Rapport d'enquête aéronautique A96P0064

Collision avec le relief
Canadian Helicopters Limited
Eurocopter AS-350BA (hélicoptère) C-GRGK
50 nm au nord de Revelstoke
(Colombie-Britannique)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 26 avril 1996 à 7 h 50, heure avancée des Rocheuses (HAR)Note de bas de page 1, le pilote de l'hélicoptère AS-350BA a quitté la base de l'exploitant située à Revelstoke et s'est rendu à la base de l'exploitant de Golden (Colombie-Britannique) pour prendre du carburant et faire monter deux passagers. Les trois personnes sont ensuite parties de Golden à 9 h HAR et ont entrepris un vol selon les règles de vol à vue (VFR) pour aller prélever des échantillons de neige à divers endroits dans les montagnes entre Golden et Revelstoke. L'hélicoptère n'étant pas rentré à Golden à l'heure prévue, le pilote de la base de l'exploitant à Golden a entrepris des recherches aériennes à l'aide de l'autre hélicoptère de la compagnie. Le spécialiste de la station d'information de vol de Kamloops a contacté le Centre de coordination des opérations de sauvetage de Victoria pour le prévenir de l'appareil en retard. Peu après, des aéronefs de la base des Forces canadiennes de Comox ont été dépêchés vers la région des recherches. Après d'intenses recherches civiles et militaires, l'épave de l'hélicoptère manquant a été retrouvée vers 10 h 30 HAR le lendemain. L'appareil s'était écrasé en terrain montagneux à quelque 6 200 pieds au-dessus du niveau de la mer; les trois occupants avait péri et l'hélicoptère était détruit. Il n'y a eu aucun incendie.

    Renseignements de base

    Le pilote en était à la cinquième journée de son séjour à la base de Revelstoke, et il avait volé pour la dernière fois le mercredi 24 avril 1996. Le pilote, une personne tranquille, prévenante et méticuleuse, a été décrit comme un homme marié heureux. Il était considéré par ses collègues et ses supérieurs de la compagnie comme un pilote consciencieux jouissant d'une haute estime, et il faisait preuve d'une attitude positive et professionnelle, n'hésitant pas à agir de façon proactive en matière de sécurité aérienne. Il n'était soumis à aucune pression extérieure importante. Rien n'indique que le rendement du pilote ait été compromis par une incapacité, des facteurs physiologiques ou psychologiques.

    Le pilote possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Il avait une expérience considérable du vol en montagne et dans des conditions hivernales, tout comme du vol à partir de campements isolés. Ses antécédents professionnels comprenaient environ 4 500 heures de vol sur hélicoptère au sein des Forces canadiennes, dans des unités opérationnelles ou d'instruction, tant au Canada qu'en Allemagne. Depuis son arrivée chez Canadian Helicopters, il avait accumulé 1 500 heures environ sur AS350, portant ainsi son total d'heures de vol sur hélicoptère à quelque 6 000 heures. Ses derniers examens en exploitation et de compétence pilote ainsi que ses derniers tests en vol avaient eu lieu en février 1996 et, comme les fois précédentes, il avait à nouveau obtenu de très bons résultats.

    Le pilote a effectué lui-même le ravitaillement en carburant, mais la quantité précise qu'il a ajoutée n'est pas connue. S'il avait fait le plein du réservoir à Golden, à savoir 540 litres ou 940 livres environ de carburant, la masse de l'appareil au décollage n'aurait pas dépassé les 4 200 livres. L'hélicoptère a une masse maximale certifiée de 4 630 livres. Comme le pilote avait inscrit pour sa mission un temps de vol cumulatif de 1 heure et 35 minutes jusqu'au dernier atterrissage, la quantité de carburant consommé aurait dû se situer aux alentours de 490 livres; la masse au décollage estimée au départ de Goldstream, le dernier endroit d'atterrissage inscrit dans le carnet de route du pilote, aurait donc dû être inférieure à 3 700 livres. Les positions longitudinale et latérale du centre de gravité auraient été dans les limites, quelle que soit la quantité de carburant dans le réservoir. Sur les lieux de l'accident, les enquêteurs ont vidangé du réservoir quelque 90 litres ou 160 livres de carburant. Une vérification de la présence d'eau a révélé l'absence de contamination du carburant. Il a été établi que la quantité et la qualité de carburant, de même que les procédures d'avitaillement n'avaient pas contribué à l'accident.

    L'hélicoptère était équipé d'un ensemble de housses de protection contre la neige qui servaient à recouvrir l'entrée d'air et l'échappement du moteur ainsi que les pales du rotor principal. Le pilote n'avait pas pris cet équipement protecteur quand il avait quitté la base de Revelstoke le vendredi matin, mais rien ne l'obligeait à le faire.

    Le pilote n'avait fait aucun commentaire au personnel d'entretien ce matin-là à Golden quant à des problèmes avec l'hélicoptère. Un examen des documents de maintenance de l'hélicoptère a montré que ce dernier était certifié et entretenu conformément à la réglementation en vigueur, et rien n'indiquait la présence d'une défectuosité digne de mention.

    L'hélicoptère était muni d'un émetteur de localisation d'urgence (ELT), installé dans la partie avant du pylône d'instrumentation, près de la pédale anticouple gauche du pilote. Ce montage particulier ne facilite pas l'accès à l'ELT. Aucun signal en provenance de l'ELT n'a été reçu; les premiers arrivants sur les lieux de l'accident ont retrouvé l'interrupteur de l'ELT en position OFF. Les services techniques du BST ont examiné l'ELT et n'ont découvert aucune preuve comme quoi l'interrupteur aurait reçu un coup, et ce, malgré les dommages considérables subis par le boîtier. Par conséquent, il a été conclu que l'interrupteur n'avait pas été heurté ni mis sur OFF au moment de l'impact et que l'ELT n'avait pas été armé avant le vol au cours duquel l'accident s'est produit. Les essais effectués par le Laboratoire technique ont révélé que le contacteur à inertie se trouvant à l'intérieur de l'ELT s'était déclenché mais que le quartz d'émission venait tout juste de se fendre, vraisemblablement à cause des forces d'impact engendrées par l'accident; un tel dommage aurait alors immédiatement mis l'ELT hors service. Il n'a pas été possible de déterminer quand ni pourquoi l'interrupteur de l'ELT avait été mis sur OFF, ni pourquoi le pilote ne l'avait pas placé sur ARMED avant de partir.

    La Direction générale de l'aviation civile (DGAC) - l'organisme français chargé de la réglementation aéronautique - a publié la consigne de navigabilité (CN) numéro 93-067-066(B) le 12 mai 1993 afin de limiter, en cas de chute de neige, le vol de tous les hélicoptères AS350 dépourvus de l'un des ensembles optionnels d'accessoires homologués de protection de l'entrée d'air du moteur. Au moment de l'accident, C-GRGK n'était muni d'aucun de ces ensembles et, pour éviter tout risque d'extinction moteur en vol pendant des chutes de neige, les limitations suivantes s'appliquent :

    1. vol autorisé en cas de visibilité supérieure à 1 500 mètres;
    2. vol interdit en cas de visibilité inférieure à 800 mètres;
    3. vol en chutes de neige limité à 10 minutes en cas de visibilité comprise entre 800 et 1 500 mètres. Cette limite de temps comprend le temps nécessaire pour quitter toute chute de neige, quelle que soit la visibilité.

    La Direction du maintien de la navigabilité de Transports Canada (TC) a envoyé à tous les propriétaires d'AS350 une lettre datée du 7 janvier 1994 qui fait référence à la CN de la DGAC et «clarifie les restrictions quant au vol dans la neige imposées par la consigne de navigabilité (CN) citée en objet». Cette lettre précise notamment ceci :

    • « La CN n'annule en aucune façon les suppléments au manuel de vol (AFM) homologués qui permettent, dans leurs sections consacrées aux limitations, d'annuler les limitations du vol dans la neige du manuel de vol de base ».

    Et un peu plus loin, on peut y lire :

    • « TC a accepté l'homologation de la DGAC quant au vol dans la neige après montage, conformément aux suppléments au manuel de vol, de l'ensemble de protection contre le sable ou de l'ensemble de protection de l'entrée d'air contre l'ingestion de neige ... ».

    La lettre de TC ne donne aucune indication supplémentaire quant à l'interprétation du temps de vol limité à 10 minutes.

    Au cours de l'enquête, des discussions avec d'autres exploitants canadiens d'AS-350 ont révélé des différences fondamentales dans le sens donné à la limite de 10 minutes de vol imposée par la CN. Selon l'exploitant, cette restriction supposait que le total de 10 minutes de vol devait être considéré comme un bloc homogène et que l'hélicoptère devait être de retour au sol pour une inspection de l'entrée d'air du moteur dans ce laps de temps; pour un autre exploitant, la limite de temps de vol de la CN avait un effet cumulatif, autrement dit l'hélicoptère pouvait évoluer dans des chutes de neige à diverses reprises pendant un même vol jusqu'à concurrence de 10 minutes avant de se poser en vue d'une inspection; enfin, une autre interprétation voulait que cette limite de 10 minutes fût d'application ponctuelle; par conséquent, l'hélicoptère pouvait voler indéfiniment au milieu et en dehors de chutes de neige tant que cette limite de 10 minutes n'était pas atteinte en une seule et même occasion.

    Vers 13 h 20 HAR, un témoin présent à l'altitude de 4 600 pieds dans la vallée même où s'est produit l'accident, a vu un hélicoptère qui volait à basse altitude en remontant lentement la vallée en direction de la surface de posé de Goldstream. Il a déclaré que les conditions météorologiques à l'endroit où il se trouvait étaient mauvaises avec de fortes chutes de neige et un plafond bas. Apparemment, il a fallu attendre plusieurs heures, jusque vers 17 h HAR, avant que ces conditions ne s'améliorent de façon significative. Le témoin n'a ni vu ni entendu l'hélicoptère redécoller par la suite. Faute d'observateur, les conditions météorologiques qui prévalaient à la surface de posé de Goldstream, à quelque deux milles de distance et 2 000 pieds plus haut sur le flanc de la montagne, ne sont pas connues. Selon des personnes connaissant bien l'environnement météorologique et les phénomènes saisonniers de l'endroit, il est fréquent à ce temps-ci de l'année de voir de multiples cellules localisées traverser la région, donnant des bourrasques de neige bien circonscrites au milieu d'un ciel par ailleurs tout à fait dégagé. La visibilité au milieu de ces violentes bourrasques tombe souvent au-dessous de 100 pieds.

    De récentes traces de pas humains ont été retrouvées à cinq des sept surfaces de posés prévues, ce qui indique que l'hélicoptère y avait atterri peu de temps avant. Un examen des notes de travail prises par les membres de l'équipe chargée de la prise d'échantillons de neige a confirmé que ces personnes avaient bien travaillé à ces endroits et avaient établi la séquence de leur mission; le carnet de vol personnel du pilote a confirmé les temps de vol jusqu'aux divers emplacements ainsi que la séquence d'atterrissage. Un examen groupé de ces divers documents a révélé que l'hélicoptère s'était posé à Goldstream à 13 h 25 HAR après avoir visité quatre autres emplacements.

    Les trois occupants de l'hélicoptère étaient des habitués des campements de fortune, ils avaient suffisamment de provisions pour passer la nuit à l'extérieur et aucun d'entre-eux n'était tenu de revenir impérativement à Golden ce vendredi soir. Au moment de l'atterrissage à Goldstream, ils disposaient encore de quelque sept heures de clarté pour travailler, attendre en cas de nécessité, et partir vers les autres emplacements ou retourner à Golden.

    L'accident s'est produit à une altitude inférieure de quelque 300 pieds à celle de la surface de posé de Goldstream, et à une distance de 1 500 pieds environ en redescendant vers la vallée. Il s'agissait d'un relief peuplé de grands conifères plutôt espacés et présentant un dénivelé de l'ordre de 30 degrés. Deux gros arbres en périphérie de l'endroit de l'accident avaient été étêtés et présentaient des marques évidentes de coups de rotor principal à une cinquantaine de pieds au-dessus de la surface enneigée; un gros arbre de quelque 18 pouces de diamètre s'était cassé net à la surface et était retombé sur l'hélicoptère à l'impact. D'autres arbres plus petits présentaient des égratignures et des éraflures compatibles avec un contact du fuselage et des patins de l'hélicoptère. Tout près de l'endroit de l'accident se trouvaient des surfaces dénuées de tout arbre qui auraient pu se prêter à un atterrissage d'urgence.

