Rapport d'enquête aéronautique A94C0014

Perte de contrôle de l'altitude pendant une approche indirecte
Millar Western Industries Limited
IAI 1124A Westwind II C-FMWW
Meadow Lake (Saskatchewan)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    L'avion privé (Westwind II) d'Israel Aircraft Industries effectuait un vol entre l'aéroport municipal d'Edmonton (Alberta) et l'aérodrome de Meadow Lake (Saskatchewan). Des plafonds bas et des visibilités réduites avaient été signalés à proximité de l'aérodrome de destination. Pendant l'approche indirecte en vue de l'atterrissage, l'avion a exécuté de brusques inclinaisons latérales prononcées. L'avion a heurté le sol en cabré, l'aile droite légèrement basse. L'impact au sol a produit des forces de décélération très élevées. Les réservoirs de carburant internes ont été éventrés, et l'avion a été consumé par l'incendie qui s'est déclaré après l'écrasement. Les deux pilotes ont subi des blessures mortelles.

    Le Bureau a déterminé que pendant l'approche indirecte en vue de l'atterrissage sur la piste 26, l'avion a exécuté une procédure d'approche indirecte inhabituelle à une altitude inférieure aux minimums d'approche indirecte publiés, ce qui a provoqué une perte de contrôle correspondant à un décrochage accéléré. L'avion est descendu et a heurté le sol avant que l'équipage ait le temps d'effectuer un redressement. Les conditions de voile blanc ont peut-être contribué à l'accident.

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Déroulement du vol

    L'avion privé (Westwind II) d'Israel Aircraft Industries (IAI) effectuait un vol entre l'aéroport municipal d'Edmonton (Alberta) et l'aérodrome de Meadow Lake (Saskatchewan). Des plafonds bas et des visibilités réduites avaient été signalés au voisinage de l'aérodrome de destination. L'équipage a effectué une approche directe aux instruments vers la piste 08 de l'aérodrome de Meadow Lake, et il a amorcé une approche indirecte vers le sud de l'aérodrome en vue d'atterrir sur la piste 26.

    L'avion est passé au-dessus de l'aérodrome à une altitude d'environ 400 pieds-sol. Il a ensuite tourné et a continué les ailes à l'horizontale vers le sud-est. À environ deux milles et demi de l'aérodrome, l'avion a effectué un certain nombre de brusques inclinaisons latérales prononcées. Immédiatement après ces manoeuvres, l'avion est descendu et a heurté le sol en cabré, l'aile droite légèrement basse. L'impact au sol a produit des forces de décélération très élevées. L'avion s'est désintégré en plusieurs parties, les réservoirs de carburant internes ont été éventrés, et le carburant s'est répandu à l'avant et vers l'extérieur du point d'impact initial. Un violent incendie s'est aussitôt déclaré, et le sillon laissé par l'avion est devenu la proie des flammes.

    Les équipes du service médical d'urgence et de lutte contre les incendies de la ville de Meadow Lake sont arrivées sur les lieux quelques minutes après l'accident. Les deux pilotes ont subi des blessures mortelles.

    L'accident s'est produit de jour à 8 h 55, heure normale du Centre (HNC), par 54° 07′ de latitude Nord et 108° 31′ de longitude Ouest.

    1.2 Victimes

    Équipage Passagers Tiers Total
    Tués 2 - - 2
    Blessés graves - - - -
    Blessés légers/indemnes - - - -
    Total 2 - - 2

    1.3 Dommages à l'aéronef

    L'avion a été détruit sous l'effet des forces de décélération élevées. Le poste de pilotage et les parties principales de la cabine ont été consumées par l'incendie qui s'est déclaré après l'accident.

    1.4 Autres dommages

    Pendant l'accident, l'avion a rebondi au-dessus d'une route secondaire et a heurté les deux câbles inférieurs d'une ligne électrique rurale comprenant trois câbles. Les dommages à cette ligne électrique ont causé une panne de courant temporaire dans le secteur nord-ouest de Meadow Lake. La panne de courant s'est produite à 8 h 55 HNC.

    Du carburant s'est répandu le long du sillon laissé par l'avion. Un champ a été endommagé par le carburant et par les débris que l'avion a laissés sur son passage.

    1.5 Renseignements sur le personnel

    Commandant de bord Copilote
    Âge 46 ans 33 ans
    Licence pilote de ligne pilote de ligne
    Date d'expiration du certificat de validation 1 er mai 1994 1 er avril 1994
    Nombre total d'heurs de vol 15,600 3,200
    Nombre total d'heures de vol sur type en cause 1,000 1.500
    Nombre total d'heures de vol dan le 90 derniers jours 60 60
    Nombre total d'heures de vol sur type en cause dans les 90 derniers jours 60 60
    Nombre d'heures de service avant l'accident 2 2
    Nombre d'heures libres avant la prise de service 15 12

    1.5.1 Expérience et entraînement de l'équipage

    Chacun des deux membres d'équipage détenait une licence de pilote de ligne valide, une annotation de vol aux instruments valide, et une vérification de compétence pilote à jour. En outre, chacun des membres d'équipage était à jour relativement à toutes les exigences du plan d'entraînement approuvé de la compagnie. Le plan d'entraînement exige que les pilotes de la compagnie participent à un stage de formation initiale au sol et en vol pour chaque type d'avion qu'ils vont piloter. En outre, des stages de formation périodique au sol et en vol sont exigés au moins une fois par année civile. L'équipage en question avait effectué son stage de formation périodique en octobre 1993, aux installations d'entraînement de Simuflite à Dallas-Fort Worth (Texas). Ce stage de formation met l'accent sur les procédures d'approche indirecte et permet à l'équipage d'exécuter ces procédures dans le simulateur.

    Pilote chevronné, le commandant de bord totalisait plus de 15 000 heures de vol. Cette expérience avait été acquise au cours d'une carrière en aviation de plus de 26 ans pendant laquelle il avait travaillé comme instructeur de vol, pilote d'avions nolisés, puis chef pilote pour plusieurs lignes aériennes régionales avant de s'engager au service de Millar Western en 1988.

    Le copilote totalisait environ 3 200 heures de vol. La majeure partie de cette expérience avait été acquise sur Westwind II lors de vols effectués dans des zones de circulation aérienne à forte intensité.

    Les deux membres d'équipage avaient donné un rendement élevé régulièrement pendant les exercices d'entraînement et pendant les épreuves en vol de Transports Canada. En outre, on avait constaté que les principes de coordination des membres d'équipage en vol et de bonne gestion dans le poste de pilotage qui avaient été adoptés par la compagnie étaient mis en pratique.

