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Rapport d'enquête aéronautique A14Q0060

Collision avec un fil d’une ligne de transport d’électricité
Héli-Boréal inc.
Eurocopter AS 350 BA (hélicoptère), C-FHPC
35 nm N de Sept-Îles (Québec)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 13 mai 2014, l'hélicoptère Eurocopter AS 350 BA (immatriculé C-FHPC, numéro de série 2395) exploité par Héli-Boréal inc. effectuait un vol pour inspecter l'empiétement de la végétation sur une ligne électrique avec un pilote et un observateur à bord. Le vol a fait le levé d'une ligne de distribution d'électricité de 25 kilovolts qui longeait une route de desserte menant au barrage hydroélectrique de la Sainte-Marguerite, exploité par Hydro-Québec. En effectuant un virage vers la droite dans une vallée, le pilote a remarqué une ligne de transport d'électricité de 315 kilovolts dont le tracé croisait perpendiculairement la trajectoire du vol. Le pilote a tenté un virage plus serré pour éviter la ligne de transport, mais une des pales du rotor principal de l'hélicoptère a heurté le fil inférieur. Les dommages causés à la pale du rotor ont entraîné de violentes vibrations qui ont rendu l'hélicoptère difficile à maîtriser. En s'approchant d'une petite zone déboisée sous la ligne de transport de 315 kilovolts où le pilote tentait de poser l'hélicoptère, l'atterrisseur à patins de l'aéronef a heurté des arbres. L'hélicoptère s'est renversé sur son côté gauche et a chuté d'une hauteur d'environ 50 pieds parmi les arbres avant de s'immobiliser dans la neige sur son côté gauche. Les deux occupants ont subi des blessures graves, mais sont tout de même parvenus à évacuer l'épave. L'hélicoptère a été considérablement endommagé. La radiobalise de repérage d'urgence de 406 MHz s'est activée dès l'impact. Le Système international Cospas-Sarsat de satellites pour les recherches et le sauvetage n'a reçu un signal que 25 minutes après l'accident. Aucun incendie ne s'est déclaré après l'impact. L'accident a eu lieu à la lumière du jour, à 10 h 20, heure avancée de l'Est.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Le 13 mai 2014, Héli-Boréal inc. (Héli-Boréal) a effectué un vol nolisé pour le compte d'Hydro-Québec avec un hélicoptère AS 350 BA. L'objectif du vol était de faire un levé de l'empiétement de la végétation sur une ligne de distribution électrique de 25 kilovolts (kV) dans la région de la centrale hydroélectrique de la Sainte‑Marguerite (SM-3) d'Hydro-Québec.

À 9 h 55Note de bas de page 1, le pilote et un employé d'Hydro-Québec (l'observateur) ont quitté la centrale SM-3 pour commencer le levé aérien de la ligne de distribution. Le levé a été réalisé à une altitude d'environ 50 pieds au-dessus du niveau du sol (agl) du côté droit de la route que longeait la ligne de distribution (figure 1).

Figure 1. Parcours du levé montrant le lieu de la collision avec le fil (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Parcours du levé montrant le lieu de la collision avec le fil (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

Alors que l'hélicoptère suivait la ligne de distribution au contour d'une colline (flèche, figure 1), l'observateur a remarqué, droit devant, des fils d'une ligne de transport d'électricité de 315 kV passant par-dessus la ligne de distributionNote de bas de page 2. L'observateur a indiqué au pilote que le levé était terminé pour cette section. C'est à ce moment que le pilote a aperçu droit devant lui la ligne de transport d'électricité perpendiculaire à sa trajectoire de vol (figure 2). Le pilote a immédiatement amorcé un virage à droite pour éviter une collision; toutefois, une pale du rotor principal a heurté un des fils inférieurs de la ligne de transport, causant de violentes vibrations de l'hélicoptère. La zone sous la ligne de transport était peuplée d'arbres matures, mais comprenait un petit sentier défriché d'environ 6 mètres de largeur directement sous la ligne et parallèle à celle-ci. Le pilote n'avait pas l'entière maîtrise de l'hélicoptère; il a tenté de ralentir sa descente en vue d'un atterrissage forcé dans ce sentier. Les patins de l'hélicoptère ont heurté des arbres en bordure du sentier; l'hélicoptère a roulé sur sa gauche et a chuté parmi les arbres avant de s'immobiliser sur le côté gauche. Le poste de pilotage a été détruit, et le pilote s'est trouvé suspendu dans son siège au-dessus de l'observateur, qui se trouvait dans son siège contre le sol enneigé. Le pilote a rapidement coupé le moteur.

Figure 2. Intersection des lignes de distribution et de transport d'électricité
Intersection des lignes de distribution et de transport d'électricité

Le pilote a pu détacher sa ceinture de sécurité ainsi que celle de l'observateur et a aidé ce dernier à évacuer l'épave. Après avoir trouvé le téléphone satellite, le pilote s'est éloigné de l'épave pour capter un signal satellite et a communiqué avec la base d'Héli-Boréal vers 10 h 30. Il a utilisé une couverture thermique qui se trouvait dans l'hélicoptère pour tenir l'observateur au chaud. Quinze minutes plus tard, le pilote s'est dirigé vers la route, où il a aperçu un véhicule d'Hydro-Québec à environ 150 mètres de lui. Il a réussi à atteindre la route où il a croisé un employé d'Hydro-Québec qui travaillait non loin de là. Entre-temps, des secouristes d'Hydro-Québec ont été dépêchés depuis la centrale SM-3 au lieu de l'accident, où ils ont trouvé le pilote vers 10 h 50. Grièvement blessés, le pilote et l'observateur ont été transportés à l'hôpital.

1.2 Victimes

Tableau 1. Victimes
  Équipage Passagers Autres Total
Tués 0 0 0 0
Blessés graves 1 1 0 2
Blessés légers/indemnes 0 0 0 0
Total 1 1 0 2

1.3 Dommages à l'aéronef

Une des pales du rotor principal a subi d'importants dommages lorsqu'elle a heurté le fil de transport d'électricité.

Le poste de pilotage, le tableau de bord, la console radio et le plafond de la cabine ont été détruits dans la chute de l'hélicoptère parmi les arbres et par l'impact avec le sol. Toutes les pales du rotor se sont séparées de la tête du rotor principal, sous l'effet de l'impact avec le relief.