    L'épave de l'hélicoptère était restée confinée au point d'impact, et tous les composants ont été retrouvés. D'après les marques laissées à l'impact et les caractéristiques de l'épave de l'appareil, ce dernier a percuté le sol en piqué et incliné à droite avec un fort taux de descente et un faible régime du rotor principal. Au moment de l'impact au sol, l'hélicoptère est entré en collision frontale avec le gros arbre, lequel a traversé la cabine avant d'aller percuter la boîte de transmission principale, cassant les fixations avant de la transmission principale et la servocommande hydraulique avant. La poutre de queue s'est cassée au niveau de la cloison arrière de fixation au fuselage, et elle présentait des dommages compatibles avec une séparation à bas régime rotor; le rotor de queue présentait des dommages similaires caractéristiques d'un bas régime rotor. Les trois pales du rotor principal étaient intactes et toujours fixées à la tête du rotor; l'ensemble des dommages était compatible avec un impact au sol à bas couple et faible régime rotor. Aucun des composants de la chaîne cinématique ne présentait des indications de puissance moteur à l'impact. À l'exception des commandes passant par la poutre de queue dont la cause de rupture est connue, il a été possible de confirmer la continuité des commandes de vol au niveau du collectif, du cyclique et des pédales anticouples.

    La manette des gaz du poste de pilotage a été retrouvée en position STOP ou arrière; la commande principale de débit carburant du régulateur de carburant (FCU) du moteur se trouvait sur la position fermée correspondante; enfin, l'embout du câble des gaz fixé au moteur avait été tordu à l'impact. L'examen de l'embout du câble de commande de débit carburant tordu effectué par le Laboratoire technique du BST a révélé des dommages pouvant s'expliquer par une entrée de force du câble dans l'embout pendant que l'embout se tordait ou après qu'il a été tordu. Puisque la déformation s'est produite à l'impact, il a été conclu que la manette des gaz avait été mise de force en position arrière ou fermée sous l'effet des forces d'impact au moment où l'hélicoptère a percuté le sol. La commande de carburant a été retrouvée sectionnée, au niveau du bloc manettes, en position ouverte ou normale en vol, mais le fil témoin cassable était intact; le robinet d'arrêt carburant connexe a été retrouvé ouvert.

    Le moteur Turboméca Ariel 1B a été transporté dans des installations agréées de révision des moteurs pour y subir un examen détaillé et des essais au banc. L'examen n'a révélé ni trace de problème mécanique ni signe de rotation importante à l'impact. Le moteur a tourné au banc et a satisfait aux spécifications du motoriste. Le FCU du moteur a été examiné, testé et démonté; il ne présentait aucun signe particulier et respectait la totalité des spécifications et des tolérances.

    Le boîtier d'engrenages du rotor principal a été démonté et examiné. À une exception près, tous les components étaient normaux. Quand l'arbre du rotor principal a été sorti du logement supérieur du boîtier d'engrenages, la clavette qui relie la roue phonique à l'arbre est tombée de la rainure de clavetage usinée. Un examen plus détaillé a révélé que la goupille cylindrique qui retient normalement la clavette à sa place dans la rainure de clavetage de la roue phonique, était cisaillée. Le Laboratoire technique du BST a effectué des examens au microscope de la clavette, de la roue phonique et des roulements connexes, lesquels ont montré que, même si la clavette était partiellement à sa place dans la rainure de clavetage, il n'y avait eu aucun glissement entre les composants en cours d'utilisation. Par conséquent, il a été conclu que le mauvais ajustement de la clavette n'avait pas contribué à l'accident. Ce problème a toutefois fait l'objet d'une étude et d'un examen des procédures de montage de ce composant.

    Les trois occupants portaient tous une ceinture de sécurité avec un baudrier; le pilote portait également un casque de vol. Au moment du contact avec le sol, les forces d'impact ont été importantes, et le volume habitable de la cabine a été réduit par le gros arbre que l'hélicoptère a percuté en arrivant au sol. Il n'était pas possible de survivre à pareil accident.

    Analyse

    En général, en cas de décélération non sollicitée du moteur en vol, les indications reçues par le pilote seraient similaires à celles résultant d'une extinction moteur et devraient donner au pilote les mêmes options opérationnelles. Une telle décélération aurait pu être causée par un mauvais fonctionnement du régulateur carburant (FCU) du moteur. Les essais au banc effectués après l'accident ont montré en tout temps un rendement du moteur tout à fait conforme aux spécifications ainsi qu'un rendement et un fonctionnement normaux du FCU. L'examen et le démontage du FCU n'ont rien révélé d'anormal et ont confirmé à nouveau que le FCU fonctionnait normalement. Il se peut qu'une substance étrangère ait pénétré dans le FCU à un certain moment et ait nui à son fonctionnement avant d'être expulsée à l'impact; toutefois, les échantillons de carburant non perturbé prélevés avant et pendant le premier essai au banc du moteur ne contenaient aucun contaminant visible, et aucun contaminant significatif n'a été retrouvé au cours du démontage du FCU. Compte tenu des bons résultats obtenus par le moteur au banc d'essai et pendant les examens du FCU, et en l'absence de tout contaminant retrouvé dans le circuit carburant, il est peu probable qu'une contamination du FCU ait pu provoquer une décélération non sollicitée du moteur qui aurait conduit à l'accident. En l'absence de toute anomalie mécanique du moteur ou de l'hélicoptère, l'analyse porte surtout sur les facteurs opérationnels liés à l'accident.

    À la suite de l'examen du moteur, il a été conclu que ce dernier ne fournissait pas une puissance significative à l'impact, quoiqu'il aurait été en mesure de le faire. De plus, les dommages au système rotor sont compatibles avec un faible couple et un bas régime à l'impact. Bien que la manette des gaz ait été retrouvée en position fermée, des preuves permettent de conclure qu'elle a été déplacée par les forces d'impact.

    Par conséquent, l'ingestion de neige reste la raison la plus probable de l'arrêt du moteur en vol. Il n'a pas été possible de déterminer ni l'heure du décollage de Goldstream ni la durée du vol avant l'arrêt du moteur. Deux hypothèses se présentent : a) l'hélicoptère aurait volé au milieu d'averses de neige néfastes et aurait accumulé suffisamment de neige pour que le moteur finisse par s'arrêter; b) à l'insu du pilote, de la neige se serait accumulée à l'intérieur de l'entrée d'air du moteur pendant que l'hélicoptère était au sol à Goldstream et que cette neige aurait glissé à l'intérieur du moteur pendant une manoeuvre en vol, ce qui aurait provoqué l'extinction du moteur. Il se peut également qu'il y ait eu une combinaison de ces deux hypothèses.

    Une perte soudaine de la puissance moteur aurait amené le pilote à faire une descente en autorotation et à se poser sur un relief accidenté, peut-être dans des conditions météorologiques difficiles. Les circonstances qui prévalaient en vol juste avant l'arrêt du moteur n'ont pu être établies; toutefois, quand l'hélicoptère a percuté des arbres dans les derniers instants de la descente, le régime du rotor principal aurait dû avoir diminué et, si le régime avait déjà chuté, il aurait certainement rendu l'hélicoptère ingouvernable, rendant inévitable l'impact avec la surface.

    La lettre de navigabilité publiée par TC le 7 janvier 1994 dans le but de clarifier les restrictions imposées par la CN de la DGAC en matière de vol au milieu de chutes de neige ne mentionnait pas l'éventuelle ambiguïté de la CN ni ne réglait cette question, pas plus qu'elle ne donnait une interprétation de la notion de temps de vol limité à 10 minutes. Le fait que, indépendamment les uns des autres, les exploitants canadiens d'hélicoptères AS-350 aient appliqué de façon si différente la notion de temps de vol limité à 10 minutes mentionnée dans la CN montre bien que cette consigne est ambiguë et confuse, qu'elle donne lieu à des erreurs d'interprétation et qu'elle n'est pas appliquée de façon uniforme.

    L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :

    • LP 67/96 - Systems Examination (examen de systèmes);
    • LP 77/96 - Control and Drive Systems Examination (examen des systèmes de commande et d'entraînement).

    Faits établis

    1. Un examen des documents de maintenance de l'hélicoptère a montré que ce dernier était certifié et entretenu conformément à la réglementation en vigueur, et rien n'indiquait qu'une défaillance ou un mauvais fonctionnement antérieur à l'impact aurait contribué à l'accident.
    2. On ne connaît pas les véritables conditions météorologiques sur les lieux de l'accident ou au dernier emplacement de décollage connu.
    3. Des chutes de neige et des visibilités réduites ont été signalées dans les environs au moment de l'accident ou presque.
    4. Le moteur de l'hélicoptère s'est éteint, probablement à cause de l'ingestion de neige.
    5. Le pilote a été amené à faire une descente en autorotation et à se poser sur un relief accidenté.
    6. Pour des raisons inconnues, l'hélicoptère a percuté des arbres dans les derniers instants de la descente.
    7. Durant ce vol, l'ELT n'était pas sur ARMED sans que l'on sache pourquoi.
    8. La CN de la DGAC traitant du vol au milieu de chutes de neige est ambiguë et sujette à des erreurs d'interprétation.
    9. La clavette qui relie la roue phonique à l'arbre du rotor principal avait été mal posée; il a été conclu que cette anomalie n'avait pas contribué au présent accident.

    Causes et facteurs contributifs

    Le moteur s'est éteint, probablement à cause d'une ingestion de neige . Il n'a pas été possible de savoir pourquoi l'hélicoptère avait heurté des arbres au cours d'une descente en autorotation. Ont contribué au présent accident le relief accidenté et des conditions météorologiques probablement difficiles.

    Mesures de sécurité

    Mesures de sécurité prises

    Le 20 mai 1996, Eurocopter France, le constructeur de l'AS-350BA, a envoyé la lettre de service numéro 1270-00-96 à tous les exploitants d'hélicoptères Eurocopter pour traiter de la protection et de l'utilisation des hélicoptères au milieu de chutes de neige. Cette lettre met l'accent sur les précautions à prendre avant de partir avec un hélicoptère qui est resté stationné à l'extérieur pendant des chutes de neige.

    Depuis l'accident, l'exploitant a installé l'ensemble séparateur de particules du moteur sur tous ses hélicoptères AS-350. À la suite de ce programme d'installation, plus aucun des hélicoptères AS-350 de l'exploitant n'est donc visé par la CN traitant du vol dans la neige.

    La découverte d'une anomalie au niveau de la clavette de l'arbre d'entraînement a amené les services de maintenance de l'exploitant à publier des instructions internes pour insister sur les risques de mauvais alignement des composants au moment du remontage et pour faire prendre davantage conscience des dangers potentiels d'un tel mauvais alignement.

    En décembre 1995, après une étude des données du BST couvrant les événements aéronautiques survenus entre 1984 et 1995, le BST a envoyé un avis de sécurité aérienne à TC signalant le grand nombre d'ELT retrouvées en position non armée au cours des enquêtes sur des accidents. Dans cet avis, on demandait à TC d'envisager d'insister sur l'importance d'armer l'ELT avant un vol et, en plus, d'envisager de rendre obligatoire l'armement de l'ELT. Dans sa réponse, TC a indiqué qu'un règlement rendant obligatoire l'armement de l'ELT ne lui semblait pas judicieux. Toutefois, l'ancienne ONA (série II, numéro 17) qui traitait des ELT a été maintenant remplacée par le Règlement de l'aviation canadien (RAC) 605.38, lequel exige notamment que l'ELT soit armée si cela est précisé dans le manuel de vol, le manuel d'exploitation ou le manuel de pilotage. Depuis cet accident, TC a rédigé des articles signalant combien il est important de s'assurer que l'ELT est bien armée avant le vol, et ces articles ont paru dans les bulletins COPA, Vortex, Mainteneur et Sécurité aérienne - Nouvelles.

    Un avis de sécurité a été envoyé à TC pour lui signaler l'actuelle ambiguïté de la consigne de navigabilité 93-067-066(B) quant aux limites de temps de vol au milieu de chutes de neige.

    Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président Benoît Bouchard et des membres Maurice Harquail, Charles Simpson et W.A. Tadros.