Kathy Fox
Présidente, Bureau de la sécurité des transports du Canada
Montréal (Québec)
27 juin 2018
Seul le texte prononcé fait foi.
Diapositive 1 : Page titre
Bonjour,
Merci beaucoup pour l'invitation à m'adresser à vous aujourd'hui. C'est un véritable plaisir, d'autant plus que je suis originaire de Montréal, et que j'ai étudié à l'Université McGill.
On m'a demandé de parler de la fatigue dans le cadre des enquêtes sur les accidents. Mais tout d'abord, comme il se peut que certains d'entre vous ne connaissent pas bien le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST), permettez-moi de vous le présenter brièvement.
Diapositive 2 : À propos du BST
Le BST est un organisme gouvernemental fédéral indépendant dont le mandat est de promouvoir la sécurité dans les quatre modes de transport régis par le gouvernement fédéral : aérien, maritime, ferroviaire et pipelinier. Nous le faisons en menant des enquêtes sur des événements de transport choisis dans le but de comprendre ce qui s'est passé et, surtout, pourquoi cet événement s'est produit, afin que des mesures soient prises pour réduire le risque que des accidents similaires se produisent.
Nous ne sommes pas un organisme de réglementation, nous n'attribuons pas de faute et nous ne déterminons pas les responsabilités civiles ou pénales.
Diapositive 3 : Fatigue dans le cadre des enquêtes
Au BST, nous reconnaissons que la fatigue est un risque dans tout système de transport en exploitation 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. C'est précisément pour cette raison que le risque doit être géré. Par conséquent, dans presque toutes les enquêtes du BST, la fatigue est une possibilité que nous envisageons.
- Premièrement, était-elle présente?
- Et deuxièmement, a-t-elle eu une incidence sur le rendement?
Diapositive 4 : Comment analysons-nous la fatigue?
Le BST peut compter sur plusieurs enquêteurs des facteurs humains pour analyser la fatigue. Ces enquêteurs suivent un processus en trois étapes. Nous avons déjà parlé des deux premiers : déterminer si la fatigue était présente (par exemple, en étudiant l'historique de travail et de repos des personnes concernées au cours des 72 heures précédant l'événement [ou même plus s'il y a lieu]) et voir si la fatigue a effectivement joué un rôle dans l'événement.
La troisième étape consiste à déterminer si les pratiques organisationnelles en place étaient suffisantes pour gérer efficacement les risques de fatigue.
Lorsque nous enquêtons sur la fatigue, nous nous penchons principalement sur les six facteurs de risque suivants :
- Perturbation aiguë du sommeil
Les perturbations aiguës du sommeil correspondent à une réduction de la qualité ou de la quantité de sommeil survenue au cours des 3 jours précédents. - Perturbation chronique du sommeil
En plus des perturbations aiguës du sommeil, les perturbations de la quantité ou de la qualité de sommeil sur une période de plus de 3 jours consécutifs augmentent aussi le risque de fatigue. - État de veille continu
Un troisième facteur de risque de fatigue consiste à être éveillé trop longtemps, facteur désigné couramment sous le nom d'état de veille prolongé ou continu. Être dans un état de veille continu durant 22 heures (ou moins pour ceux qui travaillent de nuit) est généralement considéré comme le point auquel la fatigue entraîne un déclin de presque tous les aspects de la performance humaine. - Effets du rythme circadien
En raison du rythme quotidien, ou circadien, l'être humain est physiologiquement prêt à dormir la nuit et à exercer des activités le jour. Les cycles sommeil-veille qui changent trop rapidement peuvent causer une désynchronisation des rythmes circadiens, ce qui peut entraver la performance. Travailler à un moment de la journée où notre organisme est préparé à dormir peut aussi nuire au rendement. - Troubles du sommeil
Souvent, les troubles du sommeil peuvent causer un niveau de fatigue supérieur à la normale s'ils ne sont pas traités ou gérés adéquatement. L'insomnie, l'apnée obstructive du sommeil et les mouvements involontaires des membres sont les trois principaux troubles du sommeil. - Conditions médicales et psychologiques, maladies et drogues
Certaines maladies et certaines conditions médicales (comme la douleur) et psychologiques (comme la dépression, l'anxiété et le stress intense) peuvent nuire à la qualité et à la durée du sommeil. À l'instar des maladies et des conditions médicales et psychologiques, les drogues (y compris les médicaments, qu'ils soient en vente libre ou sur ordonnance) devraient être prises en compte dans les enquêtes sur la fatigue.
Je souhaite maintenant vous parler de trois enquêtes récentes du BST dans lesquelles la fatigue est ressortie, mais de différentes manières.
