Impact du rotor de queue et perte de maîtrise en direction lors d'un atterrissage en autorotation
Okotoks Flight Centre Inc.
Hughes 269C (hélicoptère) C-FQCN
Aéroparc Okotoks, Okotoks (Alberta)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
L'instructeur et l'élève-pilote effectuaient des exercices d'autorotation jusqu'au toucher. Au cours d'un exercice, les pales du rotor de queue ont heurté le sol à environ 300 pieds avant l'aire d'atterrissage prévue. L'hélicoptère est ensuite monté rapidement jusqu'à une cinquantaine de pieds du sol où il s'est mis à tourner dans le sens inverse des pales du rotor principal. Il a ensuite piqué et s'est écrasé au sol. L'instructeur et l'élève-pilote ont subi des blessures légères. L'hélicoptère a subi des dommages importants.
Le Bureau a déterminé que l'élève-pilote a mal évalué l'altitude et la distance par rapport à l'aire d'atterrissage prévue pendant l'exercice d'autorotation et que l'instructeur a tardé à prendre les mesures qui auraient permis d'éviter que le rotor de queue heurte le sol et qu'il se produise une perte de maîtrise.
1.0 Renseignements de base
1.1 Déroulement du vol
L'instructeur et l'élève-pilote effectuaient un vol d'entraînement local à l'aéroparc Okotoks, situé près d'Okotoks (Alberta). L'élève faisait des exercices car il devait passer sous peu l'épreuve en vol de Transports Canada en vue de l'obtention de la licence de pilote professionnel d'hélicoptère. Pendant le vol qui a duré plus d'une heure, l'élève a effectué cinq autorotations complètes jusqu'au toucher.
Pendant une autorotation en virage de 180 °1, l'élève a effectué l'approche avant l'aire d'atterrissage prévue. L'instructeur ne l'avait pas dit à l'élève mais il s'attendait à ce que l'élève continue l'autorotation. L'élève a amorcé l'arrondi, mais n'a pas remis l'hélicoptère à l'horizontale avant le toucher. L'instructeur a essayé de pousser sur le manche de pas cyclique pour remettre l'hélicoptère à l'horizontale, mais les pales du rotor de queue ont heurté le sol alors que l'appareil était toujours en cabré. L'hélicoptère est ensuite monté rapidement...
- Voir l'annexe A pour la signification des sigles et abréviations.
- Les heures sont exprimées en HAR (temps universel coordonné [UTC] moins six heures) sauf indication contraire.
- Les unités correspondent à celles des manuels officiels, des documents, des rapports et des instructions utilisés ou reçus par l'équipage.
...jusqu'à une cinquantaine de pieds du sol et il a tourné à droite. L'instructeur a essayé de redresser, mais l'hélicoptère a piqué et s'est écrasé. L'instructeur et l'élève ont subi des blessures légères et ont été éclaboussés d'essence aviation provenant d'un réservoir éventré. Ils ont toutefois pu quitter l'hélicoptère sans aide. L'appareil a subi des dommages importants.
L'accident s'est produit de jour par 50° 44′ de latitude Nord et 113° 56′ de longitude Ouest à 13 h 45, heure avancée des Rocheuses (HAR)2, à une altitude de 3 601 pieds-mer3.
1.2 Victimes
Équipage | Passagers | Autres | Total | |
---|---|---|---|---|
Tués | - | - | - | - |
Blessés graves | - | - | - | - |
Blessés légers/indemnes | 2 | - | - | 2 |
Total | 2 | - | - | 2 |
1.3 Dommages à l'aéronef
L'hélicoptère a été lourdement endommagé.
1.4 Autres dommages
L'hélicoptère a laissé des débris sur plusieurs centaines de pieds sur l'aire de trafic et la voie de circulation, devant le hangar et les aéronefs en stationnement. Aucun de ces aéronefs n'a été endommagé.
1.5 Renseignements sur le personnel
Instructeur | Élève-pilote | |
---|---|---|
Âge | 57 ans | 59 ans |
Licence | pilote professionnel | pilote professionnel |
Date d'expiration du certificat de validation | 1 er novembre 1994 | 1 er julliet 1994 |
Nombre total d'heurs de vol | 18,000 | 8,000 |
Nombre total d'heures de vol sur type en cause | 4,000 | 36 |
Nombre total d'heures de vol dan le 90 derniers jours | 100 | 36 |
Nombre total d'heures de vol sur type en cause dans les 90 derniers jours | 95 | 36 |
Nombre d'heures de service avant l'événement | 6 | 6 |
Nombre d'heures libres avant la prise de service | 36 | N/D |
1.5.1 L'instructeur
L'instructeur possédait plusieurs années d'expérience comme instructeur à l'Okotoks Flight Centre. Il totalisait environ 18 000 heures de vol, dont plus de 14 000 sur hélicoptères, et environ 8 000 comme instructeur. La majeure partie de ses 4 000 heures de vol sur Hughes 269C ont été effectuées comme instructeur. Pendant l'enquête, il n'a pu expliquer pourquoi l'hélicoptère avait touché le sol autant avant l'aire d'atterrissage prévue.
1.5.2 L'élève-pilote
L'élève était titulaire d'une licence de pilote professionnel d'avions. Il a indiqué qu'il totalisait 8 000 heures de vol sur des avions monomoteurs équipés de roues, de skis et de flotteurs dans le nord de la Colombie-Britannique. Désirant obtenir l'annotation de pilote d'hélicoptère, il s'était inscrit à une école de pilotage d'hélicoptère à Abbotsford (Colombie-Britannique) afin de suivre un cours de conversion qui comprenait 60 heures de vol. Cet entraînement avait commencé en janvier 1994. Après plus de 75 heures, l'entraînement avait été interrompu d'un commun accord. L'élève avait été avisé qu'il aurait probablement besoin d'un entraînement supplémentaire pour satisfaire aux normes.
Le 17 mai 1994, l'élève, qui désirait terminer le cours de conversion, avait commencé l'entraînement sur un hélicoptère Hughes 269C à l'Okotoks Flight Centre. Après plus de 30 heures d'entraînement en double commande, l'instructeur a jugé que l'élève était prêt à passer l'épreuve en vol de Transports Canada. L'instructeur a recommandé que l'élève passe l'épreuve et a demandé qu'un inspecteur du groupe transporteurs aériens de Transports Canada effectue la vérification en vol le jeudi suivant, soit trois jours plus tard. Le vol au cours duquel l'accident s'est produit devait être le dernier vol d'entraînement avant l'épreuve en vol. Pendant l'enquête, l'élève n'a pu expliquer pourquoi l'hélicoptère avait touché le sol autant avant l'aire d'atterrissage prévue.
1.6 Renseignements sur l'aéronef
1.6.1 Généralités
Constructeur - Hughes Helicopters
Type - 269C
Année de construction - 1981
Numéro de série - 211029
Certificat de navigabilité- valide
Nombre total d'heures de vol cellule< - 5 595,2
Type de moteur (nombre) - Avco Lycoming HIO-360-DIA (1)
Type d'hélice (nombre) - Schweizer (1)
Masse maximale autorisée2 050 lb
au décollage
Types de carburant recommandés - essence aviation 100 LL essence aviation 100-130,
Type de carburant utilisé - essence aviation 100 LL
1.6.2 Renseignements supplémentaires
L'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. La masse et le centrage de l'hélicoptère étaient dans les limites prescrites. L'hélicoptère était équipé d'une double commande entièrement utilisable.
La radiobalise de détresse (ELT) était une Narco ELT 10. Pendant l'évacuation, elle s'est détachée de son support de montage fixé à un encadrement de porte. Après l'accident, son commutateur était sur OFF, mais un essai de fonctionnement a révélé qu'elle était en bon état de service.
Le Hughes 269C et la plupart des autres hélicoptères légers descendent rapidement pendant les autorotations.
1.7 Renseignements météorologiques
Les conditions météorologiques n'ont joué aucun rôle dans l'accident. Le vent était faible et variable. La température était de 20 °C.
1.8 Renseignements sur l'aérodrome
L'aéroparc Okotoks est situé à une altitude de 3 601 pieds-mer et convenait à l'entraînement en question. La seule piste est orientée au 160/340 °M. Une voie de circulation, orientée au 070/250 °M, relie la piste à l'aire de ravitaillement et de stationnement située devant le hangar. Selon la direction du vent, la voie de circulation est normalement utilisée pour l'entraînement sur hélicoptère et les autorotations.
1.9 Renseignements sur l'épave et sur l'impact
L'hélicoptère volait au cap de 060 °M. Il était en cabré pendant l'arrondi et est descendu jusqu'à ce que les pales du rotor de queue heurtent un chemin d'accès en asphalte à environ 50 pieds du bord de l'aire de trafic et de la voie de circulation, et à 300 pieds avant l'aire d'atterrissage prévue sur la voie de circulation. Bien que cette zone et son voisinage immédiat soient exempts d'obstacles, la surface ne convient pas à des atterrissages glissés à travers le chemin d'accès à l'aire de trafic.
Les pales du rotor de queue ont été détruites par l'impact. L'arbre d'entraînement du rotor de queue a été déformé et s'est désaccouplé de la boîte de transmission. Après l'impact, l'hélicoptère a parcouru 84 pieds sur l'aire de trafic avant de s'y immobiliser. Des morceaux de rotor de queue et de poutre de queue ont été trouvés 180 pieds plus loin le long du sillon laissé par l'hélicoptère.
1.10 Questions relatives à la survie des occupants
Le poste de pilotage a gardé sa forme, et les occupants ont pu évacuer l'hélicoptère sans aide. Les deux pilotes avaient été éclaboussés d'essence aviation. Plusieurs témoins munis d'extincteurs et de trousses de premiers soins sont arrivés sur les lieux quelques secondes plus tard pour donner les premiers soins. L'instructeur et l'élève ont été transportés à des hôpitaux distincts pour observation. L'élève a obtenu son congé de l'hôpital le jour même de l'accident. L'instructeur n'a obtenu son congé que le lendemain.
