Rapport d'enquête maritime A93C0169

Impact sans perte de contrôle
Athabaska Airways Limited
Cessna 310R C-GILR
1 mi au nord-est de Sandy Bay (Saskatchewan)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    L'appareil devait effectuer un vol d'affrètement de nuit entre Sandy Bay (Saskatchewan) et La Ronge. Peu après le décollage, l'avion a heurté des arbres et s'est écrasé sur une rive rocheuse de la rivière Churchill. Les quatre occupants de l'avion ont subi des blessures mortelles.

    Le Bureau a déterminé qu'après le décollage, le pilote a placé l'avion dans une pente de montée très faible qui s'est maintenue jusqu'à l'impact sans perte de contrôle avec des arbres au cours de la montée initiale, avant que l'avion n'atteigne la vitesse de montée en croisière.

    Autres causes concourantes possibles : la faible luminosité au sol et dans le ciel; l'absence d'éclairage par les phares d'atterrissage; l'écart par rapport au profil de départ recommandé la nuit.

    NUMÉO DE DOSSIER : A93C0169
    TYPE D'ÉVÉNEMENT : impact sans perte de contrôle (accident)
    DATE : 12 octobre 1993
    HEURE LOCALE : 21 h 30 HNC
    LIEU : 1 mi au nord-est de Sandy Bay (Saskatchewan)
    TYPE D'AÉRONEF : Cessna 310R
    IMMATRICULATION : C-GILR
    TYPE D'EXPLOITANT : transporteur aérien
    GENRE DE VOL : affrètement
    DOMMAGES : perte totale
    LICENCE : pilote professionnel - avion

    PILOTE
    HEURES DE VOL 90 derniers Total
    Tous types 80 4700
    Type en cause 68 500
    VICTIMES Équipage Passagers
    Tués 1 3
    Blessés graves - -
    Blessés légers - -
    Indemnes - -

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Déroulement du vol

    L'avion devait effectuer un vol d'affrètement de nuit entre Sandy Bay (Saskatchewan) et La Ronge (Saskatchewan). Peu après le décollage, il a heurté des arbres et s'est écrasé sur une...

    1. Les heures sont exprimées en HNC (temps universel coordonné [UTC] moins six heures) sauf indication contraire.
    2. Voir l'annexe A pour la signification des sigles et abréviations.

    ...rive rocheuse de la rivière Churchill. Les quatre occupants de l'avion ont subi des blessures mortelles.

    1.2 Témoignages

    Plusieurs résidents du village de Sandy Bay qui se trouvaient à proximité de l'aérogare ont été témoins de l'accident. Le pilote et les trois passagers sont arrivés à l'aérodrome en voiture un peu avant 21 h 30, heure normale du Centre (HNC)1. Ils sont montés à bord du bimoteur Cessna 310R stationné près de l'aérogare. Les moteurs de l'avion ont été immédiatement mis en marche, et ce dernier est demeuré immobile sur l'aire de stationnement environ trois minutes avant de circuler vers la piste de départ. Les feux de piste se sont allumés dès que l'avion a commencé à rouler vers le seuil de la piste 05. Les témoins ont aussi remarqué que les feux de navigation de l'avion étaient allumés.

    Pendant le décollage, l'avion a semblé accélérer normalement, a pris l'air environ aux deux tiers de la piste 05 et a amorcé une montée sous un angle très faible. Un peu plus tard, des témoins ont remarqué un éclair brillant à environ un demi-mille au nord-est de l'aérodrome. Les témoins ont informé la Gendarmerie royale du Canada (GRC)2 qu'un aéronef venait de s'écraser, et des opérations d'intervention d'urgence ont été dirigées et coordonnées par la police.

    1.3 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

    L'avion a heurté les arbres à environ 2 400 pieds de la fin de la piste 05, au cap de 040 degrés magnétique. Selon les estimations, le point d'impact initial se situe à environ 5 400 pieds du début de la course au décollage, à 40 pieds au-dessus de l'altitude de l'aérodrome et à 150 pieds à gauche du prolongement de l'axe de piste.

    Les dommages aux arbres indiquent que l'avion avait une inclinaison nulle et maintenait une faible pente de montée lorsqu'il a heurté les arbres la première fois. L'impact initial a gravement endommagé l'aile et le moteur droits.

    Après l'impact initial, l'avion a entamé un mouvement de roulis vers la droite, a poursuivi sa course à travers les arbres sur environ 750 pieds et s'est écrasé sur le dos sur la rive rocheuse de la rivière Churchill. Il a alors glissé sur 150 pieds environ au cap de 066 degrés magnétique avant de s'immobiliser.

    Les deux moteurs et hélices, et bon nombre des instruments de bord, ont été arrachés de l'avion au cours de l'écrasement. Le carburant du réservoir principal de gauche s'est enflammé, et le lieu de l'accident a été complètement enveloppé par une boule de feu qui s'est dissipée rapidement. Le fuselage et la cabine ont continué à brûler et ont été très endommagés par le feu. L'accident n'offrait aucune chance de survie en raison de l'importance des forces d'impact et de l'incendie.

    1.4 Examen de l'épave

    1.4.1 Examen des lieux de l'accident

    La continuité et l'intégrité des systèmes de commandes de vol ont été confirmées au cours de l'examen de l'épave. Le compensateur de direction était braqué à un angle compris entre zéro et trois degrés à droite, le compensateur de profondeur se trouvait à environ 11 degrés en cabré et les compensateurs de roulis se trouvaient au neutre. Le train d'atterrissage et les phares d'atterrissage montés sur les ailes étaient escamotés. Les volets étaient rentrés.

    La manette des gaz de gauche se trouvait sur gaz réduits; la manette de droite et les leviers de commande des hélices et de richesse se trouvaient presque complètement vers l'avant. Les deux interrupteurs des magnétos de gauche se trouvaient sur OFF, tandis que ceux des magnétos de droite se trouvaient sur ON. L'examen des instruments de bord et des commandes d'éclairage n'a fourni aucune indication sur leur situation avant l'écrasement en raison des dommages causés par l'incendie.

    Les aiguilles des indicateurs de quantité de carburant étaient figées à une lecture de 235 livres par réservoir. Le sélecteur de carburant de droite se trouvait sur la position réservoir principal. Il n'a pas été possible de déterminer la position du sélecteur de carburant de gauche puisqu'il avait été forcé au-delà de la butée.

    La radiobalise de détresse (ELT) était armée, mais elle a été détruite dans l'incendie. Aucun signal de la radiobalise n'a été capté.

    1.4.2 Démontage des moteurs

    Au cours de l'impact initial avec le sol, les deux moteurs ont été arrachés de leurs attaches et le fuselage a continué sa course. Les moteurs présentaient donc de graves dommages attribués aux surcharges dues aux forces d'impact. Les moteurs ont été retirés des lieux de l'accident et transportés à l'atelier du bureau du BST de la région du Centre pour un examen plus approfondi. Le démontage complet des deux moteurs n'a révélé aucune anomalie mécanique préexistante qui aurait pu provoquer une perte de puissance.

    Des aiguilles de pin étaient accrochées au régulateur d'hélice du moteur droit, lequel est situé dans le secteur avant inférieur gauche du moteur. Le levier du régulateur d'hélice était aussi endommagé, et le régulateur était séparé de son socle de fixation.