Diapositive 5 : Rapport d'enquête maritime M16P0378 du BST
Dans la soirée du 11 octobre 2016, le remorqueur Nathan E. Stewart, immatriculé aux États-Unis, a quitté Ketchikan, en Alaska, à destination de Vancouver, en Colombie-Britannique. Le remorqueur poussait un chaland-citerne vide, le DBL 55; ensemble, les deux navires formaient ce qu'on appelle un remorqueur-chaland articulé.
À 23 h, le 12 octobre, le second officier du Nathan E. Stewart s'est présenté à la timonerie pour prendre le relai du capitaine. Le second officier était déjà fatigué au début de son quart de travail. Il était probablement debout depuis déjà 11 heures, principalement parce que, comme les autres officiers de quart, il avait travaillé depuis deux jours et demi selon un horaire difficile de six heures de quart suivies de six heures de repos.
Comme bon nombre d'entre vous le savent, ce type d'horaire est reconnu pour perturber le cycle veille-sommeil normal et limite les occasions de profiter d'un sommeil réparateur suffisant. Des études et des experts internationaux ont démontré les nombreux inconvénients de cet horaire.
Bref, en commençant son quart, le second officier était seul sur la passerelle. Il s'est mis à l'aise en réglant son fauteuil et l'éclairage, en montant le chauffage et en faisant jouer de la musique douce. Peu après minuit, il a corrigé le cap, puis s'est endormi. Le remorqueur-chaland a maintenu le cap et la même vitesse pendant les 46 minutes suivantes, jusqu'à ce qu'il entre en collision avec un récif et s'échoue à environ 10 milles marins à l'ouest de Bella Bella.
Après avoir subi le battement des vagues pendant plusieurs heures, la coque du remorqueur s'est ébréchée. Le navire a relâché plus de 110 000 litres de diesel avant de finalement couler plus tard le même jour.
L'enquête du BST a révélé que le second officier était habituellement capable d'avoir au moins 4 heures de sommeil de bonne qualité le matin, mais était généralement incapable de trouver le sommeil l'après-midi et en soirée. Autrement dit, il était mort de fatigue au moment de l'événement. Il n'avait pas l'intention de s'endormir. Il n'avait tout simplement pas prévu qu'un éclairage tamisé, une musique douce et un fauteuil confortable entraîneraient un accident.
Diapositive 6 : Recommandations
Par suite de cet accident, le BST a formulé deux recommandations. La première portait sur un cours pratique et une formation en sensibilisation. Par exemple, en permettant aux officiers de quart de mieux comprendre la fatigue, les facteurs qui la causent, et les mesures concrètes qu'ils peuvent appliquer pour l'éliminer ou en réduire les effets, on pourrait constater une réduction considérable du nombre d'événements maritimes liés à la fatigue. C'est pourquoi nous avons recommandé que Transports Canada exige que les officiers de quart dont les périodes de travail et de repos sont régies par le Règlement sur le personnel maritime participent à un cours pratique sur la fatigue et une formation en sensibilisation pour les aider à reconnaître et à atténuer les risques de fatigue.
Notre deuxième recommandation s'adressait aux exploitants de navires, puisque ce sont les principaux responsables de la gestion des risques inhérents à leurs activités. Nous sommes d'avis qu'ils ne doivent pas se contenter d'informer leurs employés. C'est pourquoi nous recommandons que Transports Canada oblige les exploitants de navire commerciaux à mettre en œuvre un programme de gestion de la fatigue complet et adapté à leurs activités.
Diapositive 7 : Rapport d'enquête aéronautique A11F0012 du BST
Le deuxième événement lié à la fatigue que je souhaite présenter s'est produit en 2011, au cours duquel un Boeing 767 d'Air Canada effectuait un vol de Toronto à Zurich. Il y avait 95 passagers et 8 membres d'équipage de conduite à bord. Environ à mi-chemin de la traversée de l'Atlantique, durant les heures d'obscurité, l'avion a été soumis à un tangage intempestif qui a duré 46 secondes. Cet incident a donné lieu à un écart d'altitude de moins 400 pieds à plus 400 pieds par rapport à l'altitude assignée de 35 000 pieds au-dessus du niveau de la mer.
La consigne lumineuse de ceintures de sécurité était allumée depuis environ 40 minutes lorsque cet incident est survenu. Pourtant, 14 passagers et 2 agents de bord ont été blessés. Le vol s'est poursuivi jusqu'à sa destination. À l'arrivée, 7 passagers ont été transportés à l'hôpital avant de recevoir leur congé plus tard.
Diapositive 8 : A11F0012 : que s'est-il réellement passé?
Le copilote se sentait apte au vol lorsqu'il s'est présenté au travail à 19 h 35, heure de l'Est, moment qui concordait sans doute avec un sommet circadien. Toutefois, le sommeil du copilote avait été interrompu dans les 24 heures précédentes, ce qui avait accru la probabilité qu'il se sente fatigué et qu'il doive se reposer durant le vol de nuit en direction est, particulièrement lorsqu'il atteindrait un creux circadien. Le copilote s'est endormi pendant sa période de repos aux commandes, ce qui est un autre signe de son état de fatigue.
Pour lui permettre de récupérer, le commandant de bord l'a laissé se reposer plus longtemps que le maximum de 40 minutes fixé pour éviter un sommeil à ondes lentes.
Mais avec 75 minutes de repos, la probabilité qu'il entre dans un cycle de sommeil à ondes lentes augmentait, de même que les effets de l'inertie du sommeil au réveil, particulièrement si cette période de repos concordait avec un creux circadien alors qu'il était fatigué.
Vers 1 h 55, le copilote s'est réveillé lorsque le commandant de bord a communiqué par radio avec le contrôle de la circulation aérienne. Pour éviter une surprise au copilote, le commandant de bord lui a signalé deux fois la position relative d'un aéronef qui approchait. Cela s'est produit environ 1 minute après le réveil du copilote, qui était sans doute sous l'emprise de l'inertie du sommeil à ce moment-là. Le copilote n'était pas en état d'assimiler l'information des instruments et de l'extérieur de l'aéronef ni de réagir de manière appropriée. Sans doute désorienté et peu alerte en raison de l'inertie du sommeil, le copilote a perçu l'avion qui approchait comme étant sur une trajectoire de collision imminente. Il a donc poussé sur le manche de commande pour éviter la collision. Le copilote s'est rapidement rendu compte de son erreur, car l'aéronef semblait se déplacer vers le bas dans le champ de vision, ce qui n'était pas logique. À ce moment, le commandant de bord avait tiré sur le manche pour ramener l'avion à son altitude précédente.
Diapositive 9 : A11F0012 : faits établis quant aux causes
Diapositive 10 : facteurs à prendre en considération
Nous vivons dans un monde en activité 24 heures sur 24, 7 jours par semaine. Beaucoup d'employés doivent travailler la nuit. Les pilotes ont un défi de plus à relever, car ceux qui effectuent des vols intercontinentaux doivent aussi s'adapter aux différents fuseaux horaires.
Piloter la nuit, soit la période durant laquelle notre corps veut tout naturellement dormir et que le creux circadien biologique survient durant les premières heures du matin, peut entraîner une baisse de rendement : voilà un problème.
Beaucoup d'organisations qui mènent leurs activités par quarts de travail ont adopté des plans structurés de gestion des risques de la fatigue qui comprennent :
- de l'éducation, de la formation et des stratégies de sensibilisation;
- des politiques qui régissent les siestes et le repos aux commandes;
- des pratiques d'établissement d'horaires de travail et, dans le cas des compagnies aériennes, le recours à un pilote de relève.
Dans ce cas qui nous occupe, l'exploitant pensait bien faire en instaurant une politique de sieste aux commandes. Permettre les siestes et le repos aux commandes peut aider à rétablir la vigilance des membres de l'équipage. Toutefois, si les procédures ne sont pas suivies à la lettre, cela peut mener à un autre problème : l'inertie du sommeil. Le rapport du BST indique ce qui suit :
L'inertie du sommeil s'entend de la diminution du rendement après le sommeil qui se produit directement après le réveil. Bien que la durée de l'inertie du sommeil soit habituellement courte, à savoir entre 1 et 15 minutes, certains effets néfastes peuvent durer jusqu'à 30 minutes ou plus.
Un des effets néfastes de l'inertie du sommeil est la réduction de la vitesse de traitement cognitif. Par exemple, une personne aux prises avec l'inertie du sommeil prend plus de temps à filtrer les renseignements visuels incongrus.
Ainsi, de courtes siestes, c'est-à-dire de 20 à 40 minutes, sont préférables pour éviter d'entrer dans un sommeil à ondes lentes; il est également important d'accorder suffisamment de temps de récupération après la sieste pour contrer les effets de l'inertie du sommeil.
Diapositive 11 : Repos aux commandes
Cette information a guidé la politique d'Air Canada sur le repos aux commandes. Toutefois, les résultats de l'enquête ont également fait ressortir la nécessité de respecter les procédures pour éviter les conséquences indésirables possibles du repos aux commandes.
Diapositive 12 : Rapport d'enquête ferroviaire R16C0012 du BST
Le troisième exemple dont j'aimerais vous parler aujourd'hui a eu lieu au début de 2016.
Le 18 février 2016, vers 6 h 23, heure normale des Rocheuses, 13 wagons d'un train de marchandises du Chemin de fer Canadien Pacifique ont déraillé au triage Alyth, à Calgary. Personne n'a été blessé et il n'y a pas eu de déversement de marchandises dangereuses.
L'enquête du BST a révélé que la mémoire de travail et la vigilance du mécanicien de locomotive (ML) étaient probablement limitées par la fatigue, ce qui a contribué à la conduite inappropriée du train et au déraillement qui a suivi. (Dans cet événement, des exigences précises de conduite des trains afférentes à la position maximale du manipulateur de la locomotive sur les lieux du déraillement n'ont pas été respectées.) Nous avons également déterminé que le mécanicien de locomotive était probablement fatigué par suite de la mauvaise qualité de son sommeil dans les 2 semaines précédant l'événement et parce qu'il était éveillé depuis au moins 23 heures au moment de l'accident.
Alors que s'est-il passé?
Voici ce que nous avons appris au cours de l'enquête :
Le ML s'était couché vers minuit le 17 février 2016 et s'était réveillé vers 7 h ce matin-là. Cependant, le ML n'avait pas bien dormi au cours de la période de 2 semaines précédant l'événement; il se réveillait fréquemment et avait de la difficulté à se rendormir. Durant toute la journée du 17 février 2016, il avait consacré son temps à des engagements personnels. Le ML avait prévu être appelé pour une affection au cours de l'après-midi. Cependant, lorsqu'il a consulté la liste du mouvement des trains plus tard dans la journée, il s'est rendu compte que son appel viendrait probablement beaucoup plus tard que ce qu'il avait prévu au départ. Quand il a reçu l'appel, vers 20 h 20, le ML n'avait pas saisi l'occasion de dormir.
Le CP permet aux employés de se déclarer inaptes au travail quand ils ne sont pas suffisamment reposés, pourvu qu'ils le fassent avant de recevoir leur appel. Dans le cas présent, le ML ne s'était pas déclaré inapte au travail.
Au moment d'accepter l'appel, le ML ne se sentait pas apte à se présenter au travail. Cependant, il craignait de subir des mesures disciplinaires s'il refusait le service, étant donné qu'il avait déjà fait l'objet de telles mesures sous la forme d'une suspension temporaire en raison d'une tendance à l'absentéisme. Par conséquent, le ML a accepté l'appel […].
Diapositive 13 : R16C0012 : leçons apprises?
Que s'est-il passé après l'enquête? En a-t-on tiré des leçons?
Malheureusement, il semble que ce ne soit pas le cas. Comme le dit notre rapport :
- Le CP a procédé à une enquête interne […] [et] a conclu que la cause de l'incident était une utilisation du manipulateur de la locomotive qui allait à l'encontre des restrictions en la matière établies.
- Selon le résumé de l'enquête menée par le CP après l'accident, le ML avait admis à la compagnie « [traduction] qu'il était frais et dispos quand il a accepté l'appel [...]. Il avait oublié la restriction d'exploitation [...] et éprouvait du remords pour avoir été responsable de l'incident ».
- L'enquête interne du CP n'a pas comporté d'examen de l'historique de sommeil du ML ni n'a décelé des problèmes systémiques qui auraient pu amener le ML à oublier les restrictions d'exploitation.
Diapositive 14 : Gestion de la fatigue : un enjeu de la liste de surveillance
Dans la société actuelle, la fatigue est omniprésente, en particulier dans le secteur des transports. Elle l'est à tel point qu'elle figure maintenant sur notre Liste de surveillance 2016, laquelle énumère les 10 principaux enjeux de sécurité qu'il faut s'employer à régler pour rendre le système de transport canadien encore plus sûr.
Depuis 1994, la fatigue due au manque de sommeil a été retenue comme facteur contributif ou risque dans 23 enquêtes ferroviaires du BST, dont 19 mettant en cause des membres d'équipe de conduite de trains de marchandises. Ces 19 enquêtes représentent environ 20 % des 94 enquêtes ferroviaires effectuées depuis 1994 au terme desquelles un aspect « facteur humain » des activités des équipes de conduite de trains de marchandises a été retenu comme cause principale.
Bien que le secteur ferroviaire et Transports Canada soient au courant depuis plus de 20 ans du problème posé par la fatigue due au manque de sommeil, les mesures prises jusqu'à présent n'ont pas été à la hauteur pour régler pleinement cet enjeu.
Résultat : la fatigue demeure un facteur de risque pour la sécurité de l'exploitation ferroviaire, en particulier des trains de marchandises, qui transportent 70 % des marchandises expédiées par voie terrestre au pays, y compris des marchandises dangereuses.
Diapositive 15 : Gestion de la fatigue : prochaines étapes
Cet enjeu restera sur la Liste de surveillance tant que :
- Transports Canada n'aura pas achevé son examen des systèmes de gestion de la fatigue dans le secteur ferroviaire;
- Transports Canada et les compagnies ferroviaires n'auront pas mis en œuvre des mesures additionnelles pour atténuer efficacement le risque de fatigue chez les membres des équipes de conduite des trains de marchandises.
Diapositive 16 : Tout le monde n'est pas sur la même longueur d'onde
L'an dernier et plus tôt cette année, on a laissé entendre dans certains secteurs de l'industrie du transport aérien que le BST ne considérait pas la fatigue comme un problème dans le mode de transport aérien. Cela est faux. Ces remarques ont été formulées à l'origine au cours de consultations entre des représentants du secteur de l'aviation et de Transports Canada à propos d'un projet de réglementation concernant le temps de service et de vol des pilotes. Des précisions ont été apportées à cet effet depuis, mais le malentendu persiste dans certains milieux.
Je vais donc faire quelques brèves remarques à ce sujet :
- Premièrement, je tiens à préciser qu'au fil des ans, le BST a dégagé un certain nombre de faits sur la fatigue dans ses rapports d'enquête aéronautique. Dans certains cas, la fatigue était l'une des causes, tandis que dans d'autres, on a estimé qu'elle pouvait constituer un risque d'accident à l'avenirNote de bas de page 1.
- Deuxièmement, en élaborant sa Liste de surveillance 2016, le Bureau s'est effectivement demandé si la fatigue devrait figurer parmi les enjeux multimodaux. Toutefois, nous n'avions pas assez de données à ce moment pour justifier l'inclusion de la fatigue comme problème général dans d'autres modes que le transport ferroviaire.
- Voici ce qu'il faut absolument retenir : si un enjeu de sécurité particulier ne figure pas sur la Liste de surveillance du BST, cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas s'y attarder ni en faire plus pour le réduire. Car on peut toujours en faire plus.
Diapositive 17 : Conclusions
Ceci m'amène à ma conclusion d'aujourd'hui.
Évidemment, au BST, nous sommes conscients que la fatigue peut nuire au rendement. Nous le constatons enquête après enquête, dans tous les modes de transport. Étant donné l'effet de la fatigue sur le rendement, deux changements sont nécessaires.
Premièrement, il faut sensibiliser les employés dans tous les secteurs et modes de transport. Que ce soit grâce à des cours pratiques, des formations de sensibilisation ou un autre moyen, ils doivent absolument savoir ce qui peut arriver lorsqu'on tente de travailler alors qu'on est fatigué. Ils doivent également connaître les facteurs qui peuvent aggraver leur fatigue et les mesures qui peuvent l'atténuer. Et je ne parle pas seulement de s'étirer au milieu de son quart ni de prendre un café en fin de soirée. Je parle de facteurs comme l'éclairage du lieu de travail, la manière de s'asseoir ou de se tenir debout, le travail solitaire ou en groupe, et les heures de début et de fin de quart, pour n'en nommer que quelques-uns.
Deuxièmement, les employeurs et les exploitants, les principaux responsables de la gestion des risques pour la sécurité de leurs activités, doivent avoir un plan concret pour réduire les risques de fatigue. Pas seulement un plan général : cela ne suffit pas de dire que vos employés devraient se reposer davantage. Non. Ce plan doit viser précisément les facteurs qui produisent ou exacerbent la fatigue dans leurs activités.
Si nous parvenons à mettre en œuvre ces deux changements, cela devrait grandement contribuer à réduire les risques qui existent et à rendre le système de transports plus sécuritaire, et ce, pour tous.
Merci.
Diapositive 18 : SECURITAS
Diapositive 19 : Pour nous joindre
Diapositive 20 : Mot-symbole Canada
Notes de bas de page
Note de bas de page 1De fait, comme le précisait sa lettre de juin 2018 à l'Association canadienne de l'hélicoptère (ACH) et l'Association du transport aérien du Canada (ATAC), le BST a déterminé que la fatigue était un facteur dans 24 de ses enquêtes aéronautiques (facteur causal ou contributif dans 12 cas et facteurs de risque dans 12 autres). Cette liste comprend quatre accidents mettant en cause des aéronefs commerciaux pour lesquels on considère que la fatigue a été un facteur contributif.