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Rapport d'enquête aéronautique A14O0105

Perte de maîtrise à l'amerrissage
Sudbury Aviation Limited
de Havilland DHC-2 Mk. I, C-FHVT
Lac Kennedy (Ontario)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le de Havilland DHC-2 Beaver monté sur flotteurs (immatriculé C-FHVT, numéro de série 284) exploité par Sudbury Aviation Limited effectuait une approche au lac Kennedy (Ontario) avec le pilote et 2 passagers à bord, lorsque l’aéronef s’est incliné sur la gauche avant l’arrondi. Le pilote a tenté de reprendre la maîtrise de l’aéronef en braquant l’aileron de droite et en donnant au maximum du palonnier droit. La manœuvre a échoué, et l’aéronef a percuté le relief boisé ascendant au-dessus du rivage. L’aéronef s’est immobilisé sur son flanc droit sur un terrain en pente. Le pilote et le passager qui occupait le siège arrière ont été légèrement blessés. L’autre passager, qui occupait le siège avant droit, n’a pas été blessé. Les 3 occupants ont pu gagner à pied le camp de pêche de l’entreprise au bord du lac. Il n’y a pas eu d’incendie, et un des passagers a déclenché manuellement la radiobalise de repérage d’urgence (ELT) de 406 mégahertz. L’exploitant a dépêché un autre de ses aéronefs (un Cessna 185) au lac quand il a constaté le retard du C-FHVT. Un aéronef de recherche et sauvetage, qui répondait au signal de détresse, a lui aussi repéré le lieu de l’accident. La communication radio entre le Cessna 185 et l’aéronef de recherche et sauvetage a confirmé à ce dernier que son aide ne serait pas nécessaire. L’accident est survenu à 14 h 25, heure avancée de l’Est.

Renseignements de base

Déroulement du vol

Sudbury Aviation Limited exploite plusieurs camps de pêche situés à différents lacs dans le nord de l’Ontario. Deux fois par semaine, 1 des 2 de Havilland Beaver de l’entreprise se rend aux camps pour aller voir les clients et leur fournir le matériel dont ils ont besoin, ou pour préparer les camps avant l’arrivée de clients. Durant le vol en cause le 25 juin 2014, l’aéronef de Havilland DHC-2 Beaver monté sur flotteurs (immatriculé C-FHVT, numéro de série 284) devait se rendre à 3 camps; il était chargé de vivres, de carburant pour moteurs hors-bord, et de 2 moteurs hors-bord destinés au camp du lac Kennedy.

Outre le pilote, le chef pilote de l’entreprise occupait le siège avant droit comme passager, et un préposé au quai était assis au centre de la banquette arrière. Les 3 occupants portaient leur sangle sous-abdominale. Les 2 sièges avant étaient munis de ceintures-baudriers, mais les occupants ne les portaient pas.

Les vols vers les 2 premiers camps se sont déroulés sans incident. En route vers le lac Kennedy, l’aéronef a exécuté une approche indirecte en descendant, à partir du nord-est, ce qui a permis au pilote d’évaluer les vents et l’état du plan d’eau.

Long et étroit, le lac Kennedy est flanqué d’un relief ascendant depuis ses rives. Les rives sont boisées, et il y a par endroits des parois rocheuses verticales.

Le pilote a sorti les volets alors que l’aéronef descendait sous la cime des arbres. Au moment où l’aéronef a atteint la partie étroite du lac, il a effectué un mouvement de lacet à gauche, et l’aile gauche s’est inclinée juste avant l’arrondi. Le pilote a tenté de contrer ce mouvement à l’aide du palonnier et de l’aileron de droite, mais la manœuvre a échoué. L’aéronef a maintenu sa trajectoire vers le rivage ascendant; il a percuté le relief et des arbres dans une assiette légèrement en cabré et les ailes à l’horizontale. L’accident est survenu à 14 h 25 heure avancée de l’Est.

Une fois immobilisé, l’aéronef était couché sur son côté droit, de telle manière que les portes avant et de cabine droites faisaient face au bas de la pente (photo 1). L’aile droite a été arrachée du fuselage. Craignant que l’aéronef ne glisse sur le sol incliné, les occupants se sont déplacés prudemment à l’intérieur de la cabine vers la porte de cabine gauche. Les 3 occupants ont évacué l’aéronef par la porte de cabine gauche, qu’ils n’ont pu ouvrir qu’en partie, car l’aile gauche, lourdement endommagée, faisait obstacle.

Photo 1. Épave du C-FHVT, un de Havilland DHC-2 monté sur flotteurs
Photo 1. Épave du C-FHVT, un de Havilland DHC-2 monté sur flotteurs

Avant d’évacuer l’épave, le chef pilote a tenté de transmettre un message radio sur la fréquence 121,5 mégahertz, mais n’a obtenu aucune réponse. Le pilote et le chef pilote ont coupé les circuits de l’aéronef avant de l’évacuer, et le chef pilote a réglé l’interrupteur de la radiobalise de repérage d’urgence (ELT) à « ON ».

Les 3 occupants ont récupéré la trousse de survie, la trousse de premiers soins et des bouteilles d’eau de l’épave, puis ils ont gagné à pied le camp situé non loin de là. Plus tard, un Cessna 185 de l’entreprise est arrivé au camp et a ramené les occupants à la base. Un aéronef de recherche et sauvetage (SAR) qui répondait au signal de détresse a communiqué avec le Cessna 185. Après avoir déterminé que son aide n’était pas nécessaire, l’aéronef SAR a quitté les lieux.

Renseignements sur le pilote

Les dossiers indiquent que le pilote possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Le pilote était titulaire d’une licence de pilote professionnel depuis 1990. Il détenait également un certificat médical valide assorti d’une restriction imposant le port obligatoire de lunettes. On a estimé l’expérience de vol du pilote à 3500 heures, dont environ 1000 heures aux commandes du C-FHVT. Le pilote effectuait environ 140 heures de vol par année en tant que commandant de bord du C-FHVT.

Sudbury Aviation Limited

Sudbury Aviation Limited exploite 2 DHC-2 Beaver, 1 Cessna 172 et 1 Cessna 185 en vertu de la sous-partie 703 du Règlement de l’aviation canadien (RAC). De mai au début de novembre, l’entreprise transporte des passagers et du matériel à destination de divers camps de pêche depuis sa base de Sudbury. D’après la réglementation en vigueur, Sudbury Aviation Limited n’est pas tenue de se conformer à un système de gestion de la sécurité (SGS).

Conditions météorologiques

Des conditions météorologiques de vol à vue (VMC) prévalaient au moment de l’accident. Le message d’observation météorologique régulière pour l’aviation (METAR) de 14 h pour Sudbury (Ontario), qui se trouve à environ 40 milles marins au sud du lac Kennedy, était le suivant : température de 20 °C, point de rosée de 8 °C, vents du 020° vrai (V) à 12 nœuds, rafales jusqu’à 19 nœuds sous un ciel généralement nuageux. Il n’y avait aucune précipitation et la visibilité était maximale. Il n’y a aucun centre de veille météorologique près du lac Kennedy. Le pilote a rapporté que les vents étaient variables avec des rafales de l’ouest. Le relief du sol autour du lac peut influer presque instantanément sur la direction et la vitesse des vents, sur le côté du lac au vent. La déclinaison magnétique au lac Kennedy est de 12 degrés ouest.

Emplacement du lac Kennedy et de l’aéronef

Le lac Kennedy est étroit en son centre, mais comprend des plans d’eau libres plus larges à ses deux extrémités. Le lac est orienté selon un cap magnétique de 300/120°  et comporte des pentes boisées sur chaque rive. Sur les lieux de l’accident (figure 1), la pente s’élève à une hauteur d’environ 50 pieds au-dessus de la surface de l’eau; les arbres qui s’y trouvent mesurent environ 30 pieds. L’aéronef s’est immobilisé à environ 30 pieds au-dessus de la surface de l’eau. On estime à 170 pieds la largeur du lac au point d’amerrissage prévu. L’aéronef en cause a une envergure de 48 pieds, ce qui laisse environ 60 pieds entre le bout de l’aile et le rivage de chaque côté de l’aéronef. Le relief autour du lac Kennedy a une influence prépondérante sur le régime des vents et fait que les vents changent rapidement de direction, surtout lorsqu’ils soufflent en rafales. Cet état est plus prononcé lorsqu’un aéronef descend sous la cime des arbres ou lorsqu’il se trouve sur la surface de l’eau.

Figure 1. Lac Kennedy
Figure 1. Lac Kennedy

Renseignements sur l’aéronef

L’aéronef était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et respectait les limites de poids, de masse et de centrage établies dans le manuel d’utilisation de l’aéronef.

L’entreprise effectue la majorité des travaux de maintenance et des inspections au printemps de chaque année, avant l’entrée en service des aéronefs. Il n’y a eu aucune défaillance de la cellule ni aucun mauvais fonctionnement d’un système avant l’impact. Les dommages et la torsion des pales d’hélice indiquent que le moteur produisait de la puissance au moment de l’impact.

On a déposé l’anémomètre (ASI) pour l’expédier au laboratoire du BST afin de déterminer la vitesse anémométrique au moment de l’impact. L’examen a révélé que les forces d’impact durant l’accident n’étaient pas suffisantes pour déformer l’aiguille de l’ASI ou créer une marque sur le cadran de l’instrument qui permettrait de déterminer la vitesse anémométrique au moment de l’impact.

On a examiné le système de retenue après avoir appris que durant la plupart des vols, les pilotes de l’entreprise ne portaient pas les ceintures-baudriers. Les ceintures-baudriers à bord de l’aéronef en cause comprennent une sangle distincte que l’on doit tirer d’un enrouleur à inertie fixé au plafond, et elles s’attachent à la boucle de la sangle sous-abdominale; seuls les sièges avant en sont munis. Les pilotes ont expliqué qu’ils ne portaient pas les ceintures-baudriers, car lorsqu’elles sont bouclées à la sangle sous-abdominale, ils ne peuvent atteindre le levier des gouvernails marins, même lorsqu’elles sont déroulées au maximum. Pour atteindre le levier des gouvernails marins, les pilotes doivent détacher les ceintures-baudriers avant d’amorcer la course au décollage, et de nouveau après l’amerrissage, avant de circuler sur l’eau. En outre, lorsqu’elles sont complètement enroulées, elles sont difficiles à atteindre depuis le siège du pilote.

L’installation des ceintures-baudriers, qui remontait à 1995, était conforme au certificat de type supplémentaire (CTS) SA711GL et à la circulaire d’information (CI) 43.13-1A.

On a examiné l’installation des ceintures-baudriers à bord du deuxième Beaver de l’exploitant, étant donné qu’il s’agissait d’une installation identique. Un pilote de taille moyenne a pris place dans le siège avant gauche. Il était clair que lorsque les ceintures-baudriers étaient bouclées et déroulées au maximum, il était difficile d’atteindre le levier des gouvernails marins. On a mesuré la longueur des ceintures-baudriers, et celle de la sangle sous-abdominale qui comprend la boucle, à leur extension maximale. On a ensuite comparé ces mesures à celles fournies par le titulaire du CTS, Wipaire Incorporated. Le numéro de pièce des ceintures-baudriers correspondait à celui qui figurait sur le CTS. Complètement déroulées, les ceintures-baudriers mesuraient 59 pouces. Une note au CTS concernant les caractéristiques techniques des ceintures-baudriers mentionne [traduction] : « résistance nominale de 1500 livres, longueur minimale de 66 pouces, enrouleur fixe ou à inertie ».

D’après le paragraphe 605.25(1) du RAC, le commandant de bord d’un aéronef doit donner à toute personne à bord de l’aéronef l’ordre de boucler la ceinture de sécurité pendant le mouvement de l’aéronef à la surface, pendant le décollage et l’atterrissage et au cours du vol, chaque fois que le commandant de bord le juge nécessaire. D’après le paragraphe 605.27(1) du RAC, les membres d’équipage à bord d’un aéronef doivent être assis à leur poste et boucler leur ceinture de sécurité. De plus, Transports Canada (TC) a publié l’Alerte à la sécurité de l’Aviation civile nº 2013-09 pour clarifier les exigences du règlement. En novembre 2014, Transports Canada a publié la Circulaire d’information (CI) 605-004 intitulée « Utilisation des ceintures de sécurité et des ceintures-baudriers à bord d’un aéronef ». La partie 3 de cette CI comprend de l’information sur l’utilisation des ceintures-baudriers à bord de petits aéronefs, les exigences relatives à leur installation et leur mode d’emploi. Les renseignements statistiques dans cette CI proviennent de rapports d’accidents du BST qui ont déterminé la manière dont des bretelles de sécurité auraient pu prévenir des blessures graves durant des accidents.

Dans le cadre de l’enquête aéronautique  sur l’accident d’un de Havilland DHC-2 au lac Lillabelle (Ontario) le 25 mai 2012 (Rapport d’enquête aéronautique A12O0071 du BST), le BST a examiné les données de plusieurs accidents d’hydravion, y compris les blessures encourues. Le BST estimait que, compte tenu des risques supplémentaires liés aux accidents sur l’eau, l’installation de bretelles de sécurité pour tous les passagers d’hydravions permettrait de réduire les risques de blessures entraînant une incapacité physique, et améliorerait ainsi les chances d’évacuation des occupants. En conséquence, le Bureau recommande que :

Le ministère des Transports exige l'installation de ceintures-baudriers sur tous les sièges des hydravions en service commercial homologués pour le transport de 9 passagers ou moins.
Recommandation A13-03 du BST

Dans sa réponseFootnote 1, TC indique que l’aménagement et la configuration de l’habitacle de la plupart des hydravions exploités à des fins commerciales au Canada ne se prêtent guère à l’installation de ceintures-baudriers pour tous les passagers sans exiger un réaménagement important ou une modification de la structure, ou les 2, des aéronefs.

Tel que mentionné par le BST dans son évaluation de la réponse de TC, on dénombre dans le registre des aéronefs commerciaux au Canada environ 600 aéronefs pouvant être exploités sur flotteurs, qui sont certifiés pour 9 passagers ou moins et qui ont été fabriqués avant 1986. Ce nombre comprend environ 200 DHC­2 et 300 Cessna. Des trousses d’installation de ceintures-baudriers existent déjà pour les Cessna, comme l’indique le bulletin de service (BS) des aéronefs monomoteurs (Cessna Single Engine Service Bulletin) SEB92-28. De plus, TC a approuvé un certificat de type supplémentaire restreint (O-LSA09-360/D) relatif à l’installation de ceintures-baudriers aux sièges arrière dans plusieurs aéronefs DHC-2 en 2009. Ces données montrent qu’il est possible de modifier de nombreux hydravions afin d’y installer des ceintures-baudriers.

Dans sa réponse à la Recommandation A13-03, TC a ajouté que la structure de la majorité des aéronefs n’était pas assez solide pour retenir les ceintures-baudriers en cas d’écrasement, et qu’elle pouvait gêner l’évacuation. Cependant, le BST a constaté que Transports Canada n’avait pas démontré que le risque de gêner l’évacuation l’emporte sur les avantages des ceintures-baudriers aux sièges arrière. Le BST a également fait remarquer que depuis 1986, le règlement exige l’installation des ceintures-baudriers à tous les sièges des aéronefs des catégories normale et utilitaire, et que de tels dispositifs de retenue avaient été installés depuis dans des aéronefs semblables quoique plus récents que les aéronefs décrits précédemment. Le BST a déduit que les structures des aéronefs sont assez robustes pour supporter ces dispositifs de retenue étant donné leur disponibilité, les trousses d’installation actuelles et les certificats de type supplémentaire (CTS) émis par TC.

Le BST a constaté que la réponse de Transports Canada ne contenait aucune précision sur des mesures prises ou proposées afin de réduire ou d’éliminer ce manquement à la sécurité; TC n’a pas fourni de renseignements objectifs pour démontrer qu’il n’est pas possible d’installer des ceintures-baudriers aux sièges arrière; TC n’a pas établi, non plus, que le risque ne diminuerait pas de façon appréciable si des ceintures-baudriers étaient installées aux sièges arrière. Le Bureau estime que les risques dont il est question dans la recommandation A13-03 n’ont pas diminué et qu’ils demeurent importants. En conséquence, il estime que la réponse à la recommandation A13-03 demeure insatisfaisante.

Caractéristiques de décrochage

Lorsqu’un aéronef effectue une approche pour atterrir, la puissance est réduite et l’angle d’attaque est accru afin de réduire la vitesse anémométrique. Afin de répondre aux spécifications de performance, le manuel de vol du DHC-2 Beaver recommande une vitesse d’approche finale de 1,3 fois la vitesse de décrochageFootnote 2.

L’aile d’un aéronef décroche à un angle d’attaque précis. Des changements soudains de vitesse ou de direction du vent ou encore la turbulence mécanique causée par des éléments géographiques peuvent entraîner des perturbations de l’écoulement normal de l’air sur l’aile. Ces perturbations peuvent faire en sorte que des sections de l’aile dépassent l’angle de décrochage.

Le manuel de vol précise une vitesse de décrochage avec volets sortis à une vitesse indiquée de 45 mi/h, et ajoute que, durant le décrochage : [traduction] « ..., si l’on permet un mouvement de lacet, l’aéronef a tendance à effectuer un mouvement de roulis. Le pilote doit immédiatement prendre des mesures correctives afin de contrer le mouvement de roulis »Footnote 3.

Au moment de la certification d’origine du C-FHVT, rien n’exigeait l’installation d’un avertisseur de décrochage, et un tel dispositif n’a pas été installé à bord de cet aéronef. Un avertisseur de décrochage est un dispositif qui fournit au pilote un avertissement de décrochage clair et distinct, indépendamment de la reconnaissance par le pilote des comportements de l’appareil juste avant un décrochage, comme le tremblement aérodynamique. Viking Air Limited (VAL), l’actuel détenteur du certificat de type du DHC-2, a conçu une modification (CTS nº SA92-63) pour l’installation d’un avertisseur de décrochage à bord du DHC-2. Toutefois, l’installation n’étant pas obligatoire, elle n’a pas été faite sur l’aéronef en cause.

Le BST a déterminé par le passé que les décrochages qui surviennent durant des phases critiques de vol peuvent avoir des conséquences désastreuses et il craint que le tremblement aérodynamique du DHC-2 n'alerte pas suffisamment les pilotes à propos de l'imminence d'un décrochage.

Transports Canada a publié l'Alerte à la sécurité de l'Aviation civile (ASAC) no 2014-02 pour informer les propriétaires, exploitants et techniciens d'entretien de la disponibilité d'un avertisseur de décrochage artificiel pour aéronefs de série DHC-2, et en recommander l'installation.

Banquette et dispositifs de fixation au plancher

On a examiné la banquette et ses dispositifs de fixation. Il semble que la banquette faisait partie d'un CTS dont a fait l'objet l'aéronef à un certain moment durant sa vie utile. Le côté arrière gauche de la banquette avait été fixé au plancher à l'aide de 2 écrous d'ancrage rattachés à la poutre de soutien du plancher. On a trouvé une section du plancher comprenant les écrous d'ancrage et une partie de la poutre de soutien du plancher qui a cédé (photo 2 et photo 3).

Photo 2. Dispositif de fixation arrière gauche, qui a cédé
Photo 2. Dispositif de fixation arrière gauche, qui a cédé
Photo 3. Dispositif de fixation avant gauche et emplacement du dispositif de fixation arrière gauche
Photo 3. Dispositif de fixation avant gauche et emplacement du dispositif de fixation arrière gauche

L'examen a également permis de déterminer que l'arrière de la poutre de soutien du plancher n'était ni fixé ni supporté, ce qui a fait en sorte que la banquette et son dispositif de fixation se sont rompus en surcharge de flexion durant l'impact.

En août 1984, de Havilland Aircraft Company a publié le bulletin de service 2/39 pour ses aéronefs DHC-2 Mk.I, Mk.II et Mk.III Turbo Beaver. Ce bulletin de service avait été émis après que des rapports d'accident et de blessures ont fait état de [traduction] « l'utilisation de sièges non approuvés et d'une résistance insuffisante, des réparations inadéquates aux sièges approuvés, des dispositifs de fixation au plancher inutilisables ou mal installées (…) et des ferrures d'attache de ceinture de sécurité d'une résistance insuffisante » à bord de ses aéronefs. Le bulletin de service recommandait qu'à l'occasion de chaque inspection aux 100 heures, on vérifie l'intégrité de la banquette, des ceintures de sécurité, des dispositifs d'ancrage au plancher et des renforts, surtout si l'on retire fréquemment la banquette pour transporter plus de marchandises.

Rapports de laboratoire du BST

Le BST a complété le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

Analyse

Le pilote avait les qualifications requises pour ce vol, et aucune anomalie mécanique qui aurait pu nuire à la maîtrise de l’aéronef n’a été signalée ou relevée durant l’examen. L’analyse portera sur les circonstances particulières qui ont mené à la collision de l’aéronef avec le relief et sur les facteurs de sécurité qui peuvent influer sur la sécurité du vol et des passagers lors d’un accident.

Alors que l’aéronef effectuait une approche pour amerrir avec ses volets sortis, le pilote a réduit la vitesse vers la vitesse d’approche finale.

Le vent autour de la surface d’amerrissage soufflait en rafales. Les éléments géographiques ont une grande incidence sur les vents – ils causent des changements soudains de vitesse et de direction et de la turbulence mécanique.

Alors que l’aéronef était relativement proche de la surface de l’eau, il a subi l’effet d’une rafale d’ouest. L’aéronef a effectué un mouvement de lacet vers la gauche qui a réduit l’écoulement d’air sur la surface de l’aile gauche et accru l’angle d’attaque.

L’aile gauche a subi un décrochage et s’est inclinée. Le pilote n’avait que très peu de temps pour apporter des correctifs, étant donné la proximité du rivage ascendant de chaque côté. Sa tentative de contrer le mouvement de roulis intempestif à gauche et d’amorcer une montée a échoué, et l’aéronef a percuté des arbres.

Si un aéronef n’est pas muni d’un avertisseur de décrochage, il y a un risque accru que le pilote ignore l’imminence d’un décrochage aérodynamique.

L’enquête a déterminé que les pilotes de l’entreprise ne portaient pas leurs ceintures-baudriers, car elles limitent leurs mouvements pour manœuvrer les gouvernails marins. Un examen du certificat de type supplémentaire (CTS) SA711GL relatif à l’installation des ceintures-baudriers a déterminé que le numéro de pièce de l’ensemble de ceintures-baudriers était le bon. Toutefois, les ceintures-baudriers déroulées à leur longueur maximale étaient trop courtes et ne permettaient pas le dégagement minimal de 66 pouces indiqué dans le CTS. Si l’on installe des ceintures-baudriers qui limitent les mouvements du pilote, et du même coup, sa capacité d’atteindre le levier des gouvernails marins, il y a un risque que le pilote ne les porte pas. Si les occupants ne portent pas les ceintures-baudriers, il y a un risque accru qu’ils soient blessés ou tués lors d’un accident.

Le dispositif de fixation arrière de la banquette était fixé à la poutre sous le plancher, mais cette poutre n'était pas fixée à l'arrière et elle s'est rompue en surcharge de flexion durant l'impact. L'occupant de la banquette arrière portait sa sangle sous-abdominale, mais puisqu'elle était attachée à la banquette, elle ne l'a pas empêché d'être projeté vers l'avant lorsque la banquette s'est déplacée. Ainsi, l'occupant de la banquette arrière a été légèrement blessé.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Avant le posé en direction nord, l'aéronef a subi l'effet d'une rafale de travers d'ouest et de la turbulence. Cette force a entraîné un mouvement de lacet intempestif et une inclinaison de l'aile gauche, signe d'un décrochage aérodynamique. Le pilote a été incapable de reprendre entièrement la maîtrise de l'aéronef, qui a percuté le relief ascendant du rivage à environ 30 pieds au-dessus de la surface de l'eau.
  2. Le dispositif de fixation arrière de la banquette s'est rompu en surcharge et n'a pas empêché la banquette ou son occupant d'être projeté vers l'avant durant l'impact. Ainsi, l'occupant de la banquette arrière a été légèrement blessé.

Faits établis quant aux risques

  1. Si l’on installe des ceintures-baudriers qui limitent les mouvements du pilote, et du même coup, sa capacité d’atteindre le levier des gouvernails marins, il y a un risque que le pilote ne les porte pas.
  2. Si les occupants ne portent pas les ceintures-baudriers, il y a un risque accru qu’ils soient blessés ou tués lors d’un accident.
  3. Si un aéronef n’est pas muni d’un avertisseur de décrochage, il y a un risque accru que le pilote ignore l’imminence d’un décrochage aérodynamique.

Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le .