Interruption des communications - perte d'espacement
Survenue à Gander (Terre-Neuve-et-Labrador)
Mettant en cause le Centre de contrôle régional de
Gander de Nav Canada
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Le MD-11 de la compagnie Lufthansa Airlines assurant le vol 8161 (DLH8161) effectue un vol entre l'aéroport international John F. Kennedy (KJFK) (États-Unis) et l'aéroport de Francfort-sur-le-Main (EDDF) (Allemagne) en passant par l'intersection TUSKY et en se dirigeant directement au point de longitude 48° nord et de latitude 050° ouest au niveau de vol (FL) 330. DLH8161 s'attend à recevoir l'autorisation de monter au FL350 en vue de la traversée océanique. Le Boeing 757-224 de la compagnie Continental Airlines assurant le vol 65 (COA65) effectue un vol entre Lisbonne (LPPT) (Portugal) et Newark (KEWR) (États-Unis) en passant par le point 48° de longitude nord et 050° de latitude ouest et en se dirigeant directement vers le VOR (radiophare omnidirectionnel à très haute fréquence) de Torbay et l'intersection TUSKY au FL330.
Lorsque les appareils se trouvent à environ 100 milles marins (nm) l'un de l'autre, le contrôleur autorise la montée de DLH8161 afin d'assurer l'espacement requis. Cependant, la fréquence radio utilisée pour communiquer avec DLH8161 ne fonctionne pas en raison d'un problème avec la ligne terrestre reliant le Centre de contrôle régional de Gander (ACC) à la station périphérique (PAL) utilisée pour les transmissions radio. L'équipage ne reçoit donc pas l'autorisation. Les appareils se trouvent à environ 30 nm l'un de l'autre lorsque le contact radio est rétabli à l'aide d'un moyen de rechange et le contrôleur autorise DLH8161 à monter au FL350. Environ au même moment, un contrôleur chargé de la supervision utilise une radio de secours et autorise COA65 à descendre au FL320. Les appareils se croisent vers 12 h, heure normale de Terre-Neuve, avec un espacement horizontal de quatre milles marins et un espacement vertical de 3 000 pieds. L'espacement radar minimal requis de cinq milles marins horizontalement ou de 1 000 pieds verticalement n'est pas respecté entre les appareils jusqu'au rétablissement du contact radio.
Renseignements de base
Au moment des faits, l'espace aérien intérieur supérieur de Gander se divisait en quatre secteurs. L'incident s'est produit dans le secteur le plus au sud, lequel s'étendait horizontalement de St. Anthony (Terre-Neuve et Labrador) à la frontière sud de l'espace aérien contrôlé de Gander sur une distance d'environ 450 nm dans le plan horizontal et au-dessus du FL280 dans le plan vertical. Cet espace aérien se trouvait au sud et à l'extérieur de la structure des routes organisées de ce jour-là et il accueillait des appareils se dirigeant vers l'est et vers l'ouest. Un seul contrôleur était responsable de ce secteur, ce qui constituait une façon de faire normale dans cette sous-unité. Le trafic était d'un niveau modéré et d'une certaine complexité. À partir du moment où les communications avec DLH8161 ont été interrompues jusqu'au rétablissement de celles-ci, le contrôleur de Gander (chargé du contrôle), qui avait obtenu sa qualification de la sous-unité deux mois auparavant, effectuait le contrôle et la coordination des déplacements de 15 avions. Le superviseur, qui se trouvait au poste de supervision de la sous-unité de l'espace aérien intérieur supérieur, n'a pas été au courant du problème de communication jusqu'à ce que le contrôleur l'en informe environ 10 minutes après la perte du contact radio.
À 11 h 28Note de bas de page 1, DHL8161 a communiqué pour la première fois avec le contrôleur sur la fréquence 134,7 mégahertz (MHz). Il se trouvait en vol de croisière au FL330 et il se dirigeait vers l'est en direction de l'intersection COLOR. L'appareil avait reçu l'autorisation pour effectuer la traversée océanique qui comprenait une remarque stipulant qu'il devait s'attendre à monter au FL350. Le contrôleur a autorisé DLH8161 à se diriger directement au point de longitude 48° nord et de latitude 050° ouest, ce qui allait raccourcir la distance à parcourir jusqu'au point d'entrée de la traversée océanique et placerait l'avion à environ 12 nm au sud du VOR de Torbay. Le contrôleur utilisait essentiellement les minimums d'espacement radar dans l'espace aérien dont il assurait le contrôle. L'une des conditions régissant l'utilisation des normes d'espacement radar est la nécessité d'avoir des communications directes entre le pilote et le contrôleur.
