Rapport d'enquête aéronautique A02P0290

Atterrissage train rentré
Cessna Citation 550 C-GYCJ
exploité par Canada Jet Charters Limited
à l'aéroport de Sandspit (Colombie-Britannique)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le Cessna Citation 550, immatriculé C-GYCJ et portant le numéro de série 5500561, quitte l'aéroport international de Vancouver (Colombie-Britannique) pour un vol d'évacuation médicale à destination de l'aéroport de Sandspit, dans les îles de la Reine-Charlotte (Colombie-Britannique). À bord de l'appareil se trouvent deux pilotes et une équipe de deux assistants médicaux spécialisés en réanimation. Lorsque l'appareil arrive à Sandspit, le vent de surface est violent et souffle par rafales en travers de la piste. L'équipage effectue une approche aux instruments de la piste 30 et, juste avant de toucher le sol, l'appareil pique du nez : le commandant de bord pense que le train avant, puis le train principal, se sont affaissés, car l'appareil glisse maintenant sur le ventre. L'équipage fait évacuer l'appareil et se dirige vers l'aérogare. En revenant à l'appareil y chercher ses effets personnels, l'équipage s'aperçoit que le train est en position rentré, tout comme la commande du train d'atterrissage. L'accident s'est produit à 20 h 52, heure normale du Pacifique. Personne n'a été blessé. L'appareil est lourdement endommagé.

    Renseignements de base

    Le commandant de bord était employé en qualité de pilote de Cessna Citation 550 par Canada Jet Charters Ltd. depuis trois ans. Il était, sur ce vol, le pilote non aux commandes et occupait le siège de droite. Il détenait une licence de pilote de ligne valide annotée pour les avions terrestres mono- et multimoteurs, une qualification sur type pour le C550 ainsi qu'une qualification de vol aux instruments. Sa dernière vérification de compétences s'était déroulée sur un simulateur de Citation le 5 septembre 2002. Il totalisait environ 4 550 heures de vol sur divers appareils mono- et multimoteurs dont 1 450 sur Cessna Citation 550. Il était qualifié pour piloter l'appareil en qualité de commandant de bord selon les règles de vol aux instruments (IFR) de même qu'il était qualifié pour occuper le siège de droite tandis que le copilote assumait le rôle de pilote aux commandes sur le siège de gauche. Il avait été en repos durant les 24 heures précédant le vol où s'est produit l'accident.

    Le copilote était employé en qualité de pilote de Cessna Citation 550 par Canada Jet Charters Ltd. depuis deux ans. Il était, sur ce vol, le pilote aux commandes et occupait le siège de gauche. C'est une pratique normale pour le copilote, dans cette compagnie, d'occuper le siège de gauche lorsqu'il est le pilote aux commandes, pour autant que le commandant de bord soit qualifié pour occuper le siège de droite. Il détenait une licence de pilote de ligne valide annotée pour les avions terrestres mono- et multimoteurs, une qualification sur type pour le C550 ainsi qu'une qualification de vol aux instruments. Sa dernière vérification de compétences s'était déroulée sur un simulateur de Citation le 10 janvier 2002. Il totalisait environ 3 300 heures de vol sur divers appareils mono- et multimoteurs dont 850 heures sur Cessna Citation 550. Il avait été en repos durant les 12 heures précédant le vol où s'est produit l'accident.

    Les deux pilotes se sont enregistrés à l'installation de Canada Jet Charters à l'aéroport international de Vancouver à 18 h 30 heure normale du PacifiqueNote de bas de page 1 et y ont été rejoints par les deux ambulanciers affectés au vol. Les pilotes ont examiné les renseignements de l'exposé météorologique et ont établi que les conditions météorologiques étaient acceptables pour effectuer un vol IFR.

    Les conditions météorologiques signalées à l'aéroport de Sandspit à 18 h étaient les suivantes : vent du 170° vrais à 6 noeuds; visibilité de 20 milles terrestres; quelques nuages à 5 200 pieds au-dessus du niveau du sol (agl), quelques nuages à 7 400 pieds agl et des nuages fragmentés à 21 000 pieds agl; température de 11 °C; point de rosée à 10 °C; calage altimétrique à 29,03 pouces de mercure. Les conditions météorologiques prévues à l'aéroport de Sandsprits pour la période de 18 h à 22 h étaient les suivantes : vent du 160° vrais à 10 noeuds avec des rafales de 20 noeuds; visibilité dominante de plus de 6 milles terrestres; nuages épars à partir de 500 pieds agl, nuages fragmentés à partir de 2 500 pieds agl; temporairement entre 18 et 22 h : visibilité de deux milles terrestres avec des averses légères et du brouillard, nuages fragmentés à 500 pieds agl, couvert nuageux à 1 500 pieds agl.