Le dossier du siège du pilote s'est séparé du siège, mais a néanmoins retenu le pilote par la ceinture de sécurité. Le siège passager a été arraché de ses rails de fixation au plancher. L'hélicoptère a été détruit dans la séquence des événements ayant mené à l'impact (photo 1).

Photo 1. Lieu de l'impact (Source : Héli-Boréal)
Lieu de l'impact (Source : Héli-Boréal)

1.4 Autres dommages

Environ 220 litres de carburant Jet A-1 ont été déversés et absorbés dans le sol autour de l'épave.

Sectionné par une des pales du rotor principal, le fil inférieur de la ligne de transport est tombé sur la ligne de distribution, ce qui a provoqué une panne du réseau de distribution d'électricité.

1.5 Renseignements sur le personnel

Tableau 2. Renseignements sur le pilote
  Commandant de bord
Licence Licence de pilote d'hélicoptère commercial
Date d'expiration du certificat de validation 1er juin 2015
Nombre total d'heures de vol (aéronef à voilure tournante) 5847
Heures de vol au cours des 90 derniers jours 72
Heures de vol sur type 4454
Heures de service avant l'accident 2,5
Heures hors service avant la période de travail 15

Le pilote travaillait en qualité de pilote instructeur en chef à Héli-Boréal depuis 2010Note de bas de page 3. Les dossiers indiquent que le pilote possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Rien n'indique que la fatigue, une incapacité ou des facteurs physiologiques auraient pu nuire au rendement du pilote.

1.6 Renseignements sur l'aéronef

1.6.1 Généralités

Motorisé par une turbine Turbomeca, l'Eurocopter AS 350 BA est un hélicoptère monomoteur à un seul pilote doté de 6 sièges; sa masse brute maximale est de 4630 livres. Il a 1 rotor principal à 3 pales faites en matériau composite.

Les dossiers indiquent que l'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées, et ne présentait aucune déficience connue avant le vol en cause.

L'enquête a montré que sa masse et son centre de gravité étaient dans les limites prescrites.

1.6.2 Radiobalise de repérage d'urgence

L'hélicoptère était muni d'une radiobalise de repérage d'urgence (ELT) Kannad de modèle AF-COMPACT de 406 mégahertz (MHz). Celle-ci était installée dans le compartiment à bagages arrière droit, et son antenne se trouvait sur le dessus du plancher mécanique supportant la boîte de transmission du rotor principal.

Une fois activée, une radiobalise de repérage d'urgence de 406 MHz transmet immédiatement un signal pendant un quart de seconde, puis transmet un signal numérique toutes les 50 secondes. La présence d'obstacles et la position de l'antenne peuvent influer sur la qualité et la force du signal. Le Système international Cospas-Sarsat de satellites pour les recherches et le sauvetage (Système Cospas-Sarsat) est un système de satellites qui sert à capter les alertes de détresse et les données de position et à les relayer aux services de recherche et sauvetage. D'après le site WebNote de bas de page 4 :

[p]our émettre vers les satellites Cospas-Sarsat, la balise doit avoir une vue relativement dégagée du ciel. Une balise submergée, ou dont l'antenne est bloquée par le fuselage d'un avion ou la coque d'un navire, a peu de chances d'être reçue par un satellite. De même, il est parfois long de détecter une balise activée au fond d'un canyon par exemple en raison du délai nécessaire pour que le satellite passe à la verticale.

L'examen de l'hélicoptère a révélé que la radiobalise de repérage d'urgence était en position « ARM » [activée]. Aucun dommage à la radiobalise de repérage d'urgence, à l'antenne ou au fil de raccordement n'a été relevé. L'hélicoptère s'est immobilisé avec l'antenne à l'horizontale. Le signal de l'antenne était bloqué par le capot de l'hélicoptère et les arbres. Les satellites COSPAS-SARSAT ont reçu un signal de la radiobalise de repérage d'urgence 25 minutes après l'impact.

1.6.3 Carburant

Lorsque l'hélicoptère a décollé de la base de Sept-Îles (Québec), il avait été avitaillé, et son réservoir était rempli à sa pleine capacité de 540 litres. Au moment de l'accident, le réservoir était rempli à environ 70 % (370 litres), assez pour demeurer en vol pendant encore 2 heures environ.

1.7 Renseignements météorologiques

D'après le message d'observation météorologique régulière pour l'aviation (METAR) de 10 h pour Sept-Îles, environ 35 milles marins (nm) au sud-est du lieu de l'accident, les conditions météorologiques étaient les suivantes : vent de surface du 360° vrais, variable de 290° à 030° à 8 nœuds, visibilité au sol à 30 milles terrestres (sm) sous un ciel dégagé. D'après la zone de prévision graphique, on annonçait un ciel dégagé dans cette région. Les conditions météorologiques n'ont pas été considérées comme un facteur au cours de l'événement à l'étude.

1.8 Aides à la navigation

Le manuel d'exploitation de la compagnie Héli-Boréal exige que les cartes pertinentes se trouvent à bord de l'aéronef. L'entreprise utilisait les cartes de navigation (VNC) pour les règles de vol à vue (VFR). La carte VNC qui était en vigueur pour le secteur survolé était la carte AIR 5010 Chicoutimi, 14e édition, publiée en octobre 2010. La carte VNC pour Chicoutimi ne se trouvait pas à bord durant le vol en cause, car le pilote connaissait très bien la région; en outre, la réglementation en vigueur ne l'exigeait pas.

NAV CANADA publie les cartes VNC pour l'espace aérien canadien conformément à l'Annexe 4 à la Convention relative à l'aviation civile internationale — Cartes aéronautiques de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI)Note de bas de page 5 Note de bas de page 6.

D'après le paragraphe 17.7.4 de l'Annexe 4 à la Convention relative à l'aviation civile internationale de l'OACI : « Il est recommandé que les points caractéristiques artificiels et naturels, tels que les ponts, lignes de transport de force [...] soient indiqués s'ils sont jugés importants pour la navigation aérienne à vue. »Note de bas de page 7

D'après le paragraphe 17.9.3.2 : « Lorsque ces indications sont jugées importantes pour le vol à vue, les lignes de transport de force non défilées [...] qui constituent des obstacles seront représentées. »Note de bas de page 8

NAV CANADA met à jour ses produits d'information aéronautique comme les cartes VNC à partir d'une combinaison de données fédérales, provinciales, privées et commerciales. En 2009, NAV CANADA a entrepris de numériser ces renseignementsNote de bas de page 9 afin d'utiliser la cartographie numérique pour tenir ses cartes à jour. La cartographie est un procédé où l'humain intervient en décidant de la façon d'illustrer l'information; parfois, certains éléments ne sont pas inclus. La raison d'être des produits que l'on crée régit grandement ce processus. D'après l'OACI, toutes les structures de plus de 300 pieds de hauteur constituent des obstacles et doivent figurer sur les cartes VNC. NAV CANADA considère qu'un obstacle artificiel d'une hauteur inférieure à cette limite doit servir de référence à la navigation plutôt qu'à l'évitement d'obstacle. Certains obstacles ne sont pas indiqués sur les cartes, car il est à peu près impossible de garantir qu'ils ont tous été inclus; de plus, tous les éléments géographiques ou aéronautiques ne peuvent être illustrés.

