Erreur d'alignement au décollage
de l'Airbus A319-114 C-FYKR
exploité par Air Canada
à Las Vegas (Nevada)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
L'Airbus A319-114 (immatriculation C-FYKR, numéro de série 0693), assurant le vol 596 d'Air Canada et ayant 84 passagers et 5 membres d'équipage à bord, effectue un vol régulier de Las Vegas, au Nevada (États-Unis) à destination de Montréal (Québec). L'avion est autorisé à décoller de la piste 25R, et l'équipage entame un décollage sur la lancée à 0 h 15, heure normale du Pacifique. Peu après, les deux membres de l'équipage de conduite se rendent compte que l'avion roule sur l'accotement en asphalte de la piste plutôt que sur l'axe de piste. À une vitesse indiquée d'environ 65 noeuds, le pilote aux commandes enfonce la pédale de direction de gauche pour ramener l'avion sur l'axe de piste, puis exécute le décollage. Le vol se poursuit vers Montréal où l'avion se pose normalement. Pendant le vol à destination de Montréal, l'équipage avise le service de régulation des vols de la compagnie que l'avion a pu endommager certains feux de bord de piste pendant la course au décollage. Trois feux de bord de piste sont retrouvés endommagés. Le seul dommage subi par l'avion est une coupure du pneu gauche du train d'atterrissage avant. Il n'y a aucune victime.
Renseignements de base
Conformément aux dispositions de l'Annexe 13 à la Convention sur l'aviation civile internationale, la responsabilité de l'enquête sur cet incident a été confiée au Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST), qui représente l'état d'immatriculation. Le National Transportation Safety Board (NTSB), qui représente l'état d'occurrence, a délégué un représentant accrédité pour participer à l'enquête.
L'exploitant a retiré l'enregistreur numérique de données de vol (DFDR) de l'avion à la suite du vol en question. Les données ont été extraites à son atelier des enregistreurs, à Montréal, et remises au Laboratoire technique du BST pour analyse.
Des conditions météorologiques de vol à vue étaient présentes au moment du décollage. Le temps n'a pas été considéré comme un facteur dans cet incident. Les dossiers indiquent que l'avion était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et qu'il n'y avait aucune défectuosité connue avant le vol.
L'équipage de conduite était certifié et qualifié pour le vol conformément à la réglementation en vigueur. Le commandant de bord travaillait pour la compagnie depuis juillet 1989. Il totalisait environ 11 000 heures de vol, dont 1500 sur Airbus 319/320/321 comme commandant de bord, et 1500 comme copilote. Au moment de l'incident, il occupait le siège de gauche et agissait comme pilote aux commandes (PF). Le copilote travaillait pour la compagnie depuis novembre 2000. Il totalisait environ 10 500 heures de vol, dont 1900 comme copilote d'Airbus 319/320/321. Au moment de l'incident, il occupait le siège de droite et agissait comme pilote non aux commandes (PNF).
Les membres de l'équipage de conduite avaient été jumelés pour une durée de quatre jours au départ de Toronto (Ontario), le 28 janvier 2006. C'était la première fois que les pilotes faisaient équipe ensemble. Ils se sont présentés au travail à 13 h, heure normale de l'Est, pour le vol à destination de Las Vegas. L'avion est arrivé à l'aéroport international McCarran de Las Vegas (KLAS) à 20 h 41, heure normale du PacifiqueNote de bas de page 1, le même jour. L'équipage de conduite s'était reposé pendant environ 25 heures avant le vol de retour régulier à Montréal, à 23 h 55, le 29 janvier.
L'équipage de conduite est arrivé environ 1 heure et 15 minutes avant le départ du vol en question. Il s'agissait du troisième vol et du deuxième vol de nuit pour le commandant de bord au départ de KLAS. C'était le premier vol du copilote au départ de KLAS. L'équipage de conduite a reçu l'autorisation de circuler au sol pour un décollage sur la piste 25R à partir de la voie de circulation B (voir l'annexe A). Au moment où l'avion s'approchait du seuil de piste sur la voie de circulation B, l'équipage de conduite a reçu une autorisation de décoller et une instruction de maintenir un espacement visuel avec un autre avion qui décollait devant lui sur la même piste.
Alors que le PF alignait l'avion sur ce qu'il croyait être l'axe de piste, son attention s'est portée sur l'avion qui décollait, lequel se trouvait à environ 5000 pieds plus loin sur la piste, et il ne s'est pas aperçu qu'il était décalé latéralement par rapport à l'axe de piste. Pendant le virage sur la piste, le PNF a exécuté la liste de vérifications avant décollage en allumant les feux à éclats, les phares de virage et le phare de décollage du train avant. À 0 h 14 min 38, le PF a amorcé le décollage sur la lancée selon les recommandations du manuel des procédures d'utilisation standard (SOP) et il a dirigé l'avion sur un cap initial de 256 degrés magnétiques (°M)Note de bas de page 2.
À ce moment, le PNF ne savait pas que l'avion n'était pas aligné sur l'axe de piste parce qu'il passait en revue l'anémomètre et les instruments moteurs, comme le prescrivaient les SOP. Dans le cadre de la procédure de décollage, le PNF doit aussi s'assurer que l'avion se trouve sur l'axe de piste lorsque les manettes des gaz sont poussées et que la phase de décollage est amorcée.
Après avoir balayé du regard les instruments, le PNF a regardé à l'extérieur et a vu un feu rouge devant l'avion. Il s'est alors rendu compte que l'avion ne se trouvait pas sur l'axe de piste. Il en a informé le PF, qui avait déjà commencé à corriger à gauche. Selon le DFDR, la correction à gauche correspondait à une correction de cap de six degrés et elle a été exécutée 11 secondes environ après le début de la course au décollage, à une vitesse de 64 noeuds. À ce moment, l'avion se trouvait à environ 800 pieds du seuil, à environ 30 pieds à la droite des feux de bord de pisteNote de bas de page 3, et à environ 115 pieds de l'axe de piste. Au cours de la première partie de la course au décollage, l'équipage de conduite a eu l'impression que l'avion roulait sur les joints de dilatation de la chaussée. Cette constatation n'a eu aucune conséquence. Les données d'accélération obtenues du DFDR ont indiqué qu'il n'y avait eu aucune vibration importante pendant toute la course au décollage. L'avion est revenu sur la piste dans le voisinage du seuil décalé. À ce point, l'avion avait accéléré au-delà de 113 noeuds, et le décollage s'est poursuivi.
L'équipage de conduite n'a pu confirmer s'il avait heurté des feux. Toutefois, à 2 h 16, il a avisé le service de régulation des vols de la compagnie de cette possibilité. Le répartiteur a informé le personnel de la tour de KLAS, lequel a demandé une inspection. L'inspection, menée environ deux heures après l'incident, a révélé que trois feux de bord de piste avaient été endommagés, mais les autres feux fonctionnaient et aucune autre anomalie n'a été relevée. L'avion a poursuivi son vol vers Montréal et s'y est posé normalement. L'avion a été inspecté, et on a observé une coupure sur le pneu gauche du train avant. Ce pneu a été remplacé, et l'avion a été remis en service.
Selon le manuel d'exploitation de la compagnie, le service de régulation des vols doit être informé le plus tôt qu'il est opérationnellement possible de le faire (par radio, ACARSNote de bas de page 4 ou téléphone) de tout accident, incident ou de toute irrégularité touchant un vol. Dans le cas qui nous occupe, l'équipage de conduite n'a signalé l'incident au répartiteur par ACARS qu'à 2 h 16, soit deux heures après le décollage.
Les pilotes peuvent utiliser une variété d'aides visuelles pour assurer qu'un avion est aligné sur l'axe de piste : les marques de désignation de piste se trouvant sur le seuil de piste, le cap de l'avion, les feux ou les marques d'axe de piste et les feux de bord de piste. Les pilotes peuvent aussi se servir du signal du radiophare d'alignement de piste pour se guider en sélectionnant la fréquence du radiophare d'alignement de la piste de départ et s'assurer que le repère de la barre de lacet est centré sur l'écran de vol principal. Cependant, cette technique est habituellement réservée à un décollage par faible visibilité et elle n'a pas été utilisée dans le présent événement.
Les SOP dressent la liste de plusieurs facteurs qui pourraient mener à une décision d'interrompre un décollage. Sous 100 noeuds, la décision d'interrompre un décollage est à la discrétion du commandant de bord, selon les paramètres de décollage. Les SOP stipulent que, bien que toutes les causes ne puissent être mentionnées, le commandant de bord doit envisager sérieusement d'interrompre le décollage si un avertissement du moniteur électronique centralisé de bord (ECAM) s'affiche. Si, au cours de la course au décollage, une condition ou une situation pouvant compromettre la sécurité du vol sont observées, il faut immédiatement l'énoncer verbalement. Si une interruption de décollage n'est pas nécessaire, le commandant de bord annonce « on continue ». Dans le cas qui nous occupe, il n'y a eu aucun avertissement ECAM, aucune vibration anormale, et l'avion accélérait normalement. L'équipage a poursuivi la course au décollage et a appliqué les procédures de départ normalisé.
KLAS est un aéroport achalandé où se déroulent en moyenne 1468 mouvements d'aéronef par jour. Il possède quatre pistes : un doublet de pistes du côté sud des bâtiments de l'aérogare, et un doublet de pistes du côté ouest (voir l'annexe A). La surface de la piste 25R était sèche au moment de l'incident. La piste a une longueur de 14 510 pieds et une largeur de 150 pieds, et son seuil est décalé à 1397 pieds. Ses accotements en asphalte sont en mesure de supporter un aéronef s'il déborde d'un côté de la piste.
Pour offrir un bon contraste visuel avec la piste, une bande blanche est peinte de chaque côté de la piste 25R (voir la Figure 1). Conformément à la circulaire consultative (AC) 150/5340-1 de la Federal Aviation Administration et à l'Annexe 14, volume 1, Conception et exploitation technique des aérodromes de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), la bande latérale est une ligne continue qui n'est pas interrompue à l'intersection d'une piste ou d'une voie de circulation. En fait, les bandes latérales peintes sur toutes les pistes canadiennes sont interrompues à l'intersection des pistes et des voies de circulation.
La piste 25R n'est pas équipée de feux d'axe de piste, mais elle présente des marques blanches d'axe de piste. Conformément à l'Annexe 14, volume 1 de l'OACI, l'axe de la partie de la piste précédant le seuil de piste décalé en permanence est marqué de flèches. La piste est équipée de feux de bord de piste blancs, sauf pour les feux de bord de piste situés entre les voies de circulation B et A2, lesquels sont rouges dans le sens du décollage à cause du seuil décalé. Les feux de bord de piste sont des feux surélevés, sauf dans les zones d'intersection des voies de circulation, où ils sont affleurants.
La zone du seuil décalé est accessible par les voies de circulation B et B1 (voir l'Annexe A). La voie de circulation A2 débouche sur la piste 25R à la hauteur de la zone des marques de seuil. Sur la voie de circulation B, celle qui a été utilisée dans le cas qui nous occupe, l'axe de la voie de circulation et les feux d'axe verts se prolongent au-delà du point d'attente avant la piste, le long de l'axe incurvé de la voie de circulation, croisent la bande latérale blanche de piste jusqu'à ce qu'ils se confondent avec l'axe de piste représenté par les flèches du seuil décalé. Aux voies de circulation B1 et A2, les axes de voie de circulation se prolongent au-delà du point d'attente avant la piste et s'incurvent sur la bande latérale de piste. Les feux verts d'axe des voies de circulation A2 et B1 se prolongent au-delà du point d'attente avant la piste et se terminent sur la bande latérale de piste, mais en ligne droite.
Le système de balisage lumineux de l'aéroport est habituellement maintenu à l'intensité de niveau deux (sur une possibilité de cinq niveaux d'intensité), sauf par mauvais temps ou à moins d'une demande d'un autre niveau. Au moment de l'incident, l'intensité du système de balisage lumineux était réglée au niveau deux. Les feux d'axe de la voie de circulation B étaient allumés. Cependant, les feux de prise de terrain à partir du point d'attente avant la piste jusqu'à l'axe de la piste 25R n'ont pas attiré l'attention de l'équipage de conduite.
L'enquête n'a révélé aucun autre balisage lumineux voisin qui aurait pu donner l'impression erronée que la bande latérale (côté nord) et les feux de bord de piste désignaient l'axe de piste. Il n'y a que des feux de bord de piste bleus et des feux d'axe de voie de circulation verts au nord de la piste 25R.
Il y a eu deux événements précédents documentés relatifs à des dommages causés par un aéronef aux feux de bord de piste de la piste 25R. Un autre événement a eu lieu à la suite du présent événement. Seul l'événement auquel est mêlé Air Canada a été signalé. Les autres événements ont été découverts lorsque le personnel d'exploitation de l'aéroport a effectué les inspections de piste et de voie de circulation requises (voir le Tableau 1). Trois de ces événements se sont produits la nuit.
Date | Heure d'inspection de la piste | Ligne aérienne | Nombre de feux endommagés | Emplacement | Temps |
25 février 2006 | 3 h 17 HNP | Inconnue | 13 | Piste 25R (côté nord) entre les voies de circulation A2 et A3 | Dégagé |
30 janvier 2006 | 2 h 12 HNP | Air Canada | 3 | Piste 25R (côté nord) entre les voies de circulation B1 et A2 | Dégagé |
23 janvier 2006 | 2 h 40 HNP | Inconnue | 4 | Piste 25R (côté nord) entre les voies de circulation B1 et A2 | Dégagé |
03 décembre 2004 | 8 h 3 HNP | Inconnue | 4 | Piste 25R (côté nord) entre les voies de circulation B1 et A2 | Ensoleillé |
Tableau 1. |
Sommaire des incidents |
Air Canada a considéré que cet événement était un incident de catégorie F. Selon le manuel d'exploitation, la catégorie F comprend un accident ou un incident qui se produit pendant l'exploitation d'un avion et qui cause des dommages légers à l'avion ou des blessures légères aux passagers ou au personnel de la compagnie, ou les deux. Cette catégorie comprend les dommages causés aux biens de la compagnie ou à des tiers par un avion en exploitation.
Une recherche dans la base de données du BST a révélé qu'un seul événement semblable avait été signalé au cours des 10 dernières années. Le 24 septembre 1997, lors d'un décollage de nuit de l'aéroport de Moncton (Nouveau-Brunswick), un Beechcraft 200 était aligné sur les feux de bord de piste et il a exécuté un décollage au cours duquel un des feux a été heurté et brisé. Cet événement n'a pas fait l'objet d'une enquête, et la base de données n'a pas fourni suffisamment de renseignements pour qu'on puisse déterminer le ou les facteurs contributifs. Une recherche similaire a été effectuée au moyen de l'outil de requête sur le site Web du National Transportation Safety Board, mais aucun autre événement similaire n'a été trouvé.
Analyse
La recherche dans des bases de données pour retrouver des événements similaires montre que ce type d'événement se produit rarement ou qu'il n'est pas systématiquement signalé comme un incident. Du fait que les trois autres événements qui se sont produits sur la piste 25R à KLAS n'ont pas été signalés, les enquêteurs ont été privés de données importantes qui auraient pu aider à cerner les facteurs contributifs menant à l'événement.
Aucune condition environnementale ni de navigabilité de l'avion n'a contribué au présent événement. L'analyse va porter sur les facteurs qui ont amené un équipage de conduite certifié et qualifié à mal aligner l'avion et à amorcer la course au décollage à partir d'un côté de la piste.
Même si l'équipage de conduite avait franchi trois fuseaux horaires, rien n'indique que la fatigue a joué un rôle dans l'incident. L'équipage avait bénéficié d'une période de repos, et l'événement s'est produit tôt dans leur journée de service.
Aucun des deux pilotes n'était habitué à décoller de KLAS. Il s'agissait du deuxième décollage de nuit du commandant de bord et du premier décollage du copilote à partir de cet aéroport. Faire circuler un avion la nuit à un gros aéroport qu'on connaît peu, comme KLAS, peut être déconcertant et complexe, et nécessiter une grande attention. Le fait de maintenir le contact visuel avec l'avion qui décollait devant lui a peut-être distrait le commandant de bord des aides visuelles au sol alors qu'il alignait l'avion sur la piste. Il est probable que le commandant de bord s'en remettait à sa vision périphérique pour aligner l'avion sur la piste et il a pu confondre la bande latérale blanche de la piste, qui interceptait l'axe de la voie de circulation, avec la marque d'axe de piste. Voilà qui expliquerait pourquoi l'avion s'est d'abord aligné à la droite des feux du bord droit de la piste.
Si la bande latérale de piste avait été interrompue à l'intersection de la piste et de la voie de circulation B, l'erreur d'alignement aurait pu être évitée. Comme l'équipage de conduite connaissait mieux les marques présentes aux aéroports canadiens, où les bandes latérales s'interrompent au point où une voie de circulation intercepte une piste, il ne s'attendait sans doute pas à voir une marque de bande latérale de piste.
Les lignes de prise de terrain des voies de circulation B1 et A2 peuvent créer de la confusion parce qu'elles mènent directement à la bande de bord de piste plutôt qu'à l'axe de piste. Par contre, la marque d'axe de la voie de circulation B se prolonge au-delà de la bande latérale blanche de piste pour rejoindre l'axe de la piste. Le jour, cette marque constitue un repère visuel évident quant à l'emplacement de l'axe de piste. Toutefois, dans le présent événement, les feux de prise de terrain de l'axe de voie de circulation n'ont pas attiré l'attention de l'équipage de conduite, ce qui l'a privé d'une indication visuelle vers l'axe de piste. Le pilote peut aussi avoir confondu la bande latérale de piste comme étant l'axe de piste.
L'équipage de conduite ne pouvait se fier aux marques de désignation de piste pour assurer que l'avion était bien aligné sur l'axe de piste parce qu'elles se trouvaient quelque 1400 pieds plus loin sur la chaussée, dans la zone du seuil décalé. De plus, il n'y avait aucun feu d'axe de piste. La pratique utilisée pour les décollages par faible visibilité qui consiste à sélectionner la fréquence du radiophare d'alignement de la piste de départ aurait confirmé à l'équipage de conduite que l'avion ne se trouvait pas sur l'axe de piste.