    1.6 Renseignements sur l'aéronef

    Constructeur - Israel Aircraft Industries
    Type et modèle - IAI 1124A (Westwind II)
    Année de construction - 1982
    Numéro de série - 380
    Certificat de navigabilité- Catégorie standard.
    Délivré le 21 février - 1989. En état de validité.
    Nombre total d'heures de vol cellule - 4 810
    Type de moteur (nombre) - TFE731-3-1G (2)
    Type d'hélice (nombre) - N/D
    Masse maximale autorisée au décollage - 23 501 lb
    Type(s) de carburant recommandé(s) - Jet A, Jet A-1, Jet B, JP-5
    Type de carburant utilisé - Jet A

    Figure 1 - Westwind II
    Image
    Westwind II

    1.6.1 Description de l'avion

    Le IAI 1124A (Westwind II) est un avion biturbosoufflante d'affaire. Il avait été homologué à l'origine, par les autorités de l'aviation civile d'Israël en 1979 et, ensuite, par la Federal Aviation Administration des États-Unis en 1980. L'avion était conçu d'après le Westwind I, mais il comprenait une aile nouvellement modifiée et des ailettes d'extrémité de voilure de type NASA au-dessus des réservoirs de bout d'aile. Ces modifications avaient été apportées pour améliorer les performances de vol de l'avion dans des conditions de température et d'altitude élevées.

    L'avion est propulsé par deux moteurs à turbosoufflante TFE-731-3-1G de Garrett montés sur le fuselage, chacun pouvant produire une poussée statique de 3 700 livres. L'avion a une puissance massique assez élevée, et les pilotes indiquent qu'il réagit rapidement et qu'il peut monter rapidement à la pleine puissance, particulièrement lorsque la masse est faible et que la température extérieure est basse.

    Le Westwind II est commandé de façon conventionnelle à l'aide d'ailerons, de gouvernes de profondeur et d'une gouverne de direction entièrement métalliques actionnés manuellement. L'avion est équipé de volets Fowler électriques à double fente, de tabs compensateurs électriques, et d'aérofreins et de déporteurs hydrauliques situés au-dessus de chaque aile et à l'avant des volets. En outre, le stabilisateur tout entier est une structure en porte-à-faux à calage variable qui est commandée électriquement.

    Le Westwind II est équipé d'un circuit de commandes de vol automatiques FCS-80. Le pilote automatique traite les signaux provenant d'un calculateur des commandes automatiques de vol de même que les sollicitations manuelles de l'équipage de conduite pour entraîner automatiquement les servomoteurs principaux qui positionnent les gouvernes de l'avion. Le pilote automatique est normalement embrayé pendant le vol, mais il peut être débrayé à volonté par les pilotes. Le circuit amortisseur de lacet de l'avion détecte l'accélération en lacet, combine le signal à celui de coordination en virage et amplifie le signal de commande de la gouverne de direction qui en résulte pour entraîner le servomoteur de la gouverne de direction. L'amortisseur de lacet est normalement enclenché pendant le vol.

    Le Westwind II est équipé de dispositifs d'antigivrage et de dégivrage, et il est homologué pour voler dans des conditions de givrage. Le manuel de vol de l'avion indique que, dans des conditions d'humidité visible et de température givrante, du givre se formera sur les parties non chauffées du pare-brise, les essuie-glace, les bords d'attaque des ailes et de l'empennage, les entrées d'air et les fuseaux réacteurs.

    1.6.2 Procédures d'utilisation de l'avion

    La compagnie utilise un système de régulation des vols géré par les pilotes eux-mêmes. Le système autorise le commandant de bord à prendre les décisions concernant le départ des vols et le contrôle des opérations aériennes qui lui sont assignées. La surveillance globale des opérations aériennes de la compagnie incombent au chef pilote.

    Le plan de vol déposé indiquait que le vol de l'aéroport municipal d'Edmonton à Meadow Lake serait effectué selon les règles de vol aux instruments (IFR). Le vol a suivi une route directe à une altitude-pression type de 27 000 pieds-mer (FL 270). Le vol avait pour but de mettre l'avion en place afin qu'il prenne et transporte sept personnes de la compagnie, de Meadow Lake (Saskatchewan) à une deuxième installation de la compagnie à Whitecourt (Alberta). Le plan de vol indiquait que le temps estimé en route pour le vol de mise en place entre l'aéroport municipal d'Edmonton et Meadow Lake était de 35 minutes. L'avion était parti d'Edmonton à 8 h 15 HNC.

    Avant le départ d'Edmonton, 5 300 livres de carburant Jet A ont été versées dans les réservoirs. Cette quantité de carburant permettait à l'avion d'effectuer toutes les étapes du vol d'Edmonton à Meadow Lake, puis à Whitecourt, et le retour à Edmonton sans avoir à effectuer d'escale de ravitaillement en route. Le vol à destination de Meadow Lake nécessitait environ 1 000 livres de carburant, ce qui signifie qu'il restait environ 4 300 livres de carburant à bord au moment où l'accident s'est produit.

    1.6.3 Masse et centrage de l'avion

    À cause de la conception du Westwind II, une petite modification de sa charge peut se traduire par un déplacement assez grand de son centre de gravité. La plage de centrage de l'avion est indiquée dans la section VIII-21 du manuel de vol du Westwind II. La partie inférieure de cette plage indique deux zones distinctes. Le manuel indique que, si la masse sans carburant de l'avion se retrouve dans la zone 1, du carburant peut alors être mis dans l'avion jusqu'à ce que la masse maximale sur l'aire de trafic soit atteinte sans dépasser les limites de centrage. Toutefois, afin de maximiser la charge utile de l'avion, le centrage, à la masse sans carburant, est normalement réglé à la limite la plus arrière de la zone 1. Lorsque les passagers, les bagages et le carburant sont mis à bord, le centre de gravité se déplace progressivement vers l'avant, vers la limite avant de la plage de centrage d'exploitation. Ce réglage à la position de centrage, à la masse sans carburant, est effectué au moyen de l'utilisation de lest amovible.

    Avant de partir de l'aéroport municipal d'Edmonton, l'équipage de conduite avait placé 100 livres de lest amovible (quatre sacs de 25 livres de grenailles de plomb) dans le compartiment à bagages arrière afin de placer le centre de gravité de l'avion de façon à permettre à huit passagers de monter à bord à Meadow Lake.

    La masse et le centrage de l'avion pour le vol de mise en place à Meadow Lake étaient dans les limites prescrites. La masse de l'avion au moment de l'accident a été estimée à 18 138 livres, et la répartition de cette charge aurait placé le centre de gravité de l'avion à la limite arrière de la plage d'utilisation du centrage.

    1.6.4 Performances de l'avion avec centrage arrière

    Les caractéristiques de vol d'un avion et la réponse de l'avion aux sollicitations du pilote varient en fonction de la position du centre de gravité. Ces variations sont bien connues dans le monde de l'aviation et sont publiées dans de nombreux documents de référence qui traitent de l'aérodynamique. Lorsque l'avion est en centrage arrière, on peut s'attendre aux effets suivants :

    1. plus grande possibilité que l'avion cabre trop lorsqu'on tire sur le manche;
    2. stabilité en tangage réduite, et plus grande tendance au décrochage aérodynamique;
    3. réduction de la tendance naturelle de l'avant de l'avion à s'enfoncer au décrochage.

    1.6.5 Entretien de l'avion

    Le personnel d'entretien de la compagnie est employé par Millar-Western à temps plein ou sur une base contractuelle, et il relève du chef pilote quant à l'entretien des aéronefs de la compagnie, conformément au manuel d'exploitation. Les travaux d'entretien importants et les inspections étaient effectués par Innotech Aviation Ltd. à Vancouver (Colombie-Britannique).

    L'avion était entretenu selon un programme d'inspection par étapes aux 50 heures, conformément au manuel d'entretien du Westwind II d'Israel Aircraft Industries. Une inspection à l'étape 10 avait été effectuée le 7 décembre 1993, environ 33 heures de vol avant l'accident, alors que l'avion totalisait

    4 779,2 heures cellule. L'avion avait également subi le 15 octobre 1993 une inspection structurale prévue à 4 800 heures de vol selon le programme d'inspection structurale du Westwind II d'Israel Aircraft Industries; l'avion totalisait alors 4 717,7 heures cellule. Les documents techniques indiquent que tous les travaux d'entretien avaient été effectués correctement et que l'avion avait été certifié en état de navigabilité avant de partir.

    1.7 Renseignements météorologiques

    1.7.1 Prévisions régionales

    Les prévisions régionales émises à Winnipeg pour la région de Meadow Lake et valides au moment de l'accident (FACN5 CWWG 271130) indiquaient que la région serait sous l'influence d'une masse d'air humide à bas niveau et d'un courant variable léger. On pouvait s'attendre à des plafonds localisés de stratus entre 600 et 1 200 pieds-sol avec des bancs isolés de brouillard donnant des visibilités comprises entre un demi et trois milles terrestres dans de la neige en grains et du brouillard. Des plafonds obscurcis pouvaient se situer entre le niveau du sol et 300 pieds-sol environ.

    1.7.2 Observations météorologiques du Service de l'environnement atmosphérique (SEA)

    Les observations météorologiques horaires effectuées pendant la période précédant le moment de l'accident indiquaient un plafond mesuré par ballon assez constant de 500 pieds-sol. Un rapport d'observations météorologiques du SEA effectuées immédiatement après l'accident a indiqué un léger obscurcissement et un plafond mesuré par ballon à 400 pieds-sol. Le rapport indiquait que la visibilité était de trois milles terrestres dans des cristaux de glace. La température était de -9°C, et le point de rosée, de -11°C. Le vent soufflait du 280 degrés à 9 mi/h, et le calage altimétrique était de 30,10 pouces de mercure. Les rapports météorologiques subséquents indiquent que le plafond et la visibilité ont diminué graduellement au cours des heures qui ont suivi, respectivement à 200 pieds-sol et à un mille et demi dans de la neige très légère et du brouillard.

    Les mesures par ballon sont très fiables dans des conditions de plafond bas et de vent faible, et elles atteignaient probablement une précision de l'ordre de 50 pieds dans les conditions qui prévalaient le matin de l'accident.

    1.7.3 Voile blanc

    La section AIR 2.12.7 de la Publication d'information aéronautique .A.I.P. Canada) décrit le voile blanc comme étant un phénomène atmosphérique optique qui ne permet pas de percevoir les ombres, l'horizon et les nuages. Le voile blanc est un phénomène qui se produit généralement au-dessus d'une couverture neigeuse non fragmentée et sous un ciel uniformément couvert, lorsque la lumière du ciel est à peu près égale à celle de la surface de neige. Puisque la lumière est tellement diffuse, le ciel et le relief tendent à se fondre imperceptiblement l'un dans l'autre, ce qui efface l'horizon. L'absence d'un horizon nettement défini influe de façon négative sur la capacité du pilote de voir les repères visuels, même si l'aéronef vole sous les nuages et dans des conditions météorologiques de vol à vue (VMC).

    Des photographies et un enregistrement magnétoscopique pris immédiatement après l'accident montrent des nuages bas déchiquetés, un sol enneigé, une faible luminosité et l'absence d'un horizon nettement défini. Tous ces facteurs favorisent l'apparition du voile blanc, phénomène qui peut avoir réduit la visibilité en vol et l'habileté de l'équipage à évaluer l'altitude et l'angle de la trajectoire de vol à l'aide de repères visuels par rapport à l'horizon.

    1.7.4 Conditions de givrage

    Un pilote qui a atterri à Meadow Lake environ 45 minutes après l'accident a signalé qu'il avait traversé une mince couche de brouillard pendant la descente et qu'il y avait des traces de givre sur l'avion pendant l'approche sur l'aérodrome. En outre, plusieurs témoins au sol, au moment de l'accident, ont indiqué que les antennes radio de leurs véhicules étaient givrées et que les arbres étaient couverts de gelée blanche. Ces comptes rendus de conditions au sol provenaient de la région située au sud-est des lieux de l'accident.

    Les enquêteurs n'ont décelé aucune trace de givre sur les lieux de l'accident. En outre, les photographies prises par les médias environ 15 minutes après l'accident ne montrent du givre sur aucune partie des profils aérodynamiques de l'avion.

    1.8 Aides à la navigation

    L'avion était équipé pour le vol aux instruments. Tout l'équipement de navigation à bord était en bon état de marche avant le vol.

    1.8.1 Installations au départ et en route

    L'avion avait reçu l'autorisation du contrôle de la circulation aérienne (ATC) de voler directement de l'aéroport municipal d'Edmonton à l'aérodrome de Meadow Lake au FL 270. La partie en route du vol avait été surveillée et contrôlée par les installations de l'ATC au centre de contrôle régional (ACC) d'Edmonton et par les installations de contrôle terminal du ministère de la Défense nationale à Cold Lake (Alberta). Les communications enregistrées sur bande et les données radar relatives à ces parties du vol ont été sauvegardées après l'accident et ont été utilisées au cours de l'enquête.

    1.8.2 Installations à destination

    L'aérodrome de Meadow Lake offre, à l'usage des compagnies, une procédure d'approche aux instruments approuvée basée sur le radiophare non directionnel (NDB) «YLJ» basse fréquence situé à environ 4,6 milles marins (nm) à l'ouest de l'aérodrome. Lorsque le vent souffle de l'ouest (favorisant la piste 26), l'approche vers Meadow Lake nécessite que le pilote effectue une approche indirecte afin d'aligner l'avion sur la piste en service.

    «Approche indirecte» est l'expression utilisée pour décrire les manoeuvres visuelles nécessaires après une approche aux instruments pour placer un avion en vue de l'atterrissage sur une piste qui n'est pas bien située pour permettre un atterrissage direct. La section RAC 9.25 de l'A.I.P. précise ce qui suit : «L'ensemble des exigences (d'une approche indirecte) se résume essentiellement à garder la piste en vue après le contact visuel initial, et à conserver la MDA (altitude minimale de descente) d'approche indirecte jusqu'à ce qu'un atterrissage normal soit assuré.»

    Figure 2 - Approche indirecte
    Image
    Approche indirecte

    Les différences de performance entre les avions ont un effet sur l'espace aérien et la visibilité nécessaires pour effectuer une manoeuvre indirecte en toute sécurité. Le Westwind II utilise normalement la plage de vitesses de catégorie D, vitesse indiquée (KIAS) comprise entre 141 et 165 noeuds; sa vitesse d'approche estimée compte tenu de la masse aurait été d'environ 150 KIAS. La zone de franchissement d'obstacles pour un avion de la catégorie D s'étend sur 2,3 milles vers l'extérieur à partir de l'extrémité de piste et assure une hauteur minimale de 300 pieds au-dessus des obstacles à l'intérieur de la zone de manoeuvre à vue.

    À Meadow Lake, l'obstacle dont il faut tenir le plus compte dans le cas d'une approche indirecte pour un avion de la catégorie D est une tour de télévision haute de 250 pieds située à quelque deux milles à l'est de la piste 26. L'espacement de franchissement de cette tour pour les avions évoluant en IFR a été établie par la publication d'une MDA de 604 pieds pour les avions de la catégorie D. Une tour de radiodiffusion haute de 200 pieds est située à trois milles au sud- est de l'aérodrome, et à un demi-mille environ au sud de la trajectoire d'approche indirecte suivie par l'avion accidenté. Cette tour est à 0,7 mille à l'extérieur de la zone de franchissement d'obstacles pour les avions de la catégorie D et ne présente pas de risques pour les aéronefs qui volent dans l'espace aérien prévu pour les approches indirectes publiées. Le commandant de bord savait où se trouvait cette tour, et il faisait souvent des remarques sur son emplacement lorsqu'il arrivait à Meadow Lake.

    La procédure d'approche indirecte que l'équipage a effectuée en simulateur lors de son dernier stage de formation pratique ressemble à celle décrite par la ligne continue Trajectoire normale d'approche indirecte.qu'on peut voir sur la figure 2. Cette procédure correspond aux procédures d'approche indirecte standard décrites dans l'A.I.P. et dans le Manuel de vol aux instruments.(TP2076F) de Transports Canada. Toutefois, le jour de l'accident, l'avion a entrepris la procédure d'approche à la verticale de l'aérodrome et a suivi la trajectoire de vol indiquée par la ligne pointillée sur la figure 2. Cette trajectoire de vol a amené l'avion à l'extérieur de la zone de franchissement d'obstacles pour les aéronefs de la catégorie D et au voisinage de la tour de radiodiffusion de 200 pieds. Les brusques manoeuvres en vol que les témoins au sol ont observé sont survenues alors que l'avion approchait de la route qui se dirige vers le nord et qui mène à la ville de Meadow Lake. Les déclarations des témoins indiquent que l'événement a été bref et que l'avion a exécuté des inclinaisons latérales prononcées dans les deux sens. Les mouvements à gauche de la section avant de l'avion décrits par un témoin, alors que l'appareil avait l'aile droite basse, donnent à penser qu'il est possible que l'avion ait été soumis à un facteur de charge négatif.

    1.9 Télécommunications

    Toutes les radiocommunications enregistrées ont été examinées après l'accident. Cet examen a permis de déterminer ce qui suit :

    a) les radiocommunications pendant le départ de l'aéroport municipal d'Edmonton ont été normales;

    b) les radiocommunications en route avec l'ACC d'Edmonton et avec les installations du ministère de la Défense nationale à Cold Lake ont été normales et n'ont donné aucun signe de difficultés en vol.

    En plus des données enregistrées, les renseignements suivants ont été obtenus d'autres sources :

    1. les radiocommunications avec l'observateur du SEA et le directeur de l'aéroport de Meadow Lake ont semblé normales;
    2. les radiocommunications en vol étaient effectuées par le copilote; et
    3. aucune radiocommunication en provenance de l'avion n'a été entendue pendant son approche indirecte.

    1.10 Renseignements sur l'aérodrome

    L'aérodrome de Meadow Lake est un aérodrome privé et enregistré qui est exploité par le ministère de la voirie et du transport du gouvernement de la Saskatchewan. Les renseignements relatifs à l'aérodrome sont indiqués dans le Supplément de vol - Canada.de Transports Canada. Ces renseignements sont fournis par l'exploitant et sont vérifiés par Transports Canada dans le cadre d'une inspection effectuée tous les trois à cinq ans.

    L'aérodrome de Meadow Lake n'a pas de tour de contrôle. Les plus récentes conditions météorologiques et les plus récents renseignements concernant l'aérodrome peuvent être obtenus d'une station de service consultatif privée (UNICOM) qui est en service pendant certaines heures. Un observateur météorologique du SEA fournit des rapports météorologiques locaux (rapports horaires ou rapports spéciaux, ou les deux), et s'occupe d'un système d'information météorologique aviation libre-service à l'usage des exploitants d'aéronefs.

    L'aérodrome a deux pistes. La piste principale a 5 000 pieds de longueur et 100 pieds de largeur, et sa surface est asphaltée; elle est orientée au 080/260 degrés magnétique. La piste venait juste d'être nettoyée, et elle était propre et sèche au moment de l'accident.

    L'aérodrome de Meadow Lake n'est pas équipé d'installations de sauvetage et de lutte contre les incendies en cas d'écrasement, et il compte sur la ville de Meadow Lake pour assurer ce service.

    Le Supplément de vol - Canada.indique que du carburant Jet B en fût est disponible. Toutefois, ce type de carburant n'est pas conservé à l'aérodrome, et on ne peut en obtenir qu'à certaines heures du vendeur de carburant en vrac de la ville de Meadow Lake. À cause des difficultés et des dépenses importantes que présentaient le transport et l'utilisation de ce carburant, les procédures d'exploitation aérienne de Millar-Western exigeaient que l'avion qui devait se rendre à Meadow Lake emporte suffisamment de carburant pour effectuer l'étape suivante de l'itinéraire.

    1.11 Enregistreurs de bord

    L'avion n'était pas équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR) ni d'un enregistreur phonique (CVR), ce qui n'était pas contraire à la réglementation.

    1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

    1.12.1 Traces au sol et répartition des débris

    L'avion s'est écrasé à environ 2,5 nm à l'est-sud-est du seuil de la piste. L'examen et la mesure des marques d'impact ont révélé que l'avion avait heurté le sol dans une assiette de cabré d'environ 15 degrés, l'aile droite légèrement basse. Les débris de l'avion étaient dispersés de façon linéaire à partir du point d'impact initial, et de façon symétrique autour d'une trajectoire nominale de 004 degrés magnétique. L'avion a laissé un sillon de 1 035 pieds de long.

    1.12.2 Structures de l'avion

    L'avion a subi des dommages importants dus à l'impact. Les ailes, l'empennage, la cabine et le poste de pilotage se sont détachés pendant l'écrasement et se sont immobilisés en segments distincts près de l'extrémité nord du sillon laissé par l'avion. La partie avant du fuselage s'est détachée de la section centrale au niveau de la cloison étanche de la partie arrière de la cabine, et elle reposait à l'endroit à l'extrémité la plus au nord des lieux de l'accident. L'intérieur de la cabine et du poste de pilotage, de même que la partie avant droite du fuselage et des sections du pare-brise ont été consumés par l'incendie qui s'est déclaré après l'accident.

    La porte de cabine et le panneau issue de secours gauche se sont détachés du fuselage et ont été trouvés parmi les débris du sillon. Les deux goupilles de verrouillage de la porte principale étaient déployées et dans la position verrouillée. Le hublot issue de secours reposait sur la neige, le côté intérieur vers le bas, près de l'extrémité nord du sillon laissé par l'avion. Il n'y avait aucun signe de suie ou d'incendie sur le côté intérieur du hublot issue de secours. L'issue de secours droite était fixée au fuselage et avait été endommagée par le feu.

    Les vérins du train d'atterrissage principal étaient déployés de 12 pouces, ce qui indique que le train était sorti et verrouillé au moment de l'impact.

    1.12.3 Instruments et circuits électriques

    Le poste de pilotage a été lourdement endommagé par l'incendie; c'est pourquoi les instruments de vol et de navigation ont été enlevés du poste de pilotage et envoyés au Laboratoire technique du BST à Ottawa pour démontage et analyse. L'examen a permis de déterminer ce qui suit :

    1. la vitesse indiquée de l'avion au moment de l'impact était de 175 noeuds;
    2. la vitesse descensionnelle au moment de l'impact était de 2 200 pieds par minute (pi/min); et
    3. le pilote automatique était débrayé et l'amortisseur de lacet était enclenché au moment de l'impact.

    1.12.4 Réacteurs

    Les deux réacteurs ont subi des dommages importants dus à l'impact, mais ils n'ont pas été touchés par l'incendie qui s'est déclaré après l'accident. Les dommages causés par l'ingestion de débris étaient évidents sur les aubes de soufflante des deux réacteurs. Plusieurs aubes de soufflante du réacteur droit s'étaient détachées et le carénage de la soufflante droite était bombé. Toutes les aubes de soufflante du réacteur gauche étaient en place. Plusieurs d'entre elles présentaient des dommages mécaniques sur le bord d'attaque.

    Les réacteurs, avec leurs régulateurs éélectroniques, ont été enlevés des lieux et transportés aux installations du motoriste, Allied Signal à Phoenix (Arizona), pour un examen en cours de démontage et une analyse. Cette analyse a permis de déterminer que les deux réacteurs produisaient de la puissance au moment de l'impact. Toutefois, l'importance de la puissance des réacteurs n'a pu être déterminée.

    1.12.5 Commandes de vol

    Les circuits de commandes de vol principaux de l'avion ont été examinés sur les lieux de l'accident. Aucune discontinuité antérieure à l'impact dans les circuits n'a été déterminée. Tous les dommages observés avaient été causés par la surcharge, et ils correspondaient aux forces d'impact élevées et à la désintégration subséquente de la cellule.

    Les circuits de commandes de vol secondaires ont été examinés avant qu'on enlève l'épave des lieux de l'accident. Cet examen a permis de déterminer que les volets étaient sortis de façon symétrique et à 20 degrés au moment de l'impact. Toutefois, on a noté que l'un des colliers de fixation du câble d'entraînement de volet droit manquait depuis un certain temps avant l'accident. Ce collier manquant permettait au câble d'entraînement de toucher à la bride extérieure du bras de levier d'asservissement d'aileron. Avec le temps, le mouvement du bras de levier contre le câble d'entraînement avait causé l'usure par frottement du métal du bras de levier. Même si le contact entre ces deux composants avait été suffisant pour arracher du métal, cela ne s'était pas traduit par une perturbation ou par une obstruction de mouvement notables dans le circuit d'aileron.

    Les inverseurs de poussée, les déporteurs et les aérofreins étaient tous rentrés au moment de l'impact. On a déterminé que la position du stabilisateur avoisinait la position plein piqué à 29 degrés de la corde aérodynamique moyenne (MAC), ce qui indique que l'avion était dans sa plage de vitesses d'approche dans les conditions estimées de masse et de centrage. Les tabs compensateurs de la gouverne de direction et des ailerons étaient au neutre.

    1.13 Renseignements médicaux

    Le commandant de bord de l'avion détenait un certificat de validation de catégorie 1 valide en vertu des exigences de sa licence de pilote de ligne. Les dossiers médicaux et les examens effectués après l'accident n'ont révélé aucune trace de problèmes médicaux antérieurs à l'accident, qui auraient pu provoquer une incapacité en vol chez le commandant de bord. En outre, rien n'indique que le commandant de bord ait pu subir une ischémie du myocarde ou une crise cardiaque en vol.

    Le copilote détenait un certificat de validation de catégorie 1 valide. Une histologie de routine a été effectuée après l'accident, et aucun problème médical antérieur au décès indiquant une cause quelconque d'incapacité n'a été décelée. Les résultats des tests ont révélé une concentration de carboxyhémoglobine de 10 % dans le sang du copilote. Le copilote avait l'habitude de fumer, et il est possible que cela ait pu compter un peu pour le monoxyde de carbone trouvé dans son sang.

    Les résultats des tests visant à déceler la présence de drogues et d'alcool ont été négatifs pour les deux pilotes. Les résultats des examens histologiques des deux pilotes ont également été négatifs.

    1.14 L'incendie

    Les réservoirs de carburant de l'avion ont été éventrés au moment de l'impact avec le sol, et le carburant s'est répandu vers l'avant et vers l'extérieur, le long du sillon laissé par l'avion. L'intérieur de la cabine de l'avion avait récemment été recapitonné avec du matériau ignifuge. Toutefois, du carburant a pénétré dans le poste de pilotage et la cabine, et ce sont à ces endroits que l'incendie a causé les dommages les plus graves. Rien n'indique qu'il y ait eu un incendie en vol.

    1.15 Questions relatives à la survie des occupants

    On a jugé que l'accident n'offrait aucune chance de survie à cause de l'importance des forces de décélération et de la contrainte thermique qui a suivi.

    Le dispositif de retenue à quatre points utilisé par chacun des membres d'équipage est resté fixé à la structure de l'avion, et les sangles des ceintures de sécurité ne se sont pas rompues. La sangle gauche des bretelles de sécurité du commandant de bord n'était pas attachée à la boucle centrale. On n'a pu déterminer pourquoi la sangle n'était pas attachée correctement. Les structures secondaires des sièges de membre d'équipage se sont affaissées à cause des forces de décélération verticales élevées et des charges latérales à l'impact.

    1.16 Essais et recherches

    Trois témoins qui se trouvaient à des endroits différents ont pu localiser l'avion dans l'espace au moment des brusques inclinaisons latérales prononcées. L'avion était à environ 3 000 pieds au sud-ouest des lieux de l'accident. Une analyse des performances de l'avion a été effectuée pour déterminer si la perte de contrôle en vol observée par les témoins peut avoir été associée à un décrochage aérodynamique. Cette analyse mathématique était basée sur les indices selon lesquels, au moment de l'impact, la vitesse indiquée de l'avion était de 175 noeuds, et sa vitesse descensionnelle, de 2 200 pi/min. En utilisant ces données comme référence, il a été possible d'estimer l'angle de la trajectoire de vol de l'avion jusqu'à l'impact. En projetant cet angle, il a alors été possible d'évaluer l'altitude de l'avion, et la vitesse de l'avion au point où les manoeuvres brusques en vol sont survenues. À partir de cette analyse, on a déterminé que :

    1. l'angle de la trajectoire de vol de l'avion à partir du début des manoeuvres brusques en vol jusqu'au sol a été d'environ 7,8 degrés en piqué;
    2. l'altitude de l'avion au moment des manoeuvres était d'environ 400 pieds-sol;
    3. il s'est écoulé environ 10 secondes entre le début des manoeuvres observées par les témoins et le moment de l'impact;
    4. on a estimé que la vitesse indiquée de l'avion au moment des manoeuvres était entre 129 et 154 noeuds.

    1.17 Renseignements supplémentaires

    1.17.1 Décrochage aérodynamique et avertissement de décrochage

    Un profil aérodynamique peut produire de la portance sur une plage limitée d'angles d'attaque. Si l'angle d'attaque augmente au-delà de ces limites, la portance des ailes disparaît et l'avion décroche.

    Un décrochage peut être amorcé à une vitesse plus élevée que la normale lorsque le manche est tiré pour garder les ailes de l'avion à l'horizontale pendant un virage serré. La vitesse de décrochage réelle de l'avion augmente proportionnellement à toute augmentation de l'angle d'inclinaison latérale et de la sollicitation du manche vers l'arrière. Cette forme de «décrochage accéléré» est normalement caractérisée par très peu d'avertissement et une amorce rapide.

    Lorsqu'un profil aérodynamique approche de son angle d'attaque critique, un avertisseur de décrochage avertit normalement le pilote de l'imminence du décrochage. Le Westwind II n'est pas équipé d'un avertisseur sonore, mais il comporte un indicateur d'angle d'attaque et produit un tremblement aérodynamique qui avertit le pilote de l'imminence du décrochage.

    Le manuel de vol de l'avion indique que, à la masse de l'avion au moment de l'accident, la vitesse corrigée (CAS) de décrochage à 1 g de l'avion dans la configuration d'atterrissage avec volets sortis à 20 degrés et train d'atterrissage sorti, est de 102 noeuds. La limite de charge de vol de manoeuvre autorisée maximale publiée, avec train d'atterrissage et volets sortis, est de 2 g. D'après cette limite, les vitesses de décrochage accéléré de l'avion pouvaient atteindre 144 noeuds.

    1.17.2 Effets aérodynamiques du givre sur les ailes

    Une augmentation de la rugosité de la surface causée par l'accumulation de givre sur une aile peut produire un décrochage de l'aile à des vitesses plus élevées que la normale. En outre, du givre sur les surfaces portantes augmente la masse totale de l'avion, diminue la capacité de l'aile à produire de la portance, et augmente la traînée aérodynamique de l'aile.

    2.0 Analyse

    2.1 Entraînement et qualifications des membres d'équipage

    L'équipage de conduite possédait les qualifications, la formation et l'expérience nécessaires au vol, et il avait régulièrement obtenu des résultats élevés pendant les évaluations en vol de Transports Canada. Rien n'indique qu'un problème médical antérieur à l'accident ait pu provoquer une incapacité en vol chez le commandant de bord ou le copilote.

    2.2 Approche indirecte sur Meadow Lake

    Les deux membres d'équipage connaissaient bien l'aérodrome de Meadow Lake et la procédure d'approche indirecte approuvée de la compagnie. L'équipage avait obtenu un exposé météorologique avant le vol, de même que des mises à jour par radio de Cold Lake et de l'observateur du SEA de Meadow Lake, et il savait que le plafond signalé à l'aérodrome de Meadow Lake était à 500 pieds-sol, donc à une altitude inférieure aux limites d'approche indirecte de catégorie D. Les conditions météorologiques au voisinage de Meadow Lake favorisaient la formation de givre sur la cellule et les profils aérodynamiques de l'avion, mais aucune trace de givre n'a été décelée sur l'avion. Il semble qu'aucune pression n'était exercée sur les pilotes pour qu'ils atteignent leur destination malgré le mauvais temps. La raison pour laquelle les pilotes ont entrepris le vol et pour laquelle ils ont entrepris l'approche dans les conditions qui prévalaient n'a pas été déterminée.

    Les observateurs au sol ont vu l'avion survoler l'aérogare de Meadow Lake; il devait donc être à la base mesurée des nuages à 400 pieds-sol ou à une altitude inférieure au moment de l'accident. L'avion semblait effectuer une approche indirecte pour atterrir sur la piste 26. On n'a pu trouver aucune raison permettant d'expliquer les manoeuvres de l'avion à une altitude inférieure à la MDA de catégorie D de 604 pieds-sol pendant l'approche indirecte. Bien que l'équipage ait établi le contact visuel avec le sol à la MDA de catégorie D, la mesure recommandée était de rester à la MDA d'approche indirecte jusqu'à ce qu'un atterrissage normal puisse être effectué.

    On a calculé que la vitesse indiquée de l'avion au moment des brusques manoeuvres en vol se trouvait entre 129 et 154 noeuds. Au vu de ces calculs, il semble que l'avion évoluait peut- être à une vitesse avoisinant sa vitesse normale d'approche indirecte ou à une vitesse inférieure. Le risque inhérent au vol à une vitesse inférieure est que la marge entre la vitesse actuelle de manoeuvre de l'avion et sa vitesse de décrochage est réduite. Des précautions supplémentaires doivent alors être prises pour limiter la charge de vol pendant tous les virages et pour empêcher l'avion de décrocher.

    2.3 Manoeuvres brusques en vol

    L'avion effectuait un virage à gauche pour s'aligner sur la piste 26 lorsqu'il s'est mis à effectuer des manoeuvres brusques en vol et à s'incliner latéralement d'une façon prononcée. Cette situation n'a duré que quelques secondes. Les déclarations des témoins donnent à penser qu'il est possible que l'avion ait été soumis à un facteur de charge négatif pendant qu'il était fortement incliné à droite. La raison des manoeuvres n'a pu être déterminée, mais il est probable qu'elles étaient associées à un décrochage accéléré.

    2.3.1 Position de l'avion au moment des manoeuvres

    Au moment des manoeuvres observées par les témoins, l'avion tournait pour revenir à la piste et aurait normalement été en virage à gauche incliné de 30 degrés. Toutefois, la procédure d'approche indirecte a été amorcée au-dessus de l'aérodrome, et le vent d'ouest aurait fait dériver l'avion encore plus vers l'est à un point situé à environ 2,5 nm de l'environnement de la piste de l'aérodrome et à l'extérieur des zones de franchissement d'obstacles publiées pour les approches indirectes. Cette situation a placé l'avion à proximité d'une tour de radiodiffusion de 200 pieds de hauteur. Puisque le commandant de bord savait où se trouvait la tour, il est probable que l'équipage s'est aperçu qu'il était à proximité de la tour, et il est possible que c'est ce qui a pu inciter l'équipage à effectuer un virage serré pour revenir à l'aérodrome.

    2.4 Explications plausibles des manoeuvres brusques

    2.4.1Possibilité d'un décrochage accéléré

    Comme le centre de gravité de l'avion était situé à la limite arrière, il serait plus probable que l'avion se cabrerait trop si la gouverne de profondeur était sollicitée pour le cabrage. Le centrage arrière aurait réduit la stabilité en tangage de l'avion, et il aurait augmenté la probabilité de décrochage accéléré.

    Compte tenu de la description faite par un témoin concernant les manoeuvres brusques observées avant l'impact, il est possible que l'avion ait été soumis à un facteur de charge négatif pendant qu'il était fortement incliné à droite. Dans ce cas, la manoeuvre a pu être causée par un décrochage à haute vitesse, et le mouvement à gauche de la section avant de l'avion, mouvement qui a été observé par le témoin, a pu être la réponse de l'avion aux sollicitations de l'équipage sur les commandes pour sortir du décrochage.

    2.4.2 Possibilité d'une manoeuvre planifiée et délibérée

    Il est possible, toutefois, que les manoeuvres en vol qui ont été observées par les témoins aient pu être planifiées et prises délibérément par l'équipage afin de placer l'avion par rapport à la tour de radiodiffusion et à l'aéroport. Toutefois, il est peu probable que deux pilotes chevronnés entreprendraient des manoeuvres en vol aussi brusques à basse altitude et avec de mauvaises références visuelles, car cela augmenterait considérablement les risques d'accident.

    2.4.3 Possibilité d'une défectuosité d'un système de l'avion

    Rien n'indique que l'avion ait présenté une défaillance d'un système antérieure à l'impact qui pourrait avoir causé les manoeuvres brusques en vol, ni qu'il y ait eu un incendie en vol. À l'impact, l'avion était configuré pour exécuter une approche indirecte. Toutes les parties des profils aérodynamiques ont été retrouvées et étaient dans la position correspondant à l'étape du vol. Les aérofreins, les déporteurs et les inverseurs de poussée étaient tous rentrés au moment de l'impact, et les volets étaient sortis de façon symétrique et à 20 degrés. Compte tenu du comportement de l'avion en vol qui a été observé par les témoins, il est peu probable qu'une sortie transitoire de l'un ou l'autre de ces dispositifs de commande auxiliaires se soit produite, que ce soit avant ou pendant les manoeuvres brusques en vol.

    2.5 Perte de contrôle de l'altitude

    Peu importe la cause sous-jacente, les inclinaisons latérales prononcées et les brusques manoeuvres en vol ont provoqué une perte de contrôle de l'altitude, et l'avion s'est mis à descendre suivant une trajectoire de descente de 8 degrés jusqu'à ce qu'il s'écrase. Pendant la descente, il semble que la direction de la trajectoire de vol était stable. L'avion a heurté le sol à une vitesse indiquée de 175 noeuds et à une vitesse descensionnelle de 2 200 pi/min. L'avion s'est écrasé dans un angle de cabré de 15 degrés, l'aile droite légèrement basse, ce qui donne à penser qu'un des deux pilotes, ou les deux, s'était rendu compte de la perte d'altitude et essayait de remettre les gaz.

    Comme il s'est écoulé très peu de temps entre le début des manoeuvres qui ont été observées par les témoins et l'écrasement de l'avion, il est peu probable que l'équipage aurait eu le temps de se rendre compte de la situation, de prendre les mesures correctives et de réussir à redresser l'avion avant qu'il ne heurte le sol.

    Les conditions de voile blanc peuvent avoir diminué l'habileté de l'équipage à évaluer l'altitude et l'angle de la trajectoire de vol à l'aide de repères visuels, ce qui aurait probablement ralenti l'exécution du redressement.

    3.0 Faits établis

    1. Les deux membres d'équipage possédaient une licence de pilote de ligne valide, une annotation de vol aux instruments valide, et une PPC à jour.
    2. L'avion était entretenu conformément au programme d'entretien approuvé et avait été certifié en état de navigabilité avant le vol.
    3. L'avion n'était pas équipé d'un FDR ni d'un CVR, ce qui n'était pas contraire à la réglementation.
    4. La masse et le centrage de l'avion étaient dans les limites prescrites, mais le centre de gravité de l'avion se situait à la limite arrière de la plage de centrage.
    5. La position arrière du centre de gravité aurait réduit la stabilité en tangage de l'avion, augmenté la possibilité d'un décrochage aérodynamique et accentué ses caractéristiques de décrochage.
    6. Les conditions de vent à Meadow Lake nécessitaient que l'équipage effectue l'approche NDB vers la piste 08, puis qu'il exécute une approche indirecte afin d'atterrir sur la piste 26.
    7. La vitesse indiquée normale d'approche de 150 noeuds nécessitait que l'équipage effectue l'approche indirecte à la MDA de catégorie D de 604 pieds-sol.
    8. Le plafond mesuré de 400 pieds ne permettait pas d'effectuer l'approche indirecte en respectant les minimums d'approche de la catégorie D.
    9. L'avion a survolé l'aérogare de Meadow Lake au niveau de la base des nuages à 400 pieds-sol ou à une altitude inférieure, et il a semblé effectuer une approche indirecte pour atterrir sur la piste 26 à une altitude inférieure aux minimums d'approche indirecte publiés pour les avions de la catégorie D.
    10. L'avion a fait des manoeuvres à environ 2,5 milles de l'environnement de la piste, à l'extérieur de la zone de franchissement d'obstacles publiée pour les avions de la catégorie D pendant la dernière étape du vol.
    11. Il est probable que l'équipage s'est aperçu qu'il était à l'extérieur de la zone de manoeuvre normale et qu'il a effectué un virage serré pour revenir à l'aérodrome.
    12. L'avion a effectué de brusques inclinaisons latérales prononcées en tournant pour s'aligner sur la piste 26 à Meadow Lake.
    13. Après les manoeuvres brusques en vol, l'assiette de l'avion a été rétablie avant l'impact. L'avion a heurté le sol en cabré, l'aile droite légèrement basse, ce qui laisse penser que le redressement avait été amorcé.
    14. Les deux réacteurs produisaient de la puissance à l'impact; toutefois, le niveau de puissance des réacteurs n'a pu être établie.
    15. Il est peu probable que l'équipage aurait eu le temps de redresser l'avion.
    16. Les conditions météorologiques au voisinage de Meadow Lake favorisait la formation de givre sur la cellule et sur les profils aérodynamiques, mais aucune trace de givre n'a été décelée sur l'avion.
    17. Les conditions de voile blanc peuvent avoir diminué l'habileté de l'équipage à évaluer l'altitude et l'angle de la trajectoire de vol à l'aide de repères visuels, ce qui aurait probablement ralenti l'exécution du redressement.
    18. Aucun problème médical antérieur à l'accident qui aurait pu provoquer une incapacité chez les pilotes n'a été décelé.
    19. Rien n'indique que l'avion ait présenté une défaillance d'un système antérieure à l'impact qui pourrait avoir causé les manoeuvres brusques en vol, ni qu'il y ait eu un incendie en vol.
    20. On a jugé que l'accident n'offrait aucune chance de survie à cause de l'importance des forces de décélération et de la contrainte thermique qui a suivi.

    3.1 Causes

    Pendant l'approche indirecte en vue de l'atterrissage sur la piste 26, l'avion a exécuté une procédure d'approche indirecte inhabituelle à une altitude inférieure aux minimums d'approche indirecte publiés, ce qui a provoqué une perte de contrôle correspondant à un décrochage accéléré. L'avion est descendu et a heurté le sol avant que l'équipage ait le temps d'effectuer un redressement. Les conditions de voile blanc ont peut-être contribué à l'accident.

    4.0 Mesures de sécurité

    Le Bureau n'a, jusqu'ici, recommandé aucune mesure de sécurité.

    Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau, qui est composé du Président, John W. Stants, et des membres Gerald E. Bennett, Zita Brunet, l'hon. Wilfred R. DuPont et Hugh MacNeil.

    Annexes

    Annexe A - Liste des rapports de laboratoire pertinents

    L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :

    • LP 34/94 - Cockpit Instrumentation IAI Westwind II.(Instruments du poste de pilotage du Westwind II);
    • LP 73/94 - Approach Speed Calculation, IAI, 1124A (Calculs de la vitesse d'approche).
    • On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.

    Annexe B - Sigles et abréviations

    ACC
    centre de contrôle régional
    A.I.P.
    Publication d'information aéronautique
    ATC
    contrôle de la circulation aérienne
    BST
    Bureau de la sécurité des transports du Canada
    CAS
    vitesse corrigée
    CVR
    enregistreur phonique
    FDR
    enregistreur de données de vol
    FL
    niveau de vol
    g
    facteur de charge
    h
    heure(s)
    HNC
    heure normale du Centre
    IAI
    Israel Aircraft Industries
    IFR
    règles de vol aux instruments
    KIAS
    vitesse indiquée
    lb
    livre(s)
    MAC
    corde aérodynamique moyenne
    MDA
    altitude minimale de descente
    mi/h
    mille(s) à l'heure
    NDB
    radiophare non directionnel
    nm
    mille(s) marin(s)
    PPC
    vérification de compétence pilote
    pi/min
    pied(s) par minute
    SEA
    Service de l'environnement atmosphérique
    VMC
    conditions météorologiques de vol à vue
    °C
    degré(s) Celsius