La carte VNC AIR 5010 Chicoutimi n'affichait pas la ligne de transport d'électricité de 315 kV, bien qu'elle ait été en place depuis plus de 15 ans. La hauteur de la ligne de transport de 315 kV était inférieure à 300 pieds.

NAV CANADA est le fournisseur officiel des données VNC canadiennes de plusieurs fabricants de systèmes de navigation électroniques numériques.

NAV CANADA reçoit des renseignements sur les obstacles fournis volontairement; l'agence n'a pas l'autorité légale d'obliger les tierces parties à fournir ces renseignements. D'après la norme 621, chapitre 1.2, du Règlement de l'aviation canadien (RAC) : « Quiconque prévoit ériger un obstacle à la navigation aérienne devrait également prévenir NAV CANADA en se servant du formulaire Projet d'utilisation particulière d'un terrain » [...]. »Note de bas de page 10

De plus, toute personne qui remarque une lacune sur ces cartes peut en informer NAV CANADA afin que l'agence puisse la corriger. L'enquête a relevé des lacunes dans d'autres VNC; elles ont été signalées à NAV CANADA et corrigées.

Une autre façon pour NAV CANADA de recueillir de l'information consiste à demander des renseignements aux tierces parties comme Hydro-Québec. L'enquête a révélé que NAV CANADA avait présenté quelques demandes d'information à Hydro-Québec concernant ses lignes de transport d'électricité au cours des 3 dernières années, mais ces efforts ont eu des résultats mitigés. Le partage d'information étant volontaire, NAV CANADA ne peut qu'en faire la demande.

Durant le vol en cause, l'observateur s'est servi d'un système mondial de localisation (GPS) pour noter les endroits où la végétation empiétait sur les lignes électriques. Il avait également avec lui des cartes géographiques détaillées qui indiquaient l'infrastructure d'Hydro-Québec, y compris les lignes de transport d'électricité et les pylônes. Il avait ces cartes en cas de panne du GPS. Le pilote savait que ces cartes existaient, mais il ne s'en servait pas pour la navigation.

1.9 Communications

s.o.

1.10 Renseignements sur l'aérodrome

s.o.

1.11 Enregistreurs de bord

L'hélicoptère n'était pas doté d'un enregistreur de données de vol ou d'un enregistreur de conversations de poste de pilotage et n'était pas tenu d'en avoir selon la réglementation en vigueur.

1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

Les restes de la cellule ont été examinés, et il n'y avait aucun signe d'anomalie ou de défectuosité antérieures à l'accident des commandes de vol, de la chaîne dynamique ou de tout autre système de l'aéronef qui aurait pu contribuer à l'accident.

La verrière, les portes, le tableau de bord, la console des instruments et le pare-brise du poste de pilotage ont été arrachés de la cabine et retrouvés sous le plancher de la cabine.

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

s.o.

1.14 Incendie

Aucun incendie ne s'est déclaré après l'impact.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

1.15.1 Généralités

Le toit de la cabine de l'hélicoptère a été arraché à la cloison arrière et au plancher de la cabine durant la chute. L'hélicoptère gisait sur son côté gauche sur le sol enneigé. Les sièges avant du pilote et du passager se sont brisés sous les charges latérales à l'impact, mais ont retenu les occupants dans leur position.

Après une chute d'environ 50 pieds, l'hélicoptère s'est écrasé sur le sol gelé, le pilote et l'observateur étant retenus dans leurs sièges grâce à leurs ceintures de sécurité à 4 points. Le dossier du siège du pilote s'est brisé et s'est séparé près de la base du siège. Le siège de l'observateur s'est détaché du plancher de la cabine par la force latérale vers la gauche (photo 2).

Photo 2. Plancher de la cabine du C-FHPC (Source : Héli-Boréal)
Plancher de la cabine du C-FHPC (Source : Héli-Boréal)

Les blessures qu'ont subies les deux occupants sont attribuables à la désintégration du toit du poste de pilotage et de la cabine durant la chute à travers les arbres.

1.15.2 Casques de vol

Le pilote portait un casque de vol, mais l'a perdu sous la force de l'impact.

L'examen du casque a révélé plusieurs marques d'impact visibles sur le côté gauche et sur le dessus. La visière du casque présentait 2 profondes égratignures partant de la joue et de la tempe gauches vers l'œil gauche et le nez. Les photos 3 et 4 montrent l'état du casque après l'impact. La visière s'est brisée et a été égratignée sur sa surface par les charges d'impact. L'examen du matériau de la jugulaire du casque adjacent à la visière a révélé de profondes marques de frottement. Il n'a toutefois pas été possible de déterminer comment le pilote a perdu son casque.

Photo 3. Casque du pilote montrant les dommages au côté gauche de la visière causés par l'impact (Source : Héli-Boréal)
Casque du pilote montrant les dommages au côté gauche de la visière causés par l'impact (Source : Héli-Boréal)
Photo 4. Gros plan du côté gauche de la visière du casque du pilote montrant les dommages causés par l'impact (Source : Héli-Boréal)
Gros plan du côté gauche de la visière du casque du pilote montrant les dommages causés par l'impact (Source : Héli-Boréal)

La tête est la deuxième partie du corps la plus fréquemment blessée au cours d'écrasements d'hélicoptère auxquels les occupants surviventNote de bas de page 11. Selon les résultats de recherches réalisées par les forces militaires des États-Unis, les occupants d'un hélicoptère qui ne portent pas de casque de vol s'exposent à un risque jusqu'à 6 fois plus élevé de blessures mortelles à la têteNote de bas de page 12. Les effets des blessures non mortelles à la tête vont de la confusion et de l'incapacité de se concentrer momentanées à la perte de conscience complèteNote de bas de page 13. Ces effets invalidants peuvent entraver la capacité d'un pilote à quitter rapidement son hélicoptère et à aider les passagers dans les situations exigeant l'évacuation de l'aéronef ou l'application de mesures d'urgence pour assurer la survie de ses occupants.

En 1988, le National Transportation Safety Board (NTSB) des États-Unis a examiné 59 accidents d'aviation des services médicaux d'urgence survenus entre le 11 mai 1978 et le 3 décembre 1986. Cette étude a mené à la recommandation A–88–009 du NTSB faite à la Federal Aviation Administration (FAA), et à la recommandation A–88–014 faite à l'American Society of Hospital Based Emergency Aeromedical Service; elles leur demandaient d'exiger que les équipages de conduite et le personnel médical portent un casque de vol et les encourageaient à le faire afin de réduire les risques de blessure ou de décès.

En 1998, Transports Canada (TC) a reconnu les avantages, sur le plan de la sécurité, du port du casque de vol dans le rapport du Groupe de travail chargé de l'examen de la sécurité de l'exploitation d'un taxi aérien (SATOPS), dans lequel TC s'engageait à mettre en œuvre les recommandations suivantes :

Transports Canada devrait continuer à promouvoir, dans Sécurité aérienne – Nouvelles et Sécurité aérienne – VortexNote de bas de page 14, les avantages du port du casque pour les pilotes d'hélicoptère, particulièrement durant les opérations de travail aérien. Transports Canada devrait aussi inciter les unités de formation au pilotage à encourager les élèves-pilotes à porter un casqueNote de bas de page 15.

De plus, le groupe SATOPS a formulé la recommandation suivante à l'intention des exploitants aériens :

Les exploitants d'hélicoptère, en particulier ceux qui exécutent des opérations de travail aérien, devraient encourager leurs pilotes à porter un casque; les pilotes d'hélicoptère commerciaux devraient porter un casque et les unités de formation au pilotage devraient encourager les élèves-pilotes d'hélicoptère à en porter unNote de bas de page 16.

Le BST a documenté de multiples événementsNote de bas de page 17 lors desquels le port d'un casque de vol aurait probablement évité aux pilotes de subir des blessures à la tête ou en aurait réduit la gravité. Il n'y a aucune réglementation en vigueur qui oblige les pilotes d'hélicoptère à porter un casque de vol.

Le Rapport d'enquête aéronautique A09A0016 du BST a conclu que malgré les avantages abondamment documentés des casques protecteurs sur le plan de la sécurité et de la nature exigeante du vol en hélicoptère, la majorité des pilotes d'hélicoptère continuent d'effectuer leurs vols sans protection pour la tête. Dans le même ordre d'idées, l'enquête a aussi établi que la plupart des exploitants d'hélicoptère canadiens n'exigent pas que leurs pilotes portent un casque de vol, ni ne font la promotion active du port du casque.

Le 27 juin 2011, afin de souligner les avantages des casques protecteurs, le conseil d'administration de l'Association canadienne de l'hélicoptère (ACH) a adopté une résolution qui précise ce qui suit :

L'ACH recommande fortement à ses membres exploitants de promouvoir l'utilisation de casques protecteurs auprès des membres d'équipage de conduite d'hélicoptères dans toutes les circonstances opérationnelles où ces casques sont permis. L'ACH souligne également, cependant, que certaines configurations d'aéronefs ou de cabines de pilotage peuvent empêcher le port d'un casque en toute sécurité.

À Héli-Boréal, même s'il n'y a aucune politique écrite régissant le port du casque, environ 80 % des pilotes ont un casque et le portent.

1.16 Essais et recherches

On a fourni au laboratoire du BST le dispositif GPS manuel que l'observateur a utilisé pour documenter la région du levé. Le laboratoire du BST a téléchargé les données du dispositif du vol en cause, puis analysé l'écart entre le moment de l'accident consigné par le GPS et le moment où le Centre canadien de contrôle des missions (CCCM) a reçu le signal de la radiobalise de repérage d'urgence.

Les données du dispositif GPS téléchargées ont indiqué la trajectoire de vol et le lieu de l'accident sous la ligne de transport d'électricité de 315 kV à 10 h 20 min 51 s. Le rapport du CCCM sur le dossier de la radiobalise en cause a montré que la première réception satellite a eu lieu à 10 h 45 min 38 s, représentant un retard d'environ 25 minutes par rapport à l'heure consignée par le dispositif GPS. Le laboratoire du BST a conclu que l'effet jumelé de l'atténuation du signal de la radiobalise de repérage d'urgence attribuable à l'emplacement de l'hélicoptère sous le couvert forestier et de la dégradation du signal attribuable à la position horizontale de l'antenne et au blocage du signal par le capot de l'hélicoptère pourrait avoir retardé le décodage du signal de la radiobalise par le système satellite.

1.16.1 Rapports du laboratoire du BST

Le BST a complété le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

1.17.1 Généralités

Héli-Boréal exploite 7 hélicoptères (6 Eurocopter AS 350 et 1 EC120) ainsi que 2 aéronefs à voilure fixe (Beech King Air 90 et Cessna 206U) et détient un certificat d'exploitation aérienne valide. Sa base se trouve à environ 7 milles marins au nord-ouest de Sept-Îles. Ces hélicoptères sont exploités en vertu duR AC, sous-partie 703 – Exploitation d'un taxi aérien.

Héli-Boréal effectue la majorité de ses vols pour le compte d'Hydro-Québec, dans le cadre de projets de construction, d'inspection et d'entretien.

Héli-Boréal a adopté son propre système de gestion de la sécurité (SGS) bien que la réglementation en vigueur ne l'exige pas; le président de l'entreprise en est le cadre supérieur responsable. Étant donné la petite taille de l'entreprise, tous les employés prennent part aux discussions sur les conditions dangereuses qui sont signalées et agissent dans le cadre d'un processus sans formalité. L'équipe de gestion du SGS, qui comprend le président, le pilote en chef, le directeur de l'exploitation et le directeur de l'entretien, se réunit de manière officielle et informelle pour se pencher sur les enjeux de sécurité à mesure qu'ils se présentent.

En avril 2014, un hélicoptère d'Héli-Boréal est entré en collision avec un hauban d'une tour de télécommunication. L'entreprise a immédiatement lancé une enquête dans le cadre de son SGS et a adopté des mesures correctives, y compris l'offre d'une formation supplémentaire sur les dangers du vol à basse altitude. Cet exposé de formation, mise au point par le pilote instructeur en chef (le pilote en cause), portait sur l'identification des balises et repères visuels à proximité des pylônes et lignes électriques, les dangers liés aux différentes étapes de vol, les méthodes pour s'approcher de lignes électriques et l'importance de demeurer vigilant aux risques inhérents aux opérations à basse altitude. Cet exposé, auquel tous les pilotes de l'entreprise ont assisté, indique que le pilote en cause connaissait bien les dangers du vol à basse altitude et y était bien formé.

1.17.2 Surveillance réglementaire

TC prépare et administre des politiques et des règlements pour le réseau d'aviation civile. Son programme de sécurité aérienne vise à gérer les risques à des niveaux acceptables au moyen d'une approche systémique. La mise en place de SGS dans le secteur de l'aviation change fondamentalement la façon dont TC conçoit ses responsabilités en matière de surveillance.

Les méthodes de surveillance classiques ont été remplacées par des évaluations et des inspections de validation de programme (IVP)Note de bas de page 18 comme principaux outils de surveillance. L'évaluation et l'IVP servent à mesurer l'efficacité du contrôle des opérations et le niveau de conformité au RAC, mais l'IVP constitue plutôt une méthode de surveillance périodiqueNote de bas de page 19. TC effectue des inspections et interventions supplémentaires au besoin et selon les ressources disponibles, y compris d'occasionnelles vérifications sur le terrain des aéronefs présents à la base de l'exploitant.

Correctement mis en œuvre, les SGS permettent aux sociétés de transport aérien de reconnaître les dangers, de gérer les risques et d'élaborer des processus de sécurité efficaces, puis de s'y conformer. Les grands exploitants aériens commerciaux au Canada qui mènent leurs activités en vertu de la sous-partie 705 du RAC sont tenus d'avoir un SGS depuis 2005. Toutefois, pour les exploitants moins importants comme ceux qui effectuent du travail aérien en vertu de la sous-partie 702 du RAC, qui fournissent des services de taxi aérien en vertu de la sous-partie 703 du RAC, ou qui offrent des services aériens de navette en vertu de la sous-partie 704 du RAC, la mise en œuvre d'un SGS a été retardée afin de leur accorder plus de temps pour améliorer leurs procédures, leurs documents d'orientation et leur formation. Pourtant, de 2004 à 2013, ce groupe dans son ensemble a enregistré 92 % des accidents d'aéronefs commerciaux et 95 % des pertes de vie liées à des accidents d'aéronefs commerciaux.

Dans la Liste de surveillance 2014, le BST demandait donc que TC adopte une réglementation qui obligerait tous les exploitants du secteur de l'aviation à se doter de processus officiels de gestion de la sécurité, et que TC contrôle ces processus.

Puisque le SGS d'Héli-Boréal n'est pas exigé par le RAC, il n'a pas fait l'objet d'un contrôle par TC.

TC a fait une inspection de validation de programme (IVP) à Héli-Boréal en octobre 2009 afin de déterminer l'efficacité du système d'assurance de la qualité de l'entreprise. Cette IVP a été faite conformément à l'Instruction visant le personnel no SUR-001, Procédures de surveillance. Le résultat de l'IVP n'a révélé aucune non-conformité à quelque aspect de contrôle opérationnel que ce soit. En effet, tous les critères de mesure avaient été respectés. En décembre 2010, TC a fait une autre IVP à Héli-Boréal; cette fois, en vue de déterminer si l'entreprise avait un manuel d'exploitation de la compagnie, s'il était conforme à la réglementation, si le personnel adhérait à ses directives et si l'entreprise avait un processus de contrôle visant ce manuel. L'IVP n'a établi qu'un seul fait, qui concernait le fonctionnement et la réinitialisation de disjoncteurs du circuit électrique.

1.17.3 Surveillance par les utilisateurs habituels de services d'hélicoptère

En général, les clients qui utilisent les services d'hélicoptère commerciaux se fient à l'exploitant et au pilote pour garantir la sécurité des vols. Toutefois, l'employeur est responsable de la santé et de la sécurité de ses employés et doit prendre des précautions raisonnables pour garantir un environnement de travail sûr. Par conséquent, certains utilisateurs habituels de services d'hélicoptère, y compris Hydro-Québec, ont décidé de mettre en œuvre leurs propres mesures et critères de surveillance en plus des normes du RAC.

1.17.4 Hydro-Québec

Le service de transport aérien d'Hydro-Québec fait appel aux services de plusieurs exploitants au Québec pour effectuer le travail aérien par hélicoptère. Hydro-Québec exploite environ 35 000 kilomètres de lignes de distribution d'électricité à l'échelle du Québec. La moyenne annuelle des heures de vol varie de 11 000 à 15 000 heures, dont environ 5000 heures sont consacrées à l'inspection et à l'entretien des lignes électriques. Hydro-Québec est le plus important client du secteur des services d'hélicoptère au Québec. En 1992, à la suite d'une série d'accidents, Hydro-Québec a mis en place un programme de qualification et d'audit technique pour évaluer les entreprises de services d'hélicoptère dont elle utilisait les services et pour s'assurer que celles-ci entretiennent leurs aéronefs et mènent leurs activités conformément au RAC.

En 2005, Hydro-Québec a mis au point une méthode d'évaluation technique pour évaluer les exploitants qu'elle utilise. Cette méthode a été mise en œuvre en collaboration avec l'École nationale d'aérotechnique (ÉNA), qui fait un audit de qualité en moyenne tous les 18 mois et produit un rapport. Hydro-Québec fait ensuite une évaluation fondée sur la performance antérieure de l'exploitant et son adhésion aux exigences contractuelles. Le résultat de cette évaluation s'exprime en pourcentage et sert à établir un niveau de qualification pour l'exploitantNote de bas de page 20. Hydro-Québec précise le niveau de qualification minimal dans ses appels d'offres pour des services d'hélicoptère.

Héli-Boréal a fait l'objet d'un audit de qualification le 30 avril 2013; l'entreprise a obtenu la cote R1 (niveau le plus élevé) grâce à une note de 100 %. C'était la première fois qu'Hydro-Québec accordait une note parfaite dans le cadre de l'audit d'un exploitant de services d'hélicoptère.

1.17.4.1 Suivi du vol

Comme Hydro-Québec a son propre service de contrôle en vol, les pilotes d'Héli-Boréal retenus pour effectuer des vols pour Hydro-Québec utilisent ce service de contrôle en vol. Au moment de l'accident, l'équipement de contrôle en vol de l'hélicoptère faisait l'objet de travaux d'entretien; le pilote a donc dû appeler le centre de régulation des vols d'Hydro‑Québec après avoir décollé, puis devait établir le contact radio au moins toutes les 60 minutes. En l'absence d'une communication de l'hélicoptère, Hydro-Québec devait mettre en œuvre ses procédures d'urgence.

L'hélicoptère en cause a quitté le barrage SM-3 à 9 h 55 et n'était en patrouille que depuis environ 25 minutes quand l'accident s'est produit. Le pilote a signalé l'accident à l'entreprise avant qu'Hydro-Québec ait pu considérer l'hélicoptère comme étant en retard et mettre en œuvre ses procédures d'urgence.

1.17.5 Balisage des lignes électriques

1.17.5.1 Généralités

Il n'existe aucune exigence réglementaire fédéraleNote de bas de page 21 prescrivant d'indiquer l'approche d'une intersection avec une ligne électrique qui peut se trouver sur la trajectoire d'un vol d'inspection de lignes électriques. Hydro-Québec TransÉnergieNote de bas de page 22 a toutefois un document de normesNote de bas de page 23 qui comprend une politique pour indiquer l'emplacement des lignes électriques et des obstacles afin d'optimiser et de normaliser l'installation des balises. Ce balisage sert à garantir la sécurité des vols et à fournir des avertissements normalisés aux personnes qui font les inspections le long des lignes afin qu'elles évitent les obstacles. Les balises sont surtout installées sur les trajectoires de vol en régions rurales et boisées.

D'après ce document d'Hydro-Québec TransÉnergie, toute intersection avec des lignes électriques doit être indiquée par une balise triangulaire jaune et noirNote de bas de page 24 fixée au pylône ou aux poteaux précédant l'intersection. Ainsi, chaque intersection est indiquée par 4 balises triangulaires, une dans chaque direction. Chaque balise triangulaire est positionnée de manière à être visible durant le vol et pointe dans la direction (danger ci-dessus ou ci-dessous) de la ligne électrique qui approche. Ces balises étaient absentes à l'intersection en cause. Dans l'aviation canadienne, les couleurs de peinture orangé et blancNote de bas de page 25 constituent la norme reconnue. Même si cette norme ne peut s'appliquer au signalement des lignes électriques qui se croisent, elle assure une visibilité maximale aux obstacles grâce au contraste des couleurs.

Toujours d'après ce document, les employés d'Hydro-Québec (observateurs) doivent pouvoir identifier les divers types de balises afin d'avertir le pilote, par des signes de main ou verbalement, à l'approche d'un obstacle. Dans l'événement à l'étude, l'observateur savait qu'une intersection avec des lignes électriques approchait et il a indiqué au pilote qu'il avait terminé son inspection. Le pilote a aperçu les fils au moment où l'observateur lui communiquait ce message, mais il a manqué de temps pour réagir.

L'enquête a révélé l'absence de balise et l'utilisation de balises non conformes dans d'autres secteurs du réseau, à l'approche d'intersections avec des lignes électriques.

1.17.5.2 Maîtrise de la végétation autour des lignes électriques

Hydro-Québec TransÉnergie dispose d'un document qui établit les normesNote de bas de page 26 de déboisement des emprisesNote de bas de page 27 sous les lignes électriques. Il stipule la superficie à déboiser sous les lignes électriques en prenant en considération divers facteurs, comme la norme de protection de l'environnementNote de bas de page 28, la fiabilité du réseau ainsi que la sécurité du public et des travailleurs (par exemple les gens qui font l'entretien et l'inspection des lignes électriques).

Le déboisement habituel d'une emprise comprend toute la zone sous les lignes de transport. Aux endroits accessibles uniquement en hélicoptère, on ajoute 26 mètres additionnels d'un côté de la ligne électrique pour permettre l'atterrissage sécuritaire d'un hélicoptère.

L'enquête a révélé que, le long du court segment de la ligne de transport sur la colline où a eu lieu l'accident, une bande d'une largeur de seulement 6 mètres avait été déboisée, étant donné la norme complémentaire de protection de l'environnement établie par le Programme de maîtrise intégrée de la végétation dans les emprises de lignes aériennes de transport d'Hydro‑Québec TransÉnergie.

1.18 Renseignements supplémentaires

Les accidents de collision avec des fils n'ont habituellement rien à voir avec l'expérience de vol d'un pilote. D'après la FAA, l'âge moyen des pilotes en cause dans de tels accidents est de 43,5 ans, et ceux-ci ont accumulé en moyenne 4000 heures de volNote de bas de page 29. De plus, la majorité (86 %)Note de bas de page 30 de ces accidents aux États-Unis sont survenus le jour, dans des conditions météorologiques de vol à vue (VMC).

D'après la FAA, le champ de vision normal pour chaque œil est d'environ 160° à l'horizontale et 135° à la verticale. Toutefois, à l'extérieur de 10° à partir du point focal, l'acuité visuelle diminue de 90 %Note de bas de page 31.

D'après Flight Safety Australia, à propos du champ de vision des pilotes : [traduction] « Un pilote qui approche des fils tendus entre deux pylônes visibles serait soit trop loin pour distinguer les fils, soit trop proche pour voir les deux pylônes à la fois. Les indices qui se trouvent dans le champ de vision se trouveraient au-delà de la portée visuelle, et vice versa. »Note de bas de page 32

Durant le vol en question, l'hélicoptère suivait une route à la droite de la ligne de distribution faisant l'objet du levé en contournant une colline. Le relief était ascendant vers la droite, et le pylône de droite de la ligne de transport de traverse se trouvait à une altitude supérieure à celle de l'hélicoptère (figure 3).

Figure 3. Vue depuis le siège du passager de l'hélicoptère à l'approche de la ligne de transport d'électricité (Source : Héli-Boréal, avec annotations du BST)
Vue depuis le siège du passager de l'hélicoptère à l'approche de la ligne de transport d'électricité (Source : Héli-Boréal, avec annotations du BST)

En outre, plusieurs facteurs peuvent accroître la difficulté d'apercevoir des fils dans l'environnement de l'espace aérien inférieur.