    L'appareil quitte Vancouver à 19 h 18. Le copilote est le pilote aux commandes. Le vol se déroule sans encombre jusqu'à 20 h 21, heure à laquelle l'équipage obtient le bulletin d'observation météorologique pour Sandspit du système automatique d'observation météorologique (AWOS). Cette observation, effectuée à 20 h 20, signale un vent du 220 degrés magnétiques à 30 noeuds, avec des rafales de 37 noeuds. L'équipage passe en revue l'exposé pour une approche VOR/DME de la piste 30 et, en raison des rafales de vent de travers à Sandspit, décide d'atterrir avec les volets en position d'approche (15°) plutôt qu'en position d'atterrissage (complètement sortis). La piste 30, recouverte d'asphalte, mesure 5 120 pieds de long sur 150 pieds de large. L'équipage passe en revue la liste de vérifications de descente, puis il entame à 20 h 35 sa descente à partir du niveau de vol (FL) 350en vue d'une approche à Sandspit. Franchissant le FL180, l'équipage passe en revue la liste de vérifications du niveau de transition suivie de la liste de vérifications à 10 000 pieds. À 20 h 45, et à une altitude d'environ 10 000 pieds, les aérofreins ont été sortis et sont demeurés sortis durant tout le reste du vol.

    Durant l'approche, l'équipage reçoit de nombreux appels de l'AWOS et de la station d'information de vol de Terrace au sujet des conditions météorologiques à Sandspit. Au moment de l'approche prévu, les volets ont été sortis en position d'approche. Le klaxon de train d'avertissement d'atterrissage retentit à quatre reprises avant que l'appareil ne survole EGBAM, le repère d'approche final (FAF), et il est, à chaque fois, coupé par l'équipage.

    Le copilote ne demande pas que le train d'atterrissage soit sorti et il ne demande pas que la liste de vérifications avant atterrissage soit passée en revue. Le commandant de bord ne rappelle pas au copilote de sortir le train d'atterrissage et il n'effectue pas non plus les vérifications avant atterrissage. La liste de vérifications avant atterrissage utilisée demande que les aérofreins soient réglés selon le besoin tandis que la liste de vérifications avant atterrissage du manuel de vol de l'aéronef (MVA) approuvé par la Federal Aviation Administration (FAA) demande que les aérofreins soient rentrés avant d'atteindre 50 pieds. Le klaxon d'avertissement du train d'atterrissage retentit encore à trois reprises après le survol du repère d'approche finale et coupé, à chaque fois, par l'équipage.

    À 20 h 51, à environ deux milles marins du seuil de la piste, le commandant de bord remarque que l'indicateur de trajectoire d'approche de précision (PAPI) n'est pas visible. Il essaye de l'allumer à distance en enfonçant à plusieurs reprises le bouton de son micro, puis, n'obtenant aucun résultat, il appelle par radio la FSS de Terrace pour demander si le PAPI fonctionne. La réponse de la FSS de Terrace consiste à pousser le balisage lumineux de la piste au maximum de son intensité et le commandant de bord a dû demander que son intensité soit baissée. L'appareil se trouve alors à environ 14 secondes du toucher de roues.

    Après le contact initial avec la piste, l'appareil rebondit à plusieurs reprises avec une force décroissante tout en glissant le long de la piste. Tout d'abord, il vire sur le côté droit de la piste, brisant cinq feux de balisage de piste avec son aile droite, puis il vire sur la gauche et s'immobilise, selon un cap d'approximativement 280 degrés magnétiques, à environ 500 pieds de l'extrémité de la piste. L'appareil a subi des dommages structuraux importants.

    La conception du système d'avertissement de train d'atterrissage du Cessna Citation 550 est telle que, si le train d'atterrissage n'est pas sorti et que les volets sont sortis en position d'atterrissage, le klaxon d'avertissement retentit et ne peut pas être coupé par l'équipage. Lorsque les volets sont en position d'approche et que le train n'est pas sorti, le klaxon d'avertissement retentit lorsqu'une manette des gaz est ramenée en-deça d'environ 70 % de N1, mais il peut être coupé par l'équipage. S'il est coupé, aucun avertissement sonore ne retentira plus si le train n'est pas sorti, à moins que l'une des manettes de gaz soit poussée au-delà de la position de réinitialisation, puis de nouveau tirée en arrière.

    Les dossiers indiquent que l'appareil était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. L'appareil avait été construit en 1987 et avait volé un total de 8143,5 heures avant le vol où s'est produit l'accident. Un examen du carnet de route et des livrets cellule et moteur n'a rien révélé de particulier. L'appareil était exploité dans les limites de masse et de centrage prescrites. Il était équipé d'un enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR) qui a été extrait de l'appareil et envoyé au Laboratoire technique du BST pour analyse.

    L'appareil n'était pas équipé d'un dispositif avertisseur de proximité du sol (GPWS) et le Règlement de l'aviation canadien (RAC) n'exigeait pas qu'il en soit équipé. Le GPWS est conçu pour produire des signaux d'avertissements sonore et visuel lorsque l'appareil se trouve sur une trajectoire de descente vers le sol conduisant à une collision avec le relief ou bien lorsque l'appareil va atterrir avec une configuration d'atterrissage incorrecte. Si l'appareil avait été équipé d'un GPWS lors de son approche sur Sandsprit, le mode 4 de ce dernier se serait déclenché à une altitude, mesurée par le radio-altimètre, de 500 pieds au-dessus du niveau du sol, allumant des voyants d'avertissement et déclenchant le signal sonore « TOO LOW, GEAR » (trad. : « TROP BAS, TRAIN »).

    Analyse

    Les procédures d'utilisation normalisées (SOP) de Canada Jet Charters Ltd. demandent que la liste de vérifications avant atterrissage soit passée en revue avant que l'appareil, en approche de non-précision, ne survole le repère d'approche finale. Cela n'a pas été fait bien que le klaxon d'avertissement du train d'atterrissage ait retenti à quatre reprises avant le repère d'approche finale et à trois reprises supplémentaires entre le repère d'approche finale et le toucher de roues. L'équipage a coupé le klaxon à chaque fois que celui-ci a retenti.

    Lorsque le commandant de bord s'est aperçu en approche finale, à deux milles de la piste, qu'il ne pouvait pas voir le PAPI, il s'est occupé de faire allumer ce dernier. À la suite de quoi, l'intensité du balisage lumineux de la piste ayant été augmentée, le commandant de bord a dû faire de nouveaux appels. Ces distractions, ainsi que les nombreuses communications radio reçues par l'appareil au sujet des conditions météorologiques à Sandsprit, ont probablement fait que l'équipage a oublié que le train n'était pas sorti et que la liste de vérifications avant atterrissage n'avait pas été passée en revue.

    Faits établis

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. L'équipage n'a pas effectué les vérifications avant atterrissage, ne s'est pas occupé du signal d'avertissement sonore et n'a pas sorti le train d'atterrissage, entraînant un atterrissage train rentré.

    Faits établis quant aux risques

    1. L'appareil n'était pas équipé d'un dispositif avertisseur de proximité du sol qui aurait pu permettre d'éviter l'accident.
    2. La liste de vérifications avant atterrissage utilisée ne reflétait pas les exigences du manuel de vol relatives au fait que les aérofreins doivent être rentrés avant d'atteindre 50 pieds.

    Mesures de sécurité

    Le 10 janvier 2003, le BST a adressé à Transports Canada, avec copie au B.C. Ambulance Service, une lettre d'information sur la sécurité aérienne portant sur la conception du système d'avertissement du train d'atterrissage du Cessna Citation 550. Cette lettre démontrait également en quoi un GPWS permettrait d'éviter les risques d'atterrissage train rentré.

    En réponse à cette lettre, B.C. Ambulance Service a décidé d'exiger l'installation d'un système de GPWS sur tous les avions exploités en son nom par des transporteurs sous contrat.

    Le 14 février 2003, Transports Canada a répondu à cette lettre en donnant le détail d'une proposition de modification du Règlement de l'aviation canadien (RAC) relative à l'installation de systèmes d'avertissement et d'alarme d'impact (TAWS) de classe « A » et de classe « B ». La lettre de réponse indiquait que, si ces modifications entrent en vigueur, le TAWS pourrait, selon la classe, l'installation et l'exploitant, constituer un moyen de prévention des atterrissages train rentré. Cette proposition de modifications a par la suite été approuvée dans son principe et, si elle est avalisée, les appareils tels que le Cessna Citation 550 devront être équipés d'un TAWS. Ainsi, un Cessna Citation 550 exploité en vertu de l'article 704 du RAC serait doté, au minimum, d'un TAWS de classe « B » si l'appareil est configuré avec six à neuf sièges passagers. Un TAWS de classe « A » équipé d'un écran serait obligatoire pour un appareil configuré avec plus de 10 sièges passagers. Rien n'exigerait qu'un appareil configuré comme celui impliqué dans l'événement en question soit équipé d'un TAWS.

    Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .