Rapport d'enquête aéronautique A95O0150

Collision avec le terrain par mauvais temps
Cessna 310Q C-FAKW
2 mi à l'ouest de Caledon (Ontario)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le pilote effectue un vol selon les règles de vol à vue (VFR) entre Lindsay (Ontario) et l'aéroport régional de Kitchener/Waterloo. À 7 h 25, heure avancée de l'Est (HAE), il demande au centre de contrôle régional (ACC) de Toronto d'être suivi au radar, ce qu'on lui accorde. L'avion est identifié au radar à 30 milles au nord de Toronto, à 4 500 pieds-mer, en ligne directe vers Kitchener. Le pilote signale ensuite à la tour de contrôle de Kitchener/Waterloo qu'il survole la région d'Orangeville. Le contrôleur lui dit que la météo est inférieure aux limites VFR, qu'il y a des nuages fragmentés à une hauteur estimée à 4 000 pieds-sol et que la visibilité est réduite à deux milles et demi dans le brouillard. Le contrôleur autorise alors l'avion à voler en VFR spécial (SVFR) pour se poser à l'aéroport, mais l'autorisation doit être annulée par la suite parce que le pilote ne répond pas aux appels du contrôleur. Une dizaine de minutes après le premier contact radar, le contrôleur voit la cible radar descendre de 4 500 pieds-mer en croisière jusqu'à 1 800 pieds environ avant de passer en mode d'extrapolation. La cible de l'avion est captée à 1 500 pieds. L'appareil monte à 1 800 pieds, mais la cible est de nouveau extrapolée. Cette fois-ci, la cible demeure en mode d'extrapolation. Le pilote ne répond pas aux appels radio, et un aéronef en vol capte le signal d'une radiobalise de repérage d'urgence (ELT). Des témoins au sol entendent un avion voler puis s'écraser. L'épave est retrouvée dans les 20 minutes qui suivent la disparition de la cible radar.

    L'enquête révèle que l'avion a heurté des arbres sur un relief ascendant à une altitude de 1 150 pieds-mer environ et s'est immobilisé dans un champ de canola. Il y avait un plafond de stratus bas et du brouillard dense dans le secteur de l'accident. Le pilote, qui était seul à bord, a subi des blessures mortelles. Il ne portait pas sa ceinture-baudrier.

    Renseignements de base

    À la suite d'une initiative du pilote, la direction de la compagnie avait récemment convenu que ce serait économique et pratique de louer un avion et de le faire piloter par le pilote plutôt que d'en affréter un pour les voyages d'affaires. Après discussions, la compagnie avait payé la formation périodique du pilote sur Cessna 310. Le vol de l'accident est le premier vol que le pilote effectuait au nom de la compagnie à la suite de cette entente. Le pilote devait partir de Lindsay pour Kitchener où il devait prendre un passager, puis se rendre à l'île Manitoulin pour affaires pour la compagnie, et rentrer à Lindsay.

    Le pilote était titulaire d'une licence de pilote depuis 1971. Il avait obtenu sa première qualification de vol aux instruments en 1976 ainsi qu'une qualification d'instructeur de classe III en 1978. Il avait effectué environ 1 542 heures de vol de 1976 à 1979, ayant travaillé comme instructeur de vol et comme pilote d'avion affrété. En 1979, il avait effectué 11 heures de vol aux instruments, 53 heures de vol simulé aux instruments et 32 heures de formation en simulateur. De 1980 à 1995, il avait effectué 55,2 heures de vol. Dans les trois mois avant l'accident, il avait effectué neuf heures de vol, dont une heure aux instruments sur un Cessna 310, et 2,2 heures dans un simulateur Link.

    En juin 1991, il avait consulté son médecin de famille parce qu'il avait des étourdissements, des troubles de la vue et des engourdissements dans la main gauche, le nez et la lèvre supérieure ainsi que des maux de tête. Le 19 juin 1991, il avait subi un électroencéphalogramme (EEG) qui n'avait révélé aucune anomalie. Le 22 octobre 1991, un neurologue avait diagnostiqué une migraine. Le 30 novembre 1991, son médecin de famille avait indiqué dans son dossier qu'il avait eu d'autres troubles de la vue, des engourdissements de la main droite et des maux de tête. Une autre migraine avait également été diagnostiquée. Rien n'indique que le pilote ait eu d'autres maux de tête de novembre 1991 au 28 juillet 1995. Ce problème médical risquait d'entraîner une perte d'efficacité soudaine ou une incapacité totale. Le pilote n'a pas déclaré ces problèmes médicaux au cours de ses examens médicaux de l'aviation civile. S'il avait déclaré ces problèmes, on aurait sans doute refusé de renouveler son certificat de validation de licence de pilote. On ne sait pas si le pilote avait une migraine ou d'autres symptômes connexes au moment de l'accident.

    L'avion était un bimoteur Cessna 310. Rien n'indique que l'avion présentait des défaillances ou un mauvais fonctionnement avant la collision. L'analyse des données radar révèle que l'appareil a quitté le vol en palier à 4 500 pieds-mer pour descendre jusqu'à 1 500 pieds-mer en une minute et quarante-cinq secondes, ce qui correspond à une descente de 1 700 pieds par minute. Le taux de descente est demeuré relativement constant pendant la descente.

    L'Ordonnance sur la navigation aérienne (ONA), série II, numéro 2 (chap. 28 de la CRC), intitulée Arrêté concernant les sièges et les ceintures de sécurité des aéronefs, a été modifiée récemment et oblige les aéronefs commerciaux à être équipés d'une ceinture-baudrier pour chacun des occupants des sièges avant. Le propriétaire de l'avion avait obtenu une exemption temporaire. L'examen de l'avion a permis de constater que des ceintures-baudriers étaient installées à bord. Les entrées au carnet de route à propos de cette installation n'avaient pas été officiellement approuvées. Les ceintures-baudriers étaient fixes et non à enroulement à inertie. Si le pilote avait bien fixé sa ceinture-baudrier fixe sur sa poitrine, il n'aurait pas pu se pencher vers l'avant pour atteindre certains commutateurs et d'autres choses dans le poste de pilotage, à moins de desserrer sa ceinture-baudrier.

    Le jour de l'accident, un faible creux frontal se trouvait entre Muskoka et Kingston à 7 h HAE. La masse d'air au-dessus de la région était très humide. Après 6 h HAE, du brouillard et des nuages bas ont commencé à se former. Le courant ascendant humide du sud-sud-est a favorisé la formation de stratus bas à partir de la surface jusqu'à 500 pieds-sol et a réduit la visibilité à un mille et demi ou moins au voisinage du lieu de l'accident.

    Avant de partir de Lindsay, le pilote a téléphoné à la station d'information de vol (FSS) de Sault Ste. Marie pour obtenir un exposé météo. On lui a alors signalé qu'il y avait des avertissements d'orages et de turbulence dans la région de la baie Georgienne et que la visibilité était réduite dans le brouillard dans le sud de l'Ontario. On lui a également signalé que la visibilité à Kitchener était de trois milles dans le brouillard, et qu'à London elle était à deux milles et quart dans le brouillard. On signalait des nuages épars à 9 000 pieds à Kitchener et des nuages fragmentés à 11 000 pieds à London.

    Analyse

    Au départ de Lindsay, le ciel était clair. Le pilote savait toutefois qu'il rencontrerait des nuages bas et des visibilités réduites dans la région de Kitchener ainsi que des risques d'orages au voisinage de l'île Manitoulin. En route vers Kitchener, le pilote s'est retrouvé dans des conditions météo pires que prévu. Le fait que le pilote a effectué une descente constante et en apparence contrôlée entre 4 500 pieds jusqu'à proximité du sol révèle que le pilote avait la maîtrise de l'avion. Cette descente contrôlée, combinée au plafond bas et à une visibilité réduite indique que le pilote descendait dans l'intention de garder le contact visuel avec le sol ou pour sortir des nuages (ce qui est plus probable). Malheureusement, le pilote est descendu dans une zone où le relief montait et, avant d'établir un contact visuel convenable avec le sol, il a heurté des arbres et s'est écrasé. Pendant sa descente, le pilote a contacté la tour de contrôle de Kitchener/Waterloo et a été autorisé à entrer dans la zone de contrôle en SVFR. Les conditions météo à l'aéroport de Kitchener/Waterloo, même si elles n'étaient pas propices au vol VFR, étaient considérablement meilleures que celles que le pilote avait rencontrées en route et pendant sa descente. Le pilote a sans doute présumé que la météo dans laquelle il volait était similaire à celle qui était annoncée à Kitchener et que, en descendant, il pourrait garder le sol en vue ou établir le contact visuel avec le sol.

    Les ceintures de sécurité existantes avaient été modifiées pour accepter une ceinture-baudrier. Toutefois, le pilote ne portait pas sa ceinture-baudrier lors de la collision avec les arbres, probablement à cause des inconvénients qu'occasionnent ce type de ceinture fixe. Si le pilote avait porté sa ceinture-baudrier, il aurait sans doute subi des blessures au torse beaucoup moins graves.

    L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

    • LP 111/95 - Instrument Examination (Examen des instruments).

    Faits établis

    1. En essayant de garder le sol en vue ou d'établir le contact visuel avec le sol, le pilote est descendu dans des nuages bas et du brouillard dense au-dessus d'un relief ascendant, et l'avion s'est écrasé.
    2. L'avion était en bon état de service, mais l'installation d'une ceinture-baudrier pour le pilote n'était pas approuvée.
    3. Le pilote ne portait pas sa ceinture-baudrier au moment de l'accident.
    4. Le pilote n'a pas fait une déclaration complète de son état de santé lors de ses examens médicaux de l'aviation civile.

    Causes et facteurs contributifs

    Le pilote s'est retrouvé dans des conditions météo pires que prévu et, en essayant de garder le sol en vue ou d'établir le contact visuel avec le sol dans une zone de nuages bas et de brouillard dense au sol, l'avion s'est mis en descente et s'est écrasé. La décision du pilote de poursuivre le vol par mauvais temps a pu être influencée par son manque d'expérience récente, par le fait qu'un passager l'attendait, et par le fait que de meilleures conditions météo étaient signalées à Kitchener.

    Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président Benoît Bouchard et des membres Maurice Harquail et W.A. Tadros.