1.11 Confiance excessive et vigilance
La confiance excessive est un état de conscience ou de vigilance réduites attribuable à un faux sentiment de sécurité et à la confiance en soi. Deux des caractéristiques de la confiance excessive sont la présomption et l'ennui, lesquels peuvent grandement diminuer le rendement.
La vigilance consiste à conserver le niveau d'attention nécessaire pour effectuer une tâche. Après avoir effectué des tâches de surveillance pendant un certain temps, on peut avoir des moments d'inattention.
On ne peut pas déterminer si une confiance excessive ou un manque de vigilance, ou les deux, ont contribué à l'accident en question, bien que les faits établis par l'enquête donnent à penser que ces deux facteurs, ou l'un ou l'autre, sont en cause.
1.12 Technique de l'instructeur
Un instructeur doit évaluer les avantages qu'il y a à laisser l'élève faire des erreurs, puis il doit attendre pendant un certain temps pour voir si l'élève se rend compte de l'erreur et la corrige, au lieu de prendre immédiatement les commandes, puis les mesures correctives qui s'imposent. Souvent l'instructeur n'a que quelques secondes pour faire cette évaluation, et très peu de temps pour prendre une décision.
Pendant une autorotation complète jusqu'au toucher, l'instructeur doit être vigilant à cause de la vitesse descensionnelle élevée de l'hélicoptère et de la proximité du sol car il a peu de temps pour prendre des mesures correctives. Lorsque la trajectoire d'approche est mal évaluée ou non optimale, l'instructeur ne doit pas tarder à prendre des mesures correctives, comme amorcer un redressement au moteur ou prendre les commandes et continuer le vol jusqu'au toucher à un endroit convenable.
2.0 Analyse
2.1 Introduction
Pendant l'enquête, ni l'instructeur ni l'élève n'ont pu expliquer pourquoi le rotor de queue avait heurté le sol autant avant l'aire d'atterrissage prévue. Des mesures correctives adéquates n'ont pas été prises pendant la descente. L'analyse porte sur les actes de l'instructeur et de l'élève.
2.2 Actes de l'instructeur et de l'élève-pilote
L'élève avait eu du mal à passer au vol sur hélicoptère, mais l'instructeur avait effectué plus de 30 heures de vol avec lui, et il était persuadé que le rendement de l'élève satisfaisait aux normes voulues pour l'obtention d'une annotation de Transports Canada.
Les faits établis par l'enquête correspondent à une confiance excessive ou à un manque de vigilance, ou aux deux, pendant toute l'autorotation finale. L'instructeur était conscient que l'élève avait mal évalué l'altitude et la distance et qu'il avait laissé l'hélicoptère descendre au- dessous de la trajectoire d'approche optimale vers l'aire d'atterrissage prévue, mais il l'a laissé continuer l'autorotation jusqu'au toucher. L'instructeur a tardé à prendre les mesures qui auraient permis d'éviter que le rotor de queue heurte le sol, probablement parce que l'élève avait réussi à faire les cinq autorotations précédentes. Les pales du rotor de queue et l'arbre d'entraînement étant alors endommagés, il s'est produit une perte de maîtrise en direction lorsque le redressement a été tenté, et l'appareil s'est écrasé.
3.0 Faits établis
- L'élève-pilote a mal évalué l'altitude et la distance par rapport à l'aire d'atterrissage prévue; il a amorcé un arrondi prononcé et n'a pas remis l'hélicoptère à l'horizontale avant le toucher.
- L'instructeur a laissé l'élève-pilote continuer l'autorotation jusqu'au toucher, et il a tardé à prendre les mesures qui auraient permis d'éviter que le rotor de queue heurte le sol.
- Le rotor de queue a heurté le sol, ce qui a causé des dommages aux pales du rotor de queue et à l'arbre d'entraînement, puis une perte de maîtrise en direction.
- L'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.
- L'instructeur et l'élève-pilote possédaient les licences et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur.
3.1 Causes
L'élève-pilote a mal évalué l'altitude et la distance par rapport à l'aire d'atterrissage prévue pendant l'exercice d'autorotation, et l'instructeur a tardé à prendre les mesures qui auraient permis d'éviter que le rotor de queue heurte le sol et qu'il se produise une perte de maîtrise.
4.0 Mesures de sécurité
Le Bureau n'a, jusqu'ici, recommandé aucune mesure de sécurité.
Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau, qui est composé du Président, John W. Stants, et des membres Zita Brunet et Hugh MacNeil.
Annexes
Annexe A - Sigles et abréviations
- BST
- Bureau de la sécurité des transports du Canada
- C
- Celsius
- ELT
- radiobalise de détresse
- h
- heure
- HAR
- heure avancée des Rocheuses
- lb
- livre(s)
- LL
- à basse teneur en plomb
- M
- magnétique
- N/D
- non disponible
- UTC
- temps universel coordonné
- °
- degré(s)
- ′
- minute(s)