    Le carter d'huile du moteur gauche était écrasé dans le voisinage du pignon de l'arbre à cames et présentait des marques d'éraflures causées par le contact et la rotation de cet arbre. Il a été déterminé que l'écrasement et les éraflures du carter d'huile s'étaient produits une fois que le moteur avait été arraché de sa nacelle. Ce dommage est révélateur d'une rotation élevée à l'impact.

    1.4.3 Examen des hélices

    Les hélices ont été retirées des lieux de l'accident et transportées à la Division des accessoires McCauley, à Vandalia, dans l'Ohio, pour être démontées et examinées. Les dommages aux pales et au moyeu des hélices indiquent que les deux hélices tournaient au moment de l'impact.

    L'angle des pales de l'hélice gauche s'était figé entre 16,6 et 20,2 degrés (plage de régulation normale). En outre, deux des trois pales d'hélice étaient pliées et tordues, ce qui constitue un indice de production de puissance.

    L'angle des pales de l'hélice droite étaient compris entre 43 et 48 degrés, ce qui correspond au mode de transition, l'hélice s'approchant ou s'écartant de la position de mise en drapeau. De légères marques laissées par les masselottes sur le moyeu d'hélice correspondent à un angle de pale de la plage d'utilisation normale (près du petit pas).

    1.5 Systèmes de l'avion

    1.5.1 Généralités

    Le Cessna 310R est certifié en vertu de la partie 3 des Civil Airworthiness Regulations.(CAR) et de la partie 23 des Federal Aviation Regulations.(FAR). L'avion est propulsé par deux moteurs Continental (IO-520-MB), chacun d'eux pouvant produire 285 HP. Les moteurs sont accouplés à deux hélices tripales McCauley pouvant être mises en drapeau. La butée de petit pas de ce type d'hélice est calée à 13,9 degrés, et la butée de mise en drapeau, à 81,7 degrés. L'avion était équipé pour le vol aux instruments et le vol à vue de nuit.

    1.5.2 Livrets techniques de l'avion

    Un examen des livrets techniques de l'avion a révélé que celui-ci était entretenu selon un cycle d'entretien progressif de 200 heures comportant des inspections toutes les 50 heures.

    Six jours avant l'accident, des ratés sporadiques avaient été signalés sur le moteur droit. Les deux moteurs avaient alors fait l'objet d'une vérification de compression, d'alimentation de carburant et d'allumage, et les ratés signalés n'avaient pu être reproduits. L'avion avait été remis en service sans que d'autres difficultés ne soient signalées.

    Le jour de l'accident, alors que la cellule totalisait 3 796 heures, l'avion a subi une inspection des 50 heures. Les services d'entretien ont également inspecté les moyeux d'hélice à la recherche de criques, conformément au bulletin pour multimoteurs Cessna (MEB-3), vérifié le filtre à air à dépression et examiné le filtre à air d'admission de droite. L'avion a été remis en service à la suite de ces inspections. Les carnets techniques de l'avion ne renferment aucune anomalie non corrigée.

    Au moment de l'écrasement, la cellule totalisait environ 3 798 heures.

    1.6 Renseignements opérationnels

    1.6.1 Régulation des vols

    La surveillance du vol d'affrètement s'effectuait à l'aide d'un avis de vol, en accord avec les exigences du manuel d'exploitation approuvé de l'entreprise. L'avion avait quitté Prince Albert à 16 h 40 HNC, avait pris un passager de plus à bord à La Ronge et s'était rendu directement à Sandy Bay. Les passagers devaient assister à une réunion de planification de la collectivité. Le vol de retour à partir de Sandy Bay était prévu pour 20 h 30 HNC, mais il avait été retardé d'environ une heure pour satisfaire aux demandes des passagers.

    1.6.2 Masse et centrage

    La masse et le centrage de l'avion se trouvaient dans les limites prescrites. La masse estimée au décollage de Sandy Bay était de 5 300 livres. La répartition de la charge aurait situé le centrage près de la limite avant. Un devis de masse avait été rempli à l'avance conformément aux procédures de l'entreprise.

    Le calage normal du compensateur pour le décollage d'un avion ayant un centrage avant serait d'environ 11 degrés en cabré.

    1.6.3 Exigences opérationnelles du vol

    Sandy Bay se trouve dans un espace aérien non contrôlé. Les vols traversant un espace aérien non contrôlé peuvent être faits selon les règles de vol à vue (VFR) ou selon les règles de vol aux instruments (IFR). Le vol à vue, la nuit ou à d'autres moments, est régi par le Règlement de l'Air, qui stipule que «lorsqu'il vole conformément aux règles de vol à vue, un aéronef devra être piloté par référence visuelle par rapport au sol ou à l'eau». Le manuel d'exploitation de l'entreprise renforce cette consigne et impose une limitation supplémentaire aux vols VFR de nuit en indiquant que ces vols doivent «être effectués par référence par rapport à des objets au sol seulement s'il y a des lumières au sol ou si la nuit est suffisamment claire.»

    Les minima météorologiques VFR stipulés dans les Ordonnances sur la navigation aérienne exigeraient un plafond de 1 500 pieds au-dessus du sol et une visibilité en vol de un mille marin pour qu'un aéronef en vol VFR atteigne l'altitude minimale du circuit après le décollage.

    1.7 Conditions environnementales

    1.7.1 Conditions météorologiques

    Le Service de l'environnement atmosphérique (SEA) ne fait pas d'observation météorologique à Sandy Bay. Toutefois, le SEA (FACN5 CWWG 122330Z) prévoyait pour la région de Sandy Bay un plafond de nuages fragmentés entre 3 000 et 4 000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Le sommet de la couche était prévu à 8 000 pieds; le SEA prévoyait également une autre couche de nuages épars en altitude (au-dessus de 20 000 pieds). La prévision de visibilité dans la région était de plus de six milles. On prévoyait quelques plafonds de stratus dans la région et, à l'occasion, une visibilité aussi faible que deux à quatre milles dans la bruine verglaçante et le brouillard. Selon le personnel de la GRC et d'autres témoins, les plafonds locaux se situaient à environ 3 500 pieds au-dessus du sol. La température signalée était d'environ moins deux °C. Le vent était très léger.

    Le pilote avait reçu à 14 h 10 HNC un exposé météorologique complet de la station d'information de vol (FSS) de Prince Albert, puis un autre à 21 h 10 HNC, juste avant de quitter Sandy Bay.

    1.7.2 Conditions de luminosité ambiante

    L'aérodrome de Sandy Bay dessert une communauté plutôt isolée du Nord. Le soleil se couche tôt durant l'automne et l'hiver, et la lumière ambiante produite par le ciel la nuit est souvent négligeable. Il n'y a que très peu de lumières au sol au nord-est de l'aérodrome, et les témoins s'accordent à dire qu'au moment de l'accident, il n'y avait que peu ou pas de lumière provenant du village ou du ciel nocturne.

    1.8 Renseignements sur l'aérodrome

    Sandy Bay est un aérodrome enregistré qui appartient au ministère des Transports et des Routes de la Saskatchewan, qui en assure aussi l'exploitation. L'altitude de l'aérodrome, qui figure dans le Supplément de vol - Canada.(CFS), est d'environ 1 000 pieds-mer.

    La piste en gravier traité de 3 000 pieds sur 75 pieds de l'aérodrome est orientée au cap de 050 degrés magnétique. La piste est équipée de feux de seuil et d'extrémité de piste, et de feux de bord de piste basse intensité. Ces feux sont contrôlés par un système de balisage lumineux d'aérodrome télécommandé (ARCAL - Type J) sur la fréquence radio 122,8 MHz. Le pilote active le système ARCAL en appuyant sur le bouton du microphone de l'émetteur de l'avion à cinq reprises dans un délai de cinq secondes. Les feux restent alors allumés pendant une quinzaine de minutes. L'allumage des feux peut être commandé à nouveau n'importe quand; il suffit de répéter la séquence. Un phare rotatif d'aéroport, situé près de l'aérogare, ne fonctionnait plus depuis un certain temps.

    L'examen du terrain après l'accident a révélé que des collines peu élevées sont situées dans le prolongement de la piste 05. Ces collines sont couvertes d'un mélange d'arbres à feuilles caduques et de conifères qui s'élèvent à une hauteur moyenne de 30 à 40 pieds au-dessus du sol. Le point d'impact initial avec les arbres se situe à environ 40 pieds au-dessus de l'altitude de la piste. Les cimes sont à une hauteur considérablement moindre que celle qui s'appliquerait à la surface de limitation d'obstacle pour la zone de décollage d'un aéroport certifié.

    1.9 Télécommunications

    L'aérodrome de Sandy Bay possède une fréquence de trafic d'aérodrome (ATF) de 122,8 MHz. Cette fréquence sert aussi à l'exploitant local, Jackson Air Service, qui fournit des services consultatifs privés dans la région de Sandy Bay. Jackson Air Service syntonisait l'ATF le soir de l'accident et a signalé avoir entendu un court message radio sur bande latérale vers 21 h 30 HNC. Les services de la circulation aérienne de Transports Canada ont effectué une recherche après l'accident mais n'ont pu relever aucun autre rapport de communication radio.

    1.10 Procédures de départ et de décollage à l'aérodrome

    La Publication d'information aéronautique.(A.I.P. Canada) de Transports Canada mentionne que «les aéronefs qui quittent un aéroport non contrôlé devraient monter directement au cap de piste jusqu'à l'altitude du circuit d'aérodrome avant d'effectuer un virage dans une direction quelconque pour prendre leur cap en route.» L'altitude de circuit normale pour un aérodrome est d'environ 1 000 pieds-sol.

    1.11 Profils de montée de l'avion

    1.11.1 Profils de montées initiale et en route du Cessna 310R

    Le manuel de vol du Cessna 310R indique qu'après le décollage, il est important de maintenir intentionnellement la vitesse minimale avec un moteur en panne (vitesse indiquée de 92 noeuds) jusqu'à 50 pieds. Le manuel recommande ensuite de laisser l'avion accélérer à la vitesse du meilleur taux de montée (vitesse indiquée de 107 noeuds) et de monter rapidement à une altitude à laquelle l'avion serait capable de faire un circuit sur un moteur.

    Une fois que l'avion a atteint une altitude de sécurité après le décollage, le pilote peut passer à un des plusieurs profils de montée recommandés. Le profil de montée choisi va dépendre des conditions opérationnelles et météorologiques à l'aérodrome de départ. Le manuel de vol du Cessna 310R indique qu'une montée au régime de croisière normal est recommandée dans la mesure du possible et doit être menée à une vitesse indiquée comprise entre 115 et 130 noeuds, avec environ 75 % de la puissance (régime de 2 500 tours et pression d'admission de 24,5 pouces). Le manuel de vol de l'avion mentionne que le taux de montée pour une configuration de montée en croisière est d'environ 900 pieds par minute (pi/min).

    1.11.2 Procédures de l'entreprise

    Le pilote avait l'habitude de prendre une faible pente de montée immédiatement après le décollage et d'accélérer à la vitesse de montée en croisière avant d'entamer sa montée. Le personnel opérationnel et de formation de la compagnie s'était inquiété des aspects dangereux de cette technique.

    Plusieurs semaines avant l'accident, en réponse à ces préoccupations, le pilote instructeur de la compagnie avait diffusé une procédure de montée recommandée à utiliser pour les départs de nuit à partir d'aérodromes isolés. Cette procédure préconisait une «montée à pleine puissance» à la vitesse de la ligne bleue (vitesse indiquée de 107 noeuds) jusqu'à 500 pieds-sol avant d'amorcer tout virage sur le cap en route. La note de service insistait sur le fait que les pilotes de l'entreprise devaient s'assurer que les vitesses au départ ne dépasseraient pas une vitesse indiquée de 107 noeuds tant que l'avion ne se serait pas suffisamment écarté du sol. Le pilote en cause dans l'accident (agissant comme directeur des opérations de l'entreprise) avait par la suite remis en question auprès du chef pilote la validité de la procédure de départ recommandée et avait fourni des arguments en faveur de l'utilisation d'un profil de montée en régime de croisière plutôt que d'une montée à pleine puissance afin de réduire au minimum l'inconfort des passagers pendant le départ.

    1.12 Performances de l'avion

    1.12.1 Performances en montée de l'avion

    Le manuel de vol de l'avion indique que le taux de montée de l'avion, fondé sur une montée à PLEINE PUISSANCE à une vitesse indiquée de 107 noeuds, et dans les mêmes conditions de masse et d'environnement que celles de l'accident, serait de 1 800 pi/min. L'angle de montée de l'avion dans ces conditions serait, selon les estimations, d'environ 10 degrés en cabré.

    Le manuel de vol de l'avion donne le taux de montée de l'avion en configuration de montée au régime de croisière comme étant environ 970 pi/min. Compte tenu d'une vitesse indiquée comprise entre 115 et 130 noeuds, l'angle de montée calculé pour une montée en régime de croisière serait d'environ cinq degrés en cabré.

    1.12.2 Performances d'accélération de l'avion

    À partir du manuel de vol de l'avion, il fut possible d'établir que la course au décollage pour un décollage normal volets rentrés serait de 1 700 pieds et que la distance totale nécessaire au franchissement d'un obstacle de 50 pieds serait d'environ 2 080 pieds. Un décollage de "performances maximales", volets sortis à 15 degrés, nécessiterait une course au décollage d'environ 1 300 pieds. La distance nécessaire au franchissement d'un obstacle de 50 pieds pour cette configuration de décollage serait d'environ 1 700 pieds.

    Le manuel de vol de l'avion ne renferme pas de renseignements détaillés sur le temps ou la distance qui serait nécessaire pour que l'avion accélère du début de sa course au décollage jusqu'à la plage des vitesses indiquées de montée en régime de croisière, comprises entre 115 et 130 noeuds. Pour cette raison, d'autres renseignements sur l'accélération du Cessna 310R ont été obtenus par l'observation et la prise en note des affichages des instruments d'un avion similaire au cours d'un certain nombre de décollages et de montées. Les données de ces observations, ainsi que celles du manuel de vol de l'avion, ont permis de faire une projection de l'accélération de l'avion accidenté.

    À l'aide de ces calculs, il a été estimé que le temps pris par l'avion accidenté pour accélérer du début de sa course au décollage jusqu'à sa vitesse de montée en régime de croisière aurait été d'environ 40 secondes. Selon les calculs, la distance parcourue par l'avion à partir du début de sa course au décollage à Sandy Bay jusqu'au point où la vitesse de montée en régime de croisière est atteinte aurait été d'environ 6 400 pieds. Ces calculs tenaient compte des différences connues dans la température extérieure, la direction et la vitesse du vent et des conditions de la surface de la piste.

    1.13 Règlements et normes

    1.13.1 Manuel d'exploitation de l'entreprise

    Transports Canada réglemente l'industrie de l'aviation et supervise et contrôle les normes de délivrance des licences et les normes d'exploitation. Le manuel d'exploitation d'Athabaska Airways Ltd. est un document de base qui régit la façon dont les opérations aériennes doivent être menées au sein de l'entreprise. Le contenu du manuel d'exploitation et tout modificatif à ce dernier doivent être approuvés par Transports Canada avant de devenir la politique officielle de l'entreprise.

    Le manuel d'exploitation détaille la structure organisationnelle officielle de la compagnie. Au sein de cette structure, le chef pilote se voit confier la responsabilité et l'autorité pour l'administration de toutes les questions ayant trait aux pilotes, au programme de formation des pilotes, aux examens, aux épreuves de compétence et à l'établissement de limites d'exploitation pour les aéronefs et les équipages. Plus précisément, le chef pilote est chargé de s'assurer de la capacité des pilotes de satisfaire aux exigences de Transports Canada et a l'autorité finale pour toute question relative aux normes de pilotage. Le chef pilote relève directement du directeur des opérations.

    1.13.2 Programme de formation de l'entreprise

    Transports Canada exige de chaque transporteur aérien qu'il établisse et maintienne un programme de formation conforme aux exigences des Ordonnances sur la navigation aérienne. Au début de 1990, les autorités de Transports Canada ont relevé un certain nombre de lacunes dans le programme de formation d'Athabaska Airways Ltd. Comme mesure faisant partie d'un plan d'action pour corriger les lacunes relevées, l'entreprise a embauché un pilote instructeur, puis a établi de nouvelles procédures pour assurer un contrôle opérationnel de son personnel. À la suite de cette mesure corrective, aucune autre lacune n'a été relevée lors des vérifications de Transports Canada.

    1.14 Qualifications et expérience du pilote

    Le pilote était âgé de 49 ans. Il était titulaire d'une licence et il était qualifié sur Cessna 310, conformément aux exigences de la Loi sur l'aéronautique.et du certificat d'exploitation de l'entreprise. Il était titulaire d'une licence de pilote professionnel valide et d'une qualification aux instruments de Groupe I; sa licence était annotée d'une restriction médicale précisant qu'il devait porter des lunettes pour piloter. Le pilote occupait aussi le poste de directeur des opérations de l'entreprise.

    La plus grande partie de l'expérience du pilote avait été acquise sur monomoteur. Il était considéré comme un pilote très qualifié et très compétent sur le Cessna 185 et sur le Beaver DHC-2 de de Havilland. Ses rapports de vérification en vol et son dossier de formation attestent de ses compétences en matière de pilotage de monomoteurs en vol VFR.

    Au début de 1990, il a entrepris une formation de conversion sur le bimoteur Cessna 310. Cette conversion exigeait du pilote qu'il obtienne une qualification multimoteur, une annotation aux instruments pour sa licence de pilote professionnel et qu'il subisse une vérification de compétence pilote (PPC) sur le Cessna 310. La transition du pilote sur Cessna 310 s'est déroulée au moment où le programme de formation de l'entreprise faisait l'objet d'un examen de Transports Canada.

    En janvier 1993, le pilote a échoué à une épreuve périodique en vol aux instruments et il a reçu de l'entraînement supplémentaire avec le personnel de formation de l'entreprise. Au cours de cette période, le personnel de formation a noté que le pilote était nerveux quand il pilotait en conditions de vol aux instruments. Cette nervosité se manifestait par le fait qu'il bougeait constamment le corps, qu'il remuait diverses cartes et les cartes d'approche, et qu'il enlevait et remettait constamment ses lunettes. Le personnel de formation avait évalué que la qualité du pilotage du pilote était inférieure à la norme exigée pour obtenir et maintenir une qualification aux instruments, et le chef pilote avait recommandé de cesser toute formation sur Cessna 310 jusqu'à ce que le pilote ait acquis plus d'expérience et d'assurance en milieu IFR. Le chef pilote avait recommandé que cette expérience soit obtenue à titre de premier officier sur les vols réguliers de la compagnie sur Cessna 404. Le président de la compagnie décida d'autoriser de l'entraînement supplémentaire, mais sur le Cessna 310. Cependant, en vue d'éviter tout conflit d'intérêt entre le pilote à l'entraînement (en l'occurrence, le directeur des opérations) et le chef pilote ou son personnel, le président avait exigé que l'entraînement ait lieu à Prince Albert, sous la gouverne et le contrôle du directeur général.

    Les registres d'entraînement tenus par l'entreprise indiquent que la compétence du pilote s'est améliorée au cours d'une période de formation de

    6,4 heures dispensée par le directeur général. Toutefois, en mars 1993, le pilote a tenté l'épreuve en vol aux instruments et la PPC administrées par un inspecteur de Transports Canada, mais il a encore échoué. Après avoir reçu 2,8 heures de formation en vol supplémentaires, le pilote a réussi de façon satisfaisante une épreuve en vol aux instruments de Transports Canada et une PPC sur Cessna 310. Aucune restriction spéciale, que ce soit de la part de Transports Canada ou de la direction de l'entreprise, n'a été apportée à la licence du pilote ni à l'utilisation de ce dernier dans les opérations.

    Seulement un des vols d'entraînement avait été effectué de nuit.

    1.15 Renseignements médicaux

    1.15.1 Généralités

    Tous les titulaires d'une licence de pilote canadienne doivent subir un examen médical périodique pour établir s'ils sont aptes à exercer les privilèges de leur licence. La fréquence des examens médicaux dépend de l'âge du titulaire et du type de licence. Pour certains examens, des tests supplémentaires peuvent être exigés. L'agent régional de médecine aéronautique (ARMA) de Santé Canada agit pour le compte de Transports Canada. Il est chargé de s'assurer que chaque candidat est médicalement apte à détenir une licence aéronautique; la responsabilité de l'émission d'un certificat médical relève de l'ARMA.

    Les données recueillies au fil des ans révèlent qu'un certain pourcentage de candidats se situe à la limite de la norme médicale. Dans ces cas, les renseignements médicaux des candidats sont revus par le Bureau de révision médicale en aéronautique (BRMA). Ce Bureau comprend un groupe de spécialistes en neurologie, cardiologie, psychiatrie, ophtalmologie, médecine interne, oto-rhino-laryngologie et médecine aéronautique. L'objet implicite de l'évaluation médicale consiste à permettre aux titulaires de licence de conserver leurs privilèges de pilotage chaque fois que c'est compatible avec les exigences de la sécurité aérienne. Dans certains cas, certaines exigences médicales peuvent être assouplies pour qu'un pilote puisse conserver sa licence. La décision de faire preuve de tolérance repose sur une évaluation tout d'abord médicale, mais parfois également sur une évaluation pratique de la capacité du pilote de compenser l'écart par rapport aux exigences. Le chapitre 2 du volume 3 du Manuel de licences du personnel .e Transports Canada spécifie qu'une licence délivrée à une personne "à qui les normes médicales peuvent être appliquées avec une certaine souplesse [...] est généralement annotée de certaines restrictions."

    1.15.2Vision du pilote

    Des verres correcteurs avaient été prescrits au pilote, et il devait porter un certain type de lunettes à double foyer lorsqu'il pilotait. Les verres correcteurs qui lui avaient été prescrits servaient à corriger un astigmatisme qui s'était développé après une greffe de la cornée en 1967. Une correction additionnelle était nécessaire pour compenser une presbytie, c'est-à-dire une réduction de la capacité de l'oeil à faire l'accommodation sur des objets rapprochés.

    Le dossier médical du pilote avait été étudié par le BRMA et, à la suite d'une épreuve en vol effectuée dans des conditions de vol à vue et de jour, le pilote avait obtenu une licence de pilote professionnel avec tolérance médicale sur le plan de la vue. Par la suite, sa vision avait été vérifiée par des professionnels de la santé deux fois par an. Rien n'indique que le pilote souffrait de problèmes ophtalmologiques pendant la période où il a été suivi, comme en témoigne une revue des rapports médicaux.

    Un problème courant avec les lunettes à double foyer réside dans la possibilité que l'utilisateur regarde à travers la mauvaise partie du verre lors d'un balayage visuel. Il en résulte alors la perception d'une image floue avec risque de désorientation. En outre, il faut un certain temps à l'oeil pour revenir au foyer et s'ajuster aux différentes lentilles des lunettes à double foyer. Cet ajustement, appelé réflexe d'accommodation, est une fonction physiologique involontaire de l'oeil qui permet de mettre un objet au foyer sur la rétine. Lorsqu'elles s'ajustent pour la vision rapprochée, les pupilles se contractent, les cristallins deviennent plus convexes, et les yeux convergent; lorsque les yeux s'ajustent pour voir au loin, c'est l'inverse qui se produit. Le réflexe d'accommodation de l'oeil ralentit avec l'âge.

    Dans des circonstances idéales, il aurait fallu beaucoup de temps aux yeux du pilote pour s'habituer à la correction de son type d'astigmatisme. Au cours de la période d'accoutumance, il aurait été important que le pilote porte continuellement ses verres. En effet, tout port irrégulier aggraverait et prolongerait la période d'accoutumance.

    Les lunettes du pilote étaient munies d'une cordelette lui permettant de les retirer du nez et de les laisser pendre à son cou.

    1.15.3Examen toxicologique

    À l'autopsie, des traces d'antihistaminiques ont été décelées dans l'urine du pilote, mais non dans son sang. Les antihistaminiques sont couramment utilisés comme décongestionnants, mais sont aussi connus pour leurs effets secondaires sédatifs.

    L'A.I.P. indique à la section AIR 3.12 que «les remèdes ordinaires, comme les antihistaminiques [...] peuvent gravement affaiblir le jugement et la coordination nécessaires au pilotage.» L'A.I.P. fait en outre remarquer que «l'état pour lequel le pilote prend un médicament peut en lui-même réduire l'efficacité du pilote au point de constituer un danger, même si les symptômes sont camouflés par le médicament.»

    1.15.4Illusion somatogravifique

    L'illusion somatogravifique est une impression de tangage (rotation dans le plan vertical) provoquée par une accélération linéaire. Elle est perçue le plus souvent lors d'une forte accélération comme celle du roulage au décollage et de la montée initiale.

    Le problème a été identifié au cours de la Seconde Guerre mondiale, à la suite de multiples accidents pendant des décollages de nuit par temps clair sans repères visuels externes3. Le cas type serait celui d'un avion établi en montée qui revient percuter le sol une ou deux minutes après le décollage. Selon les descriptions des témoins et les expériences visant à reproduire un profil de vol identique, il n'est pas possible de percevoir l'erreur en tangage. Bien qu'au tout début on ait attribué l'erreur, en partie, au temps de réaction de l'horizon artificiel, il s'est avéré que le problème physiologique était également important.

    Une accélération positive aussi faible que 0,1 g suffit à produire une forte sensation de montée4. En conditions de...

    3 J.R.R. STOTT. "Spatial Disorientation in Flight" dans International Journal of Aviation Safety, .écembre 1984

    4 David O'HARE et Stanley ROSCOE. Flightdeck Performance: The Human Factor.(1ère éd., Ames: Iowa State University Press, 1990) 48-49.

    ...vol à vue, les pilotes sont rarement victimes de cette illusion puisqu'elle est contrée par la perception de repères visuels extérieurs. Cependant, les effets de l'illusion sont beaucoup plus marqués la nuit, quand des conditions de visibilité réduite ou des perceptions visuelles trompeuses attirent l'attention du pilote ailleurs que sur les instruments de vol. Si le pilote ne réalise pas qu'il est victime d'une illusion, il peut réagir d'une façon inappropriée en poussant sur le manche. Il n'a pas été possible de déterminer l'incidence de l'illusion somatogravifique sur le déroulement de l'accident.

    2.0 Analyse

    2.1 Préparation du vol et décollage

    On a vu le pilote et les trois passagers monter à bord de l'avion dès leur arrivée à l'aérogare. Les moteurs ont été immédiatement mis en marche, et quelques minutes se sont écoulées avant que l'avion commence à rouler. Ce délai est normal et peut se justifier par la nécessité d'effectuer les vérifications prévol dans le poste de pilotage et de laisser se réchauffer l'huile moteur à sa température normale de fonctionnement pour le décollage.

    Les feux de position de l'avion et les feux de piste se sont allumés lorsque l'avion a commencé à circuler au sol. Comme les feux de piste ARCAL sont actionnés par radio, on peut conclure que le circuit de génération d'électricité et l'émetteur radio de l'avion fonctionnaient avant le décollage.

    D'après les observations, l'avion a pris l'air après une course au décollage de 2 000 pieds environ (soit les deux tiers de la longueur de la piste). L'analyse des tableaux de distance de décollage dans le manuel de vol de l'avion indique que, selon les conditions du moment, la course au décollage aurait été de 1 700 pieds environ. Cette distance théorique de décollage correspond aux comptes rendus des témoins et mène à conclure que le décollage a probablement été conforme aux abaques de performances de l'avion.

    2.2 Faible pente de montée

    2.2.1 Montée initiale

    Les témoins ont observé l'avion amorcer une montée à faible pente immédiatement après le décollage. Bien qu'ils ne soient pas experts en matière d'aviation, les témoins étaient absolument sûrs que la pente de montée avait été plus faible que pour les autres départs qu'ils avaient pu observer auparavant. Les observations concordent sur la faible pente de montée au départ et le maintien du vol à basse altitude jusqu'à ce que l'avion entre en collision avec les arbres. L'avion n'a pas semblé monter normalement, puis il est descendu. Deux explications possibles de cet écart par rapport au profil de départ recommandé la nuit sont présentées ci-après.

    2.2.2 Possibilité d'une défectuosité non décelée

    Il est possible que l'avion ait subi une défectuosité ou une anomalie de nature inconnue immédiatement après le décollage et que cette défectuosité ait limité la performance de montée de l'avion ou distrait le pilote au cours de cette phase critique du vol. Ni la description du profil de vol par les témoins, ni les données de l'analyse de l'épave ne permettent d'étayer cette hypothèse.

    Si le pilote avait utilisé la procédure recommandée par l'entreprise pour les départs de nuit à partir d'aérodromes isolés, il aurait amorcé sa montée jusqu'à atteindreune hauteur de 500 pieds-sol. La pente de montée à pleine puissance à une vitesse indiquée de 107 noeuds est d'environ 10 degrés, ce qui est plus du double de celle en régime de croisière. Dans ces circonstances, les témoins auraient dû percevoir une pente de départ plus accentuée que la normale; toutefois, la pente de montée observée était plus faible que la normale.

    Si une défectuosité mécanique s'était produite, l'enquête en aurait relevé des preuves lors de l'examen de l'épave. L'examen des deux moteurs n'a montré aucune anomalie préexistante ayant pu provoquer une perte de puissance. Le carter d'huile du moteur gauche portait des éraflures résultant du contact avec les dents du pignon de l'arbre à cames. Ces éraflures se sont produites après que le moteur s'est dégagé de la nacelle et indiquent que le moteur tournait à vitesse élevée. Deux des trois pales de l'hélice gauche présentaient une déformation et une torsion correspondant normalement à une puissance moteur élevée; des marques d'impact sur le moyeu indiquaient que l'hélice se trouvait dans sa plage de calage normale. Ces constatations montrent que le moteur gauche produisait de la puissance au moment de l'impact. Le niveau précis de puissance n'a pu être déterminé, mais il se serait probablement situé dans la plage des puissances élevées. Il a été conclu, du fait de l'absence de preuves contraires, que la position OFF.des interrupteurs des magnétos de gauche et la position gaz réduits de la manette des gaz du moteur gauche avaient été le résultat des forces d'impact. Il est normal que des interrupteurs ou des commandes d'aéronef changent de position au cours d'un écrasement.

    L'hélice de droite se trouvait au milieu de la plage de mise en drapeau à l'impact; toutefois, des marques légères de masselottes, correspondant à un angle de pale inférieur, ont été retrouvées sur le moyeu d'hélice. Les premiers contacts de l'hélice droite avec les arbres étaient très nets, indiquant un faible angle de calage et une vitesse de rotation élevée. Les marques laissées par les masselottes auraient été causées par ces premiers contacts avec les arbres. Cette constatation d'un angle de calage faible et d'une vitesse de rotation élevée indique que le moteur droit produisait probablement de la puissance lors du contact initial avec les arbres. Toutefois, le niveau de puissance développée n'est pas connu.

    Le fait que des aiguilles de pin étaient accrochées au régulateur d'hélice du moteur droit laisse croire que ce régulateur a probablement été endommagé lors du contact avec les arbres. Le régulateur d'hélice hors d'usage, les pales de l'hélice auraient pu commencer à se mettre en drapeau automatiquement. Toutefois, cette mise en drapeau n'aurait pas été complétée avant l'impact avec le sol. L'hélice se serait de ce fait figée au milieu de la plage de mise en drapeau.

    À la suite de l'accident, la continuité de toutes les commandes de l'avion a été vérifiée, et aucune anomalie n'a été décelée. L'enquête a établi que le calage des compensateurs de la gouverne de profondeur, de la gouverne de direction et des ailerons se situait dans la plage normale de décollage pour la masse de l'avion. En résumé, l'examen de l'épave n'a permis de déceler aucun signe de défaillance mécanique avant l'impact au niveau des moteurs, des hélices ou des commandes de vol.

    Le profil de vol de l'avion ne s'accorde pas avec l'hypothèse qu'une défaillance de nature inconnue se soit produite. Les constatations révèlent que l'avion se trouvait dans une assiette de vol maîtrisée (inclinaison nulle, léger angle de montée, compensateurs réglés normalement) au moment du contact initial avec les arbres. En outre, il n'y avait qu'un léger écart latéral par rapport à la trajectoire de vol de l'avion à partir du prolongement de l'axe de piste.

    Tous les facteurs ci-dessus permettent d'étayer la conclusion que les moteurs produisaient de la puissance et que le pilote avait la maîtrise de l'avion au moment de l'écrasement; cette conclusion tend à écarter l'hypothèse que le pilote réagissait à une urgence inhabituelle au niveau des commandes ou de la propulsion. D'après les preuves disponibles, aucune anomalie présente avant l'impact n'aurait réduit les performances de montée initiale.

    2.2.3 Possibilité du choix d'une pente faible par le pilote

    Au cours de sa formation, le pilote, selon les observateurs, s'écartait du profil de départ recommandé la nuit et gardait l'avion en faible pente de montée immédiatement après le décollage. Le pilote laissait l'avion accélérer à sa vitesse de montée en régime de croisière (vitesse indiquée comprise entre 115 et 130 noeuds) avant d'entamer une montée à l'altitude en route. Les preuves recueillies concordent avec l'écart par le pilote du profil de départ recommandé la nuit et son maintien d'une faible pente de montée au cours du vol qui a mené à l'accident.

    Des renseignements obtenus à la suite d'un vol d'essai de Cessna 310R après l'accident indiquent que, dans des conditions de vol semblables à celles du vol en question, un Cessna 310R couvre une distance horizontale d'environ 6 400 pieds, du début de sa course au décollage jusqu'au point où il accélère à une vitesse indiquée de 130 noeuds (vitesse de montée maximale en régime de croisière). Les arbres heurtés à Sandy Bay se trouvaient à 5 400 pieds au-delà du point de décollage initial et s'élevaient à

    40 pieds au-dessus de l'altitude de la piste. Si le pilote avait adopté un profil de montée semblable à celui qu'on lui avait vu adopter par le passé, l'avion aurait pu heurter les arbres avant qu'il ait accéléré à la vitesse de montée en régime de croisière, soit entre 115 et 130 noeuds.

    2.3 Conditions de luminosité ambiante

    2.3.1 Luminosité au sol et dans le ciel

    Un départ de nuit à partir d'un aérodrome isolé du Nord peut s'avérer exigeant. Même dans des conditions météorologiques de vol à vue, ce type de départ oblige le pilote à se fier en grande partie à sa vision et à ses compétences fondamentales de pilotage aux instruments. La transition entre les références visuelles extérieures qui sont utilisées au cours de la course au décollage et les références aux instruments utilisées au cours de la montée initiale exige une attention soutenue.

    La nuit, une réduction de la visibilité des références extérieures causée par une luminosité insuffisante au sol et dans le ciel, jumelée au besoin de maintenir l'éclairage adéquat du tableau de bord, rend plus difficile la procédure de départ. Ce manque de visibilité des références extérieures peut compromettre la capacité du pilote de maintenir les références visuelles nécessaires avec le sol lors de la montée initiale, ou de voir et d'éviter les obstacles.

    2.3.2 Éclairage de la trajectoire de vol par les phares

    L'éclairage vers l'avant de la trajectoire de vol aurait été assuré par le phare d'atterrissage monté sur le train avant et par les deux phares d'atterrissage montés sur les ailes. Comme le train d'atterrissage a été retrouvé en position rentrée, le phare monté sur le train avant n'aurait fourni aucun éclairage au moment de l'impact. On n'a pu déterminer si les phares d'atterrissage montés sur les ailes étaient allumés au moment du décollage. Toutefois, le fait qu'ils étaient escamotés au moment de l'impact indique qu'ils n'auraient fourni aucun éclairage vers l'avant avant l'impact. L'absence d'éclairage vers l'avant de la trajectoire de vol par les phares d'atterrissage de l'avion pendant ou après le décollage aurait empêché le pilote d'être averti de la présence d'obstacles et de prendre des mesures pour les éviter.

    2.4 Renseignements médicaux

    Le pilote était titulaire d'une licence de pilote professionnel qui autorisait une certaine tolérance pour sa vision. Sa vision était vérifiée par des professionnels de la santé deux fois par an. Des verres correcteurs avaient été prescrits au pilote; il était tenu de porter des lunettes à double foyer pour piloter. Il était important qu'il porte continuellement ses verres correcteurs pour que ses yeux s'adaptent à la forte correction fournie par les lentilles.

    En n'utilisant pas ses lunettes correctement, le pilote n'aurait pas pu bénéficier de la correction apportée par les lentilles, ce qui aurait eu pour effet de modifier sa capacité de faire le balayage visuel des instruments, créer un problème de transition entre le vol à vue et le vol aux instruments et perturber sa capacité de voler aux instruments. Rien n'indique qu'il n'utilisait pas ses lunettes correctement.

    Les fonctions du pilote exigeaient qu'il pilote la nuit et dans des conditions de vol aux instruments, mais l'épreuve en vol que lui avait demandé d'effectuer le BRMA s'était déroulée le jour et dans des conditions de vol à vue. Voler la nuit ou en conditions de vol aux instruments aurait demandé davantage de la vision du pilote, et une épreuve en vol effectuée dans ces conditions aurait été plus difficile à réussir.

    Bien que le certificat médical ait été émis avec tolérance médicale sur le plan de la vue et que le BRMA ait exigé une épreuve en vol et un examen de contrôle deux fois par an, le service des licences de Transports Canada n'imposait aucune restriction, autre que l'obligation de porter les lunettes en vol, en vertu du chapitre 2 du volume 3 du Manuel de licences du personnel.de Transports Canada.

    2.5 Pathologie et toxicologie

    Des concentrations d'antihistaminiques obtenus en vente libre, jugées thérapeutiques par le laboratoire d'examen, ont été retrouvées dans l'urine du pilote. Elles indiquent que ce médicament avait été absorbé suffisamment longtemps avant l'accident pour être métabolisé et éliminé, ce qui, par conséquent, exclut tout effet sédatif. De plus, bien que la somnolence soit un effet secondaire de ce type de médicament, des concentrations thérapeutiques d'antihistaminiques n'ont pas été décelées dans le sang du pilote; ce médicament n'aurait donc pas eu d'effet au moment de l'accident. Par conséquent, il est peu probable que la présence de ces antihistaminiques ait réduit l'aptitude du pilote à exercer ses fonctions.

    2.6 Facteurs humains - Illusions et désorientation

    L'accélération positive du Cessna 310 suffit à produire une forte sensation de cabrage croissant. Par nuit très noire et en présence de repères visuels externes peu nombreux, l'illusion somatogravifique peut induire chez le pilote l'impression que l'avion ne cesse de cabrer. Cette illusion aurait été encore plus prononcée chez un pilote à qui aurait manqué des informations visuelles précises à cause d'un mauvais balayage des instruments, d'une mauvaise vision et d'une mauvaise illumination du paysage.

    2.7 Gestion et réglementation

    Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Néanmoins, un certain nombre de faiblesses en vol aux instruments avaient été cernées et documentées par Transports Canada et le personnel de formation de l'entreprise. La haute direction de l'entreprise était aussi au courant de la faiblesse du pilotage du pilote pour le vol aux instruments. La cause sous-jacente de cette faiblesse n'avait pas été identifiée, ni documentée dans les dossiers de l'entreprise ou de Transports Canada.

    Le contrôle de l'aptitude au pilotage d'un pilote est une responsabilité conjointe, partagée par la ligne aérienne et par Transports Canada. Toutefois, malgré des difficultés persistantes et bien que des faiblesses dans ses aptitudes au pilotage aux instruments aient été décelées asez tôt, aucun mécanisme de contrôle n'avait été mis en place par l'un ou l'autre organisme pour surveiller les tendances du comportement du pilote ou s'assurer que le pilote ne se trouverait pas placé dans une situation qui serait au-delà de ses capacités.

    Transports Canada n'a pas envoyé de renseignements à l'ARMA au sujet des difficultés qu'éprouvait le pilote à piloter aux instruments, et n'était pas tenu de le faire. La détérioration de la qualité du pilotage aurait pu être un signe de vision insuffisante, et le fait de fournir ces renseignements se serait peut-être traduit par une réévaluation de l'aptitude médicale du pilote.

    Le chef pilote avait recommandé que le pilote puisse acquérir plus d'expérience opérationnelle sur multimoteur dans un milieu IFR en volant comme premier officier sur le Cessna 404 de l'entreprise qui effectuait des vols réguliers. Un tel arrangement aurait aussi permis de mieux évaluer la qualité du pilotage du pilote pendant un vol aux instruments.

    Le chef pilote n'a pu effectivement exercer ses responsabilités lorsque le président de l'entreprise a décidé d'accorder de l'entraînement additionnel au pilote sur le Cessna 310, en donnant l'ordre que cet entraînement soit effectué à Prince Albert, sous la supervision et la gouverne du directeur général. Bien que le pilote ait par la suite échoué à l'épreuve en vol aux instruments et à la PPC de Transports Canada et qu'on ait exigé de lui de la formation additionnelle pour qu'il finisse par réussir l'épreuve en vol et la PPC exigées sur Cessna 310, aucune limite particulière concernant les fonctions du pilote n'a par la suite été imposée par la direction de l'entreprise.

    3.0 Faits établis

    1. Les conditions météorologiques au moment du départ de Sandy Bay étaient propices au vol VFR.
    2. Il n'y a que très peu de lumières au sol au nord-est de l'aérodrome de Sandy Bay et, au moment de l'accident, il n'y avait que peu ou pas de lumière provenant du village ou du ciel nocturne.
    3. Un mauvaise luminosité au sol et dans le ciel peut avoir empêché le pilote de conserver une référence visuelle suffisante avec le sol et peut avoir exigé du pilote qu'il fasse appel à ses aptitudes au pilotage aux instruments, surtout pendant la phase de montée initiale du vol.
    4. L'absence d'éclairage vers l'avant par les phares d'atterrissage de l'avion pendant ou après le décollage peut avoir empêché le pilote d'être averti de la présence d'obstacles et de prendre des mesures pour les éviter.
    5. Le terrain recouvert d'arbres au-delà de l'extrémité de départ de la piste 05 présente des obstacles jusqu'à une hauteur d'environ 40 pieds au-dessus du sol; ces obstacles se situent bien au-dessous de la pente de montée normale après le décollage.
    6. Le pilote avait l'habitude d'adopter une pente de montée faible après le décollage et de monter après avoir atteint la vitesse de montée au régime de croisière.
    7. La faible pente de montée s'écartait considérablement des procédures récemment publiées par l'entreprise pour les départs de nuit d'aérodromes isolés.
    8. Un profil de montée au régime de croisière se traduit par environ la moitié du taux de montée et de l'angle de montée de la montée à performance maximale recommandée.
    9. L'avion a suivi une pente de montée très faible après le décollage.
    10. L'avion a heurté des arbres à environ 2 400 pieds au-delà de l'extrémité de la piste, avec une inclinaison nulle et une faible pente de montée.
    11. Le pilote a perdu la maîtrise de l'avion au cours du contact avec les arbres et l'avion est entré en collision avec le sol.
    12. L'accident n'offrait aucune chance de survie en raison de l'importance des forces de décélération et de l'incendie qui s'est déclaré après l'écrasement.
    13. La continuité et l'intégrité des commandes de vol a été vérifiée.
    14. Rien n'indique la présence d'une défaillance mécanique antérieure à l'accident qui aurait pu causer une perte de puissance.
    15. Aucun signe d'anomalie mécanique qui aurait pu compromettre les performances de l'avion n'a été relevé.
    16. Les dommages subis par les hélices correspondaient à une puissance se situant dans la plage de régulation.
    17. La masse et le centrage de l'avion se trouvaient dans les limites prescrites.
    18. La qualité du pilotage aux instruments du pilote sur bimoteur avait été notée comme étant faible au cours de l'entraînement et des épreuves en vol subséquentes.
    19. Le pilote était titulaire d'une licence portant une restriction exigeant qu'il porte des lunettes.
    20. Les fonctions du pilote exigeaient qu'il vole la nuit et dans des conditions de vol aux instruments; toutefois, l'épreuve en vol que lui avait demandé de subir le BRMA s'était déroulée le jour et dans des conditions de vol à vue.
    21. Transports Canada n'avait pas transmis de renseignements à l'AMRA au sujet des difficultés de pilotage qu'éprouvait le pilote à voler aux instruments, et il n'était pas tenu de le faire.
    22. Il est peu probable que la présence dans l'urine du pilote, mais non dans son sang, d'antihistaminiques obtenus en vente libre ait pu perturber les habiletés de pilotage du pilote.
    23. L'illusion somatogravifique peut avoir perturbé le pilote dans l'exercice de ses fonctions pendant le décollage et la montée initiale.
    24. Le président de l'entreprise, à l'encontre de la recommandation du chef pilote, a décidé d'autoriser de l'entraînement additionnel sur le Cessna 310 à Prince Albert, sous la supervision et la gouverne du directeur général.
    25. Le service des licences de Transports Canada n'a appliqué à la licence du pilote aucune restriction à laquelle fait référence le chapitre 2 du volume 3 du Manuel de licences du personnel .e Transports Canada.

    3.1 Causes

    Après le décollage, le pilote a placé l'avion dans une pente de montée très faible qui s'est maintenue jusqu'à l'impact sans perte de contrôle avec des arbres au cours de la montée initiale, avant que l'avion n'atteigne la vitesse de montée en croisière.

    Autres causes concourantes possibles : la mauvaise luminosité au sol et dans le ciel; l'absence d'éclairage par les phares d'atterrissage; l'écart par rapport au profil de départ recommandé la nuit.

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures prises

    4.1.1Accidents CFIT

    Cet accident a été classé dans la catégorie CFIT (impact sans perte de contrôle). Un accident CFIT, de l'anglais controlled flight into terrain, est un accident au cours duquel un avion dont l'équipage n'a pas perdu le contrôle, entre en collision par inadvertance avec le terrain ou l'eau, sans que l'équipage ait conscience de la catastrophe imminente. Le Bureau constate avec inquiétude qu'au cours de la période de 11 ans comprise entre le 1er janvier 1984 et le 31 décembre 1994, 68 aéronefs exploités commercialement (nombre qui ne comprend pas les aéronefs qui effectuaient des vols spéciaux à basse altitude) ont subi des accidents CFIT. Compte tenu de la fréquence et de la gravité des accidents CFIT, le Bureau effectue une étude de ces accidents pour déterminer les lacunes systémiques. L'étude comprend notamment un examen des données relatives aux accidents CFIT survenus en vol VFR de nuit et aux facteurs contributifs comme les illusions somatogravifiques.

    4.2 Mesures à prendre

    4.2.1 Restrictions à la licence de pilote - Épreuves en vol

    L'état visuel du pilote avait été revu par le BRMA. Après une épreuve en vol, le pilote avait obtenu une licence de pilote professionnel conformément aux tolérances médicales sur le plan de la vue. Sa licence indiquait qu'il devait porter des verres à double foyer prescrits lorsqu'il pilotait. L'épreuve en vol avait été effectuée de jour et dans des conditions météorologiques de vol à vue; les fonctions du pilote au moment de l'accident nécessitaient qu'il vole de nuit et dans des conditions météorologiques de vol aux instruments. L'environnement dans lequel s'était déroulée l'épreuve en vol ne correspondait pas aux conditions beaucoup plus difficiles dans lesquelles le pilote devait voler.

    Au printemps de 1990, le BST a fait une autre enquête où la validité d'une épreuve en vol demandée par le BRMA a été également mise en question (rapport du BST A90Q0090). Dans le cas de cet accident, le BST avait déterminé que le pilote, ayant un usage limité de sa jambe droite, avait été incapable de faire sortir de vrille l'ultra-léger qu'il pilotait. L'épreuve en vol avait été effectuée à bord d'un aéronef d'une catégorie autre que celle pour laquelle la licence était annotée, et il semble que les exercices en vol n'avaient pas compris de manoeuvres qui auraient exigé que la jambe droite du pilote soit la plus sollicitée.

    Ni le contenu des épreuves en vol ni le milieu dans lequel elles ont eu lieu n'étaient représentatifs des situations auxquelles ces pilotes pouvaient faire face pendant l'exercice des privilèges de leurs licences respectives, et ces licences en vigueur n'avaient pas non plus été annotées pour indiquer les limites de quelque aspect opérationnel de vol lié à leur catégorie de licence.

    Le Bureau accepte le principe visant à délivrer des licences en faisant preuve de tolérance dans le cas de divers problèmes médicaux. Il reconnaît également qu'il peut être difficile au cours des épreuves en vol du BRMA de toucher tous les aspects des conditions de vol. Toutefois, lorsqu'on examine ces deux accidents, il semble y avoir absence de cohérence entre les aptitudes au pilotage effectivement vérifiées pendant les épreuves en vol et les restrictions des privilèges de la licence. Par conséquent, les pilotes dont la licence a été délivrée en vertu d'une tolérance médicale peuvent piloter des aéronefs ou voler dans des conditions quand leurs aptitudes ne sont pas à la hauteur des exigences de la tâche. Dans le cas en question, les passagers payants accordaient leur confiance à un pilote pour qu'il les transporte en toute sécurité dans des conditions où un problème de vision peut l'avoir empêché de voir adéquatement les repères visuels au sol et d'éviter les obstacles.

    En vue de diminuer les risques que d'autres pilotes titulaires d'une licence délivrée en vertu d'une tolérance médicale pilotent par mégarde un aéronef dans des conditions plus exigeantes que celles dans lesquelles ils ont démontré leurs aptitudes, le Bureau recommande que :

    le ministère des Transports examine toutes les licences de pilote délivrées en vertu de tolérances médicales pour assurer la compatibilité entre les aptitudes vérifiées des pilotes et les privilèges de la licence.
    Recommandation A95-13 du BST

    Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau, qui est composé du Président, John W. Stants, et des membres Gerald E. Bennett, Zita Brunet, l'hon. Wilfred R. DuPont et Hugh MacNeil.

    Annexes

    Annexe A - Sigles et abréviations

    ATF
    fréquence de trafic d'aérodrome
    A.I.P.
    Publication d'information aéronautique
    ARCAL
    système de balisage lumineux d'aérodrome télécommandé
    ARMA
    agent régional de médecine aéronautique
    RMA
    Bureau de révision médicale en aéronautique
    BST
    Bureau de la sécurité des transports du Canada
    CAR
    Civil Airworthiness Regulations
    CFIT
    de l'anglais controlled flight into terrain . impact sans perte de contrôle
    CFS
    Supplément de vol - Canada
    ELT
    radiobalise de détresse
    FAR
    Federal Aviation Regulations
    GRC
    Gendarmerie royale du Canada
    HNC
    heure normale du Centre
    HP
    horse power
    IFR
    règles de vol aux instruments
    MHz
    mégahertz
    pi/min
    pied(s) par minute
    SEA
    Service de l'environnement atmosphérique
    UTC
    temps universel coordonné
    VFR
    règles de vol à vue