COA65, qui se dirigeait vers l'ouest au FL330, s'approchait de la limite entre l'espace aérien océanique et l'espace aérien intérieur au point de longitude 48° nord et de latitude 050° ouest. L'équipage avait reçu l'instruction de communiquer avec le contrôleur sur la fréquence 134,7 Mhz, une fois rendu à ce point. Les appareils en provenance de l'espace aérien océanique qui pénètrent l'espace aérien intérieur de Gander ne sont pas identifiés au radar tant qu'une communication directe avec le contrôleur n'a pas été établie.
À 11 h 47, le contrôleur a autorisé DLH8161 à monter au FL350 dans le but d'établir l'espacement vertical entre les deux appareils (voir l'annexe A), mais celui-ci n'a reçu aucun collationnement de la part de l'équipage. Pendant les huit minutes suivantes, le contrôleur a tenté à neuf reprises d'entrer en contact avec DLH8161 sur la fréquence 134,7 MHz, mais en vain. Selon ce qui a été observé, DLH8161 n'a pas changé d'altitude et il est demeuré au FL330. À l'ACC de Gander, les pannes de communication sont le plus souvent associées, et de loin, à des problèmes liés aux avions.
À 11 h 48, un contrôleur de l'ACC de Moncton a averti le contrôleur en question qu'un autre appareil était retourné sur la fréquence de Moncton après avoir reçu l'instruction d'utiliser la fréquence de Gander (134,7 MHz), puisqu'il n'avait reçu aucune réponse sur la fréquence assignée. Le contrôleur a demandé au contrôleur de l'ACC de Moncton d'assigner de nouveau la fréquence 134,7 MHz à l'appareil, et si cela ne fonctionnait pas, de demander à l'appareil d'essayer la fréquence 132,05 MHz. Le contrôleur a aussi tenté de communiquer avec plusieurs autres appareils se trouvant dans la partie sud du secteur qui devaient eux aussi surveiller la fréquence 134,7 MHz, mais il n'a reçu aucune réponse.
Le contrôleur a communiqué avec le coordonnateur de la station d'information de vol internationale (IFSS) et a déterminé que DLH8161 n'avait pas communiqué avec l'IFSS. À 11 h 55 min 3 s, le contrôleur a demandé à un appareil en direction ouest, qui se trouvait dans les environs et qui utilisait une autre fréquence, de syntoniser la fréquence de veille (121,5 MHz), de tenter d'entrer en contact avec DLH8161 et COA65 et de leur demander qu'ils communiquent avec l'ACC de Gander. Le contrôleur n'a pas précisé quelle fréquence les appareils devaient utiliser. Peu de temps après, le contrôleur a communiqué une seconde fois avec le coordonnateur de l'IFSS et lui a demandé de communiquer avec DLH8161 à l'aide du système SELCALNote de bas de page 2 et de demander au pilote de communiquer avec l'ACC de Gander sur la fréquence 133,9 MHz. Le contrôleur a aussi demandé au coordonnateur de l'IFSS de transférer COA65 à sa fréquence plus tôt que prévu.
Le contrôleur a ensuite avisé le superviseur de l'espace aérien intérieur supérieur de Gander qu'il n'était pas en mesure d'entrer en contact avec DLH8161. Le superviseur s'est rendu au poste de travail du contrôleur et a constaté, à partir de l'écran de commande du système de commutation en phonie (VSCS) du contrôleur, que les transmissions du contrôleur sur la fréquence 134,7 MHz ne se rendaient pas aux appareils (voir la figure 1). Le superviseur a communiqué avec le coordonnateur de l'IFSS afin de confirmer de nouveau qu'il n'était pas en communication avec DLH8161 ou COA65. Le superviseur a ensuite utilisé une radio de secours multi-canaux à accord continu et a été en mesure d'entrer en contact avec COA65 sur la fréquence 134,7 MHz. À 11 h 55 min 22 s, le superviseur a autorisé COA65 à descendre immédiatement au FL320, instruction qui a été confirmée par l'équipage. Les données radar enregistrées indiquent que COA65 a commencé sa descente à 11 h 56. COA65 n'a pas reçu l'ordre de syntoniser une fréquence principale en état de marche après l'autorisation de descendre du superviseur, et personne n'a surveillé la radio de secours.
À 11 h 56 min 3 s, DLH8161 est entré en contact avec le contrôleur sur la fréquence 133,9 MHz et a immédiatement reçu l'ordre de monter au FL350. L'équipage de DLH8161 a confirmé la réception de l'autorisation. Les données radar enregistrées indiquent que DLH8161 a commencé sa montée à 11 h 56 min 15 s. Le contrôleur n'avait pas été en mesure de communiquer avec l'un ou l'autre des appareils au cours de huit minutes précédentes. Les appareils se rapprochaient l'un de l'autre à une vitesse de 16 nm par minute sur des trajectoires quasiment opposées. Vingt secondes après le début de la montée de DLH8161, l'espacement vertical minimal de 1 000 pieds a été établi. COA65 et DLH8161 étaient alors à 18 nm l'un de l'autre.
De 11 h 57 à 11 h 59, le contrôleur a tenté à plusieurs reprises d'entrer en contact avec COA65 sur la fréquence 134,7 MHz, mais il n'a reçu aucune réponse. À 11 h 59 min 56 s, le contrôleur a demandé à un autre appareil dans les environs de communiquer avec COA65 sur la fréquence 134,7 MHz et d'ordonner à l'équipage de communiquer avec l'ACC de Gander sur la fréquence 132,05 MHz. COA65 a communiqué avec le contrôleur à 12 h 1 min 22 s sur la fréquence 132,05 MHz et a reçu l'instruction de changer le code de son transpondeur pour un code discret en vue d'une identification radar. L'incident a entraîné un changement de contrôleurs de l'espace aérien intérieur supérieur à 12 h 4 min 29 s, et COA65 a ensuite été identifié au radar. Il a été question, pendant l'exposé de relève, d'un problème de fréquence, mais aucune discussion n'a eu lieu concernant une mesure de rechange visant le rétablissement des communications avec tous les appareils.
Vers 12 h, le superviseur a signalé au personnel technique qu'il y avait un problème avec la fréquence 134,7 MHz. Des vérifications internes effectuées par le personnel technique ont confirmé qu'il y avait un problème avec les câbles reliant l'ACC et la station PAL à Trepassey. Aucun problème n'a été décelé dans les radios principales et de secours de la station PAL. Il n'y a aucune alarme qui se déclenche à l'ACC de Gander pour avertir le personnel technique de ce type de défaillance. L'entreprise qui assure la maintenance du lien entre l'ACC de Gander et la station PAL a été contactée à 12 h 34. La liaison entre l'ACC de Gander et la station PAL de Trepassey a été rétablie à 12 h 37, au moment même où le technicien de Nav Canada discutait de la coupure avec un représentant de l'entreprise. La cause de la défaillance n'a pu être déterminée.
Les contrôleurs utilisent principalement le système de commutation en phonie pour accéder aux radios et aux lignes terrestres. Chaque poste de contrôle possède un écran de commande du système VSCS (voir figure 1). Il s'agit d'un écran tactile qui affiche toutes les fréquences air-sol et les lignes terrestres qui s'offrent au contrôleur. Chaque fréquence est affichée séparément sur l'écran à l'intérieur d'un rectangle. Certaines parties du rectangle sont de couleur verte selon que le contrôleur reçoit ou émet une communication ou qu'il appuie sur le bouton de transmission sans qu'il y ait transmission (ce qui indique une défaillance).
La formation qu'ont reçue les contrôleurs en rapport avec le système VSCS comprend une instruction théorique ainsi que des exercices pratiques. Le contrôleur dont il est question dans l'incident ne savait pas que la configuration en question des cases de couleur verte dans le rectangle de la fréquence 134,7 MHz signifiait qu'il ne transmettait pas sur cette fréquence même s'il appuyait sur le bouton de transmission. Il s'agissait de la seule indication directe permettant au contrôleur se savoir qu'il y avait une panne d'un équipement de communication des services de contrôle de la circulation aérienne (ATC). L'enquête a permis de déterminer que certains autres contrôleurs ignoraient également la signification des différents voyants de couleur verte apparaissant sur l'écran de commande.
Un certain nombre de fréquences offertes aux contrôleurs de l'ACC de Gander sont stratégiquement situées aux stations PAL afin de s'assurer que la communication radio est possible dans tout l'espace aérien sous la responsabilité de l'ACC de Gander. Les radios ont une portée d'environ 200 nm, distance dépendant en partie de l'altitude des aéronefs. La station PAL de Trepassey se situe à un endroit qui permet de fournir un service radio aux aéronefs évoluant dans la partie sud de l'espace aérien contrôlé par l'ACC de Gander. Nav Canada a mis sous contrat une entreprise de services commerciale qui s'occupe de la maintenance des liaisons entre les stations PAL et l'ACC de Gander. Le système VSCS ainsi que le système de communication d'urgence de l'ACC (ACCECS)Note de bas de page 3 sont reliés aux radios principales et aux radios de secours grâce aux liaisons des stations PAL.
Les modes de transmission (p. ex. lignes terrestres ou micro-ondes) entre l'ACC de Gander et les stations PAL offrent un certain niveau de redondance. Les lignes terrestres entre l'ACC de Gander et la station PAL de Trepassey passent par St. John's, et seulement une ligne par fréquence est disponible entre St. John's et Trepassey. Il a été déterminé que la liaison entre l'ACC de Gander et St. John's était fonctionnelle, mais qu'une défaillance s'était produite dans la ligne entre St. John's et Trepassey. Le contrôleur ne pouvait donc utiliser la fréquence 134,7 MHz située à Trepassey. Les fréquences 134,7 MHz et 132,05 MHz sont situées à la station PAL de Trepassey et sont reliées à l'ACC de Gander par des moyens de communication distincts. L'émetteur et le récepteur de la fréquence 133,9 MHz sont situés à Gander. Il s'agit de la fréquence qui a finalement permis à DLH8161 de communiquer avec Gander. Une radio de secours multi-canaux à accord continu était disponible à l'ACC de Gander en cas d'interruption des communications. Cependant, ce ne sont pas tous les contrôleurs qui était au courant de l'existence de cette radio, de l'endroit où elle se trouve et de sa portée.
La section 6 du Manuel d'exploitation du contrôle de la circulation aérienne (MANOPS ATC) décrit les procédures que doivent suivre les contrôleurs lorsqu'une panne de communication survient avec un appareil. Les contrôleurs reçoivent une instruction théorique tant pendant la formation ATC initiale que pendant la formation en région. On explique comment réagir à une telle panne et on présente les méthodes de rechange possibles pour rétablir les communications avec les appareils. L'accent est mis sur les interruptions de communications provoquées par un bris de l'équipement se trouvant dans les avions. Pendant les sessions de formation à l'ACC de Gander, il n'y aucune simulation d'interruption des communications provoquée par un bris de l'équipement ATC pas plus qu'il n'y a de revue de la procédure en cas de panne de la sorte pendant le cours de recyclage. Le MANOPS ATC ne fournit pas de directives claires aux contrôleurs en ce qui a trait aux situations d'interruption des communications causée par un problème d'équipement ATC. La section 1112 d'une autre publication de Nav Canada, soit le Manuel d'exploitation des services en vol, énumère les étapes précises qu'un spécialiste des services en vol doit suivre s'il n'est pas en mesure d'entrer en contact avec un appareil après un appel sur la fréquence que cet appareil est censé surveiller. Les contrôleurs ne consultent habituellement pas cette publication.
Analyse
Les communications radio sont essentielles au contrôle efficace de la circulation aérienne. Un contrôleur doit rapidement déterminer la cause de toute panne de communication et décider de la meilleure façon de rétablir les communications. Lorsque DLH8161 n'a pas collationné l'autorisation de monter au FL350, le contrôleur a d'abord conclu que c'était l'appareil qui avait des problèmes de communication. En raison de leur expérience passée, de nombreux contrôleurs effectuent l'évaluation de la situation sans même considérer au départ qu'il pourrait s'agir d'un problème de l'équipement ATC. Ils concluent plutôt à un problème au niveau de l'aéronef. Ce ne sont pas tous les contrôleurs de Gander qui ont reçu la formation appropriée ou qui ont pris part à une simulation de panne de communications au sol comprenant l'exécution des étapes à suivre pour rétablir rapidement les communications. Par conséquent, les multiples tentatives de contact avec DLH8161 sur une fréquence qui ne fonctionnait pas ont fait perdre un temps précieux.
Les indices suivants se sont présentés au contrôleur, indices qui lui confirmaient que la panne ne se limitait pas qu'à un appareil : l'indication sur l'écran de commande du VSCS du contrôleur et les commentaires provenant d'un autre appareil et des contrôleurs de l'ACC de Moncton qui laissaient entendre qu'ils avaient de la difficulté à communiquer avec le secteur sur la fréquence 134,7 MHz. Même lorsqu'il a demandé à un autre appareil d'entrer en contact avec DLH8161, le contrôleur n'a pas précisé quelle autre fréquence en état de marche aurait pu être utilisée. Le contrôleur n'a pas utilisé le mode de secours du VSCS. Cependant, parce que la défaillance résidait dans une ligne menant à la station PAL, une telle mesure n'aurait rien changé.
L'écran de commande du VSCS a donné un indice menant à la conclusion que la panne de communication était causée par une défaillance d'un équipement ATC et non par un équipement à bord de l'appareil. Cependant, la différence entre les affichages à l'écran de commande du VSCS n'était pas évidente pour le contrôleur. Si le contrôleur jette un coup d'oeil au tableau des fréquences, il voit ce qu'il s'attend à voir lorsqu'il tente d'obtenir la fréquence, soit une indication globale de couleur verte. Cependant, seul un regard plus attentif et une connaissance plus approfondie de la signification des différents types d'affichage du tableau des fréquences auraient pu alerter le contrôleur qu'il ne transmettait pas sur la fréquence. Même s'il a reçu de l'instruction sur le fonctionnement du VSCS durant sa formation et qu'il a utilisé l'équipement pendant un certain nombre de mois, il ne connaissait pas les divers types d'affichage pas plus que leur signification exacte. Le contrôleur en question n'était pas le seul à ne pas connaître la signification des affichages de l'écran de commande du VSCS. Le superviseur a observé l'écran de commande du VSCS et a pu déterminer que la fréquence 134,7 MHz utilisée par le contrôleur ne fonctionnait pas.
Le contrôleur ne savait pas qu'une radio de secours multi-canaux à accord continu était disponible dans une autre sous-unité de l'ACC de Gander. Le contrôleur en question n'était pas le seul à ne pas être au courant de l'existence de cet équipement. La trajectoire des appareils passait près de la limite extérieure de la portée de cette radio. Par conséquent, COA65 se trouvait assez près de l'ACC de Gander pour se trouver à la portée de la radio de secours multi-canaux à accord continu. Il a été déterminé que les autres contrôleurs n'étaient pas au courant de la portée de cette radio. Par coïncidence, DLH8161 a communiqué avec le contrôleur au moment même où le superviseur entrait en contact avec COA65, ce qui a permis au contrôleur d'autoriser immédiatement la montée au FL350, réduisant ainsi la période de conflit entre les deux appareils.
Les problèmes de communication n'étaient pas totalement résolus après l'établissement de l'espacement minimal entre les deux appareils. Le superviseur a laissé COA65 sur la fréquence 134,7 MHz, mais personne ne surveillait la radio de secours multi-canaux à accord continu. Le contrôleur, pensant que DLH8161 l'avait contacté sur la fréquence 134,7 MHz, a cru que la fréquence 134,7 MHz était de nouveau fonctionnelle. Le personnel technique n'a été averti du problème avec la fréquence 134,7 MHz qu'à 12 h, soit 15 minutes après que le problème s'était déclaré, parce que le contrôleur n'a pas réalisé à ce moment-là qu'il s'agissait d'un problème avec l'équipement au sol. Au cours de l'exposé de relève entre le contrôleur en question et le contrôleur de relève, aucune indication claire n'a été donnée en ce qui a trait aux fréquences qui étaient fonctionnelles et aux mesures qui avaient été prises ou non dans le but de s'assurer qu'une fréquence fonctionnelle soit assignée à tous les avions. La liaison entre l'ACC de Gander et la station PAL de Trepassey était encore rompue au moment de la relève.
Une entreprise de services commerciale sous contrat avec Nav Canada est responsable du maintien des liaisons entre l'ACC de Gander et les stations PAL. Le système VSCS et le système de communication d'urgence de l'ACC sont reliés aux radios principales et aux radios de secours des stations PAL grâce à ces liaisons. Seulement une ligne par fréquence est disponible entre St. John's et Trepassey. La défaillance de cette ligne a entraîné la perte de la liaison entre l'ACC de Gander et la station PAL ainsi que la perte de la fréquence principale de ce secteur (134,7 MHz). Il n'y avait pas de ligne de secours et par conséquent, aucun moyen de rechange permettant au contrôleur d'avoir accès à la fréquence 134,7 MHz. Ni l'entreprise de services ni Nav Canada n'a reçu un avertissement indiquant qu'une défaillance de ligne s'était produite. Il revient au contrôleur de déterminer qu'il y a eu défaillance du système de communication et d'alerter le personnel technique. Environ 15 minutes se sont écoulées avant que les techniciens soient avertis de la panne.
Dans l'incident en question, la sécurité du vol de deux avions qui évoluaient sur des trajectoires inverses à la même altitude n'a pas été assurée pendant environ 10 minutes, parce qu'il n'existait aucune solution de rechange aux minimums d'espacement radar au moment où la communication avec les deux appareils a été coupée. Les deux appareils ayant finalement été contactés, COA65 a reçu l'ordre de descendre, DLH8161 a reçu l'ordre de monter, et le minimum d'espacement vertical a été établi lorsque les deux appareils se trouvaient à environ une minute de vol l'un de l'autre.
Faits établis
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- Il y a eu une défaillance de la liaison reliant l'ACC de Gander et les fréquences ATC à la station PAL de Trepassey. La cause de la défaillance n'a pas pu être déterminée.
- La panne de communication entre le contrôleur de Gander et les deux appareils qui se trouvaient sur des trajectoires inverses à la même altitude a fait en sorte que la sécurité du vol des deux avions n'a pas été assurée.
- Le contrôleur ne s'est pas rendu compte qu'il y avait un problème avec la fréquence utilisée pour le contrôle des appareils dans la partie sud de l'espace aérien.
- Le contrôleur n'était pas au courant que l'écran de commande du système de commutation en phonie affichait une indication de couleur verte même lorsqu'il y avait échec de transmission sur une fréquence. Cette situation a entraîné un délai dans l'établissement d'un moyen de rechange pour communiquer avec les avions.
Faits établis quant aux risques
- Le contrôleur ainsi que certains autres contrôleur à l'ACC de Gander n'étaient pas au courant que, dans la salle d'exploitation se trouvait une radio de secours multi-canaux à accord continu qu'ils pouvaient utiliser en cas de panne de l'émetteur principal et que cette radio n'avait peut-être pas une portée assez grande pour communiquer avec tous les avions se trouvant dans l'espace aérien dont un contrôleur avait la responsabilité.
- La formation des contrôleurs de Gander au sujet du rétablissement de la situation après une panne de communication et des ressources disponibles pour rétablir les communications avec les avions dont ils ont le contrôle ne fait pas l'objet d'une simulation. Cette situation pourrait retarder le rétablissement d'une situation de panne de communication et entraîner une perte d'espacement ou un risque d'abordage.
- Il n'existe aucune méthode de rechange à l'ACC de Gander qui permettrait aux contrôleurs d'accéder aux radios situées à la station PAL en cas de panne des lignes reliant l'ACC à la station PAL. Les radios principales et de secours à la station PAL sont reliées à l'ACC par la même liaison.
Autres faits établis
- Le système de communication d'urgence de l'ACC de Gander utilise les mêmes liaisons que le système VSCS pour relier l'ACC aux fréquences de la station PAL. Une panne de courant ou une défaillance du système VSCS à l'ACC de Gander et une perte simultanée des liaisons reliant l'ACC et la station PAL entraîneraient une perte totale des communications sur toutes les fréquences desservies par les liaisons défaillantes.
Mesure de sécurité prises
Les techniciens et les contrôleurs n'étaient pas au courant qu'il existait une anomalie dans l'écran de commande du système de commutation en phonie (VSCS) qui faisait en sorte qu'une indication de couleur verte apparaissait indiquant que le bouton de transmission était enfoncé et qu'il y avait transmission alors que la transmission ne s'effectuait pas. Cette anomalie a été portée à l'attention de la direction des Exigences des systèmes opérationnels de Nav Canada pour résolution.
Depuis un certain nombre d'années, la sous-unité de l'espace aérien supérieur intérieur de l'ACC de Gander n'a bénéficié que de très peu de nouveaux éléments de formation. Par conséquent, le plan de formation en vue de la qualification de la sous-unité ne prévoyait pas une formation relative à l'utilisation d'une radio à accord continu pour les stagiaires. Les contrôleurs qui ont récemment été qualifiés ont reçu un exposé sur l'utilisation de l'émetteur et des dispositions ont été prises pour que la formation périodique annuelle de cette année comprenne une simulation et aborde le sujet des pannes de communication et les moyens de s'en sortir rapidement.
Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .
Annexes