Le METAR émis à 15 h (35 minutes après l'accident) indiquait : vent du 360°T à 20 nœuds, rafales à 34 nœuds, visibilité 7 sm dans la pluie faible, plafond couvert à 1100 pieds agl, température 3°C, point de rosée 2°C, et calage altimétrique 29,73 po Hg. Les conditions météo à l'arrivée à CFH4 correspondaient aux prévisions d'aérodrome de Charlottetown (CYYG), Halifax (CYHZ) et Moncton (CYQM).
Pendant l'approche, l'équipage a constamment évalué les vents et s'attendait à des turbulences. Malgré les rafales, aucun cisaillement du vent n'était signalé dans la région et le système d'avertissement de proximité du sol amélioré (EGPWS) de l'avion n'en a pas détecté.
L'équipage avait mentionné l'aéroport de Halifax (CYHZ) dans son plan de vol comme aéroport de dégagement avec l'aéroport de Québec à Québec (CYQB) comme second aéroport de dégagement. La météo aux deux aéroports était dans les limites de dégagement, et l'avion avait une réserve de carburant suffisante pour se rendre à Halifax (CYHZ) en cas d'approche interrompue, puis à Québec (CYQB) si nécessaire.
1.7 Renseignements sur l'aérodrome
1.7.1 Aérodromes et aéroports
La Loi sur l'aéronautique définit un aérodrome comme « Tout terrain, plan d'eau (gelé ou non) ou autre surface d'appui servant ou conçu, aménagé, équipé ou réservé pour servir, en tout ou en partie, aux mouvements et à la mise en œuvre des aéronefs, y compris les installations qui y sont situées ou leur sont rattachées ».
Lorsque l'exploitant d'un aérodrome fournit à Transports Canada les renseignements concernant l'emplacement, le marquage, le balisage lumineux, l'utilisation et l'exploitation de l'aérodrome, Transports Canada enregistre l'aérodrome et publie les renseignements dans le Supplément de vol Canada CFS. En outre, l'exploitant d'un aérodrome enregistré doit se conformer à certaines exigences.
Un aéroport est un aérodrome pour lequel un certificat d'aéroport a été délivré par le ministre en vertu de la Partie III du RAC. Essentiellement, s'il y a un service aérien commercial à horaire fixe, l'aérodrome est alors certifié par Transports Canada. L'exploitant d'aéroport est tenu d'entretenir et d'exploiter le site conformément aux normes pertinentes et Transports Canada effectue des inspections périodiques afin de vérifier dans quelle mesure elles sont respectées. Les normes relatives aux aéroports sont plus strictes que les normes relatives aux aérodromes.
1.7.2 Aérodrome de Fox Harbour
Fox Harbour est un aérodrome enregistré exploité par Fox Harbour Development Limited. Il est situé sur la côte du détroit de Northumberland par 45°52,12′ N, 063°27,40′ W, à une élévation de 62 pieds au-dessus du niveau moyen de la mer (msl). La piste 33, celle utilisée par l'équipage lors du vol ayant mené à l'accident, est orientée au 325°M; elle mesure 4885 pieds de long sur 75 pieds de large, et sa surface est asphaltée. Le seuil de piste est situé à 52 pieds msl. La piste 33 a une distance d'atterrissage utilisable publiée de 4885 pieds.
L'aérodrome a été construit pour desservir le terrain de golf qui l'entoure. Le complexe de villégiature Fox Harbour Resort dispose également d'un ensemble résidentiel protégé. Fox Harbour Development Limited présente le complexe comme un centre de conférence exclusif. La fréquentation du complexe étant en augmentation, l'utilisation de l'aérodrome est également attendue puisque de nombreux clients préfèrent se rendre sur place en avion.
Sauf en cas d'urgence, il faut obtenir l'autorisation du propriétaire ou de l'exploitant avant d'utiliser l'aérodrome. Les aéronefs à destination de CFH4 peuvent contacter l'UNICOMFootnote 10 sur la fréquence de 122,2 MHz ou signaler leurs intentions lors du compte rendu d'approche. L'aérodrome est entretenu par des employés du complexe Fox Harbour Resort. Aucun des employés ne possède de formation ni d'expérience spécialisée dans la gestion d'un aérodrome.
Un ARCAL de type K est disponible et peut être utilisé pour allumer les feux de bord de piste ainsi que l'APAPI de la piste 33.
Le CFS signale que les dangers suivants doivent être pris en compte à cet aérodrome (Annexe D – Renseignements figurant dans le CFS sur l'aérodrome de Fox Harbour) :
- arbres en approche piste 15, à 250 pieds du seuil et à 52 pieds au-dessus du seuil;
- hangar de 37 pieds de haut, à 175 pieds de la piste;
- déconseillé de nuit pour les avions à hautes performances;
- illusion d'optique possible à cause de la largeur relative de la piste. Un avion peut paraître plus haut qu'il ne l'est en réalité sur l'approche;
- attention à la présence d'animaux sauvages sur la piste;
- turbulences possibles sur la piste par vent d'ouest à cause des arbres à proximité.
Peu après le seuil de la piste 33, une rangée de 12 copropriétés situées à 250 pieds à l'est de l'axe de piste longent la piste. De plus, un chemin coupe l'approche de la piste 33, à environ 30 pieds du seuil de piste et à 7 pieds en contrebas de la piste (Annexe C – Trajectoire au sol de l'avion accidenté).
L'aérodrome n'est pas doté d'aides électroniques à la navigation, mais des approches GPS (système de positionnement mondial) sont publiées dans le Restricted Canada Air Pilot (RCAP) pour les deux pistes ainsi qu'une procédure de départ normalisée aux instruments (SID).
1.7.3 Inspection de l'aérodrome par Transports Canada
Le 28 avril 2000, Transports Canada a inspecté CFH4. Les aérodromes enregistrés n'ont pas à répondre aux normes de conception des aéroports certifiés, mais à la demande de la gestion de Fox Harbour, l'aérodrome a été évalué sous les deux aspects : certification et enregistrement. Cette demande avait été faite en vue d'obtenir la certification de CFH4.
Le 4 mai 2000, Transports Canada a transmis son rapport à Jetport où il indique que CFH4 ne peut répondre aux normes d'un aéroport certifié. La piste comporte des fossés et des monticules de terre des deux côtés ainsi qu'une forte élévation du terrain avant le seuil de la piste 33. Les aires aménagées en bordure de piste devraient être permettre de réduire les risques de dommages aux avions en cas de sortie de piste. De plus, les obstacles à proximité (une ligne électrique, des arbres, des copropriétés et le hangar) dépassent les limites de hauteur acceptables.
Sur le plan administratif, un manuel d'exploitation d'aéroport est obligatoire. Il indique les caractéristiques physiques de l'aéroport et les services offerts. Il sert aussi d'entente selon laquelle l'exploitant de l'aéroport s'engage à respecter les normes de Transports Canada.
Jetport a choisi de ne pas faire certifier l'aérodrome, et les points mentionnés précédemment n'ont pas été traités. Toutefois, des mesures ont été prises concernant d'autres points notés dans le rapport d'inspection :
- les deux pistes ont été équipées d'un APAPI, mais seul l'APAPI de la piste 33 a été mis en service, car les arbres et la ligne électrique constituent des obstacles en approche sur la piste 15;
- certaines marques obligatoires, comme les marques de seuil, d'identification et d'axe de piste ont été ajoutées, mais pas les marques de point cible ni de toucher des roues;
- un plan d'arpentage détaillé a été établi et transmis à Transports Canada.
Dans une lettre datée du 9 janvier 2001, Transports Canada avisait Jetport que le chemin coupant l'approche de la piste 33 de CFH4 posait un problème. Il déclarait, entre autres :
[Traduction]
Nous considérons qu'un chemin représente une obstruction de 14 pieds de haut en raison des camions qui peuvent emprunter le chemin. Des mesures devraient être prises pour empêcher le passage d'un camion à un moment critique pour le trafic aérien. Il faudrait au moins que des panneaux de signalisation soient mis en place pour demander aux automobilistes de s'arrêter et de s'assurer qu'il n'y a pas de danger avant de continuer.
Aucun panneau de signalisation n'a été installé par l'exploitant de l'aérodrome pour informer les automobilistes du risque posé par le passage d'avions à basse altitude, et aucune autre stratégie d'atténuation du risque n'a été adoptée pour répondre au problème.
1.7.4 Trafic aérien à l'aérodrome de Fox Harbour
Fox Harbour Development Limited ne tient pas de registre des mouvements d'aéronefs et elle n'est pas tenue de le faire. L'enquête n'a pu établir avec précision le nombre d'aéronefs atterrissant et décollant à CFH4 chaque année. Toutefois, il a été déterminé que de nombreux aéronefs de différents types fréquentaient CFH4, du monomoteur au gros jet d'affaires. Depuis l'ouverture du terrain de golf et du complexe à Fox Harbour en 2001, le trafic aérien a fortement augmenté et comprend maintenant des Beech 1900, des Cessna Citation, ainsi que des avions d'affaires plus gros comme des Gulfstream G200, des Gulfstream G-IV, des Gulfstream G-V, des Bombardier Challenger, des Bombardier Global 5000, des Hawker 800, des Learjet 45, des Falcon 50 et des Falcon 900.
Les dépôts de caoutchouc qu'on trouve sur la piste indiquent que bon nombre de ces avions touchent des roues sur les 500 premiers pieds de la piste. Quelques traces ont été relevées à seulement 60 pieds du seuil de piste.
1.8 Illusions d'optique
Une piste étroite comme celle de CFH4 peut provoquer une illusion d'optique. Ce sujet est traité dans une note d'information opérationnelle d'Airbus (Airbus Operational Briefing Note ou AOBN)Footnote 11 sur la sensibilisation aux illusions d'optique. Elle décrit comment le phénomène se produit lorsque les conditions modifient la perception que le pilote peut avoir de l'environnement en fonction de ses attentes. Une illusion d'optique peut se traduire par un atterrissage avant la piste, un atterrissage dur ou une sortie en bout de piste, mais elle peut aussi entraîner une désorientation spatiale et une perte de maîtrise. Selon l'AOBN d'Airbus, les statistiques indiquent que 30 % des accidents en approche et à l'atterrissage se produisent pendant les approches à vue ou lors du segment visuel d'une approche aux instruments.
L'illusion d'optique affecte la perception des hauteurs, des distances et des angles d'interception. Elle peut conduire l'équipage à faire une correction qui altère la trajectoire de vol verticale ou horizontale initialement prévue. Une piste étroite ou longue, comme celle de CFH4 a des proportions qui peuvent donner l'impression d'être trop haut en approche.
L'AOBN d'Airbus indique également que par vent de travers, les feux et l'environnement de piste apparaissent de biais par rapport au cap de l'avion. Le pilote doit maintenir la correction de dérive et résister à la tendance de vouloir aligner l'avion sur l'axe de piste.
Les actions du pilote et leurs conséquences mentionnées ci-après sont souvent citées dans les analyses sur les incidents ou accidents en approche et à l'atterrissage résultant d'une illusion d'optique :
- modification inconsciente de la trajectoire de l'avion pour garder une perception constante des références visuelles;
- tendance naturelle à vouloir descendre au-dessous de l'alignement de descente ou de la trajectoire d'approche initiale (c.-à-d., la tendance à vouloir « creuser l'approche »);
- incapacité à arrêter le taux de descente après être descendu au-dessous de la trajectoire d'approche initiale (c.-à-d., reconnaissance tardive du fléchissement du plan d'approche par rapport à la piste et à l'environnement de piste).
1.9 Hauteur entre les yeux du pilote et les roues de l'avion
1.9.1 Généralités
La distance verticale entre les yeux du pilote et les roues est appelée hauteur entre les yeux et les roues (EWH)Footnote 12 (Photo 5). Cette distance peut aller de 4 pieds ou moins jusqu'à 45 pieds pour certains gros porteurs comme le Boeing 747. L'équipage doit connaître l'EWH de son avion pour juger dans quelle mesure un indicateur visuel d'alignement de descente (VGSI) est adéquat.
1.9.2 Niveau de connaissance de la hauteur entre les yeux et les roues parmi les pilotes
Au cours de l'enquête, plusieurs titulaires de la licence de pilote de ligne ont été contactés pour déterminer leur niveau de conscience et de connaissance de l'EWH, ainsi que leur connaissance des limites des VGSI. Parmi eux, il y avait des pilotes de ligne, des instructeurs, des pilotes vérificateurs, des chefs pilotes, des inspecteurs de l'aviation civile et des pilotes d'essai, dont l'expérience allait du turbopropulseur léger au turboréacteur lourd. Des constructeurs, des compagnies aériennes, des transporteurs de fret, des compagnies de vols nolisés, des centres de formation et le gouvernement étaient représentés dans ce groupe.
Il a été établi que les pilotes ne connaissent généralement pas l'EWH du type d'avion qu'ils pilotent. Plusieurs pilotes croient à tort que l'EWH est la hauteur entre les yeux du pilote et le sol quand l'appareil est au sol, car cette distance est publiée dans l'AFM de certains constructeurs.
Normalement, les renseignements pouvant avoir un impact sur la sécurité sont enseignés au cours de la formation théorique ou de l'entraînement en simulateur. Pour ce qui est de l'équipage de l'avion accidenté, le sujet de l'EWH n'a pas été couvert au cours de la formation théorique, de l'entraînement en simulateur ou de la formation en ligne. De plus, le sujet est rarement traité dans la formation des pilotes, quelle qu'elle soit.
1.9.3 Disponibilité de l'information sur la hauteur entre les yeux et les roues
Normalement, les renseignements techniques pouvant avoir une influence sur l'exploitation d'un aéronef en toute sécurité se trouvent dans l'AFM. Selon les consultations faites auprès de plusieurs constructeurs, d'autres manuels d'aéronef peuvent donner des renseignements sur la hauteur de franchissement du seuil (TCH) en fonction du profil ou de la configuration. Ces renseignements peuvent être utilisés pour essayer de calculer l'EWH, mais aucun chiffre n'est donné pour indiquer clairement l'EWH. Transports Canada a confirmé que l'EWH n'est pas mentionnée dans les AFM et qu'il n'y a pas d'exigence réglementaire à cet égard.
L'équipage de l'avion accidenté (C-GXPR) ne disposait pas des données EWH du Global 5000, et il ne connaissait pas l'EWH du C-GXPR. À la suite de cet accident, il a été établi que cette information n'est pas facilement disponible. Le constructeur a dû faire des calculs de façon à trouver l'EWH du C-GXPR dans la configuration du vol de l'accident, ainsi que l'EWH la plus critique (la plus grande) du Global 5000.
1.9.4 Hauteur entre les yeux et les roues du C-GXPR
Des calculs d'EWH pour le C-GXPR ont été effectués d'après les conditions du moment, avec un aérodrome au niveau de la mer, une pente de descente de 3° et le train sorti. Pour le vol ayant mené à l'accident, l'EWH était de 16,35 pieds. À la masse maximale à l'atterrissage de 78 600 livres du Global 5000, la plus grande EWH pour le Global 5000 en configuration d'approche était de 17,2 pieds.
1.9.5 Hauteur entre les yeux et les roues du Bombardier Challenger 604
Le constructeur a également fait des calculs afin d'obtenir l'EWH du Bombardier Challenger 604 (CL604), avec une pente de descente de 3° en configuration d'atterrissage à vide et à pleine charge. L'EWH en configuration d'atterrissage à vide a été calculée en utilisant une masse à l'atterrissage de 28 000 livres et a été établie à 12,11 pieds.
À pleine charge, l'EWH a été calculée avec une masse à l'atterrissage de 38 000 livres et a été établie à 12,176 pieds.
1.10 Indicateurs visuels d'alignement de descente
1.10.1 Généralités
Au cours des ans, différents types d'indicateurs visuels d'alignement de descente (VGSI) ont été utilisés. Jusqu'en 1995, l'indicateur visuel de pente d'approche (VASIS) était le système en usage au Canada. À partir de 1995, le VASIS a été progressivement remplacé par l'indicateur de trajectoire d'approche de précision (PAPI). Le PAPI est un dispositif lumineux destiné à améliorer la sécurité opérationnelle pendant l'approche finale et l'atterrissage. Ces dispositifs fournissent un guidage visuel de pente de descente aux pilotes jusqu'à la transition aux repères visuels de l'environnement de piste en préparation à l'arrondi et au toucher des roues. Ils sont parfois utilisés en complément au guidage donné par les aides d'approche électroniques.
Selon Transports Canada, 261 aérodromes et aéroports ont des pistes dotées de VGSI au Canada. Certains aéroports, comme l'aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (Ontario), disposent de 10 PAPI, alors que de nombreux aérodromes secondaires n'ont qu'un PAPI ou un VASIS à l'une des extrémités d'une seule piste. Le nombre de VGSI en usage au pays est estimé par Transports Canada à 400 ou 500 dispositifs.
1.10.2 Normes d'installation des PAPI
La publication de Transports Canada intitulée Aérodromes - Normes et pratiques recommandées (TP 312F) donne les spécifications qui s'appliquent aux aéroports terrestres certifiés selon la Partie III du RAC. Cette publication sert de référence pour les spécifications d'aérodrome, leurs caractéristiques physiques, les surfaces de limitation d'obstacles, le balisage lumineux, les balises, les marques et les panneaux. La section 5.3.6 du document traite des VASIS et précise les différentes normes qui s'appliquent aux PAPI et aux APAPI.
La publication Aérodromes - Normes et pratiques recommandées (TP 312F) stipule qu'un VASIS « sera installé pour desservir l'approche d'une piste où au moins une des conditions suivantes existe :
- la piste n'est pas desservie par un alignement de descente électronique et est utilisée par des avions à turboréacteurs ou autres aéronefs qui exigent un guidage analogue dans l'approche;
- le pilote d'un aéronef quelconque risque d'éprouver des difficultés pour évaluer son approche pour l'une des raisons suivantes :
- guidage visuel insuffisant, par exemple au cours d'une approche de jour au-dessus d'un plan d'eau ou d'un terrain dépourvu de repères ou, pendant la nuit, par suite de l'insuffisance de sources lumineuses non aéronautiques dans l'aire d'approche, ou
- illusions d'optique dues par exemple à la configuration du terrain environnant ou à la pente de la piste;
- il existe dans l'aire d'approche des objets qui peuvent constituer un danger grave si un aéronef descend au-dessous de l'axe normal de descente surtout s'il n'y a pas d'aide non visuelle ou d'autre aide visuelle pour signaler ces objets;
- les caractéristiques physiques du terrain à l'une ou l'autre des extrémités de la piste présentent un danger grave en cas de prise de terrain trop courte ou trop longue; et
- la topographie ou les conditions météorologiques dominantes sont telles que l'aéronef risque d'être soumis à des turbulences anormales pendant l'approche. »
Le PAPI est constitué d'une barre de flanc formée de quatre unités lumineuses multilampes à transition franche (ou à lampes individuelles groupées par paires), également espacées alors que l'APAPI est constitué d'une barre de flanc formée de seulement deux unités lumineuses multilampes à transition franche (ou à lampes individuelles groupées par paires). Un APAPI peut être installé lorsque la largeur de la bande de piste disponible est insuffisante pour permettre l'installation d'un dispositif complet. Il doit être situé sur le côté gauche de la piste à moins que cette disposition ne soit physiquement impossible. La trajectoire d'approche normalisée des indicateurs visuels est de 3°.
La barre de flanc d'un APAPI est construite et disposée de manière qu'un pilote qui exécute une approche et dont l'aéronef se trouve :
- sur la trajectoire d'approche ou tout près de celle-ci, voie l'unité la plus proche de la piste en rouge et l'unité la plus loin en blanc;
- au-dessus de la trajectoire d'approche, voie les deux unités en blanc;
- au-dessous de la trajectoire, voie les deux unités en rouge.
Bien que le PAPI et l'APAPI donnent tous les deux des indications visuelles de pente, le PAPI présente l'avantage d'avoir des indications de déviation graduelles (Figure 2) puisqu'il dispose de quatre unités lumineuses alors que l'APAPI en a deux. Le PAPI permet au pilote de mieux anticiper les corrections de trajectoire. Cela est particulièrement important pour les corrections de trajectoire à basse altitude, car l'épaisseur du faisceau lumineux diminue et il est facile de passer du faisceau blanc-blanc (trop haut) au faisceau rouge-rouge (trop bas) en traversant le faisceau rouge-blanc (pente correcte).
Les unités lumineuses du PAPI doivent être positionnées de manière à assurer une marge de franchissement du seuil pour l'avion le plus critique qui utilise la piste sur une base régulière. Ainsi, le PAPI est conçu d'après l'EWH des avions pour lesquels l'aérodrome a été prévu, et assure une marge suffisante entre les roues et le seuil lorsque le pilote suit le faisceau « sur la pente ». La TCH peut varier selon la piste sur laquelle il est installé ou le type d'avion. Par exemple, le tableau 5-5 de la publication Aérodromes - Normes et pratiques recommandées (TP 312F) montre qu'un APAPI ou un PAPI 1, qui peuvent amener un avion à franchir le seuil à une hauteur de 19,7 pieds, peuvent aussi être réglés de façon à amener un avion à 4,9 pieds à peine au-dessus du seuil lorsqu'ils sont installés sur une piste plus courte principalement utilisée par des avions légers à hélices.
Même si une piste devrait normalement être dotée d'un VGSI approprié à l'avion le plus critique (le plus gros) qui utilise la piste sur une base régulière, l'enquête a noté des exceptions. Par exemple, l'aéroport de Nanisivik au Nunavut (CYSR) comporte différents types de VGSI aux extrémités opposées de la même piste. Un VASIS 1, propre aux avions ayant une EWH inférieure à 10 pieds est installé pour la piste 29 T, et un VASIS 2, qui convient aux avions avec une EWH inférieure à 25 pieds est installé à l'autre extrémité pour la piste 11 T. Par conséquent, le pilote d'un gros avion n'est assuré d'une TCH suffisante qu'en approche sur la piste 11 T.
Le Canada Air Pilot, Procédures aux instruments (CAP 6) décrit les différents types de PAPI. Un tableau présente les renseignements suivants (voir Annexe E – Indicateurs visuels d'alignement de descente [VGSI]) :
APAPI (AP) PAPI simplifié pour avions dont l'EWH peut atteindre 10 pieds.
PAPI 1 (P1) PAPI pour avions dont l'EWH peut atteindre 10 pieds.
PAPI 2 (P2) PAPI pour avions dont l'EWH peut atteindre 25 pieds.
PAPI 3 (P3) PAPI pour avions dont l'EWH peut atteindre 45 pieds.
En changeant la distance des unités lumineuses à partir du seuil, il est possible d'assurer une marge de franchissement adéquate à des avions ayant des EWH différentes (Figure 3). En effet, la (TCH augmente proportionnellement à la distance du PAPI avec le seuil. Un PAPI 2 est nécessaire pour assurer une TCH adéquate au Global 5000 avec ses 17,2 pieds d'EWH.
Il est important de noter que pour un pilote en approche, les PAPI 1, 2 ou 3 sont absolument identiques vus du poste de pilotage. Pour connaître le type de PAPI, le pilote doit consulter les renseignements d'aérodrome à sa disposition.
Un mauvais alignement (décalage angulaire) d'une unité lumineuse du PAPI, qui est composée de quatre unités lumineuses multilampes à transition franche, n'est pas critique puisque les trois autres unités lumineuses continuent à donner une indication de déviation progressive au pilote qui suit le guidage. Par contre, l'APAPI étant composé de deux unités lumineuses seulement, un mauvais alignement ne peut pas être détecté par le pilote et risque de l'amener sur une trajectoire d'approche dangereuse. C'est pourquoi il est primordial que l'alignement soit vérifié régulièrement. Une note dans la publication Aérodromes - Normes et pratiques recommandées (TP 312F) souligne l'importance du problème : « Les systèmes APAPI requièrent des inspections et entretiens réguliers afin d'éviter tout désalignement qui résulterait en une pente d'approche dangereuse ».
1.10.3 APAPI de Fox Harbour
Suite à un accident survenu à CFH4 le 22 mars 2000, où un jet d'affaires de Jetport a heurté des arbres en descendant trop bas lors d'une approche de nuit, Fox Harbour Development Limited a pris plusieurs mesures de sécurité visant à améliorer la sécurité de l'aérodrome. Ces mesures de sécurité ont été notées dans le rapport d'enquête A00A0051 du BST. L'une de ces mesures, outre l'abattage des arbres en approche de la piste 33, portait sur l'installation d'un APAPI sur cette piste (Photo 6) en août 2000. Fox Harbour Development Limited avait indiqué au BST que le calage de l'APAPI serait vérifié chaque semaine selon les instructions du fabricant.
L'APAPI a été installé à 480 pieds du seuil de piste, du côté droit de la piste, car l'aire de trafic située du côté gauche empêchait son installation de ce côté. Il a été réglé d'après les critères du manuel d'utilisation du fabricant, lequel décrit le calage angulaire en site de 3° recommandé par Transports Canada. Ce manuel décrit aussi les procédures de réglage, les intervalles de contrôle périodiques recommandés et la maintenance. Pour un APAPI, il recommande le contrôle hebdomadaire du calage en site.
À la suite de l'installation de l'APAPI, plusieurs pilotes de Jetport basés à CFH4 ont reçu, selon l'information recueillie, une formation sur l'utilisation de l'outil de réglage et ils étaient chargés des contrôles. Pourtant, au moment de l'accident du 11 novembre 2007, il a été établi que personne chez Fox Harbour Development Limited ne connaissait les procédures de réglage. La dernière personne responsable du contrôle de l'APAPI avait quitté la compagnie à l'automne 2006, un an auparavant, et personne n'avait été chargé de ce travail depuis. Fox Harbour Development Limited ne disposait d'aucune documentation attestant qu'un contrôle des réglages de l'APAPI avait été fait.
1.10.4 Inspections de l'APAPI
Le 5 janvier 2001, Transports Canada avait inspecté l'APAPI et avait constaté que le calage en site était tombé à 2,5°, soit 0,5° de moins qu'au moment de l'installation 5 mois plus tôt. Le calage de l'APAPI a été ramené à 3°. L'angle de calage en site de l'APAPI peut être altéré par un tassement du sol suite à l'installation, le déneigement et l'entretien, ou suite à des soulèvements de terrain dus au gel.
Dans une lettre adressée à Jetport en date du 9 janvier 2001, Transports Canada déclarait : [Traduction] « Afin d'éviter que l'angle de calage n'atteigne une valeur dangereuse, nous vous recommandons fortement de faire l'acquisition d'un niveau ou d'équiper l'APAPI d'un interrupteur automatique ». Suite à quoi l'exploitant de l'aérodrome a acheté un niveau électronique auprès du fabricant de l'APAPI, mais ce niveau n'a jamais été utilisé pour vérifier le calage en site. Un interrupteur automatique n'a pas été installé.
Le 25 juillet 2006, la compagnie qui avait initialement installé l'APAPI a vérifié les réglages. Dans un courriel daté du 26 juillet 2006, elle déclarait : [Traduction] « Il est crucial que l'alignement de ces feux soit vérifié périodiquement afin de garantir la précision des unités lumineuses. Elles guident les avions en approche ». Dans le même courriel, elle offrait ses services pour faire des contrôles annuels des équipements installés sur l'aérodrome afin d'en assurer la conformité aux normes. Fox Harbour Development Limited n'a pas donné suite à cette offre, et ne disposait d'aucune documentation attestant que des contrôles périodiques de l'APAPI avaient été faits par un membre de son personnel.
1.10.5 Contrôle de l'APAPI suite à l'accident survenu au C-GXPR
Les résultats d'un contrôle de l'alignement suite à l'accident ont montré que l'unité A, celle qui est la plus éloignée de la piste, était légèrement déréglée. Au lieu d'être calée à 2,7° pour donner une indication de « montée » à un avion bas en approche, elle était calée à 2,6°. Cette différence a eu pour effet de modifier la TCH d'environ 1 pied. Les yeux du pilote au-dessus du seuil de piste auraient été à 26,3 pieds au lieu de 27,1 pieds avec un angle de 2,7°.
1.10.6 Scénarios d'approche avec l'APAPI pour le Global 5000
En supposant que le Global 5000 ait suivi la trajectoire d'approche de l'APAPI calé à 3°, avec une assiette en cabré à 3,3° et sans arrondi avant le toucher, le train principal aurait franchi le seuil à une hauteur de 12 pieds et touché la piste 214 pieds après le seuil de piste.
En supposant que l'avion ait suivi l'indication « sur la pente » du faisceau rouge-blanc de l'APAPI, mais à la limite inférieure de 2,7°, où le pilote devrait avoir une indication de « montée », le train principal aurait franchi le seuil à une hauteur de 9 pieds et touché la piste 183 pieds après le seuil.
Si l'avion avait réellement franchi le seuil en suivant la pente de 2,6° (avec une indication de « montée ») correspondant au calage de l'APAPI le jour de l'accident, le train principal aurait franchi le seuil à une hauteur de 8 pieds et touché la piste 172 pieds après le seuil de piste.
1.10.7 Types de PAPI dans différentes publications
Les renseignements sur les types de VGSI actuellement en usage au Canada se trouvent dans le Canada Air Pilot (CAP) publié par NAV CANADA. La configuration du VGSI est donnée dans une légende apparaissant dans le Canada Air Pilot, Procédures aux instruments (CAP 6). Pour toute approche aux instruments publiée, un diagramme d'aérodrome apparaît en bas à droite de la page. Un cercle y est représenté dans lequel est indiqué le type de VGSI (Figure 4). Un rapide coup d'œil permet au pilote de connaître exactement le type de VGSI en usage sur la piste où il prévoit faire son approche.
Les renseignements sont aussi disponibles dans le Supplément de vol Canada CFS publié par NAV CANADA, mais ils sont présentés de façon différente. Le diagramme d'aérodrome du CFS est très similaire à celui du CAP, mais le symbole utilisé pour représenter le VGSI est simplement un cercle comportant la lettre « P » ou « V » indiquant au pilote qu'un PAPI ou un VASIS est disponible (Figure 5). Pour connaître le type de PAPI ou de VASIS, il doit se référer à la section sur le balisage de la description de l'aérodrome. Cette section donne la description de tous les balisages lumineux disponibles sur chaque piste. Le type de PAPI est indiqué par le symbole AP, P1, P2 ou P3, et le type de VASIS par le symbole AV, V1, V2 ou V3.
1.10.8 Niveau de connaissance des indicateurs visuels d'alignement de descente parmi les pilotes
L'équipage du C-GXPR ne connaissait pas les limites de l'APAPI installé et utilisé à CFH4. La plupart des pilotes savent que différents types de VGSI sont en usage, mais ils en ignorent les limites et ne connaissent pas non plus la signification d'un guidage VGSI inapproprié au type d'avion qu'ils pilotent.
La plupart des pilotes consultés ont indiqué qu'une indication rouge-blanc (« sur la pente ») les amenait à penser qu'ils étaient sur une trajectoire sécuritaire jusqu'à l'atterrissage, quel que soit le type de VGSI émettant le guidage visuel. Cette fausse impression peut conduire un pilote à se fier au guidage d'un VGSI inapproprié au type d'avion qu'il pilote. Un guidage vertical ne devrait être utilisé qu'après confirmation de la pertinence du VGSI au type d'avion utilisé.
La documentation sur les VGSI est à la disposition des pilotes, mais dans l'ensemble, la formation traite uniquement de la signification des indications du VGSI. Elle ne traite pas des différents types de VGSI ni de leurs limites respectives. Dans le passé, les examens du personnel navigant de Transports Canada ne portaient que sur l'interprétation des différentes indications visuelles émises par les VGSI. À l'exception d'une question posée au début des années 90 au sujet des VASIS à 3 barres, les examens ne traitaient pas de la pertinence du type de VGSI selon le type d'avion utilisé.
1.11 Gestion de la sécurité et surveillance
1.11.1 Introduction
L'accident survenu au C-GXPR doit être considéré dans le contexte d'un cadre de sécurité aéronautique et réglementaire relativement nouveau. Il concerne Jetport en tant qu'exploitant de l'avion, l'aérodrome de Fox Harbour, l'Association canadienne de l'aviation d'affaires (ACAA), à la fois comme représentant corporatif et comme agence déléguée de Transports Canada, ainsi que Transports Canada comme organisme de réglementation.
La présente section décrit le cadre de sécurité aéronautique et réglementaire de façon à en comprendre la pertinence dans l'accident survenu au C-GXPR. Elle débute par une description des principes du système de gestion de la sécurité (SGS).
Le SGS est la stratégie adoptée par Transports Canada pour améliorer la sécurité dans les secteurs du transport aérien commercial et de l'aviation d'affaires. L'ACAA a aussi utilisé les principes du SGS pour élaborer ses propres normes de sécurité des opérations aériennes pour l'aviation d'affaires (NSOA-AA).Ces normes étaient celles qu'elle devait utiliser pour évaluer la capacité de ses membres à gérer la sécurité avant de délivrer, renouveler, ou refuser de délivrer un certificat d'exploitant privé (CEP).
1.11.2 Concept du système de gestion de la sécurité
Avec l'augmentation attendue des activités aéronautiques dans le monde, il devenait évident que les méthodes traditionnelles de réduction des risques seraient insuffisantes. Ces méthodes reposent essentiellement sur le respect de la réglementation, avec une réaction aux événements indésirables en trouvant les causes pour prescrire des mesures visant à empêcher leur répétition. Les pratiques modernes de gestion de la sécurité favorisent une recherche proactive des dangers, une identification des risques et l'adoption des meilleurs moyens de défense pour réduire les risques à un niveau acceptable. Ces principes doivent être enracinés dans la gestion de l'entreprise de façon à ce que les politiques, la planification, les procédures et la mesure des performances soient intégrés dans les opérations quotidiennes.
L'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a adopté le concept du SGS. Elle demande que les États membres imposent la mise en œuvre du SGS dans tous les secteurs de l'aviation civile avant la fin de l'année 2009. Afin d'aider les États membres à répondre à cette exigence, l'OACI a publié le Manuel de gestion de la sécurité (MGS)Footnote 13 qui explique la différence entre la gestion traditionnelle de la sécurité et la méthode moderne fondée sur le SGS.
Dans ce manuel, l'OACI définit la sécurité comme une « situation dans laquelle les risques de lésions corporelles ou de dommages matériels sont limités à un niveau acceptable et maintenus à ce niveau ou sous ce niveau par un processus continu d'identification des dangers et de gestion des risques ». Par ailleurs, elle définit le SGS comme une « approche structurée de gestion de la sécurité qui englobe les structures, responsabilités, politiques et procédures organisationnelles nécessaires ».
Le manuel fait état des défis auxquels les organisations seront confrontées pour s'adapter au SGS et propose des solutions visant à les surmonter. Il présente la gestion de la sécurité d'une manière concrète et reconnaît que les entreprises devront trouver le meilleur modèle de SGS. Le manuel présente des exemples pratiques qui peuvent être adaptés à leurs besoins. Il donne des indications visant à l'élaboration de politiques SGS efficaces et souligne l'importance du maintien des responsabilités de surveillance des États membres de l'OACI après l'adoption d'une approche SGS vis-à-vis de la sécurité.
Étant donné le rôle joué par l'OACI dans l'établissement de normes aéronautiques internationales, et comme ce manuel est l'un des plus récents et des plus complets actuellement disponibles dans les milieux aéronautiques, il a souvent été consulté au cours de l'enquête pour servir de référence ou de normes pour le SGS.
Transports Canada a investi des ressources considérables dans le développement du SGS au Canada et tient un rôle de leader mondial. Avant même que l'OACI n'impose l'adoption du SGS, il avait introduit le SGS dans de nombreux secteurs du transport public canadien. Transports Canada est le premier organisme de l'aviation civile à avoir mis en place une réglementation obligeant les compagnies aériennes à adopter le SGS. Les événements ci-après donnent un bref historique du développement du SGS dans l'aviation civile au Canada :
- 2000 jusqu'à présent : développement de 17 Avis de proposition de modification (APM) et modifications à la Loi sur l'aéronautique.
- 2001 : publication de Introduction aux systèmes de gestion de la sécurité (TP 13739).
- 2001 à 2004 : Campagne d'information sur les systèmes de gestion de la sécurité.
- 2002 : publication de Systèmes de gestion de la sécurité destinés aux exploitants aériens et aux organismes de maintenance des aéronefs - Un guide de mise en œuvre (TP 13881).
- 2004 : publication de Systèmes de gestion de la sécurité propres aux petites exploitations aériennes : Un guide de mise en œuvre pratique (TP 14135).
- 2005 : publication du Guide sur les procédures de mise en œuvre des systèmes de gestion de la sécurité (TP 14343).
1.11.3 Description du système de gestion sur la sécurité
Le document d'orientation de Transports Canada intitulé Introduction aux systèmes de gestion de la sécurité (TP 13739) décrit le SGS comme suit :
Un système de gestion de la sécurité est une façon de traiter la sécurité sous une optique commerciale. Il désigne un processus systématique, explicite et global de gestion des risques inhérents à la sécurité. À l'instar de tous les systèmes de gestion, celui-ci prévoit l'établissement d'objectifs, la planification et la mesure du rendement. Un système de gestion de la sécurité est incorporé dans la structure même d'une organisation; il devient partie intégrante de sa culture, de la façon dont les employés s'acquittent de leurs fonctions.
La Partie I du RAC donne une définition de base du SGS et décrit les éléments essentiels :
Un SGS est un « processus documenté de gestion des risques qui intègre des systèmes d'exploitation et des systèmes techniques à la gestion des ressources financières et humaines pour assurer la sécurité aérienne ou la sécurité du public ».
Le système de gestion de la sécurité doit comprendre :
- une politique en matière de sécurité sur laquelle repose le système;
- un processus qui permet d'établir des buts en vue d'améliorer la sécurité aérienne et d'évaluer dans quelle mesure ils ont été atteints;
- un processus qui permet de déceler les dangers pour la sécurité aérienne et d'évaluer et de gérer les risques qui y sont associés;
- un processus qui fait en sorte que le personnel soit formé et compétent pour exercer ses fonctions;
- un processus qui permet de rendre compte à l'interne des dangers, des incidents et des accidents et de les analyser et qui permet de prendre des mesures correctives pour empêcher que ceux-ci ne se reproduisent;
- un document contenant tous les processus du système de gestion de la sécurité et un processus qui fait en sorte que le personnel connaisse ses responsabilités à l'égard de ceux-ci;
- un processus qui permet d'effectuer des examens ou des vérifications périodiques du système de gestion de la sécurité et des examens ou des vérifications du système de gestion de la sécurité pour un motif valable;
- toute exigence supplémentaire relative au système de gestion de la sécurité qui est prévue par le présent règlement.
L'élément le plus important d'un SGS est un engagement ferme et continu de la direction de l'entreprise. Elle doit établir et soutenir une philosophie de sécurité clairement formulée, accompagnée de politiques d'entreprise, dont une politique non punitive de compte rendu, un processus de surveillance interne de la sécurité, et une documentation de sécurité. Si l'entreprise fait de la sécurité sa priorité absolue, la structure de la gestion, l'attribution des responsabilités et l'octroi de ressources suffisantes doivent alors être en rapport avec ses objectifs de sécurité énoncés.
L'exploitant doit employer des mécanismes à la fois réactifs et proactifs d'identification des dangers à travers toute l'entreprise d'après des comptes rendus volontaires d'incidents, des enquêtes sur la sécurité, des vérifications de sécurité des opérations aériennes et des évaluations de la sécurité ou des risques. Les comptes rendus d'incidents et de dangers doivent être soigneusement examinés afin de détecter les faiblesses internes et les lacunes de sécurité qui peuvent ensuite être atténuées par des stratégies appropriées.
L'évaluation de la sécurité est également un mécanisme proactif permettant d'identifier les dangers potentiels et de trouver des moyens de maîtriser les risques associés à ces dangers. Une évaluation de la sécurité peut se justifier lors de la planification de modifications majeures concernant les procédures opérationnelles, l'acquisition ou la configuration d'équipements ou les relations organisationnelles au sein de l'entreprise.
La gestion des risques comprend trois éléments essentiels : l'identification des dangers, l'évaluation des risques et les moyens d'atténuation. Lorsqu'un danger est identifié, le risque est évalué pour déterminer la gravité de ses conséquences éventuelles ou les effets d'un événement dangereux et la probabilité que le danger contribue à un événement. Dans l'exemple du tableau (Figure 6), un danger ayant des conséquences de gravité modérée, mais qui est peu probable serait évalué comme présentant un risque faible à modéré.
Probabilité de conséquence malheureuse | |||||
---|---|---|---|---|---|
Gravité des conséquences | Fréquente | Probable | Occasionnelle | Peu probable | Fort peu probable |
Catastrophique | Élevé | Élevé | Élevé | Modéré | Faible à modéré |
Grave | Élevé | Élevé | Modéré à élevé | Modéré | Faible |
Modérée | Élevé | Modéré | Modéré | Faible à modéré | Faible |
Négligeable | Faible | Faible | Faible | Faible | Faible |
Figure 6. Exemple de tableau d'évaluation des risques
Quand le danger est identifié et le niveau de risque évalué, un moyen d'atténuation acceptable est mis en place et communiqué aux employés. Le processus de gestion du risque ne s'arrête pas là. Le moyen de défense doit être évalué et parfois modifié ou remplacé s'il génère un nouveau danger imprévu. Cette façon de boucler la boucle dans la gestion de la sécurité demande une rétroaction fondée pour permettre à la gestion de remettre en question ses suppositions, de tester la validité de ses décisions, et de juger l'efficacité de ses stratégies de sécurité.
L'OACI et Transports Canada ont reconnu l'importance d'une gestion structurée de la documentation et de l'information. La revue de la documentation joue un rôle crucial dans les audits de supervision de la sécurité, internes ou externes, afin de cerner les tendances ou les lacunes en matière de gestion de la sécurité. Lorsque des dangers similaires réapparaissent, la compagnie est en mesure d'appliquer des stratégies d'atténuation appropriées. Éventuellement, une comparaison des résultats de plusieurs audits ou de rapports d'évaluation internes subséquents peut révéler d'autres lacunes organisationnelles. Finalement, la consignation des mesures de sécurité et leur diffusion parmi le personnel renforcent l'engagement de l'entreprise à établir une culture de sécurité.
1.11.4 Mise en place du système de gestion de la sécurité au Canada
Transports Canada possède une expérience dans la mise en place du SGS avec d'autres modes de transport. Le SGS est obligatoire dans le secteur ferroviaire de compétence fédérale depuis 2001. Également en 2001, en vertu des exigences de l'Organisation maritime internationale (OMI), la Loi sur la marine marchande du Canada a rendu le SGS obligatoire pour tout navire canadien engagé dans le transport international. Un certain nombre de compagnies maritimes canadiennes ont volontairement adopté le SGS, et Transports Canada encourage activement son adoption.
Les compagnies aériennes canadiennes régies par la sous-partie 705Footnote 14 du RAC sont obligées d'avoir un SGS depuis le 31 mai 2005. Février 2010 est la date prévue de mise en place obligatoire du SGS pour les exploitants régis par les sous-parties 702Footnote 15, 703Footnote 16 et 704Footnote 17 du RAC.
Les exploitants d'aéronefs d'affaires doivent aussi adopter le SGS, mais leur cadre réglementaire (sous-partie 604 du RAC) est différent de celui des exploitants régis par les sous-parties 700 du RAC (voir 1.12.4).
Sachant que la mise en place du SGS est un défi et doit être progressive, Transports Canada a opté pour une approche réaliste. Il a publié un plan de mise en œuvre en quatre phases sur une période de trois ans. Ce plan, qui fixe des étapes claires pour l'élaboration d'un SGS de compagnie, est présenté dans le Guide sur les procédures de mise en œuvre des systèmes de gestion de la sécurité (TP 14343).
1.11.5 Responsabilité de la supervision de la sécurité
L'OACI précise le concept de responsabilité partagée dans une supervision formelle de la sécurité et la définit comme l'une des pierres angulaires d'une gestion efficace de la sécurité. L'exploitant doit avoir dans toute l'entreprise un système de collecte des rapports de danger. Il doit régulièrement conduire des audits internes et faire évaluer périodiquement l'efficacité de son SGS par un tiers indépendant. L'OACI mentionne également que l'État ou l'organisme délégué chargé de la supervision réglementaire doit avoir un programme de surveillance continue afin de vérifier que l'exploitant respecte sa politique, ses objectifs, ses buts et ses normes de sécurité.
Dans la supervision de la sécurité, l'OACI fait la distinction entre la responsabilité de l'État et celle de l'entreprise dont le rôle est d'assurer le contrôle de la performance. L'avantage d'une supervision adéquate par l'État, outre de simplement faire respecter la réglementation, est d'offrir à l'entreprise une évaluation indépendante lui donnant un autre moyen proactif d'identifier les dangers, de valider l'efficacité des mesures de sécurité prises et d'évaluer en continu sa performance en matière de sécurité. Le partage des responsabilités de supervision et de contrôle de la performance entre l'État et l'exploitant doit être équilibré. L'OACI ne suggère aucunement de confier entièrement la responsabilité de supervision de la sécurité à un organisme.
Au Canada, Transports Canada, et en dernier ressort le ministre des Transports, sont chargés du maintien de la sécurité aérienne comme le prévoient la Loi sur l'aéronautique et le RAC, et dans le respect des normes et pratiques recommandéesFootnote 18 de l'OACI.
Les exploitants ont une responsabilité importante dans la gestion de la sécurité au sein de leur entreprise et sont tenus d'avoir un processus interne de révisions ou d'audits périodiques de leur SGS afin d'en garantir l'efficacité dans la réduction des risques.
Certains craignent qu'une augmentation de la délégation des responsabilités de supervision à certains exploitants augmente en réalité le risque d'accident. Conscient de ce fait, Transports Canada a émis l'Instruction visant le personnel IP SUR-003, Activités de surveillance réglementaire pendant la période de transition aux systèmes de gestion de la sécurité (SGS), qui est entrée en vigueur le 31 mai 2007. Ce document décrit les méthodes de surveillance des titulaires de certificat déjà régis par la réglementation SGS et ceux qui ont volontairement adopté le SGS. Le document s'applique aux employés ainsi qu'aux personnes ou organismes qui exercent les privilèges d'une délégation de pouvoirs ministérielle externe.
La section 5 de l'instruction résume les différents outils de surveillance et leur application. À la section 5.1, Surveillance dans les entreprises possédant un SGS complet, Transports Canada indique que les organismes ayant un SGS approuvé feront l'objet d'une surveillance de routine continue. Toute indication selon laquelle une entreprise éprouve des difficultés pourrait entraîner une surveillance de validation. À la section 5.4, Surveillance continue des organismes conformes, Transports Canada mentionne que la surveillance continue des indicateurs de risques associés aux activités d'une entreprise se poursuivra, car elle peut mettre en évidence un problème lié à son SGS. Si le SGS n'est pas conforme, Transports Canada envisagera de recourir à des activités de surveillance traditionnelles.
1.12 Réglementation et surveillance de la sécurité de l'aviation d'affaires au Canada
1.12.1 Surveillance réglementaire des aéronefs d'affaires par Transports Canada
Avant 1983, aucune réglementation ne régissait l'utilisation d'un aéronef d'affaires dans un service aérien non commercial. En réponse à une série d'accidents, dont l'un mettait en cause un gros avion transportant du personnel d'entreprise, Transports Canada a adopté l'Ordonnance sur le transport des passagers à bord d'avions privés (Ordonnance sur la navigation aérienne, série I, no 2). L'ordonnance s'appliquait à l'exploitation des gros avionsFootnote 19 et des avions pressurisés à turbomoteur utilisés pour le transport de passagers. En 1996, avec l'adoption du Règlement de l'aviation canadien (RAC), le certificat d'exploitation privée (également appelé certificat d'exploitant privé ou CEP) a été établi en vertu de la sous-partie 604 du RAC.
En 1999Footnote 20, le Canada comptait 121 titulaires de CEP exploitant 193 aéronefs et employant 672 pilotes. La majorité des 193 aéronefs étaient des jets d'affaires. Environ 16 inspecteurs de l'aviation civile basés dans les bureaux régionaux de Transports Canada à travers le pays surveillaient les opérations. Ils effectuaient les vérifications réglementaires, les CCP et les visites de sécurité et assuraient la surveillance et le suivi des incidents.
1.12.2 Association canadienne de l'aviation d'affaires
L'Association canadienne de l'aviation d'affaires (ACAA) a été incorporée en 1962. Elle a pour but officiel de « représenter les exploitants d'aéronefs d'affaires et de promouvoir l'image et l'utilité de l'aviation d'affaires » au Canada en défendant les intérêts de ses membres. L'ACAA représente des exploitants qui vont de la petite entreprise à un seul pilote-propriétaire jusqu'au département des vols des grandes entreprises.
Vers la fin de 1998, l'ACAA et Transports Canada ont commencé à envisager le transfert de l'administration et de la gestion de la sous-partie 604 du RAC à l'ACAA. L'autoréglementation par l'industrie présentait plusieurs avantages pour les exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC et pour Transports Canada. Les exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC étaient d'avis que les règles et les normes de l'ACAA pouvaient offrir plus de flexibilité et d'efficacité, et leur permettraient de jouer un rôle plus direct dans la gestion de la sécurité, comme la certification des pilotes.
Les avantages pour Transports Canada portaient sur la possibilité d'affecter les ressources jusque-là consacrées à la surveillance de la sous-partie 604 du RAC, à des activités à plus haut risque. Transports Canada a estimé que le coût annuel de la surveillance des exploitants privés, avec son cadre réglementaire traditionnel, était de l'ordre de 1 à 1,5 million de dollars.
1.12.3 Études sur l'autoréglementation – Phase 1 et Phase 2
Entre 1999 et 2000, Transports Canada et l'ACAA ont mené une étude de faisabilité conjointe sur l'autoréglementation de l'aviation d'affaires au Canada. Un rapport intitulé Autoréglementation de l'aviation d'affaires au Canada a été publié le 21 mars 2000. L'étude concluait qu'il était possible de modifier la sous-partie 604 du RAC en vue de transférer les responsabilités réglementaires à l'ACAA. Transports Canada et l'ACAA ont accepté les conclusions de l'étude.
Plus tard, une seconde étude a été lancée pour établir un cadre réglementaire et administratif. Le rapport final, Système de normes de sécurité des opérations aériennes pour l'aviation d'affaires - Phase 2 : Normes, procédures et frais visant les exploitants, a été publié le 15 mars 2001. L'étude a examiné trois options et a recommandé que l'ACAA adopte une approche large basée sur le SGS pour établir des normes pour les exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC. Un profil de risque de l'exploitant constituerait la base sur laquelle le SGS serait établi, mis en place et évalué. Le profil de risque est décrit comme une carte qui délimite les contours du risque le plus élevé des opérations quotidiennes. L'étude indiquait que le profil de risque devait être suffisamment bien documenté pour permettre au gouvernement, à la direction de l'entreprise, aux assurances et autres, de comprendre comment le profil de risque a été déterminé, évalué et géré.
L'approche réglementaire proposée comportait l'élaboration d'un ensemble de règles fondées sur les performances directement liées au SGS de l'exploitant. Ces règles devaient être incluses dans des normes élaborées par l'ACAA et s'intituler système de normes de sécurité des opérations aériennes pour l'aviation d'affaires (système NSOA-AA). La phase 2 de l'étude soulignait le besoin de juger en continu comment les exigences NSOA-AA continuaient à répondre aux objectifs.
Les deux études admettaient qu'une autoréglementation par l'industrie comportait des risques. Les études notaient cependant que les antécédents des exploitants privés dans le domaine de la sécurité étaient excellents et qu'historiquement, ces derniers s'étaient montrés prudents dans les risques qu'ils étaient prêts à prendre. Vu que la surveillance des exploitants resterait une nécessité après le transfert des responsabilités réglementaires de Transports Canada à l'ACAA, l'ACAA devrait conduire des vérifications pour vérifier si les exploitants respectaient les règlements et les normes. L'étude notait également que le ministre des Transports était responsable d'émettre des directives à l'ACAA pour qu'elle prenne des mesures correctives si des lacunes pouvant compromettre la sécurité étaient décelées dans les systèmes ou les procédures de l'ACAA.
Il a été conclu que les risques liés au transfert de la surveillance et de l'application de la loi au secteur privé pouvaient être atténués par diverses mesures (élaboration et publication d'un manuel des méthodes de vérification ou adoption de l'actuel manuel de vérification de Transports Canada; surveillance du travail des vérificateurs chargés de contrôler les exploitants au nom du secteur privé; vérifications périodiques de Transports Canada). Un directeur de la certification qualifié, employé par l'ACAA, devrait assurer la certification des exploitants et la révision des rapports de vérification. Il pourrait ainsi évaluer la qualité du travail des vérificateurs en plus du contenu des rapports de vérification, et de ce fait, assurer la qualité et la standardisation des vérifications.
Les deux études ont noté que le coût du nouveau programme pour les membres de l'ACAA, par rapport au coût de la surveillance traditionnelle exercée par Transports Canada, était un aspect important de l'autoréglementation. Il a été estimé que le coût du nouveau programme devrait idéalement être le même que celui du programme existant. Par ailleurs, toute nouvelle norme nécessaire à la gestion adéquate de la sécurité devait être rentable. Par exemple, un système de vérification avec des employés de l'ACAA serait efficace, mais d'une mise en place et d'un entretien onéreux.
La responsabilité potentielle de l'organisme d'autoréglementation et de son comité de direction était une autre préoccupation. En établissant ses propres normes et en certifiant les exploitants selon ces normes, on pensait que l'ACAA assumerait une responsabilité impliquant un devoir de diligence. Par voie de conséquence, ce dernier entraîne une responsabilité de négligence potentielle en cas d'accident raisonnablement prévisible d'un titulaire de certificat ou de négligence d'un vérificateur accrédité.
1.12.4 Programme de certificat d'exploitant privé de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires
Le 1er janvier 2003, l'ACAA a commencé à administrer la certification des exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC. La tâche était immense, car le volume de travail de conversion des anciens certificats (délivrés en application de la sous-partie 604 du RAC) en certificat d'exploitant privé (CEP) pour les exploitants désireux de se joindre au programme dépassait les prévisions. Toutefois, le travail a été fait avec efficacité et en temps opportun.
Les études de faisabilité conjointes entre Transports Canada et l'ACAA ont recommandé d'élargir la sous-partie 604 du RAC afin de permettre aux exploitants déjà titulaires d'un CEP d'utiliser des aéronefs ne répondant pas aux critères d'admissibilité du règlement. Ce changement a été accepté par l'ACAA et les critères ont été étendus aux hélicoptères et aux avions monomoteurs et bimoteurs non pressurisés. Le programme CEP ne vise plus uniquement le département des vols des grandes entreprises, il porte maintenant sur des activités à haut risque comme les opérations en hélicoptère, la lutte contre les incendies de forêt et les vols de la Gendarmerie royale du Canada. L'ACAA s'attend aussi à ce que le nombre de titulaires de CEP augmente avec la mise en service des jets très légers. Le nombre officiel de titulaires de CEP donné par l'ACAA en avril 2008 était de 321.
Les études de faisabilité décrivaient l'ACAA comme un organisme de réglementation délégué alors que l'ACAA croyait que son rôle était d'offrir un moyen efficace et facile pour les exploitants d'obtenir la certification. Actuellement, trois personnes font partie du personnel de l'ACAA chargé de la certification et du développement continu du programme CEP.
Une vérification satisfaisante du SGS de l'exploitant par une tierce partie est la condition essentielle pour obtenir et maintenir un CEP en vigueur. Des vérifications sont nécessaires pour vérifier que l'exploitant se conforme aux NSOA-AA de l'ACAA et que son SGS est acceptable. Toutefois, l'ACAA considérait qu'en tant qu'organisme de certification, elle ne pouvait contraindre ni forcer un exploitant à se conformer à ses normes. Elle croyait plutôt que les titulaires de certificats finiraient par répondre d'eux-mêmes aux normes grâce à la prise de conscience grandissante de la culture de la sécurité dans l'aviation. Outre les vérifications de certification périodiques effectuées tous les 1 à 3 ans par un vérificateur accrédité, l'ACAA n'assurait aucune surveillance, planifiée ou structurée, des exploitants privés.
L'ACAA a investi des ressources dans le développement de documents et de manuels pour aider ses membres. Elle a également développé un programme de formation destiné à répondre aux besoins de ses membres après avoir constaté des lacunes dans leurs connaissances et compétences. Toutefois, la participation aux ateliers de formation a été nettement inférieure aux attentes et ils ont été annulés en raison du manque à gagner qui en a résulté.
1.12.5 Vérificateurs accrédités de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires
En 2002, 14 vérificateurs ont été formés et accrédités par l'ACAA à travers le Canada. Ils ont été choisis d'après les critères retenus dans les études de faisabilité. Ils représentent un éventail d'expertise en aviation avec différents niveaux d'expérience dans le développement, l'enseignement et la vérification des SGS. Selon les études de faisabilité, les salaires et les coûts des assurances en responsabilité afférentes seraient prohibitifs si les vérificateurs travaillaient directement pour l'ACAA et dépasseraient largement ses revenus annuels. Cela a conduit au système actuel où les vérificateurs accrédités sont des entrepreneurs indépendants.
L'ACAA ne recommande aucun vérificateur en particulier et n'établit pas les contacts. Une liste des vérificateurs accrédités et leurs coordonnées sont affichées sur son site web. L'ACAA s'efforce d'éliminer toute perception de relation employeur-employé entre elle et les vérificateurs.
Outre le conflit d'intérêts inhérent ou l'influence possible des compagnies auxquelles les vérificateurs accrédités offrent leurs services, l'ACAA répugne à imposer aux vérificateurs une rotation entre les exploitants, car elle considère qu'il s'agit d'une ingérence dans les relations vérificateur-client.
Des téléconférences se tiennent régulièrement pour permettre de discuter des problèmes survenus pendant les vérifications. La participation n'est toutefois pas obligatoire et certains vérificateurs y participent rarement. Selon l'ACAA, les téléconférences, les ateliers de formation, les rencontres individuelles, la rétroaction des exploitants sont suffisants pour surveiller le travail des vérificateurs. Tous les deux ans, ils se réunissent pour réviser les procédures de vérification. Les autres années, le personnel de l'ACAA leur rend visite pour revoir les procédures de vérification et parfois, mais pas systématiquement, pour passer en revue les résultats de leurs récentes vérifications.
L'ACAA soutient fermement que sa philosophie à propos de la surveillance est adéquate pour assurer la cohérence et la normalisation de son programme de vérification CEP. Elle pense qu'avec le temps, les vérificateurs accrédités gagneront en connaissances et compétences pour évaluer les capacités de gestion de la sécurité des exploitants. L'ACAA ne participe pas aux vérifications ni ne les observe, car selon elle, cela ne contribuerait en aucune façon à améliorer le programme de vérification.
Depuis le début du programme en 2003, l'ACAA estime que les vérificateurs accrédités ont effectué environ 750 vérifications initiales et périodiques.
1.12.6 Lignes directrices de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires pour l'évaluation d'un système de gestion de la sécurité
Un document de l'ACAA intitulé Guidelines for Evaluating a Safety Management System (Lignes directrices pour l'évaluation d'un système de gestion de la sécurité) a été préparé en janvier 2003 dans le but [Traduction] « d'aider les vérificateurs à planifier, préparer et effectuer l'évaluation d'un SGS ainsi qu'à établir le rapport d'évaluation ». Ce document est aussi fourni aux demandeurs de CEP pour expliquer le processus de vérification. Il précise que : [Traduction] « L'évaluation du SGS a pour but d'établir dans quelle mesure l'exploitant gère les risques à la sécurité au niveau le plus faible qu'il peut raisonnablement atteindre. Cela se fait en évaluant la qualité, la pertinence et l'efficacité de la gestion de la sécurité par l'exploitant ».
Pareillement à l'approche de Transports Canada avec une mise en place progressive du SGS, l'ACAA a également adopté une philosophie d'attentes raisonnables. Ainsi, le guide mentionne que : [Traduction] « La mise en place et l'utilisation d'un SGS prennent du temps, même dans le cas d'un service des vols bien structuré. Par conséquent, le vérificateur doit établir le niveau de performance auquel il peut s'attendre quand il évalue le SGS ».
Le guide décrit trois niveaux de développement du SGS avec l'évaluation correspondante du vérificateur.
- Une évaluation de niveau un est prévue pour une demande de CEP initiale. Pour répondre à une évaluation de niveau un, [Traduction] « le SGS doit être documenté, doit être approuvé, doit disposer des ressources nécessaires, et doit être en cours de mise en application » et [Traduction] « l'évaluation de niveau un doit être principalement centrée sur l'évaluation de la qualité et de la pertinence du SGS ». La compagnie doit montrer au vérificateur accrédité de l'ACAA que l'infrastructure nécessaire d'un SGS est en place et que la gestion passée et future de la sécurité est adéquatement ciblée pour être révisée ou modifiée. Selon le guide, une évaluation satisfaisante devrait avoir une durée de validité de un an avant d'être évaluée de nouveau.
- Une évaluation de niveau deux est prévue pour le titulaire de CEP qui a déjà eu une évaluation de niveau un ou deux. Pour répondre à une évaluation de niveau deux, le SGS doit fonctionner, résultats à l'appui. Pendant l'évaluation, la compagnie doit montrer que la gestion de la sécurité est adéquatement ciblée et que les risques à a sécurité sont gérés efficacement. Généralement, une évaluation de niveau deux satisfaisante prolonge la validité du CEP pour une période de un à trois ans en fonction de la nature des constatations, à la discrétion du vérificateur accrédité de l'ACAA.
- Dans une évaluation de niveau trois, la compagnie doit montrer que son SGS fonctionne et comprend un processus d'amélioration permanent. Une évaluation de niveau trois est effectuée au cours d'une évaluation récurrente chez un titulaire de CEP qui a obtenu au moins deux évaluations récurrentes satisfaisantes. Une évaluation de niveau trois a pour objectif de confirmer que la gestion de la sécurité est complètement intégrée aux activités de la compagnie et que la culture de sécurité est entretenue de façon résolue.
Contrairement à Transports Canada, l'ACAA n'a pas établi de calendrier fixe pour la mise en place des SGS, car elle était d'avis qu'elle ne pouvait pas obliger les titulaires de CEP à se conformer au SGS tant qu'ils n'étaient pas prêts. L'ACAA a indiqué que très peu de ses titulaires de CEP avaient progressé au-delà du niveau un et a laissé entendre que dans certains cas, cela pourrait prendre bien des années avant qu'ils puissent le faire.
En 2005, l'ACAA a embauché un consultant pour évaluer le programme CEP sur la période allant du 1er janvier 2003 au 1er juin 2005. L'évaluation portait sur la revue de la documentation de l'ACAA et des entrevues avec plusieurs employés de l'ACAA, 11 vérificateurs accrédités, 6 titulaires de CEP et l'inspecteur de Transports Canada chargé de la surveillance des exploitants de l'aviation d'affaires. Certains vérificateurs ont déclaré que le SGS de plusieurs titulaires de CEP était encore rudimentaire. La réponse immédiate de l'ACAA a été d'inciter ses vérificateurs à faire particulièrement attention à cette lacune potentielle. De plus, l'ACAA a prévu d'améliorer la compréhension de la gestion de la sécurité chez les exploitants grâce à des échanges continus entre ses vérificateurs et ses spécialistes du programme CEP, et en proposant des ateliers de formation supplémentaires.
1.12.7 Surveillance de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires exercée par Transports Canada
Début 2006, trois ans après le début de l'administration de la certification des exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC par l'ACAA, Transports Canada a évalué la gestion du système CEP assurée par l'ACAA avec l'intention de vérifier si ses politiques, procédures et pratiques répondaient aux exigences de la sous-partie 604 du RAC.
Un protocole d'évaluation a été préparé. Une lacune liée à une exigence réglementaire ou à une politique ou procédure de l'ACAA serait appelée « constatation ». Une lacune liée à une exigence non réglementaire serait appelée « observation ». Selon le protocole, l'ACAA devait fournir une réponse écrite à Transports Canada pour présenter son plan de mesures correctives à court et à long terme pour chacune des constatations et après approbation du plan, Transports Canada devait contrôler sa mise en place.
Le rapport d'évaluation a été publié le 11 mai 2007 et couvrait la période de janvier 2003 à mars 2007. Le rapport a établi que le fondement du programme CEP de l'ACAA était sain, car les responsabilités visant à assurer la continuité du programme étaient correctement réparties entre les exploitants privés, les vérificateurs accrédités, le personnel du programme CEP et la direction de l'ACAA. Le rapport a donné lieu à 6 constatations et 7 observations. Une des constatations (FDG-05-01) indiquait que l'ACAA n'exerçait pas un contrôle suffisant de la qualité du programme CEP, notamment les activités de ses vérificateurs. À l'examen du manuel de procédures CEP, l'équipe d'évaluation a noté que certains éléments mentionnés dans la phase 2 de l'étude de faisabilité étaient absents, dont un programme d'assurance de la qualité.
Le rapport notait également qu'aucun document n'indiquait que l'ACAA exerçait un contrôle direct des activités des vérificateurs. L'équipe d'évaluation en a conclu que l'ACAA considérait la formation périodique et les téléconférences de normalisation comme un programme d'assurance de la qualité adéquat. Selon le rapport, il s'agissait en fait de mesures de contrôle de qualité qui ne permettaient pas d'assurer la normalisation dans la conduite des vérifications ni de vérifier que les politiques et les procédures étaient suivies uniformément. L'ACAA a déclaré à l'équipe d'évaluation qu'elle tenait de nombreuses rencontres individuelles avec les vérificateurs pour examiner la documentation et discuter de la méthodologie de vérification; toutefois, ces visites n'ont pas été documentées.
Une observation (OBS-04-02) faisait état d'anomalies dans le concept du profil de risque. Les vérificateurs accrédités de l'ACAA ont mentionné à Transports Canada que les profils de risques établis par les compagnies étaient plutôt superficiels et manquaient souvent de documents justificatifs. En particulier, les petites compagnies avec un exploitant-propriétaire avaient du mal à établir un profil de risque fonctionnel. Le personnel du programme CEP a reconnu qu'il s'agissait-là d'un problème difficile, et l'ACAA a indiqué qu'elle continuerait à faire la promotion des programmes de formation destinés au développement, à la mise à jour et à l'utilisation des profils de risques de compagnie.
Le 4 juin 2007, l'ACAA a soumis un plan de mesures correctives pour chacune des constatations. Comme mesure à court terme pour la constatation FDG-05-01, l'ACAA a indiqué qu'elle avait mis son personnel au courant du contenu et du fondement des constatations. La mesure à long terme proposée pour la constatation FDG-05-01 consistait à modifier avant le 31 décembre 2007 la section 3 du manuel CEP, en changeant le titre actuel de « Assurance de la qualité » à « Contrôle de la qualité » et de contrôler les exigences de formation des vérificateurs accrédités. De plus, l'ACAA a proposé d'améliorer l'efficacité du système actuel de contrôle des vérifications et de la tenue des dossiers.
Transports Canada a initialement rejeté le plan de mesures correctives pour la constatation FDG-05-01 en raison du manque de détails permettant de juger de son efficacité. Aucun plan de mesures correctives révisé n'a été soumis, mais le 21 septembre 2007, Transports Canada a adressé une lettre à l'ACAA mettant officiellement un terme à l'évaluation. Le BST s'est efforcé de savoir pourquoi l'évaluation avait été terminée alors que le plan de mesures correctives, initialement jugé inacceptable, n'avait jamais été révisé. Le BST a appris qu'il y avait eu de nombreuses discussions entre Transports Canada et l'ACAA à propos de cette lacune et sur la meilleure façon de la traiter. La teneur de ces discussions n'a pas été consignée, ni sous forme de procès-verbal, ni sous forme de compte rendu de décisions.
1.13 Jetport
1.13.1 Généralités
Jetport est une compagnie de vols nolisés basée à Hamilton. Elle a commencé ses opérations en 1997 avec un Cessna Caravan et un Learjet 31A. Elle s'est considérablement développée depuis et elle propose maintenant un service de vols nolisés et des vols en jet à partir de son propre service FBOFootnote 21 spécialisé dans le service à l'aviation générale et à l'aviation d'affaires. Elle offre un service 24 heures aux aéronefs en transit et assure la maintenance des Cessna Caravan, des Beechcraft King Air, des Learjet, des Gulfstream G100 et des Bombardier de la série Challenger. Au moment de l'accident, la compagnie exploitait 8 avions et 1 hélicoptère dont elle était propriétaire et elle gérait l'exploitation d'un autre avion d'une compagnie locale en vertu d'un CEP de l'ACAA.
Jetport est titulaire d'un certificat d'exploitation aérienne délivré par Transports Canada. La compagnie était autorisée à exploiter tous ses aéronefs en vertu des sous-parties 703 et 704 du RAC à l'exception du Global 5000. Elle prévoyait exploiter le Global 5000 en vertu de la sous-partie 704 du RAC, mais la certification avait été retardée dans l'attente de l'approbation du manuel de la sécurité cabine (cabin safety manual). Entre-temps, le Global 5000 était exploité en vertu d'un CEP délivré par l'ACAA pour effectuer des opérations régies par la sous-partie 604 du RAC. Le propriétaire de Jetport utilisait les aéronefs de la compagnie pour ses déplacements et le transport de ses employés, ainsi que pour le transport des employés d'une autre de ses compagnies (Fox Harbour Development Limited) chargée de l'exploitation de CFH4, du complexe de villégiature et du terrain de golf situés à Fox Harbour.
Au moment de l'accident, Jetport comptait 49 employés : 21 pilotes dont le directeur des opérations aériennes, le chef des opérations et le chef pilote; 9 employés de la maintenance dont le directeur de la maintenance; 4 coordonnateurs des vols; 10 employés des installations FBO chargés du ravitaillement et de la manutention des aéronefs; et 5 employés à l'administration.
1.13.2 Historique des accidents de Jetport
Depuis le début des opérations en 1997, les aéronefs exploités par la compagnie ont été impliqués dans cinq accidents, dont le présent accident. Deux des quatre accidents antérieurs concernaient des Cessna 208 Caravan amphibies, et les deux autres des jets d'affaires.
Un accident est survenu le 22 mars 2000 à un jet Israel Aircraft Industries Astra SPX de Jetport lors d'une approche de nuit sur la piste 33 de CFH4. L'avion est descendu trop bas en approche et a heurté la cime des arbres. L'équipage a remis les gaz, l'avion est remonté sans problème et s'est posé à Charlottetown (CYYG). L'avion a subi des dommages importants (rapport d'enquête du BST A00A0051). L'APAPI a été installé à la suite de cet accident pour offrir un guidage supplémentaire aux pilotes en approche à cet aérodrome.
Le 22 novembre 2005, un jet Gulfstream 100 de Jetport en partance de West Palm Beach en Floride aux États-Unis a eu un accident à l'atterrissage à Hamilton (CYHM). Après une approche aux instruments, l'avion a fait un atterrissage long sur une piste mouillée; quand il a touché le sol, il ne restait que 3000 pieds environ avant l'extrémité de piste. Toute la puissance de freinage a été utilisée pour ralentir l'avion, mais il est sorti en bout de piste et a parcouru 122 pieds sur un terrain en pente descendante avant de s'immobiliser brusquement. L'avion a subi des dommages importants (rapport d'enquête du BST A05O0257).
1.13.3 Expérience de la gestion de la sécurité de Jetport
Le premier contact des employés de Jetport avec le SGS remonte à octobre 2004 alors que Jetport assurait la gestion d'un aéronef appartenant à un tiers titulaire d'un CEP basé à Hamilton. Elle exploitait l'aéronef en son nom selon la sous-partie 604 du RAC. De façon à obtenir le CEP, Jetport devait soumettre un manuel CEP décrivant un SGS fonctionnel. Un vérificateur accrédité de l'ACAA avait évalué le SGS et l'avait jugé acceptable, et un CEP avait été délivré.
En prévision des modifications aux sous-parties 703 et 704 du RAC en mars 2009, Jetport était en train de développer un SGS propre à ses opérations régies par les sous-parties 703 et 704 du RAC. Un consultant préparait une « analyse des écarts » et un plan de mise en œuvre de son service de maintenance. La compagnie prévoyait établir une liste des exigences des opérations régies par les sous-parties 703 et 704 du RAC pour son SGS dans un avenir proche.
Même si Jetport était dans l'obligation d'avoir un SGS fonctionnel en vertu des NSOA-AA depuis 2004 pour la gestion de l'aéronef appartenant à un tiers et plus récemment, pour le Global 5000, il a été établi qu'au moment de l'accident, malgré plusieurs vérifications CEP de l'ACAA réussies, Jetport suivait encore l'approche traditionnelle de la gestion du risque.
L'agent de sécurité aérienne de Jetport était un pilote chevronné qui occupait ce poste depuis plusieurs années. Il avait suivi le cours d'agent de sécurité aérienne dispensé par Transports Canada, mais il n'avait jamais reçu de formation SGS. Plusieurs gestionnaires de Jetport avaient reçu une formation SGS sous forme d'ateliers de deux jours ou de séminaires.
À Jetport, n'importe quel employé pouvait soulever des préoccupations de sécurité et les soumettre à tout moment au gestionnaire du service des vols. Les rapports d'incident étaient revus par l'agent de sécurité aérienne, les circonstances faisaient l'objet d'une enquête et les causes étaient examinées par le comité de sécurité qui était chargé d'adopter des mesures correctives. Le comité jouait un double rôle, comme dans beaucoup d'entreprises de taille similaire. Il s'occupait des préoccupations liées à la sécurité des vols et des préoccupations de santé et sécurité au travail (SST). En tout, 11 rapports (2 portant sur la maintenance et 9 sur les opérations) établis entre février 2006 et novembre 2007 comportaient une description de l'incident et une case pour la mesure corrective proposée, mais rien n'indiquait un résultat final ni un suivi éventuel. La plupart des rapports d'incident étaient de nature réactive et un seul relatait un danger potentiel pour les opérations futures.
Les procès-verbaux des réunions du comité de sécurité de l'année précédente ont été demandés. Neuf documents allant de janvier 2007 à novembre 2007 ont été soumis. Pour la plupart, ils portaient sur des questions de SST liées à la maintenance à la base de Hamilton. À l'occasion, des questions liées à la sécurité des vols étaient abordées. Une question liée aux opérations qui avait été discutée et réglée était consignée dans un rapport de danger ou d'incident antérieur. L'agent de sécurité aérienne, le vice-président et le directeur des opérations aériennes sont réputés faire partie du comité, mais les fiches de présence des neuf réunions examinées indiquent que l'agent de sécurité aérienne et le vice-président n'ont jamais participé aux réunions. Le directeur des opérations aériennes a assisté à une réunion en octobre 2007 suite à une résolution prise lors de la réunion précédente qui recommandait la présence d'au moins un membre de la direction aux réunions.
Une mesure de sécurité résultant d'un rapport d'incident était communiquée aux employés sous forme d'énoncé de politique ou de changements dans les manuels de procédures. Les questions liées à la sécurité des vols étaient discutées au cours des séances d'information périodiques des pilotes. Aucune de ces pratiques de gestion de la sécurité n'était décrite de façon officielle dans un manuel de sécurité. Outre les procédures de sécurité très élémentaires mentionnées dans le manuel CEP, la sensibilisation des employés à la gestion de la sécurité à Jetport était transmise de bouche à oreille au fil du temps par les employés plus expérimentés.
1.13.4 Historique de la surveillance et des vérifications de Jetport
Les inspecteurs de Transports Canada ont assuré la majorité de la surveillance de la sécurité de Jetport parce qu'elle exploite ses aéronefs, à l'exception du Global 5000, en vertu des sous-parties 703 et 704 du RAC. Transports Canada a effectué plusieurs vérifications du département des vols et de la maintenance de Jetport. Les vérifications ont été complétées et les résultats étaient satisfaisants.
Jetport a également fait évaluer ses systèmes de gestion par deux firmes de vérification indépendantes réputées. En tout, trois vérifications ont été effectuées, en 2004, 2005 et 2007. Les résultats ont tous été satisfaisants avec des commentaires favorables de la part des vérificateurs. La dernière vérification précisait que Jetport avait un SGS officiel en place et attendait l'approbation de Transports Canada. Une recherche plus poussée a montré que la norme SGS utilisée pour faire l'évaluation ne donnait aucun détail sur le contenu d'un SGS satisfaisant, mais demandait seulement que le programme SMS soit documenté.
Depuis octobre 2004, Jetport assurait la gestion et l'exploitation d'un aéronef pour le compte d'un autre titulaire de CEP basé à Hamilton. Pour obtenir le CEP, Jetport a dû préparer un manuel CEP avec la description du SGS qu'elle se proposait d'utiliser. Lorsque le manuel a été prêt, Jetport a retenu les services d'un des vérificateurs accrédités de l'ACAA. La vérification a été faite en deux jours et le résultat a été jugé satisfaisant. La page couverture de la vérification, le formulaire de demande de CEP et les redevances ont été envoyés à l'ACAA qui a ensuite délivré le CEP. Environ deux ans après, en janvier 2007, le même vérificateur est revenu faire une vérification périodique selon le cycle des compagnies à faible risque. Cette deuxième vérification a également été réussie; la page couverture indiquant le résultat a été expédiée à l'ACAA qui a renouvelé le CEP.
1.13.5 Vérification du certificat d'exploitant privé du Global 5000 de Jetport
Lorsque Jetport a entrepris d'exploiter son nouveau Global 5000 en vertu d'un CEP de l'ACAA, elle a contacté le même vérificateur accrédité de l'ACAA. La vérification de certification initiale pour le Global 5000 a débuté le 29 août 2007 et s'est terminée lors d'une seconde visite chez Jetport le 19 octobre 2007. La page couverture du formulaire de vérification dûment remplie a été soumise à l'ACAA. Elle indiquait que la compagnie était bien gérée et qu'une vérification complète avait été effectuée avec des résultats satisfaisants (Annexe F – Formulaire du rapport de vérification de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires). Une autorisation d'exploitation pour effectuer des approches aux instruments à CFH4 a également été approuvée. L'ACAA a ensuite délivré un CEP à Jetport le 19 octobre 2007 pour l'exploitation du Global 5000.
Comme Jetport exploitait un avion pour un tiers avec un CEP depuis octobre 2004, elle aurait dû acquérir de l'expérience en SGS. Toutefois, elle a soumis pour examen le même manuel CEP en novembre 2004 et en janvier 2007 (avec la date de publication initiale du 1er décembre 2004 en bas de page) car le manuel avait déjà été examiné et accepté par ce vérificateur accrédité de l'ACAA. La version du manuel au moment de l'accident présentait des changements de noms et un nouveau profil de risque de la compagnie pour le Global 5000, mais à part ces changements, rien n'indiquait une évolution ou amélioration continue du SGS.
Le BST a examiné les trois vérifications faites chez Jetport par le vérificateur accrédité de l'ACAA ainsi que le manuel CEP que le vérificateur avait examiné. Le vérificateur a été interrogé par le BST en vue d'obtenir des éclaircissements et de juger de ses connaissances en SGS. Le travail des autres vérificateurs accrédités de l'ACAA auprès d'autres titulaires de CEP n'a pas été examiné.
Les documents ci-après ont été utilisés comme base pour juger le rapport d'évaluation SGS fait par le vérificateur accrédité :
- le Manuel de gestion de la sécurité (MGS) de l'OACI (Doc 9859, Première édition, 2006);
- les documents d'orientation SGS de Transports Canada;
- les normes SGS des NSOA-AA;
- le document de l'ACAA intitulé Guidelines for Evaluating a Safety Management System (Lignes directrices pour l'évaluation d'un système de gestion de la sécurité);
- le manuel CEP de Jetport;
- le modèle de manuel d'exploitation de l'ACAA.
La partie 2 de la liste de vérifications du rapport de vérification, qui porte sur les exigences SGS, comporte 14 éléments à vérifier lors d'une vérification initiale et 3 de plus pour une vérification périodique. Le dernier rapport de vérification indiquait qu'il s'agissait d'une vérification initiale, mais tous les éléments SGS, y compris les 3 éléments d'une vérification périodique, avaient été notés comme évalués. Les 17 éléments étaient notés comme conformes aux NSOA-AA de l'ACAA.
Toutefois, le manuel CEP comportait des énoncés très généraux sans préciser comment le SGS devait fonctionner ni comment assurer la formation continue ou instaurer un processus de comptes rendus. Il donnait des renseignements généraux sur les processus réactifs et proactifs sans indiquer les procédures à suivre. Il n'y avait aucune mention d'un système de compte rendu non punitif ni aucune explication sur la diffusion de l'information de sécurité. Jetport n'avait pas de processus proactif pour surveiller les facteurs de risque et évaluer les changements, et elle n'a pas pu fournir de documentation liée aux évaluations de risque ou aux évaluations des changements aux pratiques ou aux spécifications d'exploitation.
Tous les éléments du profil de risque de la compagnie (Annexe G – Profil de risque de la compagnie Jetport) ont été jugés à faible risque, mais rien n'indique comment cette cote a été établie. Les dangers doivent être jugés selon deux critères, la gravité et la probabilité, mais Jetport a évalué la gravité pour un ensemble de facteurs et la probabilité pour un autre. Ainsi, la gravité a été jugée comme faible pour des facteurs comme les quantités de carburant, les régions d'exploitation, les extrêmes météorologiques, les turbulences et les services d'intervention en cas d'urgence. Par contre, la probabilité de facteurs comme les renseignements météo, les aéroports, la maintenance, les qualifications, l'expérience et la compétence sur type de l'équipage ont également été évalués comme faible. Cette approche de l'évaluation des risques n'a pas été remise en question par le vérificateur accrédité.
Le CEP de Jetport comprend la spécification d'exploitation 99 (Ops Spec 99) qui l'autorise à effectuer les procédures d'approche aux instruments restreintes (RIP) publiées dans le Restricted Canada Air Pilot (RCAP). Sachant qu'il fallait une spécification d'exploitation supplémentaire pour atterrir à CFH4, il aurait été raisonnable de faire une évaluation des risques distincte à cet égard. Toutefois, Jetport n'a fourni aucune documentation indiquant que cela avait été fait. Une discussion entre le vérificateur et la direction de la compagnie a cependant eu lieu pour établir si l'exploitant se sentait à l'aise d'utiliser le Global 5000 à CFH4, et finalement le vérificateur a approuvé la spécification d'exploitation.
1.13.6 Mise en service du Global 5000 à Jetport à Jetport
Jetport a effectué une étude de marché pour le Global 5000. Elle portait sur la commercialisation de l'avion, une base de clients potentiels, les coûts d'exploitation et les limites et capacités de l'appareil d'après ses performances. Toutefois, Jetport n'a fait qu'une évaluation des risques informelle en prévision de la mise en service du Global 5000. L'évaluation n'a pas été documentée ni faite selon les Guidelines for the Conduct of Risk Analyses by Small Private Operators (Lignes directrices sur la conduite des analyses de risque par les petits exploitants privés) de l'ACAA. Le processus d'évaluation des risques consistait en des réunions et des discussions entre le directeur des opérations aériennes, le chef des opérations, le chef pilote et l'agent de sécurité aérienne. Ce processus avait pour but d'examiner les performances et les procédures d'exploitation du Global 5000.
Jetport considérait la transition au Global 5000 comme une conversion de type relativement simple plutôt qu'une évolution vers un avion complètement nouveau. Elle savait que le Global 5000 était plus gros, mais elle n'avait évalué les conséquences que du point de vue des opérations au sol. Elle pensait que l'exploitation du CL604 et la formation de Bombardier, suivies d'un entraînement en ligne assuré par un pilote de Global 5000 expérimenté, permettraient de compenser son manque de connaissance de l'avion. En raison de ses meilleures capacités sur piste courte, de son rayon d'action supérieur et de meilleures performances générales, Jetport considérait l'utilisation du Global 5000 plus sûre que celle du CL604. Elle s'est concentrée sur les aspects positifs du Global 5000 sans examiner pleinement les dangers potentiels de la mise en service d'un nouvel appareil.
Les dangers potentiels pour les avions utilisant CFH4 sont notés dans le CFS (voir 1.7.2). Les autres dangers relevés par les inspecteurs de Transports Canada qui ont évalué l'aérodrome du point de vue de la certification ont aussi été mentionnés à Jetport (voir 1.7.3). Certains de ces dangers avaient contribué à l'accident survenu le 22 mars 2000. Jetport connaissait ces dangers ainsi que les quelques moyens de défense mis en place, comme l'installation de l'APAPI, mais elle estimait que les autres dangers ne représentaient pas des risques inacceptables.
Jetport n'a pas fait une évaluation des risques plus formelle en vue d'analyser la part de ces dangers potentiels dans des scénarios d'incidents comme :
- une sortie en bout de piste (piste de 4885 pieds de longueur);
- un toucher des roues avant le seuil de piste;
- un contact avec des obstacles en approche;
- une sortie de piste due à l'étroitesse de la piste;
- une remise des gaz à la dernière minute due à la présence d'un véhicule sur le chemin à proximité;
- une collision avec un véhicule circulant sur le chemin à proximité.
Au lieu d'utiliser une approche structurée visant l'identification des dangers, suivie d'une atténuation des risques, Jetport a effectué une évaluation des risques informelle. Par la suite, elle a ajouté des aires de demi-tour aux extrémités de la piste pour éviter qu'un avion qui circule au sol sorte de la bande asphaltée lors d'un demi-tour. Comme les pilotes affectés au Global 5000 s'étaient souvent posés à CFH4 avec d'autres appareils, leur niveau d'expérience était jugé adéquat pour faire face aux autres risques.
2.0 Analyse
2.1 Introduction
Il n'y a pas eu de panne technique ni de mauvais fonctionnement des systèmes, que ce soit avant ou pendant le vol, et l'avion répondait correctement aux commandes du pilote. L'avion a été lourdement endommagé. L'accident a fait 2 blessés graves et 8 blessés légers.
La première partie de l'analyse vise à comprendre ce qui s'est passé, en présentant les aspects opérationnels de l'événement. La seconde partie est axée sur les problèmes sous-jacents, y compris les facteurs organisationnels et humains, qui sont à l'origine de l'accident.
2.2 Aspects opérationnels
2.2.1 Expérience de l'équipage
Le commandant de bord et le copilote étaient des pilotes expérimentés avec plus de 3000 heures de vol à leur actif sur turboréacteur, mais leur expérience sur le Global 5000 était limitée. Pour atténuer les risques liés à leur transition sur un nouveau type d'avion, Jetport avait retenu par l'intermédiaire de Bombardier les services d'un pilote d'expérience pour voler avec le commandant de bord pendant deux semaines. Le commandant de bord avait effectué environ 64 heures de vol sur le Global 5000 avant le vol ayant mené à l'accident, mais beaucoup de ces vols s'étaient déroulés sur de grandes distances et il n'avait fait que 14 segments avant l'accident. De plus, certains atterrissages à l'issue de ces vols avaient été effectués par le pilote d'expérience.
Le copilote n'avait pas encore reçu son entraînement en ligne. Il avait terminé sa formation initiale en août 2007, mais il n'avait pas piloté le Global 5000 pendant plus de trois mois. Il n'avait donc jamais eu l'occasion d'acquérir de l'expérience pour devenir à l'aise avec l'appareil. Un tel délai immédiatement après la formation favorise la perte des connaissances nouvellement acquises et peut conduire à une dégradation des compétences.
Une période d'adaptation est nécessaire aux pilotes pour s'adapter à un nouveau type d'avion. Dans ce cas-ci, la transition a été plus difficile en raison de la différence de taille entre le Global 5000 et le Bombardier Challenger 604 (CL604). L'attention et la concentration nécessaires pendant la période de transition augmentent la charge de travail du pilote. Les pilotes étaient encore en train de s'adapter à la taille plus imposante du Global 5000. S'ils avaient eu l'occasion de faire plus de vols et d'atterrissages, ils auraient certainement été plus habitués à la taille, aux caractéristiques de vol et aux performances du Global 5000. Ils manquaient vraisemblablement d'expérience sur le Global 5000 pour en avoir une image précise leur permettant de détecter un profil d'atterrissage dangereux.
Les pilotes de Jetport connaissaient les nombreux dangers liés à l'aérodrome de Fox Harbour (CFH4), mais ils ne doutaient pas de leurs capacités à utiliser l'aérodrome en toute sécurité puisque c'était l'une de leurs principales destinations. Toutefois, la décision de Jetport de permettre l'utilisation d'un aérodrome comme celui de CFH4 si tôt après la mise en service de ce nouveau type d'avion révèle une évaluation des risques inadéquate. Avec plus d'expérience sur des pistes longues, l'équipage aurait possiblement pu s'adapter à la taille du Global 5000, se faire une image de l'avion et mieux juger les hauteurs.
2.2.2 Planification de l'approche et du point de toucher des roues
L'équipage s'était rendu à CFH4 à de nombreuses reprises au cours des années précédentes avec différents types d'avions (King Air 350, Astra SPX, Gulfstream G100, CL604). Ces appareils étaient tous plus petits que le Global 5000.
Les pilotes ont bien planifié tous les aspects du vol ayant mené à l'accident, et la partie en route vers CFH4 s'est bien déroulée. L'équipage avait prévu suivre le même profil d'approche qu'il avait utilisé à de nombreuses reprises dans le passé et de faire le toucher des roues dans les premiers 500 pieds de la piste 33 pour utiliser toute la distance de roulage disponible. Même si cela amenait l'avion à franchir le seuil de piste à une hauteur inférieure à la hauteur de franchissement du seuil (TCH) recommandée par le constructeur (50 pieds), l'équipage considérait le risque acceptable. Cela permettait d'utiliser toute la distance de roulage disponible et de compenser l'effet d'une piste possiblement mouillée. Le plafond et la visibilité étaient bons, et l'équipage avait de bonnes références visuelles jusqu'à la piste, mais le vent en rafale aurait augmenté la charge de travail du pilote aux commandes (PF) sur ce nouvel avion. Toutefois, sans autres facteurs contributifs, le vent en rafale et la charge de travail qu'il implique sont considérés dans les limites de capacité et d'expérience du PF, même avec un nombre d'heures de vol sur type limité.
Pendant la phase initiale de l'approche, le pilote automatique est resté enclenché, et l'avion a suivi la trajectoire verticale générée par le système de gestion de vol (FMS) de l'avion. Si l'équipage avait continué à suivre la trajectoire verticale, l'avion aurait franchi le seuil de piste à une hauteur de 58 pieds (Figure 7) et touché des roues environ 1000 pieds plus loin sur la piste (Annexe A – Points de toucher des roues). L'analyse des performances de l'avion, corroborée par le constructeur, a montré que ce profil d'atterrissage aurait permis à l'avion de se poser en toute sécurité en restant dans les limites de son domaine de vol.
À une distance de 1,4 nm du seuil de la piste 33, le pilote a débranché le pilote automatique qui jusque-là suivait la trajectoire verticale. Le pilote a continué l'approche en manuel en corrigeant initialement la pente de descente par référence au faisceau de l'indicateur de trajectoire d'approche de précision simplifié (APAPI). Les trajectoires d'approche à 3° de la trajectoire verticale (VPTH) et de l'APAPI touchaient respectivement la piste à 1000 pieds et à 500 pieds du seuil de piste. Par conséquent, l'avion se trouvait un peu au-dessus de l'indication « sur la pente » du faisceau de l'APAPI en début d'approche (Annexe B – Paramètres d'approche enregistrés par le FDR) et le pilote a dû augmenter le taux de descente pour intercepter la trajectoire de l'APAPI.
Les corrections de pente du PF ont ramené l'avion sur le faisceau de l'APAPI à environ 350 pieds au-dessus de l'élévation de la piste et à 0,85 nm du seuil de piste. Toutefois, le PF n'a pas intercepté le faisceau pour suivre la pente de 3° de l'APAPI. L'avion a poursuivi sa descente et est passé au-dessous de la pente de l'APAPI. Le pilote a augmenté sa charge de travail en utilisant la technique d'approche en glissade. Le vent de travers diminuait à mesure que l'avion s'approchait du seuil de piste, mais les sollicitations du pilote ont augmenté avec les commandes croisées, ce qui a fini par déclencher la sortie des déporteurs (Annexe B – Paramètres d'approche enregistrés par le FDR). Cette augmentation des sollicitations, au lieu d'une diminution attendue, indique que l'avion réagissait à des oscillations induites par le pilote.
Dix secondes avant l'impact, à environ 0,5 nm du seuil de piste, le pilote est passé en contact visuel avec le sol et l'environnement de piste pour juger la hauteur et le moment de l'arrondi. L'avion est ensuite descendu au-dessous de la trajectoire d'approche de l'APAPI. S'il avait suivi la trajectoire d'approche de l'APAPI à partir de ce point, le train principal de l'avion aurait franchi le seuil de piste avec une marge d'environ 8 pieds et touché la piste environ 172 pieds après le seuil de piste. Toutefois, le pilote est descendu sous le faisceau rouge-blanc de la trajectoire d'approche. Aucune annonce de déviation de pente n'a été faite ni aucune correction de trajectoire, ce qui indique que les pilotes étaient satisfaits du profil qu'ils suivaient.
Quatre secondes avant l'impact, à 0,1 nm du seuil de piste, la voix synthétique du radioaltimètre a annoncé le passage des 50 pieds. Le sol avant la piste étant toutefois moins élevé, l'avion était à une hauteur inférieure à 50 pieds de l'élévation de la piste. En outre, il était encore au-dessous de la trajectoire d'approche de l'APAPI, et la vitesse avait diminué à 114 nœuds (soit 4 nœuds de moins que la Vref corrigée). Une seconde après l'annonce du passage des 50 pieds, le mode AT (automanette) est passé de SPEED (vitesse) à RETARD (ralenti), ce qui a automatiquement ramené les manettes de poussée au ralenti. La vitesse a continué de chuter pour atteindre 102 nœuds (valeur minimale enregistrée), soit 16 nœuds de moins que la Vref corrigée. Si l'avion avait été au-dessus du seuil de piste à ce moment-là, au lieu d'être à 830 pieds du seuil de piste, le pilote aurait pu compenser la perte de vitesse en faisant au pire un atterrissage dur. Or, l'avion s'est trouvé en régime de faible énergie cinétique, ce qui rendait inefficace toute correction au profil de vol sans augmentation correspondante de puissance.
À quelques secondes du toucher des roues, le PF a été confronté à une charge de travail énorme en essayant de tenir l'axe de piste par la technique d'approche en glissade pour contrer le vent en rafale, le tout conjugué à la réduction de poussée des moteurs. La puissance des deux moteurs était disponible et une augmentation de poussée aurait facilement corrigé la perte de portance due au croisement des commandes et au déploiement des déporteurs en courte finale, mais la puissance n'a pas été augmentée. L'impression d'enfoncement signalée par les pilotes est peut-être le résultat d'une combinaison de facteurs (diminution de la vitesse du vent, réduction de la puissance moteur, déploiement des déporteurs, faible vitesse d'approche) qui aurait entraîné une perte de portance. L'augmentation d'assiette dans les dernières secondes de vol n'a fait qu'augmenter la traînée.
Comme il suivait le même profil d'approche qu'il avait déjà souvent utilisé à CFH4, l'équipage ne s'est pas rendu compte que l'avion était sur une trajectoire dangereuse. Aucune annonce de déviation n'a été faite, car tout semblait aller comme prévu. Par ailleurs, le contact initial avec le sol a été considéré comme un atterrissage plus dur que la normale, jusqu'à l'affaissement du train droit et la perte de maîtrise en direction. Le rapide changement d'assiette amorcé par le PF quelques secondes avant l'impact, et le cabré final plus prononcé que la normale à 10,6° enregistré au cours de l'approche, indiquent peut-être une réaction du PF à la hauteur de franchissement du seuil (TCH) insuffisante. En raison de la faible énergie cinétique de l'avion à ce point de l'approche, le rapide changement d'assiette à la dernière seconde n'a pratiquement eu aucun effet sur le profil d'approche.
La taille plus imposante du Global 5000 avait été prise en considération pour les manœuvres au sol, mais pas pour la hauteur entre les yeux et les roues (EWH) plus grande, ni pour les répercussions engendrées par l'utilisation d'un avion plus gros sur le profil familier de CFH4. De plus, l'importante charge de travail du PF, avec une augmentation de demande cognitive correspondante, a probablement rendu la prise de décision plus difficile. Le profil d'approche prévu, la charge de travail et le manque d'expérience sur type ont mis le pilote dans une situation où il lui a été impossible de détecter le profil d'approche dangereux.
Le pilote non aux commandes (PNF) avait encore moins d'expérience que le PF, et beaucoup de temps s'était écoulé depuis sa formation initiale sur le Global 5000. Il est donc peu probable que le PNF ait été en mesure d'aider le PF à détecter le profil d'approche dangereux. Tout comme le PF, le PNF avait l'habitude de suivre le même profil d'approche à CFH4 avec le CL604 et le Gulfstream G100. Le profil suivi le jour de l'accident aurait permis à un CL604 de franchir le seuil de piste à une hauteur suffisante et d'atterrir dans les 500 premiers pieds de la piste (Photo 7).
2.2.3 Hauteur entre les yeux du pilote et les roues de l'avion
Il est nécessaire de connaître la hauteur entre les yeux et les roues (EWH) pour savoir si un indicateur visuel d'alignement de descente (VGSI) convient à l'avion. Toutefois, il a été établi qu'il s'agissait d'un domaine peu approfondi pendant la formation et généralement mal connu des pilotes. Si le pilote ne connaît pas l'EWH de son avion ni l'importance qu'elle a pour avoir une TCH suffisante, il ne peut pas savoir si le guidage visuel qu'il suit en approche est bon ou non.
Dans le présent accident, l'EWH du Global 5000 n'était pas disponible. Jetport et ses pilotes savaient que le Global 5000 était plus gros que les autres avions qu'ils utilisaient, mais ils n'ont pas pris en considération ni compris toutes les répercussions de cette différence de taille. Ils croyaient qu'avec toute leur expérience sur CL604, la taille plus imposante du Global 5000 ne présentait pas plus de risques. Ils ne savaient pas que l'EWH du Global 5000 était de 17,2 pieds, soit 5 pieds de plus environ que celle du CL604. Si les pilotes l'avait su, cela les aurait peut-être incités à faire une analyse plus poussée, particulièrement s'ils avaient fait une évaluation des risques formelle.
L'équipage ne savait pas non plus que l'APAPI convenait seulement aux avions avec une EWH inférieure à 10 pieds. Il n'a pas estimé que s'il avait suivi le guidage de l'APAPI, la marge de sécurité donnée par cet indicateur visuel aurait été réduite à un niveau insuffisant pour l'EWH du Global 5000. Le guidage de l'APAPI n'a pas contribué au dernier profil de vol suivi par le pilote pour établir une marge de franchissement du seuil suffisante pour le Global 5000, mais la question de savoir si le guidage de l'APAPI convenait ou non aurait dû se poser lors de l'évaluation des risques de Jetport.
Autrefois, les performances des gros avions excluaient l'utilisation de pistes courtes comme celle de CFH4 avec ses 4885 pieds. Les gros avions modernes, avec de meilleures performances sur terrain court, peuvent maintenant utiliser des pistes courtes où la possibilité de rencontrer un VGSI conçu pour des appareils plus petits augmente, ce qui accroît le risque pour les gros avions de franchir le seuil à une TCH insuffisante. Normalement, si la TCH est trop juste, le pilote ajuste son profil de vol d'après les repères de l'environnement de piste. Toutefois, comme le montre le présent événement, une lacune dans l'évaluation du VGSI peut, en présence d'autres facteurs, mené à un accident. Sans données EWH directement accessibles, et sans une bonne compréhension de l'importance de cette information, un exploitant ne peut pas savoir si un VGSI convient aux aéronefs qu'il exploite.
2.2.4 Indicateurs visuels d'alignement de descente
Suite à l'accident du 22 mars 2000 à CFH4, Fox Harbour Development Limited avait installé un APAPI sur la piste 33. Il s'agissait d'une stratégie d'atténuation visant à réduire certains risques associés à l'utilisation de CFH4. Le but essentiel était de donner un guidage vertical aux pilotes en approche de nuit. Toutefois, un VGSI approprié servait de moyen de défense contre d'autres risques, comme un relief inhabituel et des turbulences. L'APAPI aidait également les pilotes à éviter les illusions d'optique en approche associées à l'étroitesse de la piste et aux caractéristiques physiques de l'endroit.
Lors de l'installation de l'APAPI, Jetport envisageait l'achat d'un CL604, mais l'EWH de 12,1 pieds de cet appareil exigeait au moins la présence d'un PAPI 2 (indicateur de trajectoire d'approche de précision). De plus, Fox Harbour Development Limited annonçait le complexe de villégiature comme une destination dotée d'un aérodrome et invitait ses clients potentiels à s'y rendre en jet d'affaires. L'installation de l'APAPI aurait été un moyen de défense adéquat si CFH4 avait été réservé aux petits jets, mais le fait qu'on n'a pas tenu compte de la fréquentation attendue d'avions plus gros a engendré de nouveaux risques. Les pilotes de gros avions se rendant à CFH4 se fieraient à un guidage visuel inapproprié, ce qui les amènerait trop bas au-dessus du seuil.
Dans l'ensemble, les pilotes connaissent mal les différents types de VGSI et leurs limites, ce domaine n'étant pas traité adéquatement lors de la formation. Les types de VGSI et les limites EWH font partie du cours de pilote professionnel, mais à ce stade de leur formation, les élèves-pilotes ne pilotent que des appareils relativement petits, et la pertinence de l'EWH pour obtenir une TCH suffisante aux commandes d'un gros avion n'est pas soulignée. Par conséquent, lorsque les pilotes passent sur des avions plus gros, leurs connaissances en la matière sont insuffisantes, sauf si la compagnie qui les emploie et les forme met en évidence l'importance de l'EWH et les limites des VGSI.
Les VGSI sont des dispositifs courants sur les aérodromes et les pilotes sont habitués à utiliser le guidage visuel. Les aérodromes importants sont normalement dotés de VGSI conçus pour les gros avions, et les pilotes qui les utilisent sont assurés d'une TCH suffisante. Ils s'habituent à suivre le faisceau rouge-blanc sans se demander si le type de VGSI convient à l'avion qu'ils pilotent. Toutefois, les pilotes de gros avions qui utilisent de plus petits aérodromes avec des pistes plus courtes rencontrent parfois un VGSI conçu pour des avions ayant une EWH plus petite. La situation devient critique si l'équipage se fie au faisceau rouge-blanc « sur la pente » d'un VGSI qui ne convient pas à leur avion, puisque cela se traduit par une TCH insuffisante. Si des facteurs humains comme l'inexpérience, la fatigue ou les illusions d'optique entrent en ligne de compte, l'avion risque de toucher des roues avant la piste.
Tant que les pilotes n'auront pas acquis une bonne compréhension des différents types de VGSI en usage et de l'importance de leurs limites sur la sécurité, ils continueront à suivre des guidages visuels ne convenant pas nécessairement à l'avion qu'ils pilotent. Ils ne pourront être assurés d'une TCH suffisante, ce qui augmente le risque de toucher des roues avant l'aire d'atterrissage. Selon la configuration du sol avant la piste, cela peut entraîner des blessures ou des pertes de vie, des dommages structuraux ou la perte de l'avion, des dommages matériels ou des répercussions environnementales.
2.2.5 Sécurité cabine
Les cartes de consignes de sécurité demandaient aux passagers d'utiliser les bretelles de sécurité de leur siège pour le roulage, le décollage et l'atterrissage, mais ces dispositifs de sécurité n'ont pas été utilisés lors du vol ayant mené à l'accident. La non-utilisation des dispositifs de sécurité augmente le risque de blessure en cas d'accident pendant ces phases de vol.
Les passagers avaient ôté leurs chaussures après l'embarquement à Hamilton (CYHM) et ne les portaient pas au moment de l'atterrissage. En cas d'urgence, cela peut gêner l'évacuation. Cela peut également augmenter le risque de blessure pendant ou après l'évacuation en cas d'incendie, en présence de débris, de glace, d'objets coupants ou dans un environnement hostile. De plus, dans le cas d'une évacuation, l'avion risque de ne plus être accessible, et le passager peut se retrouver sans chaussures dans un environnement hostile, pendant une durée qui peut être longue.
2.3 Mise en place du système de gestion de la sécurité au Canada
Des organismes internationaux comme l'Organisation maritime internationale (OMI) et l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) ont rendu obligatoires les systèmes de gestion de la sécurité (SGS) comme stratégie proactive de réduction des risques dans les industries maritime et aéronautique. Ces organismes estiment que le SGS offre un meilleur potentiel de réduction des accidents parce qu'il va au-delà de l'approche traditionnelle de « la sécurité par le respect de la réglementation ». Un SGS intègre des politiques, des pratiques et des procédures de gestion des risques saines pour les opérations courantes d'une compagnie.
Transports Canada a acquis une expérience en SGS depuis la mise en œuvre initiale des SGS dans les secteurs ferroviaires et maritimes de compétence fédérale en 2001. Transports Canada a également publié de nombreux documents d'orientation et proposé une formation aux compagnies aériennes pour les aider à établir progressivement leur SGS. Toutefois, le succès de cette initiative dépend essentiellement de la culture de la sécurité de chaque exploitant et de sa compréhension des concepts de SGS.
Comme dans toute transition vers un nouveau système, l'introduction au SGS dans le transport aérien au Canada fait face à des défis. Même avec la volonté d'adopter un SGS, beaucoup d'exploitants ne savent pas vraiment comment s'y prendre. Les dirigeants de la compagnie aérienne doivent être disposés à investir énormément de temps et suffisamment de ressources pour bien comprendre le SGS et le mettre en place. L'établissement des SGS a créé une certaine confusion, mais elle n'est pas limitée aux exploitants. Les personnes chargées d'évaluer les programmes SGS ne savent pas interpréter correctement les indicateurs de performance attendus d'un SGS fonctionnel. Avec le temps et l'expérience, les connaissances des exploitants et des évaluateurs devraient s'améliorer et éventuellement offrir le niveau de protection auquel on peut s'attendre d'un SGS bien rodé.
L'OACI a souligné le besoin d'une supervision interne et externe complémentaire de la sécurité à l'intérieur d'un cadre réglementaire des SGS. L'expérience a montré qu'il faut du temps pour mettre en place un SGS entièrement fonctionnel. Pendant la transition, il est essentiel de ne pas relâcher la supervision. Si l'organisme de réglementation ou l'agence déléguée n'assurent pas une surveillance adéquate des exploitants titulaires d'un certificat d'exploitant privé (CEP), le risque augmente que des lacunes de sécurité ne soient pas décelées.
2.4 Gestion de la sécurité chez Jetport
2.4.1 Engagement de Jetport envers la sécurité
L'indice révélateur de l'engagement d'une entreprise envers la sécurité est l'affectation adéquate de ressources à la gestion de la sécurité. Lors de l'examen de la structure administrative de Jetport, plusieurs facteurs ont mis en évidence l'absence de ressources adéquates. Comme les pilotes gestionnaires assuraient des fonctions administratives et l'agent de sécurité aérienne assurait des fonctions de pilote, ces personnes n'avaient plus de temps à consacrer au développement du SGS, et plutôt que d'engager du personnel, la compagnie semble avoir mis la priorité sur le maintien de la productivité tout en continuant l'application d'un programme traditionnel de gestion de la sécurité.
Les rapports d'incident constituent une source d'enseignement précieuse pour une compagnie. Ces rapports permettent à la compagnie de détecter les dangers et les risques liés aux opérations de la compagnie et d'adopter des mesures correctives avant qu'un accident ne survienne. Le comité de sécurité de Jetport a reçu 11 rapports sur une période de 20 mois entre février 2006 et novembre 2007. Les employés soumettent d'autant plus de rapports d'incident qu'ils ont confiance dans le soutien de la gestion et qu'ils sont formés à déceler et signaler les situations ou les conditions pouvant constituer un danger. Le manque de participation de certains gestionnaires aux réunions du comité de sécurité est révélateur de la faiblesse de l'engagement de la compagnie envers la sécurité.
Ce manque d'engagement était également présent à CFH4. Certaines améliorations avaient été apportées à l'aérodrome, mais plusieurs problèmes de sécurité connus n'avaient pas été réglés. Après l'installation de l'APAPI, Jetport avait affirmé au BST que les réglages du système seraient vérifiés une fois par semaine, mais cela n'a jamais été fait. Par ailleurs, Jetport avait été prévenue à maintes reprises de l'importance de la vérification du calage des dispositifs APAPI, ainsi que des conséquences potentiellement dangereuses d'un calage incorrect. Pourtant, au moment de l'accident, personne à CFH4 n'était chargé de l'exploitation et de l'entretien de l'aérodrome, ni de la vérification périodique de l'APAPI; il était donc impossible de détecter un mauvais alignement du dispositif.
Transports Canada avait avisé Jetport que le chemin coupant l'approche de la piste 33 de CFH4 posait un problème et lui avait recommandé d'installer au moins un panneau de signalisation demandant aux automobilistes de s'arrêter et de vérifier s'il n'y avait pas d'avion en approche avant de continuer. Aucune disposition réglementaire n'imposait l'installation d'un panneau d'avertissement, et Fox Harbour Development Limited répondait aux normes minimales de sécurité. Aucun panneau n'a été installé.
2.4.2 Système de gestion de la sécurité de Jetport
Pour Jetport, l'obtention d'un CEP pour le Global 5000 était une mesure temporaire en attendant l'approbation de son manuel de la sécurité cabine (cabin safety manual) par Transports Canada et la délivrance d'un certificat d'exploitation aérienne pour exploiter l'avion selon la sous-partie 704 du Règlement de l'aviation canadien (RAC). Afin d'obtenir un CEP pour un tiers, Jetport avait déjà développé un SGS. Ce SGS devait subir avec succès une vérification complète effectuée par un vérificateur accrédité de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires (ACAA). Même si Jetport avait subi avec succès trois vérifications CEP distinctes exigeant un SGS fonctionnel, elle ne disposait en fait que d'un programme traditionnel de gestion de la sécurité. Jetport a préparé le programme et les manuels SGS en faisant le strict minimum, comme l'indique la présentation du même manuel au vérificateur accrédité de l'ACAA à trois occasions différentes. Cela suggère un manque d'engagement de la compagnie à allouer des ressources suffisantes ainsi qu'un manque de motivation, d'engagement, de connaissance ou de compréhension du SGS.
Jetport n'a pas mis au point un profil de risque précis. Elle n'a pas assigné une cote de gravité et de probabilité à chaque facteur et ne disposait d'aucune méthode pour attribuer les niveaux de risque. Les facteurs de risque ont fait l'objet d'une évaluation informelle, ce qui a donné lieu à un document qui ne reflétait pas la réalité des risques associés à l'exploitation du Global 5000. Cette situation a écarté la possibilité de détecter les lacunes de sécurité systémiques et de développer des stratégies d'atténuation appropriées.
2.4.3 Mise en service du Global 5000 à Jetport
Une évaluation des risques exhaustive faite en vertu du SGS donne un aperçu des dangers et des risques, ce qui permet à la compagnie de prévenir les accidents. Si Jetport avait respecté les consignes des documents d'orientation de l'ACAA pour faire une évaluation des risques associés à la mise en service du Global 5000, elle aurait probablement identifié des scénarios de risques, notamment en ce qui concerne l'utilisation de l'avion à CFH4.
La décision de Jetport d'utiliser le Global 5000 sur un aérodrome comme CFH4 si tôt après sa mise en service dans la flotte n'a pas permis à l'équipage d'acquérir plus d'expérience sur le profil d'atterrissage de l'avion. En adaptant les procédures d'utilisation normalisées (SOP) du CL604 au Global 5000 et en s'écartant des procédures recommandées par le constructeur, Jetport a introduit de nouveaux risques dans ses opérations.
L'une des différences fondamentales entre les SOP de Jetport et les procédures du constructeur était de permettre aux pilotes de descendre au-dessous de la pente d'approche normalisée de 3° ou au-dessous du faisceau du guidage visuel d'approche. Les manuels d'aéronef du constructeur indiquent que l'avion doit franchir le seuil de piste à une hauteur de 50 pieds. Il s'agit d'une TCH normale pour les gros avions. Jetport considérait comme « une bonne discipline aéronautique » la pratique de « creuser » l'approche au-dessous de la pente de descente et d'atterrir le plus tôt possible. Jetport pensait que la manœuvre était sans danger en conditions visuelles et la trouvait justifiée en raison de son dernier accident où un de ses avions était sorti en bout de piste à Hamilton (CYHM) à l'issue d'un atterrissage long. Cette pratique combinée à d'autres facteurs a réduit la marge de sécurité de franchissement du seuil à un niveau inacceptable, ce qui a contribué à l'accident.
Si le profil de risque préparé en vue de la mise en service du Global 5000 avait été plus réaliste, il aurait donné lieu à des stratégies d'atténuation des risques plus efficaces. Sachant que le Global 5000 était nouveau dans la flotte, les facteurs comme les qualifications, l'expérience et la compétence de l'équipage sur type ainsi que la maintenance de l'avion auraient dû recevoir initialement une cote de risque supérieure à la cote risque faible attribuée, et maintenue jusqu'à ce qu'une plus grande expérience soit acquise. Le fait que des facteurs opérationnels comme les renseignements météo et l'aérodrome étaient cotés à risque faible, alors que CFH4 était l'une des principales destinations de Jetport, révèle également une piètre évaluation des risques. Tout ce qui précède semble indiquer une mauvaise compréhension de l'identification des dangers ou du processus d'évaluation des risques, ou un excès de confiance des membres de la direction de la compagnie.
2.5 Association canadienne de l'aviation d'affaires
2.5.1 Généralités
Les études menées par Transports Canada et l'ACAA ont identifié certains risques associés au transfert des responsabilités réglementaires de Transports Canada à l'ACAA pour ce qui est de la surveillance des exploitants de l'aviation d'affaires et de la transition des exploitants aux SGS. De façon à gérer ces risques, la phase 2 de l'étude soulignait le besoin d'établir un système de surveillance et de contrôle de la qualité permettant à l'ACAA de juger le travail de ses vérificateurs accrédités tout en évaluant ses exploitants. Toutefois, il est évident que l'ACAA s'est écartée des recommandations de l'étude au point où la capacité du programme à maintenir un niveau adéquat de sécurité pourrait être affectée.
2.5.2 Programme de certification de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires
S'appuyant sur les quelque 750 vérifications effectuées depuis le début du programme, l'ACAA est confiant que tous les titulaires de CEP (environ 320) ont mis en place un SGS. La mesure de l'efficacité de son programme repose essentiellement sur le nombre de CEP et de certificats d'exploitation supplémentaires délivrés et sur les réponses aux demandes quotidiennes de ses exploitants. Toutefois, le doute subsiste quant à la qualité du programme de vérification et la capacité de ses exploitants à se conformer pleinement au SGS dans un temps raisonnable.
L'ACAA se concentre sur le développement de son programme et sur l'augmentation du nombre de titulaires de CEP. Comme l'ACAA considère qu'elle ne peut pas contraindre un exploitant à respecter les exigences du programme CEP et qu'elle ne tient pas à imposer un calendrier de mise en place et de développement des SGS, certains exploitants risquent de ne jamais se conformer pleinement au SGS.
L'ACAA est d'avis que les entreprises titulaires d'un CEP sont très professionnelles, disposent des moyens voulus et sont conscientes de la sécurité. Elle pense aussi que la qualité de leurs antécédents dans le domaine de la sécurité devrait compenser le risque d'une surveillance allégée jusqu'à la mise en place complète d'un SGS. Toutefois, le programme s'est étendu considérablement, et l'ACAA accepte maintenant davantage d'exploitants de toute taille qui exploitent des appareils dans des environnements à plus haut risque par rapport à l'aviation d'affaires. En l'absence de surveillance externe appropriée, les risques opérationnels peuvent ne pas être gérés adéquatement.
2.5.3 Qualité de la vérification de certification de Jetport
La gestion de la sécurité de Jetport était essentiellement fondée sur les méthodes traditionnelles, avec quelques références à un SGS. La vérification du SGS de Jetport, effectuée par un vérificateur accrédité de l'ACAA, n'a relevé aucune anomalie ni proposé aucune amélioration. Le vérificateur a accepté les mêmes documents trois fois en trois ans, sans aucune indication que le SGS avait été révisé ou mis à jour d'après l'expérience acquise en la matière.
Le fait que le vérificateur accrédité de l'ACAA a accepté le SGS de Jetport pour le Global 5000 alors qu'il ne répondait pas aux Normes de sécurité des opérations aériennes pour l'aviation d'affaires (NSOA-AA) révèle un manque de compréhension du SGS, du guide d'évaluation du SGS de l'ACAA et de la liste de vérifications des SGS de l'ACAA. Certains de ses vérificateurs accrédités éprouvaient encore des difficultés à comprendre le guide d'évaluation du SGS, mais l'ACAA s'attendait à une amélioration de la situation à mesure qu'une plus grande expérience est acquise.
2.5.4 Assurance de la qualité de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires
Le besoin d'une supervision de la sécurité et d'une surveillance des exploitants sous le contrôle d'un organisme auto-réglementé comme l'ACAA est souligné dans les documents de l'OACI et dans les études de faisabilité conjointes de Transports Canada et de l'ACAA. Contrairement aux recommandations des études, l'ACAA n'a pas établi de programme d'assurance de la qualité dans son processus de vérification.
La surveillance du travail des vérificateurs aurait constitué un moyen de défense pour relever les lacunes de sécurité, les insuffisances du programme de vérification CEP, les SGS inappropriés, ou même des tendances dans les SGS des différents exploitants. Cependant, l'ACAA ne reçoit que la page couverture de la vérification, elle ne révise pas le travail de ses vérificateurs accrédités, ni ne participe aux vérifications chez les exploitants titulaires de CEP. Elle n'est donc pas en mesure de juger la qualité du travail de ses vérificateurs accrédités, ni d'évaluer l'intégrité du SGS d'un exploitant ou même confirmer que les buts du programme CEP sont sur le point d'être atteints. Cela signifie que l'ACAA ne peut pas identifier de façon efficace les faiblesses de son programme de vérification CEP.
L'ACAA maintient que les vérificateurs accrédités ne font pas partie de son personnel et que ce sont des entrepreneurs indépendants. Le choix du vérificateur et le contact initial sont laissés à l'initiative du demandeur de CEP et l'ACAA ne joue aucun rôle dans cet aspect du processus. L'ACAA considère les dispositions prises entre le vérificateur et le demandeur comme des relations d'affaires complètement distinctes et ne veut pas s'ingérer dans le processus. Cette indépendance signifie que certaines pratiques peuvent rester sans contrôle. Par exemple, un exploitant faisant toujours appel au même vérificateur peut entraîner un conflit d'intérêts ou une emprise réglementaire. Avant l'accident de Fox Harbour, la participation des vérificateurs accrédités aux téléconférences et aux réunions de normalisation n'était pas obligatoire et aurait été perçue comme une relation employeur-employé où le personnel reçoit des instructions.
L'une des raisons évoquées pour éviter une surveillance directe du travail des vérificateurs est le coût lié à la surveillance. L'ACAA a déclaré que les coûts d'une surveillance sur place seraient prohibitifs et que cela ne contribuerait pas à l'amélioration de son programme de vérification passif actuel.
L'autre raison est liée à un problème soulevé dans la première étude de faisabilité. Il s'agit de questions de responsabilités civiles que l'ACAA devait prendre en considération en acceptant les responsabilités réglementaires associées à la surveillance des exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC. L'étude indiquait qu'un devoir de diligence incorrectement exercé pouvait entraîner des poursuites contre l'ACAA, ses dirigeants et son comité de direction. Cela pourrait expliquer pourquoi l'ACAA s'efforce d'éliminer toute perception de relation formelle entre elle et ses vérificateurs accrédités et s'abstient de développer et de mettre en place un programme d'assurance de la qualité.
L'ACAA se considère plutôt comme une agence de certification avec le devoir de servir ses clients en temps opportun. Elle considère qu'elle n'est pas responsable de la surveillance réglementaire des exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC. Cela va à l'encontre des études de faisabilité.
2.6 Surveillance de la sécurité exercée par Transports Canada
Comme on le voit sur la Figure 8 (Structure 1999), avant la création du programme CEP de l'ACAA, Transports Canada était chargé de la réglementation, la certification et la surveillance de l'aviation d'affaires. Les études de faisabilité ont proposé un nouveau modèle de surveillance selon lequel l'administration du programme CEP serait confiée à l'ACAA qui ferait appel à des vérificateurs accrédités.
Bien que Transports Canada conserve la responsabilité de la surveillance des activités de l'ACAA, ce nouveau programme signifiait que les exploitants seraient doublement soustraient de sa tutelle. Comme l'ont indiqué l'ACAA et Transports Canada dans les études de faisabilité, ce nouveau modèle a entraîné de nouveaux risques. Pour les atténuer, les deux parties ont convenu que Transports Canada vérifierait les activités de l'ACAA et que l'ACAA établirait un programme d'assurance de la qualité permettant de vérifier le travail de ses vérificateurs accrédités et ses exploitants.
Toutefois, le modèle utilisé (Structure 2008) ne comporte aucune de ces mesures d'atténuation. La surveillance repose principalement sur les vérificateurs accrédités. L'ACAA n'a pas de programme d'assurance de la qualité pour vérifier l'efficacité du travail de ses vérificateurs accrédités ou l'efficacité des systèmes de ses exploitants. Le modèle actuel fait appel à des communications informelles entre l'ACAA, ses vérificateurs accrédités et ses exploitants, au cours de visites de liaison et des salons professionnels. Un vérificateur accrédité ayant des connaissances insuffisantes en SGS, et qui serait assigné à un exploitant qui suit encore des méthodes de gestion de la sécurité traditionnelles, pourrait conduire l'exploitant à prendre des risques inacceptables sans que ceux-ci ne soient décelés. Transports Canada n'a pas pris de mesures pour s'assurer que l'ACAA remplit ses obligations de surveillance, et par conséquent le risque que des lacunes de sécurité ne soient pas décelées s'est accru.
Transports Canada a reconnu le besoin d'une réelle surveillance réglementaire des exploitants titulaires d'un certificat d'exploitation aérienne délivré en vertu de la sous-partie 705 du RAC et qui mettent en place un SGS selon les nouvelles exigences. Le principe étant que l'exploitant qui ne se conforme pas aux nouvelles exigences dans un temps raisonnable pourrait être soumis à la surveillance traditionnelle.
Quand il a délégué la responsabilité de la certification des exploitants privés régis par la sous-partie 604 du RAC à l'ACAA, Transports Canada s'attendait à ce que l'ACAA assume des fonctions de surveillance, notamment dans l'assurance de la qualité du programme de vérification CEP. Si cela avait été fait, Transports Canada aurait rempli ses fonctions de faire respecter les règlements et les normes. Toutefois, depuis qu'elle a commencé à administrer le programme CEP, l'ACAA s'est écartée des recommandations des études de faisabilité et n'effectue aucune assurance de la qualité du SGS de ses exploitants. Transports Canada avait relevé cette lacune, mais lorsque l'ACAA a soumis un plan de mesures correctives inacceptable, il a mis un terme à l'évaluation sans fournir de justification écrite.
2.7 Sommaire
Dans le présent événement, un équipage avec peu d'expérience sur un nouveau type d'avion plus gros a été chargé d'un vol à destination d'un aérodrome connu pour ses multiples dangers un jour de grands vents soufflant en rafale. Comme les pilotes connaissaient bien l'aérodrome, ils n'avaient aucun doute quant au succès de l'opération. Ils ont suivi le même profil que lors des vols précédents sans prendre en considération l'EWH supérieure du Global 5000 ni suivre les procédures recommandées par le constructeur pour le profil de vol et les techniques d'atterrissage. Ces écarts par rapport aux procédures recommandées ont augmenté leur charge de travail et réduit la marge de franchissement du seuil de piste. Les pilotes n'ont pas pu bien juger la hauteur de l'avion par rapport au sol et ne se sont pas rendu compte que l'avion était trop bas.
On pourrait s'attendre à ce qu'une compagnie ayant exploité un avion selon un CEP avec un SGS fonctionnel depuis trois ans aurait une bonne compréhension du processus proactif d'évaluation des risques. Toutefois, la méthode utilisée par Jetport pour la mise en service du Global 5000 était inadéquate et n'a pas permis de relever certains risques inhérents à son exploitation. Le programme SGS de Jetport avait été accepté par le vérificateur accrédité de l'ACAA, mais en fait, la compagnie n'avait pas de SGS fonctionnel. Le processus réactif traditionnel de gestion de la sécurité alors utilisé n'a pas permis de relever un grand nombre des risques concernés.
Comme l'ACAA n'avait pas de programme d'assurance de la qualité dans son processus de vérification, elle n'a pas pu déceler le manque de connaissances de son vérificateur accrédité en SGS, ni les lacunes du SGS de l'exploitant.
Grâce à son processus d'évaluation, Transports Canada avait relevé des lacunes dans la gestion du processus CEP de l'ACAA, notamment au niveau de la surveillance limitée des vérificateurs accrédités de l'ACAA et l'absence d'un système d'assurance de la qualité fonctionnel. Transports Canada avait d'abord rejeté le plan de mesures correctives proposé par l'ACAA; toutefois, sans qu'aucune modification n'y soit apportée, il a mis un terme à l'évaluation sans fournir de justification écrite. Si Transports Canada avait exigé des mesures d'atténuation de la part de l'ACAA, cela aurait pu lui permettre de relever des lacunes dans le SGS de Jetport grâce au processus de vérification.
Le SGS est un concept moderne et efficace. C'est également un outil utile et pratique. Toutefois, son succès repose sur l'abandon des méthodes normatives traditionnelles de gestion de la sécurité utilisées dans le passé. Il repose également sur une bonne répartition des responsabilités entre l'organisme de réglementation, l'exploitant, et, dans le cas qui nous occupe, l'agence déléguée. Cette répartition ne s'est pas concrétisée pour les exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC.
3.0 Conclusions
3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- L'équipage avait prévu un toucher des roues dans les 500 premiers pieds de la piste pour profiter au mieux de la distance de roulage disponible. Cette manœuvre amenait l'avion à franchir le seuil de piste à une hauteur de franchissement du seuil (TCH) inférieure à celle recommandée par le constructeur.
- L'équipage a suivi le même profil d'approche qu'il avait l'habitude de suivre avec le Bombardier Challenger 604 (CL604) plus petit, sans tenir compte de la hauteur entre les yeux et les roues (EWH) supérieure du Global 5000, ce qui a réduit la TCH.
- Le guidage de l'indicateur de trajectoire d'approche de précision simplifié (APAPI), même s'il ne convenait pas à ce type d'avion, aurait assuré une marge réduite de 8 pieds entre le train d'atterrissage principal et le seuil de piste. À 0,5 nm, le pilote aux commandes (PF) est descendu au-dessous du faisceau de l'APAPI, réduisant encore la TCH.
- Le pilote a utilisé la technique d'approche en glissade, ce qui a augmenté sa charge de travail et engendré des oscillations induites par le pilote.
- Le peu d'expérience des deux pilotes sur le Global 5000 et la charge de travail élevée du PF ne leur a pas permis de se rendre compte qu'ils étaient sur une trajectoire dangereuse et de prendre des mesures correctives en conséquence.
- Avec l'avion en faible énergie cinétique, le cabré à 10,6° sans une augmentation de puissance correspondante n'a pas permis de corriger le profil de vol. L'avion a touché des roues sur un terrain en pente avant le seuil de piste.
- Suite à l'impact avec le terrain en pente, le train d'atterrissage droit s'est affaissé, et le pilote a perdu la maîtrise en direction. L'avion est sorti de piste et a été lourdement endommagé, faisant des blessés.
- Selon les procédures d'utilisation normalisées (SOP) de Jetport, et contrairement aux pratiques recommandées par le constructeur, une descente au-dessous de la trajectoire d'approche électronique ou visuelle en vue d'augmenter la distance d'atterrissage disponible était considérée acceptable et comme une bonne discipline aéronautique. Cette pratique a contribué au toucher des roues avant le seuil de piste.
- Le maintien d'une gestion traditionnelle de la sécurité, au détriment de la mise en œuvre d'un système de gestion de la sécurité (SGS) tel que requis par le certificat d'exploitant privé (CEP) de Jetport, n'a pas permis à la compagnie de faire une évaluation des risques adéquate lors de la mise en service du Global 5000, ce qui a contribué à l'accident.
- En raison d'une mauvaise répartition des responsabilités de surveillance entre l'organisme de réglementation, son agence déléguée et l'exploitant, l'évaluation des risques inadéquate faite par Jetport n'a pas été décelée.
3.2 Faits établis quant aux risques
- Comme les pilotes n'ont pas directement accès aux données EWH, ils pourraient continuer à faire des approches avec un indicateur visuel d'alignement de descente (VGSI) qui ne convient pas au type d'avion qu'ils pilotent, ce qui augmente le risque de franchir le seuil de piste avec une marge de sécurité réduite.
- En raison du manque de connaissances des différents VGSI en usage et de leurs limites, les équipages vont continuer à suivre des guidages visuels qui pourraient ne pas garantir une TCH suffisante.
- Jetport n'a pas mis au point un profil de risque de la compagnie précis, ce qui a écarté la possibilité de détecter les lacunes de sécurité systémiques et de développer des stratégies d'atténuation appropriées.
- Si l'organisme de réglementation ou l'agence déléguée n'assurent pas une surveillance adéquate des exploitants titulaires d'un CEP surtout pendant la mise en place d'un SGS, le risque augmente que des lacunes de sécurité ne soient pas décelées.
- Du fait que l'Association canadienne de l'aviation d'affaires (ACAA) n'impose pas un calendrier de mise en place et de développement des SGS, certains exploitants titulaires d'un CEP risquent de ne jamais se conformer pleinement au SGS.
- Si Transports Canada ne prend pas de mesures pour s'assurer que l'ACAA remplit ses obligations de surveillance des exploitants régis par la sous-partie 604 du Règlement de l'aviation canadien (RAC), des lacunes de sécurité ne seront pas détectées et corrigées.
- La vérification du SGS de Jetport, effectuée par un vérificateur accrédité de l'ACAA, n'a pas relevé les anomalies du programme ni proposé des améliorations. Sans une vérification exhaustive du SGS d'un exploitant, il pourrait subsister des lacunes mettant l'exploitant dans l'impossibilité d'établir une stratégie d'atténuation efficace.
- Contrairement aux recommandations des études de faisabilité de Transports Canada et de l'ACAA, l'ACAA n'a pas établi de programme d'assurance de la qualité dans son processus de vérification. En conséquence, il y a un risque que l'ACAA ne relève pas les faiblesses de son programme de vérification CEP.
- Au moment de l'accident, personne à l'aérodrome de Fox Harbour (CFH4) n'était chargé de la vérification périodique de l'APAPI; il était donc impossible de détecter un mauvais alignement du dispositif.
- L'analyse des risques effectuée par Jetport avant la mise en service du Global 5000 n'a pas relevé l'incompatibilité entre l'EWH de l'avion et l'APAPI de CFH4.
- La non-utilisation des bretelles de sécurité pendant le décollage et l'atterrissage augmente le risque de blessure pour les passagers en cas d'accident pendant ces phases de vol.
- Les passagers qui ne portent pas de chaussures peuvent gêner l'évacuation; cela peut augmenter le risque de blessure, compromettre leur mobilité après un écrasement, et peut-être même leurs chances de survie.
3.3 Autres faits établis
- Un SGS intègre des politiques, des pratiques et des procédures de gestion des risques saines pour les opérations courantes d'une compagnie. Sa mise en place, si elle est bien faite, offre un grand potentiel de réduction du nombre d'accidents.
- Contrairement à son propre protocole d'évaluation, Transports Canada n'a pas documenté sa décision de mettre un terme à l'évaluation de l'ACAA, alors que l'ACAA n'avait pas soumis de plan de mesures correctives acceptable.
- La représentation graphique des différents VGSI varie d'une publication à l'autre.
4.0 Mesures de sécurité
4.1 Mesures prises
4.1.1 Mesures prises par le Bureau de la sécurité des transports du Canada
Le 26 novembre 2007, le BST a adressé à Transports Canada la Lettre d'information sur la sécurité aérienne A07A0134-D1-L1, APAPI Installation at Fox Harbour, Nova Scotia (Dispositif APAPI installé à Fox Harbour en Nouvelle-Écosse). Cette lettre contenait des renseignements préliminaires indiquant que l'indicateur de trajectoire d'approche de précision simplifié (APAPI) ne convenait peut-être pas à l'avion accidenté.
Le 4 avril 2008, le BST a adressé à Transports Canada l'Avis de sécurité A07A0134-D1-A1, Flight Crew Awareness of Visual Glide Slope Indicator System Limitations (Niveau de connaissance des pilotes sur les limites des indicateurs visuels d'alignement de descente). Cet avis invitait Transports Canada à réviser les exigences de formation des pilotes de manière à ce que les équipages de conduite soient mis au courant des limites des indicateurs visuels d'alignement de descente (VGSI) et de leurs conséquences sur la sécurité des différents types d'avion.
Le 4 avril 2008, le BST a adressé à Transports Canada l'Avis de sécurité A07A0134-D2-A1, Availability of Aircraft Eye-To-Wheel Height Information (Disponibilité de l'information sur la hauteur entre les yeux et les roues). Cet avis invitait Transports Canada à revoir les exigences relatives à la disponibilité de l'information de manière à ce que les équipages de conduite aient accès à l'information sur la hauteur entre les yeux et les roues (EWH) dans les publications sur l'avion.
Transports Canada a accusé réception de la Lettre d'information sur la sécurité aérienne A07A0134-D1-L1 et a indiqué qu'il attendrait que le BST ait terminé son analyse des problèmes de façon à bien comprendre toutes les lacunes de sécurité.
Transports Canada a publié des extraits des Avis de sécurité A07A0134-D1-A1 et A07A0134-D2-A1 dans le numéro 1/2009 de son bulletin Sécurité aérienne – Nouvelles (TP 185).
4.1.2 Mesures prises par la gestion de Fox Harbour
Fox Harbour Development Limited a désaffecté l'APAPI de la piste 33 et l'a remplacé par un indicateur de trajectoire d'approche de précision (PAPI) 2 conçu pour les avions dont l'EWH peut atteindre 25 pieds.
Fox Harbour Development Limited a déplacé le seuil de la piste 33 de 88 pieds. Les cartes d'approche du Restricted Canada Air Pilot (RCAP)seront modifiées pour indiquer les nouvelles distances utilisables à l'atterrissage et au décollage.
4.1.3 Mesures prises par Bombardier
Bombardier a modifié son manuel de référence pour l'exploitation du Global 5000 (Operations Reference Manual) de façon à mieux expliquer la technique d'approche en crabe. Bombardier a également annoncé qu'une présentation serait créée et serait accessible sur le Web pour expliquer les effets d'une flèche de voilure plus prononcée sur les atterrissages par vent de travers.
Bombardier a informé le BST que les données EWH seront publiées dans le manuel destiné à l'équipage de conduite (Flight Crew Operating Manual) des avions de type BD-700.
4.1.4 Mesures prises par Transports Canada
En novembre 2007, la responsabilité de la surveillance de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires (ACAA) a été transférée de la Direction des normes à la Direction des opérations nationales. En février 2008, un gestionnaire de projet a été affecté à la Direction des opérations nationales pour développer et mettre en place un programme de surveillance de l'ACAA. En janvier 2009, cette personne a été nommée chef de la Division des entreprises de transport aérien au sein de la Direction des opérations nationales en conservant la responsabilité générale de la surveillance de l'ACAA. Pour l'assister, deux inspecteurs des opérations ont été chargés de la surveillance directe de l'ACAA.
À la suite d'une révision du programme de certificat d'exploitant privé (CEP) faite le 11 mars 2009, Transports Canada a indiqué que les conclusions de son évaluation, à laquelle il avait initialement mis un terme le 21 septembre 2007, n'avaient pas été entièrement traitées. Transports Canada a pris des mesures pour que l'ACAA traite adéquatement les problèmes en suspens.
En avril 2009, Transports Canada a amorcé une série de réunions mensuelles entre ses inspecteurs et l'ACAA pour examiner les événements et les rapports de sécurité afin de surveiller la gestion de l'information de sécurité, le respect du processus et des procédures, et le suivi des cas nécessitant des mesures correctives assurés par l'ACAA.
4.1.5 Mesures prises par l'Association canadienne de l'aviation d'affaires
L'ACAA a entrepris un examen interne de son programme CEP en 2008 pour identifier les domaines dépassant le cadre de l'évaluation de Transports Canada de 2007 et qui pourraient faire l'objet de révisions ou modifications. Cet examen a donné lieu à des recommandations visant à améliorer certains secteurs. À l'issue de ces recommandations, les changements ci-après ont été adoptés.
L'ACAA a modifié la Partie 2 des Normes de sécurité des opérations aériennes pour l'aviation d'affaires (NSOA-AA) afin d'écarter toute ambiguïté concernant la fréquence des vérifications et de clarifier le besoin d'une vérification partielle et d'une mise à jour du profil de risque. Une vérification de renouvellement obligatoire, un an après la vérification de certification initiale, a été ajoutée. Ces modifications décrivent également le processus et la procédure pour établir la validité d'un CEP en fonction des exigences de vérification. En outre, le manuel du programme CEP (Section III – Procédures de vérification) a été modifié pour décrire comment une vérification pour des motifs justifiés est mise sur pied et gérée.
L'ACAA a indiqué que son programme des vérificateurs accrédités avait fait l'objet de modifications concernant la surveillance des vérificateurs. Elle a adopté un cadre d'assurance de la qualité pour le programme CEP qui a été documenté dans le manuel du programme CEP avec l'ajout d'une nouvelle section (Section IV - Cadre d'assurance de la qualité du programme CEP). Cette section décrit les procédures de l'ACAA pour son programme d'audit en présence de témoins (Witness Audit program). L'ACAA a également indiqué avoir établi une procédure de contrôle de la qualité du programme CEP en vue d'assurer la standardisation des activités de vérification et l'application uniforme des politiques et des procédures de vérification.
4.2 Mesures requises
4.2.1 Accès à l'information sur la hauteur entre les yeux et les roues (EWH)
Il est nécessaire de connaître l'EWH de l'avion pour savoir si un indicateur visuel d'alignement de descente (VGSI) convient à l'avion. Dans le présent accident, l'EWH du Global 5000 n'était pas disponible. L'équipage n'aurait pas pu déterminer si le VGSI était approprié pour leur avion.
L'enquête a également établi que beaucoup de pilotes ne connaissent pas l'EWH de l'avion qu'ils pilotent. De plus, le sujet est rarement traité dans la formation des pilotes, quelle qu'elle soit.
Sans données EWH, les équipages ne peuvent pas déterminer si le VGSI qu'ils utilisent convient à leur avion.
En conséquence, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports veille à ce que l'information sur la hauteur entre les yeux et les roues (EWH) soit directement accessible aux pilotes qui exploitent des avions de plus de 12 500 livres.
Recommandation A09-03 du BST
4.2.2 Connaissance des limites des indicateurs visuels d'alignement de descente (VGSI)
L'équipage de l'avion accidenté ne connaissait pas les limites du VGSI installé à l'aérodrome de Fox Harbour (CFH4). L'enquête a établi que cet équipage ne faisait pas exception. La plupart des pilotes savent qu'il y a différents types de VGSI en usage, mais ils n'en connaissent pas les limites. Ils ne savent pas non plus que certains VGSI peuvent ne pas convenir à un type d'avion.
Ce manque de connaissances peut conduire des pilotes à se fier à un guidage VGSI qui ne convient pas au type d'avion qu'ils pilotent. Sans formation pour améliorer leurs connaissances dans ce domaine, un niveau de risque inacceptable va persister, autant pour les équipages que pour les passagers.
En conséquence, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports exige que les pilotes reçoivent une formation sur les indicateurs visuels d'alignement de descente (VGSI) pour leur permettre de déterminer si le système utilisé convient au type d'avion qu'ils pilotent.
Recommandation A09-04 du BST
4.2.3 Surveillance
En examinant la question du transfert des responsabilités réglementaires, Transports Canada et l'ACAA avaient relevé un certain nombre de risques dans les études conjointes initiales. En vue de gérer ces risques, l'approche proposée comportait l'élaboration d'un ensemble de règles fondées sur les performances directement liées au système de gestion de la sécurité (SGS) de l'exploitant. Reconnaissant que la surveillance des exploitants resterait une nécessité après le transfert des responsabilités, l'ACAA devait faire des vérifications pour s'assurer que les exploitants respectaient les règles et les normes, et développer et tenir à jour un programme d'assurance de la qualité dans son processus de vérification.
Les études avaient établi un plan visant à atténuer les risques, mais il n'a pas été suivi. Au moment de l'accident de Fox Harbour, l'ACAA ne participait pas, et n'assistait pas en tant qu'observatrice, aux vérifications chez les titulaires de CEP et elle n'avait pas de programme d'assurance de la qualité. Par voie de conséquence, les lacunes du SGS de Jetport n'ont pas été relevées. De plus, l'ACAA estimait qu'elle ne pouvait pas contraindre un exploitant à se conformer aux NSOA-AA et n'a donc pas établi de calendrier de mise en place et de développement des SGS.
Depuis l'entrée en vigueur de cette nouvelle méthode de supervision des exploitants régis par la sous-partie 604 du Règlement de l'aviation canadien (RAC), Transports Canada n'a pas exercé une surveillance efficace de l'ACAA, des vérificateurs accrédités et des titulaires de CEP. Transports Canada n'avait pas de programme établi, pour assister en tant qu'observateur ou participer aux vérifications effectuées par les vérificateurs accrédités de l'ACAA, destiné à vérifier si cette nouvelle méthode répondait aux objectifs de sécurité.
Lors de son évaluation de 2007, Transports Canada a constaté que le programme CEP de l'ACAA ne disposait pas d'un programme d'assurance de la qualité, alors que c'était obligatoire. Toutefois, un plan de mesures correctives acceptable pour traiter le problème n'a jamais été soumis. Malgré cette lacune, Transports Canada a mis officiellement un terme à l'évaluation.
Depuis l'accident de Fox Harbour, l'ACAA a modifié ses manuels en ajoutant un cadre d'assurance de la qualité pour son programme CEP. Son programme d'audit en présence de témoins (Witness Audit program) adopté en 2009 permet au personnel de l'ACAA d'observer un vérificateur accrédité pendant la conduite d'une vérification. Les constatations sont discutées avec le vérificateur, et les problèmes systémiques relevés servent à la formation et au perfectionnement des vérificateurs ainsi qu'à l'amélioration du programme. Ce programme semble prometteur, mais il est trop tôt pour juger de son efficacité.
Transports Canada a également pris des mesures pour améliorer sa surveillance du programme CEP de l'ACAA, notamment en faisant un réexamen des constatations de son évaluation de 2007.
Toutefois, le Bureau est d'avis qu'il faudrait en faire davantage, entre autres :
- l'ACAA doit impérativement établir un calendrier de mise en place et de développement des SGS et insister pour qu'il soit respecté par ses exploitants;
- l'ACAA doit veiller à ce que des vérifications exhaustives du SGS de ses exploitants soient faites pour s'assurer que les lacunes sont identifiées et atténuées de façon efficace;
- l'ACAA doit développer et mettre en place un programme d'assurance de la qualité efficace pour son processus de vérification;
- Transports Canada doit exercer une surveillance efficace de l'ACAA pour garantir une surveillance adéquate des exploitants régis par la sous-partie 604 du RAC.
Si l'organisme de réglementation ou son agence déléguée n'assurent pas une surveillance adéquate des titulaires de CEP, le risque augmente que des lacunes de sécurité ne soient pas décelées et corrigées.
En conséquence, le Bureau recommande que :
l'Association canadienne de l'aviation d'affaires établisse un calendrier de mise en place des systèmes de gestion de la sécurité pour ses titulaires de certificat.
Recommandation A09-05 du BST
et que :
le ministère des Transports veille à ce que l'Association canadienne de l'aviation d'affaires adopte un programme d'assurance de la qualité efficace pour la vérification de ses titulaires de certificat.
Recommandation A09-06 du BST
Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .
Annexes
Annexe A – Points de toucher des roues
- Avion en approche finale
- Point d'impact (7,5 pieds avant le seuil de piste)
- Point de toucher des roues en suivant la pente de 3° de l'APAPI et sans faire d'arrondi (213 pieds après le seuil de piste)
- Zone de toucher des roues prévue et zone principale des dépôts de caoutchouc sur la piste (caoutchouc laissé au contact de la piste lors d'atterrissages antérieurs) (de 129 à 500 pieds après le seuil de piste)
- Dispositifs APAPI (480 pieds après le seuil de piste)
- Point de toucher des roues recommandé par le constructeur (1000 pieds après le seuil de piste)
- Point d'immobilisation de l'avion (1017 pieds après le seuil de piste)
Annexe B – Paramètres d'approche enregistrés par le FDR
Annexe C – Trajectoire au sol de l'avion accidenté
- Point d'impact (7,5 pieds avant le seuil de piste)
- Début des éraflures laissées par le carénage du vérin des volets extérieur et central (140 pieds après le seuil de piste)
- Début de l'éraflure laissée par le carénage du vérin du volet intérieur (170 pieds après le seuil de piste).
- Point où le train gauche a traversé l'axe de piste (457 pieds après le seuil de piste)
- Dispositifs APAPI (480 pieds après le seuil de piste)
- Empreinte au sol laissée par l'aile droite (600 pieds après le seuil de piste)
- Point où le train d'atterrissage droit a quitté la piste (640 pieds du seuil de piste)
- Conditionneurs d'air pour les copropriétés (893 pieds après le seuil de piste)
- Point d'immobilisation de l'avion (1017 pieds après le seuil de piste)
- Copropriétés
- Hangar
Annexe D – Renseignements figurant dans le CFS sur l'aérodrome de Fox Harbour
(en vigueur le 25 octobre 2007)
Annexe E – Indicateurs visuels d'alignement de descente (VGSI)
Annexe F – Formulaire du rapport de vérification de l'Association canadienne de l'aviation d'affaires
Annexe G – Profil de risque de la compagnie Jetport
Annexe H – Liste des rapports de laboratoire du BST
L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :
- LP123/2007 – FDR/CVR Analysis (Analyse du FDR et du CVR)
- LP131/2007 – Accelerometers Testing C-GXPR (Tests d'accéléromètre du C-GXPR)
On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.
Annexe I – Sigles et abréviations
- ACAA
- Association canadienne de l'aviation d'affaires
- AFM
- aircraft flight manual (manuel de vol)
- agl
- au-dessus du sol
- ALD
- distance réelle d'atterrissage
- AOBN
- Airbus Operational Briefing Note (note d'information opérationnelle d'Airbus)
- APAPI
- indicateur de trajectoire d'approche de précision simplifié
- ARCAL
- balisage lumineux d'aérodrome télécommandé
- asl
- au-dessus du niveau de la mer
- AT
- automanette
- BST
- Bureau de la sécurité des transports du Canada
- CAP
- Canada Air Pilot
- CAP 6
- Canada Air Pilot, Procédures aux instruments
- CCP
- contrôle de compétence pilote
- CEP
- certificat d'exploitation privée (également appelé certificat d'exploitant privé)
- CFH4
- aérodrome de Fox Harbour (Nouvelle-Écosse)
- CFS
- Canada Flight Supplement (Supplément de vol Canada)
- CL604
- Bombardier Challenger 604
- CVR
- enregistreur de la parole dans le poste de pilotage
- CYHM
- aéroport de Hamilton (Ontario)
- CYHZ
- aéroport de Halifax (Nouvelle-Écosse)
- CYQB
- aéroport Jean-Lesage de Québec (Québec)
- CYQM
- aéroport de Moncton (Nouveau-Brunswick)
- CYYG
- aéroport de Charlottetown (Île-du-Prince-Édouard)
- ELT
- radiobalise de repérage d'urgence
- EGPWS
- système d'avertissement de proximité du sol amélioré
- EWH
- hauteur entre les yeux et les roues
- FAF
- repère d'approche finale
- FBO
- exploitant de services aéronautiques d'aéroport
- FCOM
- Flight Crew Operating Manual (manuel destiné à l'équipage de conduite)
- FDR
- enregistreur de données de vol
- FMS
- système de gestion de vol
- GPS
- système de positionnement mondial
- Jetport
- Jetport Inc.
- LFL
- longueur de piste pondérée
- METAR
- message d'observation météorologique régulière pour l'aviation
- msl
- au-dessus du niveau moyen de la mer
- nm
- mille marin
- NSOA-AA
- Normes de sécurité des opérations aériennes pour l'aviation d'affaires
- OACI
- Organisation de l'aviation civile internationale
- ORM
- Operations Reference Manual (manuel de référence pour l'exploitation duGlobal 5000)
- PAPI
- indicateur de trajectoire d'approche de précision
- PF
- pilote aux commandes
- PNF
- pilote non aux commandes
- po Hg
- pouce de mercure
- QRH
- Quick Reference Handbook (manuel de référence rapide)
- RAC
- Règlement de l'aviation canadien
- RCAP
- Restricted Canada Air Pilot
- RNAV (GNSS)
- navigation de surface avec le système mondial de navigation par satellites
- SGS
- système de gestion de la sécurité
- sm
- mille terrestre
- SOP
- procédures d'utilisation normalisées
- SST
- santé et sécurité au travail
- TCH
- hauteur de franchissement du seuil
- TP
- publication de Transports Canada
- VASIS
- indicateur visuel de pente d'approche
- VGSI
- indicateur visuel d'alignement de descente
- Vref
- vitesse d'approche de référence à l'atterrissage