Le commandant de bord a amorcé la course au décollage selon les SOP. Même si un décollage sur la lancée est une pratique reconnue, elle laisse moins de temps au PNF pour exécuter les vérifications de départ, et à l'équipage pour effectuer une vérification visuelle extérieure complète avant d'amorcer la course au décollage. Si l'avion s'était complètement immobilisé sur la piste avant le décollage, l'équipage de conduite aurait peut-être eu l'occasion de constater que l'avion n'était pas aligné entre les deux rangées de feux rouges de bord de piste.
Pendant la course au décollage, l'attention du copilote s'est portée à l'intérieur du poste de pilotage parce qu'il exécutait la liste de vérifications avant décollage et qu'il passait en revue les instruments moteurs, conformément aux SOP. Ce n'est que lorsqu'il eut terminé ces tâches qu'il a remarqué que l'avion n'était pas aligné sur l'axe de piste.
Lorsque l'équipage de conduite s'est rendu compte qu'il n'était pas bien aligné sur l'axe de piste, la vitesse de l'avion se situait bien en deçà de 100 noeuds, et il restait suffisamment de piste pour interrompre le décollage. L'équipage a décidé de poursuivre le décollage parce qu'il n'y avait aucun avertissement ECAM, aucune vibration importante et que l'avion accélérait normalement. La seule sensation ressentie par l'équipage a été celle de rouler sur des joints de chaussée. L'équipage de conduite n'avait aucun moyen de savoir si le train d'atterrissage avait été endommagé pendant la course au décollage. Si les risques de dommages dans cet événement étaient faibles, le fait de rentrer un train d'atterrissage endommagé présente un risque pour les conduites exposées dans la case de train advenant l'éclatement d'un pneu après rentrée du train.
L'incident n'était pas une situation nécessitant la déclaration d'une situation d'urgence, mais il aurait convenu d'avertir plus tôt la compagnie et les services de la circulation aérienne. Compte tenu de l'achalandage à cet aéroport, des débris de l'avion ou des feux brisés auraient pu présenter un danger pour les autres avions empruntant la piste 25R à ce moment.
L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :
- LP012/2006 – Flight Data Recorder (enregistreur de données de vol)
On peut obtenir ce rapport en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.
Faits établis
Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs
- Le pilote aux commandes s'est probablement fié à sa vision périphérique pour faire circuler l'avion au sol du fait qu'il devait assurer l'espacement par rapport à l'avion qui décollait avant lui. Cette situation, alliée aux marques de l'aérodrome, a eu pour effet de causer une erreur d'alignement de l'avion et de faire entamer le décollage à partir de l'accotement en asphalte de la piste plutôt que sur l'axe de piste.
Faits établis quant aux risques
- Un décollage sur la lancée réduit le temps dont dispose un équipage pour effectuer une vérification visuelle extérieure complète et vérifier l'alignement sur la piste avant d'entamer la course au décollage.
- L'axe des voies de circulation B1 et A2 s'incurve sur la bande latérale de la piste. La nuit, il se pourrait que les pilotes alignent leur avion sur la bande latérale de piste plutôt que sur l'axe de piste.
- Le présent événement a été signalé au service de régulation des vols de la compagnie et aux services de la circulation aérienne deux heures après le fait. Au cours de cette période, les débris des feux brisés auraient pu présenter un danger pour les autres avions qui ont emprunté la piste 25R.
Autre fait établi
- Les trois autres événements semblables qui se sont produits sur la piste 25R de l'aéroport international McCarran de Las Vegas (KLAS) n'ont pas été signalés. L'omission de déclarer ces événements prive les enquêteurs de renseignements importants qui pourraient aider à déterminer les facteurs contributifs à ce type d'événement.
Mesures de sécurité prises
L'autorité aéroportuaire de Las Vegas a modifié les marques de voie de circulation après l'événement. À la voie de circulation B1, l'axe de la voie de circulation a été prolongé au-delà de la bande latérale de piste et il rejoint maintenant l'axe de piste dans la zone des flèches du seuil décalé. À la voie de circulation A2, l'axe de voie de circulation qui s'incurve sur la bande latérale de piste a été effacé et il se prolonge maintenant vers les marques de seuil.
Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .
Annexes
Annexe A - Carte de l'aérodrome KLAS
Reproduite avec la permission de Jeppesen Sanderson, Inc. Ne pas utiliser pour la navigation.