John Clarkson
Membre, Bureau de la sécurité des transports du Canada
Vancouver (Colombie-Britannique), le 14 septembre 2015
Seul le texte prononcé fait foi.
Diapositive 1 : Page titre
Diapositive 2 : Aperçu
Diapo 3 : Notre mission
Promouvoir la sécurité du transport maritime, ferroviaire et aérien ainsi que du transport par pipeline sous juridiction fédérale :
- en menant des enquêtes indépendantes
- en cernant les lacunes de sécurité
- en déterminant les causes ainsi que les facteurs contributifs
- en faisant des recommandations
- en publiant des rapports
Diapo 4 : Qui nous sommes
Le BST a été créé par une loi du Parlement du Canada (Loi sur le Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports) qui est entrée en vigueur le 29 mars 1990.
Nous sommes :
- Un organisme indépendant dont le Bureau peut être constitué d'un maximum de cinq membres, dont un président, et qui regroupe environ 220 employés.
- Le BST rend compte au Parlement par le biais du leader du gouvernement à la Chambre des communes, et est indépendant des autres organismes et ministères du gouvernement.
- Le BST n'est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales.
Diapo 5 : Bureaux du BST (carte)
L’administration centrale est à Gatineau (Québec). Le Laboratoire technique est à Ottawa (Ontario). Carte des ureaux du BST
Le BST a des bureaux régionaux partout au pays afin que les enquêteurs puissent rapidement se rendre sur les lieux d’un accident :
- Vancouver (Colombie-Britannique)
- Calgary (Alberta)
- Edmonton (Alberta)
- Winnipeg (Manitoba)
- Toronto (Ontario)
- Montréal (Québec)
- Québec (Québec)
- Halifax (Nouvelle-Écosse)
Diapo 6 : Liste de surveillance 2014
- Accidents à l’approche et à l’atterrissage
- Risque de collision sur les pistes
- Gestion de la sécurité et surveillance
- Pertes de vie à bord de bateaux de pêche
- Sécurité aux passages à niveau ferroviaires
- Transport de liquides inflammables par rail
- Enregistreurs vidéo et enregistreurs de la parole à bord
En plus de la publication de recommandations et de préoccupations liées à la sécurité, un de nos outils clés pour améliorer la sécurité est la Liste de surveillance, qui cerne les risques les plus problématiques pour le réseau de transport du Canada. Nous l'avons publiée pour la première fois en 2010, et avons émis de nouvelles versions en 2012 et en 2014, pour suivre l'évolution des enjeux, en retirant ceux résolus et en ajoutant ceux s'étant manifestés. Dans cette toute dernière version, quelques enjeux ont pris plus d'importance, tandis qu'un autre a été ajouté. D'autre part, il reste des problèmes qui n'ont connu aucune amélioration, ou très peu.
Les objectifs de notre Liste de surveillance sont simples :
- Sensibiliser le public, les médias et les intervenants aux risques de sécurité
- Démontrer comment des actions concrètes amélioreront la sécurité des transports
- Faire passer nos messages à propos de notre mandat
- Nous appuyer sur la crédibilité acquise, stimuler le dialogue et inciter à l'action les agents de changement
Diapo 7 : Sécurité des navires à passagers
Que TC, l’ACOT et la CGC élaborent « un cadre basé sur le risque grâce auquel les exploitants de traversiers pourront élaborer des méthodes efficaces qui permettront de dénombrer les passagers de chaque navire et de chaque itinéraire » (M08-01)
Que TC « établisse des critères, y compris sur la tenue d’exercices réalistes, à partir desquels les exploitants de navires à passagers pourront évaluer la mesure dans laquelle leurs équipages sont préparés à gérer efficacement l’intervention auprès des passagers pendant une situation d’urgence » (M08-02)
Mais...
Le BST est préoccupé par l’absence d’encadrement des exploitants et par le niveau d’efficacité de la supervision de la mise en œuvre des nouveaux règlements par TC.
TC et BST ont actuellement des discussions.
Le problème de sécurité des navires à passagers – et en particulier la préparation aux situations d'urgence à bord des traversiers – a été retiré de la Liste de surveillance du BST en 2012
En effet, deux des recommandations clés relatives à ce problème ont reçu une attention « entièrement satisfaisante », la cote la plus élevée du Bureau.
Une des recommandations porte sur l'élaboration d'un cadre de référence dont les exploitants peuvent bénéficier pour établir des méthodes efficaces pour dénombrer les passagers pour chaque navire et chaque itinéraire; la deuxième recommandation propose l'établissement de critères que les exploitants peuvent utiliser pour évaluer la préparation des équipages pour gérer les passagers dans une situation d'urgence.
Mais...
Ces deux recommandations se rapportent au « cadre », et traitent de l'élaboration d'outils et de critères. Et si un outil est mal utilisé, il peut entretenir un risque plutôt que l'atténuer. Plus particulièrement, l'absence d'encadrement des exploitants nous préoccupe, de même que l'inefficacité de la mise en œuvre du Règlement sur les exercices d'incendie et d'embarcation par TC
Voilà pourquoi le BST poursuit le dialogue avec TC sur cette question.
Je souhaite maintenant vous parler de quelques événements dans lesquels des traversiers étaient en cause et sur lesquels le BST a enquêté
Diapo 8 : Rapport d'enquête M12N0017 du BST (Beaumont Hamel)
Le 30 mai 2012, le traversier à passagers Beaumont Hamel a heurté le quai de Portugal Cove (Terre-Neuve-et-Labrador) après avoir perdu sa propulsion principale et sa direction à la suite d'une panne électrique. La porte d'étrave du traversier a été perforée et le quai a été légèrement endommagé. Une blessure mineure a été signalée.
Le navire avait connu plusieurs pannes électriques et, même si on avait fait des réparations pour régler les causes mécaniques de ces pannes, les risques cernés après chaque événement n'ont pas été atténués de façon efficace
L'enquête du BST a révélé que le système de gestion de la sécurité mis en place par l'exploitant était inefficace pour gérer les risques opérationnels découlant des pannes électriques récurrentes à bord du navire.
Diapo 9 : Rapport d'enquête M12C0058 du BST (Jiimaan)
Le 11 octobre 2012, le transbordeur roulier à passagers Jiimaan quittait l'île Pelée en route vers Kingsville (Ontario) avec, à son bord, 18 passagers et 16 membres d'équipage. L'équipage avait prévu de longer du côté est le chenal cartographié menant au port de Kingsville pour éviter une obstruction dans le chenal. Le vent a toutefois poussé le navire à tribord, et celui-ci s'est échoué à 130 mètres de l'entrée du port. Le lendemain, le traversier a été déséchoué et escorté à Leamington, où les passagers ont débarqué. Il n'y a eu ni blessures, ni pollution, ni endommagement du navire.
L'enquête du BST a révélé que le système de gestion de la sécurité (SGS) du navire ne comprenait pas de processus d'évaluation des risques. C'est ce qui explique que les risques liés à une sortie du chenal cartographié pour éviter une obstruction n'ont pas été évalués correctement et atténués adéquatement.
Diapo 10 : Rapport d'enquête M13L0067 du BST (Louis Jolliet)
Le 16 mai 2013, le navire à passagers Louis Jolliet s'échouait près de Sainte-Pétronille, île d'Orléans (Québec), pendant une excursion avec 57 passagers à bord. Les passagers et des membres d'équipage ont été évacués. Le navire a subi des dommages mineurs et a été renfloué à marée haute. Il n'y a eu ni blessures ni pollution.
L'enquête du BST a révélé que même s'il était présent sur la passerelle au moment de l'échouement, le capitaine ne participait pas à la navigation du navire ni ne la supervisait, l'ayant laissée au premier officier récemment embauché.
L'enquête a aussi montré que les principaux membres d'équipage connaissaient mal leurs tâches en cas d'urgence, que les procédures d'urgence en place pour le navire comportaient des lacunes au niveau de la gestion de la sécurité des passagers, et que les membres de l'équipage ne s'étaient pas exercés à ces procédures en contexte simulé.
Diapo 11 : Rapport d'enquête M13M0287 du BST (Princess of Acadia)
Le 7 novembre 2013, le roulier à passagers et véhicules Princess of Acadia approchait de la gare maritime de Digby (Nouvelle-Écosse) avec à son bord 87 passagers et membres d'équipage, lorsque la génératrice principale est tombée en panne, causant une perte d'alimentation électrique et désactivant les pompes de commande du pas de l'hélice principale. La poussée de l'hélice a pris par défaut la marche arrière toute, alors que les moteurs fonctionnaient toujours. Le navire a donc ralenti, s'est immobilisé, puis s'est mis à faire marche arrière en direction du rivage, jusqu'à s'échouer
Même s'il n'y a eu ni blessures ni pollution, l'enquête du BST a révélé des lacunes de maintenance et l'absence de procédures d'urgence appropriées.
Diapo 12 : Problèmes courants dans les enquêtes sur les traversiers
Chaque accident est le résultat unique d'un ensemble de causes et de facteurs contributifs particuliers. Toutefois, ces quatre enquêtes récentes ont plusieurs points en commun.
Préparation aux situations d'urgence
- Avez-vous un plan?
- Les membres de l'équipage ont-ils tous participé à des exercices réalistes?
- Quand?
- Les exercices étaient-ils réalistes? Portaient-ils sur toutes les compétences requises pour rassembler et gérer un grand nombre de passagers?
Systèmes de gestion de la sécurité
- Évaluez-vous régulièrement les risques? Comment?
- Que faites-vous en cas de risque?
La gestion de la sécurité est un processus continu au cours duquel on doit cerner les dangers, évaluer les risques et prendre les mesures nécessaires pour maintenir le plus faible niveau de risque raisonnable possible.
Un SGS doit être efficace. Autrement dit, votre SGS accomplit-il sa mission? Mesure-t-il le risque? Comment le savez-vous?
Communication entre la passerelle et la salle des machines
Est-ce que tout le monde est sur la même longueur d'onde au même moment?
Surveillance
La surveillance – exercée par Transports Canada ou l'organisme responsable – est-elle efficace?
J'aimerais maintenant approfondir l'un de ces enjeux, d'autant plus que celui-ci figure sur notre Liste de surveillance : la gestion de la sécurité et la surveillance.
Diapositive 13 : Gestion de la sécurité et surveillance
« Certaines entreprises de transport ne gèrent pas leurs risques de sécurité de façon efficace, et Transports Canada ne parvient pas toujours, au moyen de ses pratiques de surveillance et de ses interventions, à les amener à changer leurs pratiques d’exploitation non sécuritaires. » — Liste de surveillance 2014 du BST
Et maintenant… que faut-il faire?
À plusieurs reprises, le BST a souligné les avantages des systèmes de gestion de la sécurité (SGS), qui fournissent aux entreprises de transport un cadre permettant de gérer les risques pour la sécurité de leur exploitation, comme le risque pour la sécurité des passagers en cas d'urgence
Si on se penche sur les enquêtes décrites ci-dessus, on constate que la société d'exploitation du Louis Jolliet n'était pas tenue par TC de mettre en œuvre un SGS, et elle ne l'avait pas fait. Bien que les exploitants du Jiimaan et du Princess of Acadia aient volontairement mis en œuvre un SGS, les vérifications et les inspections par des tiers ont été inefficaces, en ce sens qu'elles n'ont pu garantir que les procédures fondamentales de sécurité, notamment les procédures de sécurité des passagers, étaient de fait mises en œuvre. Dans le cas du Beaumont Hamel, même si le ministère des Transports et des Travaux publics de Terre-Neuve-et-Labrador avait un SGS, ce système était inefficace pour atténuer les risques opérationnels occasionnés par les pannes électriques récurrentes.
Les conclusions de ces enquêtes témoignent des facteurs clés pour faire évoluer cet enjeu de la surveillance et de la gestion de la sécurité, lequel est désigné dans la Liste de surveillance 2014 du BST : un cadre réglementaire clair obligeant les entreprises à mettre en œuvre un certain processus de gestion de la sécurité, qui soit efficace pour détecter les dangers et atténuer les risques; et une surveillance réglementaire équilibrée.
La question est donc : que faut-il faire?
Diapo 14 : SGS et surveillance : mesures à prendre
Des mesures rigoureuses sont nécessaires pour assurer la sensibilisation aux risques et leur atténuation – deux questions qui peuvent être résolues par une approche officielle et systémique à la sécurité. TC, les exploitants de navires et les entreprises chargées de la gestion de navires doivent collaborer pour garantir que les risques d'exploitation seront bien cernés et réduits au minimum par l'adoption de systèmes de gestion de la sécurité efficaces. En particulier :
- Transports Canada doit élargir les règlements afin d'exiger que tous les exploitants adoptent des processus de gestion de la sécurité officiels et entreprennent des vérifications à intervalles réguliers.
- Les exploitants qui sont tenus d'adopter un système de gestion de la sécurité (SGS) doivent prouver que leur système fonctionne.
- Si nécessaire, Transports Canada doit intervenir pour modifier les pratiques d'exploitation non sécuritaires.
Diapo 15 : La surveillance, de la théorie à la réalité
Concernant la surveillance assurée par Transports Canada, deux problèmes ont été observés : l'incapacité du Ministère à déterminer les processus inefficaces des entreprises, et le manque d'équilibre entre les processus de vérification et les inspections classiques.
Par exemple, si les inspecteurs de la sécurité maritime de TC n'évaluent pas les rôles d'appel et les procédures d'évacuation pour déterminer leur conformité et leur pertinence – et si TC ne fournit pas de lignes directrices d'interprétation – la conformité à la réglementation de sécurité pour les passagers risque d'être inadéquate, ce qui annulerait les avantages potentiels de sécurité de cette réglementation.
TC a récemment lancé une Campagne d'inspection concentrée (CIC) qui aborde certains éléments pour lesquels les inspecteurs ont constaté de fortes lacunes. Ces inspections concentrées pourraient aussi effectuées après des incidents ayant eu lieu sur des types de navires pour lesquels TC juge qu'une intervention particulière est nécessaire.
En outre, TC améliore le processus de surveillance afin d'atténuer davantage les risques associés à la sécurité des navires de passagers et a rédigé un avis FLAGSTATENET à l'intention des inspecteurs pour leur rappeler les exigences du Règlement sur les exercices d'incendie et d'embarcation et de la surveillance subséquente.
Pour les organismes responsables, comme Lloyd's Register, ABS, etc., les problèmes se situent surtout au niveau de la compétence des équipages – notamment en ce qui a trait à la gestion des urgences – et de la publication de documents sur la gestion de la sécurité.
Après un incident, il faut évaluer l'efficacité du SGS afin de tirer des recommandations appropriées et d'apporter les modifications requises pour corriger toute lacune.
Diapo 16 : Conclusions
La Liste de surveillance est un document qui évolue au gré des progrès – ou du manque de progrès. Même si l'enjeu de la préparation aux situations d'urgence à bord des traversiers a été retiré de la Liste en 2012, il pourrait y revenir, selon les résultats de nos enquêtes. La préparation aux situations d'urgence a été un facteur contributif dans quelques incidents récents, et le BST discute de ce sujet avec Transports Canada.
En attentant, il faut absolument que les exploitants mettent tout en œuvre pour gérer la sécurité; et le SGS est un outil éprouvé dans ce domaine. Un bon SGS est plus qu'un exercice sur papier, qu'un cartable rangé sur une tablette quelque part. Il s'agit d'un processus continu, d'une évaluation constante des risques et d'un tremplin pour prendre des mesures correctives. C'est avant tout une méthode proactive.
Enfin, comme le montrent les récentes enquêtes, il est essentiel que les membres de l'équipe à la passerelle se concentrent sur la communication en s'assurant qu'ils sont toujours tous sur la même longueur d'onde.