Rapport d'enquête aéronautique A05O0115

Défaillance d'une pale du rotor principal
de l'hélicoptère Bell 212 C-GNHX
exploité par Tasman Helicopters Ltd
à Richards Landing (Ontario)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    L'hélicoptère Bell Textron 212 portant l'immatriculation C-GNHX et le numéro de série 30983 effectue un vol de convoyage entre Bolton (Ontario) et Richmond (Colombie-Britannique). Aux commandes de l'appareil dont l'achat remonte à très peu de temps se trouve le pilote en chef de la compagnie, lequel est accompagné de deux passagers. À 12 h 20, heure avancée de l'Est, l'hélicoptère vole à une altitude de 1500 pieds au-dessus du niveau de la mer et à une vitesse de 100 noeuds quand retentit une série de violents bruits, immédiatement suivie de fortes vibrations de la cellule. Le pilote a du mal à maîtriser l'hélicoptère dans les 10 à 15 secondes qui suivent.

    Le pilote abaisse immédiatement le collectif, tire sur le cyclique et règle la poignée des gaz au ralenti. Il reprend la maîtrise de l'appareil, mais les bruits et les vibrations se poursuivent. À chaque fois qu'une des pales avançantes du rotor principal arrive en avant, elle se soulève de façon anormale au-dessus de son plan de rotation. Les vibrations et les bruits vont en s'intensifiant à mesure que le vol se poursuit. Le pilote se dirige vers un grand champ labouré pour y faire un atterrissage d'urgence. Au fur et à mesure que la vitesse diminue, l'hélicoptère devient plus facile à maîtriser, et l'atterrissage se passe bien. Aucun des occupants n'est blessé, mais l'hélicoptère est lourdement endommagé à la suite des vibrations en vol.

    Renseignements de base

    Au moment du vol, il régnait de bonnes conditions météorologiques de vol à vue, et le temps n'a donc pas été considéré comme un facteur dans le présent événement.

    Les dossiers montrent que l'hélicoptère était entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. Le pilote était certifié et qualifié pour effectuer le vol.

    Photo 1. Intrados de pale de rotor décollé et partie réparée (la pale est posée à l'envers).
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    Photo of Intrados de pale de rotor décollé et partie réparée (la pale est posée à l'envers).

    Après l'atterrissage, une inspection postérieure au vol a révélé que l'une des pales du rotor principal était endommagée. Une petite partie de son revêtement d'intrados se trouvant non loin de son extrémité, en arrière du renfort du longeron, s'était décollée. Le revêtement s'était soulevé et avait ondulé mais il ne s'était pas détaché de la pale (voir la Photo 1). Le revêtement décollé mesurait 25 pouces sur 2 pouces, entre les références 263 et 288. Il a été découvert par la suite que les fortes vibrations survenues en vol avaient endommagé plusieurs des composants de la tête et de la transmission du rotor principal.

    La pale de rotor principal endommagée, qui portait la référence 212-015-501-115 et le numéro de série A-3257, totalisait 3251 heures de temps de vol depuis sa mise en service initiale. Sa durée de vie en service totale était fixée à 4000 heures. Un examen des dossiers d'entretien de la pale a révélé que celle-ci avait était fabriquée par Bell Helicopter et qu'elle avait été mise en service en décembre 1996.

    Tôt en 2005, cette même pale avait été endommagée alors que l'hélicoptère était stationné dans un hangar. Elle avait alors été envoyée chez un réparateur agréé de pales de rotor.

    Pendant le décapage de la peinture de la pale de rotor en prévision des réparations, de profondes piqûres de corrosion avaient été découvertes sur le revêtement d'intrados, entre les références 243 et 262, juste à l'intérieur de l'endroit où, par la suite, il y a eu décollement au cours du vol du 10 juin 2005 (voir la Photo 1). Comme les piqûres dépassaient les limites permises, le réparateur avait proposé une procédure de réparation à Bell Helicopter, qui l'avait approuvée. Cette procédure comprenait la dépose du revêtement endommagé et son remplacement par un renfort externe collé. Le tab de compensation du bord de fuite avait également été remplacé.

    La procédure de collage du revêtement à l'âme intérieure nécessitait l'utilisation d'un dispositif composé d'une vessie et d'une couverture chauffante. Un tel dispositif permet une bonne polymérisation de l'adhésif grâce à la chaleur et à la pression qu'il permet d'appliquer sur la partie réparée. Ce type de réparation sert couramment à réparer des pales de rotor endommagées. Le dispositif composé d'une vessie et d'une couverture chauffante qui avait été utilisé avait couvert la pale de rotor depuis son extrémité jusqu'à un point situé du côté intérieur de la partie ayant fait l'objet de la réparation, ce qui englobait la partie où il y a eu décollement pendant le vol en question. En vertu du processus de réparation, la température devait être surveillée et régulée pendant la totalité du cycle de polymérisation. Une fois la réparation terminée, la partie réparée de la pale avait fait l'objet d'une inspection sous la forme d'un essai de percussion à l'aide d'une petite masse jusqu'à l'extrémité de la pale. La pale avait ensuite été renvoyée et posée sur l'hélicoptère C-GNHX. Dans le cadre de l'enquête, le Laboratoire technique du BST ainsi que Bell Helicopter ont examiné les dossiers de la procédure de réparation, ce qui a permis de vérifier que le travail avait été effectué conformément aux procédures normalisées recommandées.

    Après la réparation effectuée à l'aide du dispositif composé d'une vessie et d'une couverture chauffante, la pale était en service depuis environ quatre heures de vol quand, au cours du vol en question, le revêtement de l'intrados s'est décollé au niveau du renfort du longeron, entre les références 263 et 288.

    Photo 2. Gros plan de l'extrémité de la pale; les flèches pointent vers des restes d'adhésif sur le renfort du longeron
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    Photo of Gros plan de l'extrémité de la pale; les flèches pointent vers des restes d'adhésif sur le renfort du longeron

    La partie décollée entre les références 263 et 288 a été examinée. Il y avait une liaison cohésive de l'adhésif au substrat du revêtement. Toutefois, l'adhésif ayant servi au collage initial pendant le processus de fabrication n'avait pas adhéré de façon uniforme au renfort du longeron; seuls de petits restes de l'adhésif étaient toujours présents (voir la Photo 2). La véritable importance de l'adhérence n'a pu être quantifiée avec précision, car l'adhésif présent sur le revêtement et sur le renfort du longeron s'était usé. Cette usure de l'adhésif avait été causée par l'écoulement d'air et par les éléments environnementaux qui ont pénétré dans la partie décollée entre le moment du décollement du revêtement et l'exécution de l'atterrissage d'urgence.

    Un examen au microscope électronique à balayage d'un échantillon du revêtement décollé a montré que l'adhésif, bien que toujours fermement fixé au revêtement, présentait une réplique des marques de ponçage du longeron le long de l'interface entre l'adhésif et le longeron, ce qui montrait clairement que l'adhésif avait bien collé au revêtement, mais pas au longeron. Il y avait peu de traces d'adhésif toujours fixé à la surface du longeron. Les marques de ponçage à la surface du longeron témoignent de la procédure normalisée utilisée pour préparer la surface avant l'application de l'adhésif. Après cet examen initial, la préparation en vue de la réparation de la pale a débuté par un nettoyage de la surface du longeron. Toutefois, pendant le processus, la surface a été modifiée et les traces de collage ont été enlevées, ce qui a empêché toute autre analyse du collage à la surface du longeron.

    On a examiné d'autres parties de la pale dans le but de déterminer l'adhérence d'ensemble de la colle entre le revêtement et la surface du longeron. D'autres échantillons de revêtement ont été prélevés à divers endroits de la pale situés à l'intérieur de la partie endommagée au cours du vol en question. La partie où des réparations antérieures avaient été effectuées présentait des pertes de cohésion sporadiques du côté du revêtement. Tous les autres échantillons prélevés montraient une adhérence uniforme entre les surfaces du revêtement et du longeron.

    Photo 3. Écrasement de l'âme en nid d'abeilles, laquelle s'est détachée du longeron
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    Photo of Écrasement de l'âme en nid d'abeilles, laquelle s'est détachée du longeron

    Au cours de l'examen des autres parties de la pale le long du renfort du longeron, il y a eu découverte de deux endroits où l'âme intérieure en nid d'abeilles était écrasée et s'était détachée de l'arrière du longeron. Ces deux endroits se situaient entre les références 211 et 224, et entre les références 263 et 287. Une couche de mousse adhésive se trouve entre l'âme et le longeron (voir la Photo 3). Aux deux endroits endommagés, la mousse adhésive était présente au niveau du longeron, mais il n'y avait aucun contact entre la mousse adhésive et l'âme. D'après les services techniques de Bell Helicopter, malgré la présence d'une mauvaise liaison entre certaines parties de l'âme en nid d'abeilles et le longeron, la ligne de jonction du revêtement au longeron n'aurait pas dû connaître une rupture statique ou en fatigue pendant la durée de vie utile de la pale de rotor.

    Les dossiers disponibles ont été examinés pour permettre de savoir si cette pale avait subi d'autres dommages pendant la période au cours de laquelle elle avait été en service. Rien n'indiquait la présence de dommages additionnels.

    Analyse

    La durée de vie utile de ce genre de pale de rotor avait beau être de 4000 heures, la pale dont il est question ici n'avait accumulé que 3251 heures de vol lorsqu'elle s'est décollée pendant le vol en question. La présente enquête a essentiellement cherché à savoir si le procédé de réparation utilisé seulement quatre heures de vol avant le décollement avait un rapport avec ce qui s'est passé pendant le vol en question.

    Tant avant le présent événement qu'avant celui survenu plus tôt au cours de l'année, aucun problème relié à cette pale n'avait été signalé. Toutes les réparations effectuées dans la partie qui avait été endommagée antérieurement avaient été approuvées par Bell Helicopter et avaient été exécutées dans le respect des procédures normalisées. Les dossiers ne faisaient état d'aucun écart qui aurait pu contribuer au décollement du revêtement de la pale pendant le vol en question.

    Au cours de l'examen de la liaison entre le renfort du longeron et le revêtement, à différents endroits de la pale concernée, il a été établi que tous les endroits situés du côté intérieur de la partie réparée présentaient une liaison cohésive. Toutefois, la partie réparée antérieurement montrait un décollement cohésif sporadique du côté du revêtement, la partie décollée indiquant que la liaison entre le renfort du longeron et le revêtement n'était pas cohésive.

    La possibilité que la faiblesse de la liaison à l'endroit de la défaillance ait été le résultat d'une défectuosité apparue pendant le processus de fabrication, a été évaluée. Cette possibilité a été écartée, car il a été jugé peu probable que, si la pale avait présenté une telle défectuosité, elle aurait pu accumuler 3251 heures de vol sans qu'aucun problème ne soit signalé.

    Bien que la pale de rotor endommagée ait été réparée antérieurement à l'aide d'un processus régulièrement utilisé dans l'industrie, il n'empêche qu'on a envisagé la possibilité que l'intégrité de la pale dans la partie décollée ait été remise en question au cours du processus ayant servi lors de la réparation antérieure. Comme les deux parties sont adjacentes et sont les deux seuls endroits qui présentaient un mauvais collage, on a envisagé la possibilité que la vessie et la couverture chauffante utilisées pendant le processus de polymérisation de la réparation antérieure aient pu jouer un rôle dans le présent événement. Puisque la vessie et la couverture chauffante recouvraient une partie allant de l'extrémité de la pale jusqu'à un point situé du côté intérieur de la référence 243, la partie de la pale qui a fini par connaître une défaillance a été soumise au même cycle de chauffage et de pression que la partie en train d'être réparée. Toutefois, on n'a découvert aucun élément tendant à indiquer que le cycle de chauffage et de pression aurait eu un effet néfaste sur la partie de la pale qui s'est décollée.

    Des dommages survenus pendant la réparation antérieure sont peut-être à l'origine du décollement qui s'est produit pendant le vol en question, mais il est impossible de l'affirmer avec certitude. Si le procédé de réparation est en cause, il aurait donc provoqué un affaiblissement de la liaison sous l'influence de l'adhésif.

    Les services techniques de Bell Helicopter ont déterminé que le décollement entre l'âme en nid d'abeilles et le longeron n'aurait pas dû se traduire par un décollement du revêtement. Un décollement entre l'âme et le longeron a été constaté à deux endroits sur la pale. Le premier se situait entre les références 263 et 287, dans la zone où le revêtement d'intrados s'était décollé. Le second se situait entre les références 211 et 224. Ce second endroit endommagé se trouvait en dehors de la partie réparée et de la partie décollée, ce qui est le signe que ce type de dommage est fort probablement survenu au cours du processus de fabrication original.

    L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

    • LP 066/2005 – Main Rotor Blade Adhesive Failure (rupture d'adhérence d'une pale de rotor principal)

    On peut obtenir ce rapport en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.

    Faits établis

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. Une partie du revêtement d'intrados d'une pale du rotor principal s'est décollée en vol, d'où l'apparition de fortes vibrations de l'hélicoptère qui ont nécessité un atterrissage d'urgence.

    Fait établi quant aux risques

    1. Les dommages trouvés au second endroit de la pale sont probablement survenus au cours du processus de fabrication, mais sont passés inaperçus à ce moment-là. Il n'existe aucun renseignement permettant d'évaluer comment ce type de dommage nuit à l'intégrité d'une pale et quelles en seront les conséquences en cours d'utilisation.

    Autre fait établi

    1. Bien que le décollement se soit produit dans la région où la vessie et la couverture chauffante avaient été utilisées, l'enquête n'a pu confirmer si le cycle de chauffage et de pression avait eu des effets néfastes sur la partie de la pale qui s'est décollée.

    Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

    Safety action

    Safety action taken

    Following this incident, Transport Canada (TC) cancelled the flight permit until it could be shown that adequate inspections had determined that the aircraft was safe to operate. A new flight permit was issued on 10 June 2005 for the balance of the flight test program.

    Cascade Aerospace Inc. instituted a self-imposed restriction limiting the balance of the flight test program to an intentional manoeuvring minimum limit of +0.5 g as opposed to the previous self-imposed limit of 0 g.

    On 21 July 2005, the TSB Pacific regional office distributed two occurrence bulletins. One addressed the issue of the availability of information regarding the engine pitch-up limitation. The other addressed the issue of the availability of information to flight crews regarding the inability to unfeather a propeller subsequent to a fault condition that requires a propeller to be feathered.

    This report concludes the Transportation Safety Board's investigation into this occurrence. Consequently, the Board authorized the release of this report on .