[traduction] La capacité d'un pilote à apercevoir des fils et à éviter d'entrer en collision avec eux est plus ardue à cause de plusieurs facteurs, tels que : l'influx d'indices visuels aperçus depuis une perspective différente en effectuant des travaux à basse altitude; la végétation, les ombres et le relief du sol qui bloquent les fils et leurs structures de soutien de la vue du pilote; l'ergonomie du poste de pilotage; et des facteurs en apparence mineurs, comme des empreintes de main ou des insectes qui tachent le pare-briseNote de bas de page 33.

Ces limites de la vision humaine soulignent l'importance d'avoir d'autres points de référence et repères visuels pour éviter les collisions avec les fils. C'est en partie pour ces raisons qu'Hydro-Québec a adopté des normes de balisage pour aider les pilotes d'hélicoptère à reconnaître les obstacles qui approchent. De plus, le déboisement sous les lignes électriques est fait pour faciliter la construction des lignes électriques et pour permettre leur entretien. En outre, ces zones déboisées servent de repères visuels aux aéronefs qui font des levés et des patrouilles. Ce sont également des endroits sûrs où se poser en cas d'urgence.

1.19 Techniques d'enquête utiles ou efficaces

s.o.

2.0 Analyse

2.1 Généralités

L'examen de l'épave et des composants de l'aéronef n'a révélé aucun élément permettant de croire à une défaillance structurale, à un mauvais fonctionnement des commandes ou à une perte de puissance qui aurait pu être à l'origine de l'accident. L'examen des dossiers d'entretien et du programme d'entretien n'a révélé aucun problème concernant l'entretien de l'hélicoptère qui aurait pu provoquer l'accident. L'enquête sur la surveillance réglementaire de l'entreprise et sa culture de sécurité n'a relevé aucune lacune. L'entreprise a fait preuve d'une approche proactive envers la gestion de la sécurité.

L'hélicoptère a décollé dans de bonnes conditions météorologiques de vol à vue (VMC), et toutes les exigences opérationnelles étaient satisfaites pour le vol. L'analyse porte donc sur les circonstances entourant le vol, le balisage des lignes électriques, le déboisement sous les lignes électriques, la radiobalise de repérage d'urgence (ELT), les lacunes de la carte de navigation (VNC) pour les règles de vol à vue (VFR), les chances de survie et le port du casque de vol.

2.2 Balisage des lignes électriques

Le pilote volait à basse altitude en suivant une ligne de distribution d'électricité de 25 kilovolts à une altitude d'environ 50 pieds au-dessus du niveau du sol (agl), dans des vallées, près de la cime des arbres. Cette tâche exigeait une grande concentration. Au moment de l'événement, le vol suivait une ligne de distribution qui contournait une colline à droite. La ligne de transport d'électricité de 315 kV de traverse est apparue à la fin du virage. Dans de telles conditions de vol, les indices périphériques que perçoit le pilote sont plus étroits que lorsqu'il vole à une altitude sécuritaire, à l'écart d'obstacles au sol. Au moment où l'observateur a indiqué qu'il avait terminé son levé pour ce secteur, les pylônes de la ligne électrique de traverse se trouvaient probablement à l'extérieur du champ de vision du pilote. Il n'y avait pas assez de temps pour réagir avant de frapper les fils.

Les indices que sont les balises triangulaires servent à avertir les pilotes de dangers qui approchent. La ligne de distribution qui faisait l'objet du levé était dépourvue des balises standards signalant l'approche de l'intersection avec la ligne de transport située au-dessus. L'enquête a révélé l'absence de balises triangulaires à d'autres intersections de lignes électriques ailleurs dans le réseau d'Hydro-Québec. En outre, sur certaines des lignes balisées, les balises n'étaient pas conformes à la norme d'Hydro-Québec TransÉnergie en ce qui concerne leur dimension et leurs couleurs. La probabilité que les balises jaune et noir, lorsqu'elles étaient en place, soient vues à temps était également réduite, comparativement aux balises de couleurs orangé et blanc, qui sont les couleurs normalisées dans l'aviation. Si les sociétés de distribution d'électricité ne font pas respecter leurs normes en matière de balisage des lignes électriques, il y a un risque accru de collision avec des fils par des aéronefs volant à basse altitude.

Hydro-Québec TransÉnergie a établi une norme sectorielle pour s'assurer que tous les équipages de conduite qui participent à l'inspection, à l'entretien ou à d'autres travaux touchant les lignes électriques ont les connaissances en matière de sécurité relatives à ces travaux lorsqu'ils volent à proximité de lignes électriques. Un observateur peut être fort utile dans le poste de pilotage comme vigie additionnelle. On apprend aux observateurs à reconnaître les balises sur les pylônes et poteaux qui indiquent l'approche d'une intersection de lignes électriques. Si les dangers ne sont pas communiqués efficacement et à temps au pilote, il y a un risque accru de collision avec un obstacle, ce qui pourrait compromettre la sécurité du vol.

2.3 Maîtrise de la végétation autour des lignes électriques

Hydro-Québec TransÉnergie a établi une norme en matière de déboisement sous les lignes électriques et autour de celles-ci pour permettre leur construction et leur entretien et pour assurer la fiabilité du réseau de distribution d'électricité. La société considère que ce déboisement est essentiel pour la sécurité des vols d'hélicoptère qui sont nécessaires au soutien du réseau de distribution.

Pour des considérations d'ordre environnemental, le court segment sous la ligne de transport sur la colline n'avait été que partiellement déboisé. Cette situation a réduit la possibilité d'avertir le pilote de la présence de la ligne de transport d'électricité et a limité l'espace disponible pour faire un atterrissage d'urgence.

Le pilote et l'observateur n'ont reçu aucun des indices visuels que présentent normalement les couloirs déboisés. Après qu'il est entré en collision avec le fil, le pilote a tenté de diriger l'hélicoptère vers l'étroit couloir sous la ligne électrique, mais a plutôt heurté des arbres qui le bordaient. Si l'on ne maîtrise pas la végétation sous les lignes électriques, il y a un risque que les hélicoptères qui volent à basse altitude pour faire des levés soient privés d'aire d'atterrissage appropriée en cas d'urgence.

2.4 Radiobalise de repérage d'urgence

L'hélicoptère s'est immobilisé sur son côté gauche dans une région boisée. Pour appeler l'exploitant avec le téléphone satellite, le pilote a dû s'éloigner de l'hélicoptère vers une aire dégagée afin que le satellite puisse capter le signal du téléphone. Ainsi, il est probable que le satellite n'ait pas immédiatement reçu le signal de la radiobalise de repérage d'urgence (ELT), étant donné que le signal était bloqué par les arbres et par le capot de l'hélicoptère. Si le signal de la radiobalise n'est pas reçu rapidement, il pourrait s'ensuivre un retard dans les opérations de sauvetage, diminuant de ce fait les chances de survie.

2.5 Cartes de navigation

Dans beaucoup d'opérations aériennes, qu'il s'agisse d'aviation commerciale ou générale, les cartes sont essentielles pour aider à cerner les dangers potentiels et à naviguer précisément. L'exactitude des renseignements que contiennent les cartes VNC doit permettre aux pilotes d'effectuer leurs vols en toute sécurité. NAV CANADA a pour responsabilité de fournir des données aéronautiques exactes aux utilisateurs ou aux pilotes. Plusieurs fabricants de systèmes de navigation électroniques numériques se servent des données de NAV CANADA pour leurs bases de données. Tout renseignement erroné ou manquant se trouve ainsi disséminé dans la communauté d'aviation. Le processus de demande pour obtenir des renseignements sur les obstacles a donné des résultats mitigés. Si le processus de collecte de renseignements pour mettre à jour les produits d'information aéronautiques est inefficace, il y a un risque que ces produits omettent des renseignements nécessaires pour garantir la sécurité des vols. Si l'on n'utilise pas l'information de navigation disponible, il y a un risque de collision avec un obstacle.

2.6 Casques

Le pilote a perdu son casque pendant la séquence d'événements ayant mené à l'impact. Par ailleurs, la verrière de l'hélicoptère ne protégeait plus les occupants durant la chute. Le casque a offert une protection suffisante au pilote pour lui permettre de demeurer conscient après l'impact, de couper le moteur et de venir en aide à l'observateur grièvement blessé. L'examen du casque a révélé des signes d'un impact important qui aurait causé de graves blessures au visage et à la tête si le pilote ne l'avait pas porté. Les pilotes qui ne portent pas de casque muni d'une visière s'exposent à des risques accrus d'invalidité causée par des blessures à la tête lors d'un écrasement au sol ou d'un amerrissage forcé. De telles blessures réduisent la capacité des pilotes d'aider les passagers à évacuer en toute sécurité et à survivre à un accident.

Si les pilotes d'hélicoptère ne portent pas de casque, ils courent un plus grand risque de subir des blessures graves qui pourraient avoir une incidence non seulement sur leur propre survie, mais aussi sur leur capacité d'aider les passagers et d'obtenir de l'aide.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. La ligne de distribution de 25 kV qui faisait l'objet du levé était dépourvue des balises triangulaires standards d'Hydro-Québec TransÉnergie, de sorte qu'il n'y avait pas d'avertissement à l'approche d'une intersection avec une ligne de transport d'électricité de 315 kV.
  2. L'hélicoptère suivait la ligne de distribution au contour d'une colline, et ce relief a empêché le pilote d'apercevoir l'intersection avec la ligne de transport de 315 kV à temps pour éviter une collision.
  3. Une pale du rotor principal a heurté un fil de la ligne électrique; ce choc a causé de violentes vibrations et a exigé un atterrissage d'urgence.
  4. L'aire sous la ligne électrique n'avait pas été déboisée; l'hélicoptère a heurté des arbres et a chuté au sol.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. Si le signal de la radiobalise de repérage d'urgence n'est pas reçu rapidement, il pourrait s'ensuivre un retard dans les opérations de sauvetage, diminuant de ce fait les chances de survie.
  2. Si le processus de collecte de renseignements pour mettre à jour les produits d'information aéronautiques est inefficace, il y a un risque que ces produits omettent des renseignements nécessaires pour garantir la sécurité des vols.
  3. Si l'on n'utilise pas l'information de navigation disponible, il y a un risque de collision avec un obstacle.
  4. Si les pilotes d'hélicoptère ne portent pas de casque, ils courent un plus grand risque de subir des blessures graves qui pourraient avoir une incidence non seulement sur leur propre survie, mais aussi sur leur capacité d'aider les passagers et d'obtenir de l'aide.
  5. Si les sociétés de distribution d'électricité ne font pas respecter leurs normes en matière de balisage des lignes électriques, il y a un risque accru de collision avec des fils par des aéronefs volant à basse altitude.
  6. Si les dangers ne sont pas communiqués efficacement et à temps au pilote, il y a un risque accru de collision avec un obstacle, ce qui pourrait compromettre la sécurité du vol.
  7. Si l'on ne maîtrise pas la végétation sous les lignes électriques, il y a un risque que les hélicoptères qui volent à basse altitude pour faire des levés soient privés d'aire d'atterrissage appropriée en cas d'urgence.

3.3 Autres faits établis

  1. L'effet jumelé de l'atténuation du signal de la radiobalise de repérage d'urgence attribuable à l'emplacement de l'hélicoptère sous le couvert forestier et de la dégradation du signal attribuable à la position horizontale de l'antenne et au blocage du signal par le capot de l'hélicoptère pourrait avoir retardé le décodage du signal de la radiobalise par le système satellite.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.2 NAV CANADA

NAV CANADA a publié un document officiel sur mesure (circulaire d'information aéronautique 1/15 datée du 8 janvier 2015). L'objectif de ce document consiste à fournir des précisions sur l'utilisation prévue des publications d'information aéronautique. L'utilisation de publications de façons qui ne correspondent pas à leurs fins prévues peut avoir une incidence négative considérable sur la sécurité. Ce document est disponible sur le site Web de NAV CANADA.

NAV CANADA a conclu une entente avec Hydro-Québec afin que celle-ci partage ses données sur les lignes électriques en vue de les utiliser pour établir des repères de navigation sur des cartes données. De plus, en janvier 2015, Transports Canada et NAV CANADA ont confirmé par lettres leur soutien, à l'échelle du pays, à un programme d'acquisition de données qui permettra d'obtenir des données précises de sources autorisées.

4.3 Héli-Boréal inc.

Héli-Boréal inc. a mis en place un programme de sécurité afin d'offrir une compensation pécuniaire à ses pilotes pour l'achat d'un casque de vol.

Le programme de formation au pilotage d'Héli-Boréal inc. a été modifié afin d'y inclure des techniques pour améliorer les vols d'inspection des lignes électriques. Cette formation intègre les résultats d'études récentes sur la surveillance visuelle, sur l'examen avant le vol de l'environnement de vol et sur d'autres tâches dans le poste de pilotage qui pourraient distraire l'attention. Cette formation traite également de l'évitement d'obstacles.

Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .