Atterrissage court
du Airbus A320-211 C-FKCO
d'Air Canada
à St. John's (Terre-Neuve)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
L'Airbus A320, immatriculé C-FKCO, assurait le vol régulier 630 d'Air Canada entre Toronto (Ontario) et St. John's (Terre-Neuve). Pendant une approche de nuit LOC (radiophare d'alignement de piste) sur la piste 29 dont le seuil avait été décalé, l'avion a rencontré de fortes rafales de vent. Il a touché des roues quelque 250 pieds avant le seuil décalé et a heurté des chevalets de construction. Deux conduites de frein et un détecteur de température de frein ont été endommagés. Personne n'a été blessé. L'appareil a touché des roues à 0 h 53, heure normale de Terre-Neuve.
Renseignements de base
Environs de la piste
La piste 29 de l'aéroport de St. John's (Terre-Neuve) mesure 8 500 pieds de longueur sur 200 pieds de largeur. La piste présente une pente moyenne de 0,22 %, mais, sur sa première moitié, elle atteint parfois 0,42 %. Au moment de l'accident, le seuil de la piste 29 avait été décalé de 1 767 pieds à cause de travaux de construction. Le seuil décalé était balisé avec des drapeaux et des cônes pour les opérations de jour et avec quatre feux de barre de flanc rouges de chaque côté de la piste, pour les opérations de nuit, conformément aux plans approuvés par Transports Canada. De plus, deux rangées de barrières avaient été érigées en travers de la partie inutilisabe de la piste, à 120 pieds et à 675 pieds avant le seuil décalé respectivement. Un avis aux navigateurs aériens (NOTAM) avait été publié pour signaler que le seuil de piste avait été décalé et qu'il était balisé avec des drapeaux et des cônes, le jour, et avec des feux de barre de flanc, la nuit. Le NOTAM mentionnait également que les feux d'approche haute intensité étaient inutilisables, mais il ne parlait pas des barrières. L'équipage du vol 630 d'Air Canada (ACA630) avait un exemplaire de ce NOTAM.
Le paragraphe 5.3.11.10 du document Aérodromes - normes et pratiques recommandées de Transports Canada (TP 312) mentionne que cinq feux de barre de flanc doivent être utilisés pour baliser le nouvel emplacement d'une piste dont le seuil a été décalé et dont la largeur est supérieure à 45 mètres. La piste 29 mesure 61 mètres de large. L'enquête n'a pas permis d'établir pourquoi il avait été approuvé que seulement quatre feux de barre de flanc puissent être utilisés.
La piste 29 n'était pas desservie par un indicateur visuel de pente d'approche (VASIS). D'après la pratique recommandée au paragraphe 5.3.6.2 du TP 312Note de bas de page 1, un VASIS devrait être installé pour desservir l'approche d'une piste lorsque le seuil de cette dernière est temporairement décalé de sa position normale et est utilisé par des avions à turboréacteurs.
De plus, le paragraphe 5.3.6.1 du TP 312 indique entre autres qu'un VASIS doit être installé pour les opérations normales quand la topographie ou les conditions météorologiques dominantes sont telles que l'aéronef risque d'être soumis à une turbulence anormale pendant l'approche. Les cartes d'approche des pistes 11, 16 et 29 de l'aéroport de St. John's font toutes état de turbulence modérée à forte, même si ces pistes ne sont pas équipées d'un VASIS.
L'incident est survenu de nuit sous un ciel couvert. Les équipages de conduite de deux appareils ayant atterri à l'aéroport de St. John's cette nuit-là ont mentionné que l'approche sur la piste 29 s'était déroulée comme une approche vers un « trou noir ».
Le Manuel de vol aux instruments de Transports Canada décrit comme suit l'illusion d'optique appelée « illusion de trou noir » :
Au cours d'approches visuelles de nuit vers des pistes non éclairées (. . .) le manque de repères environnants pour l'orientation perturbe la perception de profondeur. Dans ces conditions, les pilotes surestiment souvent leur altitude, et tout en se concentrant sur le maintien d'un angle d'approche visuel constant, (. . .) [ils décrivent en descendant] (. . .) un arc qui entraîne un contact prématuré avec le sol.
Le document Facteurs humains en aviation - Manuel de base (TP 12863) de Transports Canada décrit les illusions d'optique produites par les pentes des pistes de la manière suivante : « Au cours d'une approche normale vers une piste qui possède ne serait-ce qu'une légère pente ascendante, vous penserez que vous êtes trop haut et serez porté à descendre pour faire correspondre votre image visuelle avec celle qui vous est familière ».
Conditions météorologiques
Avant de décoller, l'équipage a reçu la prévision d'aérodrome émise à 20 h 1, heure normale de Terre-Neuve (HNT)Note de bas de page 2, le 23 septembre concernant l'aéroport de St. John's. Cette prévision était valable de 20 h 30 le 23 septembre à 20 h 30 le 24 septembre et faisait état des conditions suivantes :
vent de surface du 210 ° vrai à 15 noeuds, visibilité de plus de 6 milles terrestres (sm), nuages épars à 500 pieds, plafond à 2 500 pieds avec nuages fragmentés. Fluctuations temporaires entre 20 h 30 et 5 h 30, visibilité de 4 sm dans des averses de pluie faible et de la bruine, plafonds à 500 pieds et à 2 500 pieds avec nuages fragmentés, vent de surface du 220 ° vrai à 25 noeuds avec des rafales pouvant atteindre les 35 noeuds entre 21 h 30 et 23 h 30; à partir de 5 h 30, vent de surface du 250 ° vrai à 25 noeuds avec des rafales pouvant atteindre les 35 noeuds, nuages épars à 1 500 pieds, plafond à 2 500 pieds avec nuages fragmentés.
Le message météorologique régulier pour l'aviation (METAR), valable à 0 h 30 pour l'aéroport de St. John's, faisait état des conditions suivantes :
vent du 250 ° à 28 noeuds avec des rafales pouvant atteindre les 39 noeuds, visibilité de 12 milles terrestres dans la bruine légère, plafond à 1 400 pieds avec ciel couvert.
Environnement Canada avait publié un message de renseignements météorologiques significatifs (SIGMET) qui faisait état d'importantes turbulences occasionnelles d'origine mécanique au-dessous de 4 000 pieds. Ce SIGMET était valable de 0 h 50 à 4 h 50. Les SIGMET sont transmis électroniquement aux centres de contrôle (ACC), aux tours ainsi qu'aux stations d'information de vol (FSS). Selon l'information recueillie, ce SIGMET est parvenu au secteur basse altitude de l'ACC de Gander à 0 h 52. La FSS de St. John's doit avoir reçu ce message au même moment. Selon toute vraisemblance, ACA630 s'était déjà approché à ce moment-là de la radiobalise SierraNote de bas de page 3, qui était le repère d'approche final (FAF). D'habitude, les messages de cette nature ne sont pas transmis aux appareils à un stade aussi avancé de l'approche.
En approche de la piste 29, ACA630 a reçu les renseignements météorologiques suivants en provenance de la FSS de St. John'sNote de bas de page 4 :
0 h 47 mn 27 | 0 h 47 mn 33 | 0 h 51 mn 22 | 0 h 52 mn 06 |
---|---|---|---|
vent du 260 ° à 30 noeuds avec des rafales à 45 noeuds. | avis de turbulence modérée au-dessous de 1 200 pieds. | vent du 260 ° à 25 noeuds avec des rafales à 40 noeuds. | vent du 250 ° à 25 noeuds avec des rafales à 40 noeuds. |
Enregistreurs de bord
L'appareil était équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR) Allied Signal 980-4100-AXUS portant le numéro de série 4534. Le FDR a été acheminé au Laboratoire technique du BST pour examen et analyse. Les données FDR révèlent que l'approche sur la piste 29 a été faite à l'aide du pilote automatique et du LOC jusqu'à ce que l'avion franchisse 550 pieds au-dessus du sol (agl) en descente, soit quelque 200 pieds au-dessus de l'altitude minimale de descente (MDA), altitude à laquelle le pilote automatique a été débrayé. Le commandant de bord a poursuivi l'approche manuellement, et le tout s'est déroulé sans incident jusqu'à ce que l'appareil franchisse la MDA en descente.
Après avoir franchi le FAF, l'appareil est descendu à une vitesse verticale de quelque 600 pieds par minute (pi/min) et à une vitesse moyenne d'approche corrigée de quelque 150 noeuds (KCAS). Pendant l'approche, la vitesse a été maintenue grâce au système de commande automatique de poussée qui était en mode « Speed ». Les volets d'atterrissage ont été sortis à 35° après que l'appareil eut franchi le FAF. La vitesse d'approche de la cible avec un braquage volets de 35° était de 139 KCAS. Lorsque le pilote automatique a été débrayé, au moment où l'appareil franchissait 550 pieds agl en descente, la descente a été interrompue brièvement, puis elle s'est poursuivie jusqu'à une altitude inférieure à la MDA à quelque 400 pi/min. Les sollicitations successives du commandant de bord sur le manche pendant la descente, les variations de la vitesse de descente (de 100 à 700 pi/min) ainsi que les variations de vitesse (de 142 à 156 KCAS) révèlent qu'il y avait de fortes turbulences.
Quand l'avion a franchi 150 pieds agl en descente, il a commencé à se cabrer comme si on avait tiré sur le manche. Une sollicitation en cabré de 12° a été exercée au manche (cabré de 3/4) et a provoqué un cabrage maximal de 10° de la gouverne de profondeur. L'assiette en tangage de l'appareil a vite atteint une assiette de cabré de quelque 6° quand l'appareil a franchi 80 pieds agl en descente, alors que la vitesse de descente atteignait quelque 800 pi/min (valeur maximale). Pendant ce temps, le manche du commandant de bord a été centré pendant quelques instants, puis une sollicitation en cabré de quelque 16° (plein cabré) a été exercée et maintenue pendant les 4 secondes suivantes, jusqu'au toucher des roues. Pendant la sollicitation plein cabré au manche, la vitesse de rotation du moteur est passée de quelque 60 % à 74 % avant d'augmenter à 85 % au toucher des roues.
L'assiette en tangage de l'appareil, qui avait diminué à 2,6° après le centrage du manche, a augmenté à quelque 4° pendant la sollicitation plein cabré au manche. On a remarqué que le débattement de la gouverne de profondeur n'avait pas été supérieur à 6°, malgré une sollicitation au manche bien supérieure à celle de plein cabré. La vitesse de descente (basée sur la hauteur radioaltimétrique) est restée relativement stable à quelque 700 pi/min, et la vitesse est passée d'environ 141 à 134 KCAS. L'angle d'attaqueNote de bas de page 5 vrai a atteint une valeur moyenne d'à peu près 7,5° qui a été maintenue jusqu'au toucher des roues. À l'approche de la piste, la vitesse de descente était trop eacute;levée, et l'appareil a fait un atterrissage dur. L'appareil s'est posé avec une décélération verticale de 1,78 g, à une vitesse indiquée de 137 noeuds (KIAS) et sur un cap orienté au 286°.
Pendant l'approche, aucun changement du système de commande automatique de poussée en mode « Speed » n'a été constaté jusqu'à trois secondes environ avant le toucher des roues, ce qui correspond à une augmentation de la vitesse de rotation des moteurs. Cette augmentation a été attribuée au fait que l'équipage a déplacé les manettes des gaz au-delà de la position de montée, jusqu'à la position de poussée maximale continue, immédiatement avant le toucher des roues. Le mode du système de commande automatique de poussée est alors passé de « Speed » à « Thrust », co qui correspond au déplacement des manettes des gaz. Lors des vols précédents, l'arrondi avait été amorcé entre 30 et 60 pieds agl. À l'amorce de l'arrondi, les manettes des gaz étaient habituellement ramenées de façon normale au cran de ralenti, et la vitesse de rotation des moteurs passait au ralenti au toucher des roues.
Simulations
Le BST a demandé l'aide du constructeur de l'appareil pour déterminer si le comportement de l'appareil était attribuable aux sollicitations sur les commandes et pour établir si des éléments extérieurs avaient joué un rôle. Des simulations techniques ont été effectuées en fonction des conditions d'atterrissage, de la vitesse d'approche, de la masse, du centre de gravité et de la configuration des volets. Les données FDR, y compris les sollicitations sur les commandes, ont été utilisées pour simuler le vol. Sans les perturbations atmosphériques externes, il a été impossible de reproduire avec précision le comportement de l'appareil. Il a été établi que les perturbations verticales et longitudinales (cisaillement du vent) étaient typiques du comportement de l'appareil accidenté à l'atterrissage. Au-dessous de 300 pieds agl, les vitesses estimées du vent vertical variaient de ± 20 pieds par seconde (pi/s). À partir de 100 pieds agl jusqu'au toucher des roues, les vitesses estimées du vent longitudinal révèlent que la vitesse du vent de face a diminué de 16 pi/s (10 noeuds). Les calculs de la trajectoire verticale effectués par le constructeur révèlent que, pendant toute la descente, l'angle nominal de la trajectoire de vol de l'appareil a été inférieur à trois ° jusqu'à ce que l'avion atteigne le seuil décalé, moment où l'angle de descente s'est mis à s'accentuer au-dessous de 150 pieds agl.
L'appareil était équipé d'un système de protection grand angle d'attaque permettant d'éviter de dépasser l'angle de décrochage lors de manoeuvres très dynamiques ou dans des rafales. Ce système de protection comporte quatre phases ou modes de base. L'un de ces modes est le mode « Alpha Prot », dans lequel l'angle d'attaque transmis au moyen du manche est converti en demande d'angle d'attaque par mesure de protection pour empêcher l'appareil de subir un décrochage aérodynamique. L'activation du mode « Alpha Prot » dépend de plusieurs paramètres, y compris de l'angle d'attaque là où le seuil est de 12°. La simulation a indiqué une activation rapide du mode « Alpha Prot » quand l'appareil a franchi 220 pieds agl en descente, puis une activation d'une seconde quand l'apparail a franchi 95 pieds agl en descente, après quoi le mode est demeuré actif jusqu'au toucher des roues. À 220 pieds agl, l'angle d'attaque vrai calculé se rapprochait du seuil de 12°. Il semble que la seconde activation du mode « Alpha Prot », survenue au moment où l'angle d'attaque vrai dépassait 3°, soit attribuable à une rafale de vent verticale dont la vitesse a été évaluée à 6 noeuds (10 pi/s). Quand le manche s'est trouvé momentanément au neutre quand l'appareil a franchi 80 pieds agl en descente, la position de la gouverne de profondeur a varié de ± 5°, ce qui correspond à un débattement des gouvernes en mode « Alpha Prot ».
En mode « Alpha Prot », pendant la sollicitation et le maintien du plein cabré au manche au moment où l'appareil a franchi 50 pieds agl en descente, l'assiette en tangage et l'angle d'attaque vrai n'ont atteint que 7,5° et 4° respectivement. Pour évaluer l'effet du vent longitudinal qui a réduit de 7 noeuds la vitesse de l'appareil au-dessous de 50 pieds agl, la simulation a été refaite avec un vent nul pour les 50 derniers pieds en descente. Les résultats ont révélé que, par vent nul, une sollicitation plein cabré au manche et une montée de 40 pieds auraient permis à l'assiette en tangage et à l'angle d'attaque vrai d'atteindre 14° et 10° respectivement, ce qui aurait empêché l'avion de toucher des roues trop tôt.
Analyse
Selon l'information recueillie, l'approche LOC sur la piste 29 dont le seuil avait été décalé s'est déroulée comme une approche vers un trou noir. Les calculs de trajectoire verticale effectués par le constructeur révèlent que, pendant toute la descente, l'angle nominal de la trajectoire de vol de l'appareil a été inférieur à 3° jusqu'à ce que l'avion franchisse le seuil décalé. L'angle de descente s'est alors mis à s'accentuer au-dessous de 150 pieds agl. La piste n'était pas équipée d'un VASIS, contrairement aux recommandations du document TP 312. Il est fort possible que le manque de repères visuels et une illusion d'optique de pente ascendante au cours de l'approche de nuit ont contribué à réduire la trajectoire de vol nominale. De plus, l'approche a été faite sans VASIS, ni à l'intérieur ni à l'extérieur de l'appareil, pour aider l'équipage à maintenir la trajectoire de vol souhaitée jusqu'au toucher des roues. De plus, les feux d'approche haute intensité étaient inutilisables.
Le spécialiste de la FSS n'a reçu le SIGMET qui faisait état de graves turbulences qu'après que l'appareil eut franchi le FAF. Conformément aux procédures normalisées, le spécialiste n'a pas transmis le SIGMET à l'équipage du vol ACA630 en raison du stade avancé de l'approche. Cependant, cinq minutes plus tôt, l'équipage de conduite avait été mis au courant des rapports de turbulence modérée; il avait ensuite reçu deux avis faisant état de fortes rafales. Donc, étant donné le stade avancé de l'approche, il n'est pas certain que même s'il avait reçu ce SIGMET, l'équipage aurait agi autrement.
Les données FDR révèlent que les performances de l'appareil respectaient les critères de conception. L'appareil s'est retrouvé dans des conditions météorologiques où il a dû affronter de fortes rafales de vent verticales et longitudinales près du sol, ce qui semble avoir fait augmenter la vitesse de descente pendant les dernières étapes de l'approche. Au moment de la sollicitation plein cabré au manche pour ralentir la descente, l'angle d'attaque vrai a été limité à une valeur inférieure à 8° par le mode « Alpha Prot » qui est entré en action pour compenser la réduction de vitesse provoquée par les rafales longitudinales. Malgré l'importante augmentation de la puissance moteur par l'équipage et le débattement des gouvernes de manière à obtenir le cabré maximal permis en mode « Alpha Prot », cette diminution brusque du vent de face près du sol a été telle que la vitesse de descente n'a pu être suffisamment réduite pour empêcher l'avion de toucher des roues prématurément.
Les données FDR et la simulation du vol ont permis d'établir que malgré les sollicitations du pilote, les dispositifs de protection de l'appareil n'ont pas permis un débattement suffisant des gouvernes pour ralentir l'appareil pendant les dernières étapes de l'approche. L'équipage aurait dû remettre les gaz au moment où l'appareil a dévié de façon importante au-dessous de la trajectoire de vol prévue; la réaction de l'appareil au déplacement du manche vers l'arrière a été limitée par les dispositifs de protection de l'avion. Cependant, du fait de l'absence de repères visuels et des conditions d'illusion de trou noir, il était difficile pour l'équipage d'évaluer correctement la situation verticale ainsi que le taux de variation de l'appareil par rapport à la trajectoire de vol prévue, suffisamment tôt pour pouvoir se rendre compte que la trajectoire d'approche était dangereusement basse. Quand l'équipage a reconnu cette condition dangereuse (comme le prouve la remise des gaz tardive), il était déjà trop tard pour empêcher l'avion de toucher des roues prématurément.
L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :
- LP 105/99 - FDR Analysis (Analyse du FDR).
On peut obtenir ce rapport en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.
Faits établis
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- Les environs de la piste favorisaient l'illusion de trou noir pendant l'approche de nuit sur la piste 29.
- L'angle nominal de la trajectoire de vol de l'appareil est resté inférieur à trois ° jusqu'à ce que l'appareil atteigne le seuil décalé.
- Il est fort possible que le manque de repères visuels et une illusion d'optique de pente ascendante au cours de l'approche de nuit ont contribué au maintien de l'angle nominal de la trajectoire de vol à une valeur inférieure à trois ° pendant l'approche.
- De fortes rafales de vent ont provoqué une diminution brusque du vent de face près du sol ainsi qu'une perte de portance et une augmentation de la vitesse de descente.
- L'équipage a reconnu trop tard la condition dangereuse pour empêcher l'avion de toucher des roues prématurément. L'absence de repères visuels a probablement joué un rôle dans cette reconnaissance tardive.
Faits établis quant aux risques
- Les plans approuvés par Transports Canada spécifiant le nombre de feux de barre de flanc nécessaires au balisage du seuil décalé n'étaient pas conformes aux normes de la publication Aérodromes - normes et pratiques recommandées de Transports Canada (TP 312), et seulement quatre feux de barre de flanc avaient été placés de chaque côté du seuil décalé pour le baliser, au lieu de cinq.
- Contrairement à la recommandation figurant dans la publication TP 312, aucun VASIS n'avait été installé pour guider les appareils à l'atterrissage vers le seuil décalé.
- Les feux d'approche haute intensité de la piste 29 étaient inutilisables.
Mesures de sécurité
Mesures de sécurité prises
En octobre 1999, le BST a envoyé l'avis de sécurité aérienne no A990041-1 à Transports Canada concernant trois incidents survenus à l'atterrissage sur des pistes dont le seuil avait été décalé et où il se pouvait que l'absence d'indicateur visuel de pente d'approche (VASIS) ait joué un rôle. L'avis de sécurité suggérait à Transports Canada, vu que la « pratique recommandée » à l'heure actuelle n'était pas obligatoire, d'envisager de prendre des moyens pour encourager davantage l'installation de VASIS pour les pistes ayant un seuil décalé temporairement ou pour exiger l'installation d'un VASIS pour ces pistes. L'avis indiquait également que, puisque la publication Aérodromes - normes et pratiques recommandées (TP 312) reconnaît que dans certaines conditions, comme la présence de turbulence, le VASIS est nécessaire pour assurer la sécurité aérienne, Transports Canada devrait également envisager de réévaluer les exigences relatives aux VASIS utilisés pour les opérations normales sur les pistes de l'aéroport de St. John's (Terre-Neuve).
Transports Canada a répondu ce qui suit :
- Le Ministère endosse les mesures correctives recommandées dans cet avis visant à élargir l'application des indicateurs visuels de pente d'approche. En attendant que la révision exhaustive de la réglementation en matière de normes d'aérodromes entreprise par la Direction générale de l'aviation civile soit menée à terme, il sera recommandé au Comité de la Partie III du conseil consultatif sur la réglementation aérienne canadienne (CCRAC) que le paragraphe 5.3.6.2 de la publication TP 312 passe du statut de recommandation à celui de norme.
- Les gestionnaires régionaux de la Sécurité des aérodromes ont été informés des problèmes soulevés dans cet avis et ils sont tenus de prendre en compte les solutions proposées lorsqu'ils doivent approuver des plans de construction d'aéroports.
Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .