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Rapport d'enquête ferroviaire R95V0089

Déraillement
VIA Rail Canada Inc.
Train de voyageurs numéro 1 de VIA
Point milliaire 11,12, subdivision Clearwater du Canadien
National Blue River (Colombie-Britannique)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 22 avril 1995, vers 19 h 10, le train no 1 de VIA Rail Canada Inc., qui faisait route vers l'ouest à une vitesse de 17 mi/h, a déraillé à la hauteur du point milliaire 11,12 de la subdivision Clearwater du Canadien National. Les 13 voitures qui composaient le train et une des deux locomotives ont déraillé. Neuf des 172 voyageurs et 3 des 15 employés des services de bord ont été légèrement blessés. Environ 5 700 pieds de voie principale ont été détruits.

Le Bureau a déterminé que la roue L-3 de la deuxième locomotive s'est rompue de façon catastrophique, puis elle a heurté, brisé et déplacé le rail. On a déterminé qu'une fissure de surcontrainte interne était à l'origine de la rupture.

1.0 Renseignements de base

1.1 L'accident

Le train no 1 de VIA Rail Canada Inc. (VIA 1), qui relie Toronto (Ontario) à Vancouver (Colombie-Britannique), roule en direction ouest entre Jasper (Alberta) et Kamloops (Colombie-Britannique) avec 172 voyageurs à son bord. Vers 19 h 10Note de bas de page 1, alors que le train se trouve à peu près à la hauteur du point milliaire 11,0 de la subdivision Clearwater du Canadien National (CN), le premier mécanicien serre les freins du train pour réduire la vitesse en anticipation d'un ordre de limitation de vitesse. Soudainement, alors que le train roule à environ 17 mi/h, le train décélère rapidement et s'arrête à la hauteur du point milliaire 11,12. En regardant vers l'arrière, le premier mécanicien s'aperçoit que la deuxième locomotive et toutes les voitures ont déraillé.

Figure 1
Figure 1

Le second mécanicien envoie immédiatement un message radio d'urgence pour alerter les autres trains dans le secteur et les informer de la situation. Il communique ensuite par radio avec le contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) et reçoit l'assurance que les autres trains seront tenus à l'écart. Craignant qu'il y ait des blessés, il demande aussi qu'on leur envoie du secours d'urgence. Le premier mécanicien, redoutant que le courant électrique qui alimente les voitures ne cause un incendie, coupe l'alimentation électrique de la locomotive.

Avant d'inspecter le train, le second mécanicien descend du train et place des pétards de signalisation sur la voie comme précaution supplémentaire contre les autres trains. Le premier mécanicien demeure à bord de la locomotive de tête pour rester près de la radio.

De son côté, le CCF communique immédiatement avec les services ambulanciers de Blue River qui, à leur tour, alertent le service de police local et mettent en action le plan de mesures d'urgence de Clearwater et du district. Le CCF dépêche ensuite les services d'une équipe de travaux qui vient juste de finir son quart de travail à Blue River sur le lieu du déraillement avec une locomotive et deux fourgons de queue pour évacuer les voyageurs et les employés des services de bord.

Le train s'arrête après le déraillement de la deuxième locomotive (menée) et des voitures. Le fourgon à bagages, attelé immédiatement derrière les locomotives, et la deuxième voiture à la sixième voiture penchent à des angles divers vers la rivière Thompson Nord, qui se trouve à environ 30 m (99 pieds) à l'est de la voie et dont le niveau se trouve à environ 10 m (33 pieds) en dessous de celui de la voie. Les autres voitures (7e à 13e) déraillent aussi mais demeurent à la verticale sur la plate-forme. Il s'avère difficile de descendre du train du côté de la rivière en raison de la raideur de la pente du talus.

Lors de la décélération, les voitures sont passablement secouées et des voyageurs voient de la poussière et du gravier voler dans tous les sens. Les tressautements des voitures projettent quelques voyageurs hors de leur siège.

Une fois le train arrêté, les voyageurs et les employés des services de bord de la deuxième voiture à la sixième voiture ouvrent immédiatement la plupart des portes de plate-forme du côté ouest et une des portes ouest du fourgon à bagages, et commencent à descendre. Le chef de train et son assistant aident les voyageurs à descendre. L'inclinaison des voitures rend l'ouverture des portes de plate-forme ouest et la descente du train très difficiles.

Il n'est pas nécessaire d'évacuer immédiatement les sept dernières voitures puisqu'elles sont restées à la verticale et stables. Les employés des services de bord informent les voyageurs qu'ils n'ont rien à craindre et qu'ils doivent rester dans leur siège.

Comme la nuit commence à tomber et que la température baisse, les employés des services de bord remettent des couvertures aux voyageurs qui sont évacués de la deuxième voiture à la sixième voiture et les escortent en groupe vers la queue du train.

Même si l'éclairage de secours fonctionne dans toutes les voitures, il n'y a aucun éclairage de secours extérieur. Les employés utilisent des lampes de poche et des lanternes pour guider les voyageurs évacués. Les voyageurs évacués marchent sans but le long de la voie, confus et effrayés. Le ballast bouleversé et les bouts de rails et de traverses éparpillés sur la plate-forme rendent les déplacements difficiles. Il est difficile de communiquer des instructions aux personnes évacuées puisque l'on ne dispose d'aucun porte-voix ou autre dispositif du genre. Le système de sonorisation du train n'est pas équipé de hauts-parleurs extérieurs et ne fonctionne de toute façon que sur l'alimentation électrique de la locomotive.

Le personnel de secours qui arrive par la route ne peut se rendre jusqu'au lieu de l'accident et doit se contenter d'installer, à environ 5 km au nord du lieu du déraillement, une aire de rassemblement où ils attendent l'arrivée du train de travaux.

Quand le train de travaux arrive à l'aire de rassemblement avec ses deux fourgons de queue, le personnel d'intervention d'urgence monte à bord et le train continue sa route jusqu'au lieu du déraillement. Lorsque le train de travaux s'approche du lieu, on entend les rails se briser sous le poids de ce dernier.

Pendant que les secouristes réconfortent les évacués et administrent les premiers soins aux blessés, l'équipe du train de travaux découvre que la surface de roulement du rail est de la section de voie qui se trouve au nord de leur train porte des marques d'abrasion à tous les 10 ou 11 pieds et que le rail s'est rompu sous leur train à la hauteur d'une de ces marques.

Une fois les voyageurs montés à bord des fourgons de queue, le train de travaux retourne à l'aire de rassemblement où un autobus, des fourgonnettes et des ambulances les attendent. Il faut deux aller-retour pour terminer l'évacuation. Au terme du deuxième voyage, seuls les voyageurs indisposés descendent à l'aire de rassemblement. Le train continue ensuite sa route jusqu'à Blue River.

Neuf personnes sont conduites en ambulance à l'hôpital de Clearwater, à environ 88 km au sud du lieu du déraillement. Les blessures corporelles sont toutes d'ordre mineur, mais deux voyageurs souffrent d'un choc nerveux et doivent être sortis du train sur une planche d'immobilisation du rachis. Tous les autres voyageurs et tous les employés des services de bord sont déposés à Blue River, à environ 18 km au nord du lieu du déraillement.

Une fois les évacués non blessés arrivés à Blue River, la plupart des voyageurs et tous les employés des services de bord montent à bord d'autobus nolisés par VIA pour se rendre à Vancouver. L'équipe d'exploitation du train est conduite à Kamloops en taxi. Environ 50 voyageurs sont laissés à Blue River sans être accompagnés d'un représentant de VIA. Il n'y a pas de représentant de VIA à Clearwater.

1.2 Victimes

Trois employés des services de bord et neuf voyageurs ont été légèrement blessés.

1.3 Dommages au matériel

Le fourgon à bagages et la deuxième voiture à la sixième voiture n'ont subi initialement que des dommages mineurs, mais ils ont été plus fortement endommagés quand on a dû les renverser sur le côté pour réparer la voie. La 7e voiture à la 13e voiture de même que la deuxième locomotive sont demeurées à la verticale et n'ont été que légèrement endommagées au niveau du train de roulement. La locomotive de tête n'a pas été endommagée.

1.4 Dommages à la voie

Environ 5 700 pieds de voie ont été détruits.

Figure 2
Figure 2

1.5 Renseignements sur le personnel

L'équipe d'exploitation était constituée de deux mécaniciens, qui se trouvaient dans la locomotive de tête, et d'un chef de train et d'un chef de train adjoint, postés dans les voitures.

Les membres de l'équipe d'exploitation répondaient aux exigences de leurs postes respectifs et satisfaisaient aux exigences en matière de repos et de condition physique.

Quinze employés des services de bord se trouvaient à divers endroits dans le train.

1.6 Renseignements sur le train

Le train se composait de voitures classiques en acier inoxydable remises à neuf et était formé, de l'avant à l'arrière, du matériel suivant :

Locomotive 6439 - de tête
Locomotive 6414 - menée
Fourgon 8607 - bagages
Voiture 8122 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture 8118 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture 8111 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture panoramique 8510 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture 8104 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture panoramique 8512 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture-lits 8303 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture-restaurant 8415 - sans plate-forme
Voiture-lits 8331 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture-lits 8317 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture-lits 8308 - portes de plate-forme vers l'arrière
Voiture panoramique 8706 - portes de plate-forme vers l'avant

À Jasper, l'arrivée du VIA 1 coïncide avec l'arrivée du train no 6 de VIA en provenance de Prince Rupert (Colombie-Britannique). Le VIA 1 se défait d'une rame de voitures à destination de Prince Rupert et ramasse une rame de voitures en provenance de Prince Rupert à destination de Vancouver. Le 22 avril 1995, un essai no 1 des freins à air et une inspection mécanique de toutes les voitures et des locomotives ont été effectués avant le départ de Jasper, et rien d'anormal n'a été remarqué.

1.7 Inspection du train

Alors que le VIA 1 roulait dans la subdivision Albreda entre Jasper et Blue River, soit une distance de 132,5 milles, il a dépassé un autre train en direction ouest, rencontré six trains en direction est, et a été inspecté par les équipes de ces six trains; rien d'anormal n'a été remarqué. En outre, le train est passé à la hauteur de six détecteurs de boîtes chaudes et de pièces traînantes dans la subdivision Albreda et aucune anomalie n'a été relevée. Au point milliaire 23,8 de la subdivision Edson (à l'est de Jasper), le groupe de traction et les voitures à destination de Vancouver sont passés sur un détecteur de défauts de roues sans que l'appareil n'enregistre de défectuosité.

1.8 Particularités de la voie

La subdivision Clearwater est classifiée comme étant dans l'axe est-ouest mais, géographiquement, elle suit un parcours nord-sud qui va de Blue River (point milliaire 0,0) à Kamloops (point milliaire 139,4). À l'endroit où l'événement s'est produit, la subdivision est une voie principale simple qui décrit une courbe de deux ° et six minutes et qui atteint une pente de 0,2 p. 100.

La voie est constituée de longs rails soudés de 136 livres fabriqués en 1993 et mis en service en 1994. Les traverses en béton sont installées sur du ballast en pierre concassée. La voie était en bon état dans le secteur du déraillement.

Le 10 avril 1995, une voiture d'auscultation des rails a contrôlé la voie et n'a rien trouvé d'anormal. Le 21 avril 1995, un surveillant de la voie a patrouillé le secteur en véhicule rail-route et n'a remarqué aucune défaillance de voie.

1.9 Méthode de contrôle du mouvement des trains

La subdivision Clearwater est régie par le système de contrôle centralisé de la circulation ferroviaire en vertu du Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada. Dans la subdivision Clearwater, le mouvement des trains est surveillé par un CCF en poste à Kamloops.

La vitesse maximale autorisée dans le secteur où l'accident s'est produit est de 45 mi/h pour les trains de voyageurs et de 35 mi/h pour les trains de marchandises.

1.10 Conditions météorologiques

Au moment de l'événement, le temps était clair, les vents étaient calmes et la température était de 12 ° C.

1.11 Renseignements consignés

Les données recueillies par le consignateur d'événements indiquent qu'à 21 h 11 min 24 s (heure normale de l'Est), la locomotive roulait à une vitesse de 46 mi/h, la manette des gaz était au ralenti et les freins étaient desserrés. La pression dans la conduite générale était de 87 livres au pouce carré (lb/po²). À 21 h 11 min 26 s, la pression dans la conduite générale est descendue à 81 lb/po², une diminution de 6 lb/po², indication d'un serrage minimal des freins. À 21 h 11 min 51 s, alors que le train roulait à 42 mi/h, la pression dans la conduite générale a augmenté à 86 lb/po², indication que les freins avaient été desserrés. La vitesse a continué à baisser jusqu'à ce qu'à 21 h 12 min 7 s, alors que le train roulait à 17 mi/h, la pression au cylindre de frein est passée de 0 à 20 lb/po² tandis que la pression dans la conduite générale est demeurée constante, indication du serrage des freins indépendants de la locomotive. Le train s'est immobilisé (vitesse enregistrée de 0 mi/h) à 21 h 12 min 11 s.

1.12 Renseignements sur le lieu de l'événement

1.12.1 Généralités

À l'endroit du déraillement, la subdivision traverse un territoire montagneux et longe la rive ouest de la rivière Thompson Nord. Du côté ouest de la plate-forme, le terrain, en pente presque verticale, est densément boisé. Du côté est de la plate-forme, la berge est presque à la verticale vers la rivière Thompson Nord.

Des petits fragments de jante de roue ont été retrouvés le long de l'emprise, à partir d'environ 2 500 pieds au nord de l'endroit où se trouvait la dernière voiture qui a déraillé. À partir d'environ 400 pieds plus au sud, des traces d'abrasion ont commencé à marquer la surface de roulement du rail est à tous les 10 ou 11 pieds. Plus près du lieu du déraillement, les traces d'abrasion étaient plus importantes et le rail s'était brisé à certains endroits. Deux gros morceaux de la table de roulement de la roue ont été découverts sur la plate-forme près de l'endroit où commençaient les traces d'abrasion. Quelques traverses étaient fissurées et il y avait des traces d'abrasion métallique sur certaines selles de rail et certains anticheminants. Le ballast était relativement peu dérangé.

À l'approche de la dernière voiture, le rail est avait été arraché des traverses sur environ 200 pieds et déplacé vers l'est. Le rail ouest est resté fixé aux traverses à plusieurs endroits dans le secteur du déraillement mais, à plusieurs autres, il a été arraché et repoussé vers l'est. Les rails étaient déplacés jusqu'à la locomotive menée.

1.12.2 Matériel

Deux des voitures qui ont déraillé (la troisième et la quatrième) étaient inclinées à un angle de près de 45 ° et se sont retrouvées pratiquement sous les câbles électriques des signaux qui longent la voie, touchant aux arbres qui se trouvent à environ 30 pieds de la plate-forme. Les autres voitures déraillées étaient inclinées à des angles moins importants à l'extérieur de la voie.

Le bogie arrière de la deuxième locomotive (6414) a déraillé. Il manquait environ 26 pouces de la table de roulement et quatre pouces de la toile de la roue L-3. Certains plans de rupture étaient lourdement oxydées.

On s'est servi d'un chalumeau pour couper un trou dans la roue L-3 et on a enchaîné cette dernière pour permettre les déplacements le long de la voie après le déraillement. Le fait d'avoir utilisé un chalumeau a cependant empêché le laboratoire de faire un examen métallurgique complet de la roue.

La roue endommagée et cinq morceaux de jante, de même que la roue conjuguée et les semelles de frein des deux roues, ont été envoyés au Laboratoire technique du BST pour analyse.

1.13 Matériel du VIA 1

1.13.1 Locomotive 6414

1.13.1.1 Inspections et entretien

En vertu des diverses exigences réglementaires et des politiques de la compagnie, les locomotives doivent faire l'objet d'un entretien et d'inspections périodiques, notamment des «vérifications avant départ» de type «C» ou «B», et des inspections en atelier appelées inspections «E6» et inspections trimestrielles «AB».

Entre janvier 1995 et la date du déraillement, la locomotive 6414 a fait l'objet de huit vérifications avant départ de type «C» et de deux vérifications avant départ de type «B». Elle a aussi été soumise à une inspection «E6» et à une inspection trimestrielle «AB».

Les registres d'entretien indiquent que le rattrapeur de jeu a été réparé le 14 février 1995. Le 5 mars 1995, au cours d'une inspection trimestrielle «AB», on a refait le profil des roues qui étaient usées.

La locomotive 6414 avait été entretenue conformément aux normes de VIA et les registres d'entretien ne mentionnent aucun problème qui aurait pu avoir une incidence sur sa sécurité de fonctionnement.

1.13.1.2 Roues

La locomotive 6414 est équipée de roues en acier de classe B de 40 pouces de diamètre (E40), fabriquées par la Canadian Steel Wheel (CSW) de Montréal (Québec). L'essieu a été monté aux ateliers du CN de Pointe-Saint-Charles (Québec) en novembre 1993. Les roues de classe B sont conçues pour les grandes vitesses. La désignation E40 indique qu'il s'agit d'une roue de locomotive dont le boudin et la table de roulement peuvent être usinés plusieurs fois.

Le procédé de fabrication des roues de locomotives à grande vitesse exige l'inclusion de contraintes de compression résiduelles dans la jante. Ces contraintes sont produites par trempage de la jante à l'aide d'un jet d'eau durant l'étape du refroidissement. Il n'existe pas encore de méthode d'essai qui permettrait de mesurer la quantité de contrainte de compression résiduelle d'une roue sans la détruire. Le contrôle de la qualité du procédé de fabrication est essentiel.

1.13.2 Matériel roulant classique

1.13.2.1 Voitures, voitures-lits, voitures panoramiques et voitures-restaurant

Chaque voiture est dotée de deux systèmes d'alimentation électrique. L'électricité requise pour l'éclairage, le chauffage, la climatisation et le système de sonorisation provient du circuit d'alimentation du groupe de traction.

Lorsque le courant en provenance du circuit d'alimentation de la locomotive est coupé, un circuit d'alimentation secondaire entre en service. Le circuit d'alimentation secondaire tire son énergie de batteries installées sous le plancher des voitures. Les batteries fournissent le courant nécessaire à l'éclairage de secours installé d'un côté de la voiture sous les sièges de l'allée et au plafond dans la cuisine, les plates-formes et les toilettes.

Il n'y a pas d'éclairage de secours extérieur pour aider les voyageurs à descendre du train dans le noir. Les voitures ne sont pas dotées de dispositifs d'éclairage portatifs.

1.13.2.2 Portes, marchepieds et fenêtres

La plate-forme de chaque voiture est dotée de deux portes à commande manuelle donnant sur l'extérieur et d'un marchepied constitué de quatre marches escamotables qui permettent aux voyageurs de monter et de descendre de chaque côté de la voiture.

Les portes de la plate-forme sont à commande manuelle et, quand la voiture est dans sa position normale, d'ouverture facile. Il n'y a pas d'instructions écrites sur la façon d'ouvrir les portes. La plaque qui recouvre le marchepied de la plate-forme fonctionne conjointement avec la porte de la plate-forme. Pour ouvrir la plaque d'accès au puits du marchepied, il faut ouvrir la porte de la plate-forme. Il n'y a pas d'instructions sur la façon appropriée d'ouvrir la plaque d'accès au marchepied.

Les fenêtres d'issues de secours se composent de deux vitres de verre trempé de 1/4 de pouce (6 mm) chacune séparée par une lame d'air. Elles mesurent 26 pouces (0,66 m) de haut sur 42 pouces (1,07 m) de large. Les voitures, les voitures-lits, les voitures panoramiques et les voitures-restaurant ont quatre fenêtres d'issues de secours chacune, deux de chaque côté. Chaque fenêtre d'issue de secours est identifiée par un pictogramme non éclairé représentant une main tenant un espèce de maillet et sur lequel sont inscrits les mots «Issue de secours». On retrouve près de chaque issue de secours, dans une boîte au couvercle vitré, un petit marteau à tête pointue, destiné à briser les vitres des fenêtres d'issues de secours.

Les portes ont été faciles à ouvrir, mais à cause de l'angle dans laquelle les voitures se sont retrouvées et le poids des portes, deux personnes devaient les tenir ouvertes. L'équipe a constaté que l'installation d'un dispositif pour tenir les portes ouvertes aiderait lors d'une évacuation d'urgence.

1.13.2.3 Renseignements sur le matériel de secours

Les renseignements de sécurité applicables à bord du train sont inscrits sur une plaque en acier inoxydable non éclairée mesurant 9 pouces 3/4 (25 cm) sur 5 pouces 3/4 (14,5 cm) fixée au mur de corridor de la plate-forme de chaque voiture. On peut y lire des renseignements sur l'emplacement des fenêtres d'issues de secours et sur la façon d'utiliser le marteau d'issue de secours, de même que sur l'emplacement de la trousse de premiers soins. Les renseignements sont donnés par écrit et sous forme de pictogramme. Il n'y a pas de feuillets d'instruction ni de renseignements sur la marche à suivre en cas d'urgence dans les compartiments passagers même. Il n'était pas d'usage de donner des renseignements verbaux aux voyageurs sur les procédures d'évacuation ou l'emplacement des outils de secours, des trousses de premiers soins ou des trousses pour traumatismes. Tous les trains doivent être équipés du matériel de premiers soins nécessaire pour les urgences médicales, les incendies ou les sauvetages conformément au Règlement sur la santé et la sécurité au travail à bord des trains, en annexe à la Partie II du Code canadien du travail en date du 26 mars 1987.

Chaque voiture était dotée du matériel de secours suivant : trousse de premiers soins, extincteur, hache, masse et scie à métaux. En plus de la trousse de premiers soins de base qui se trouvait dans chaque voiture, il y avait deux trousses pour traumatismes dans la voiture-restaurant. Il y avait une civière dans le fourgon à bagages et des fauteuils roulants dans les voitures. Un respirateur à oxygène était remisé dans chaque voiture où l'on sert de la nourriture.

Le train était équipé d'un système de sonorisation branché sur le circuit électrique de la locomotive et grâce auquel on pouvait communiquer des messages dans l'ensemble du train ou dans chaque voiture individuelle.

1.14 Essais et recherche

1.14.1 Laboratoire technique du BST

Les analyses effectuées par le Laboratoire technique du BST (rapport LP 94/95) sur la roue rompue, les morceaux de roue, la roue conjuguée et les pièces de frein ont révélé ce qui suit :

  1. La table de roulement de la roue rompue avait 1 pouce 15/16 d'épaisseur (la limite critique étant de 1 pouce et l'épaisseur de la table d'une roue neuve étant de 2 pouces 1/2).
  2. Les semelles de frein étaient usées normalement à l'exception des dommages causés par la roue rompue.
  3. La table de roulement de la roue intacte ne portait aucune trace de surchauffe.
  4. Les caractéristiques des plans de rupture des quatre morceaux de roue sont compatibles avec une rupture due à une surcharge.
  5. Sur le cinquième morceau de roue, on pouvait voir qu'une fissure de fatigue qui existait avant l'événement et qui a été trouvée sur une rupture transversale s'était transformée en rupture de surcontrainte.
  6. Les détails de rupture de la roue et des morceaux adjacents montrent des fissures de surcontrainte internes et semblent indiquer que ces fissures ont été l'élément déclencheur.
  7. On croit que l'écaillage découvert sur la table de roulement de la roue n'est que secondaire à la défaillance par fissuration, même si une grosse écaille d'environ 1/2 pouce d'épaisseur commençait à se détacher de la roue à cause d'un écaillage profond.

L'analyse aux rayons X à dispersion d'énergie et l'analyse métallurgique ont permis de déterminer qu'il n'y avait pas de défauts de fusion ni d'autres défauts évidents au niveau du matériau et que la qualité de fabrication satisfaisait aux exigences de l'Association of American Railroads (AAR).

Au début de l'année 1995, le BST a enquêté sur une autre rupture de roue d'une locomotive de VIA (rapport technique LP 9/95)Note de bas de page 2 du même fabricant, soit la CSW. En l'occurrence, cette roue s'était aussi rompue en raison de fissures internes qui s'étaient vraisemblablement développées sous l'action combinée de contraintes appliquées et résiduelles. Aucun défaut de composition matérielle n'avait été découvert. En raison de la soudaineté de la rupture, le BST en avait conclu que les inspections aux ultrasons n'étaient pas suffisantes pour contrôler l'état des roues. Il se peut qu'une roue passe l'inspection aux ultrasons et développe quand même d'importantes fissures internes peu après.

1.14.2 CANAC International Inc. - Technologies ferroviaires

Après l'accident, trois roues de locomotive fabriquées par la CSW de Montréal ont été analysées par CANAC International Inc. - Technologies ferroviaires (CANAC) de Ville-Saint-Laurent (Québec); ces roues avaient été retirées du service par VIA après qu'une inspection aux ultrasons a détecté des défaillances internes. Pour compléter l'analyse, VIA leur a aussi fourni une roue fabriquée par la CSW usée à la limite critique et une roue neuve fabriquée par la Standard Wheel de Bornham en Pennsylvanie (États-Unis). Les essais effectués par CANAC ont permis de relever des défaillances internes constituées de grosses inclusions occasionnelles et de particules non métalliques microscopiques en quantité inacceptable, si l'on en juge par la norme de pureté de l'acier du CN utilisée pour faire l'évaluation des railsNote de bas de page 3. On a aussi trouvé que la roue usée à la limite critique contenait le plus haut pourcentage de particules par section.

L'une des roues défectueuses ne satisfaisait pas aux exigences de l'AAR en matière de dureté de la jante et la teneur en carbone de la roue usée excédait les spécifications de l'AAR, mais la plupart des propriétés chimiques et mécaniques étaient quand même conformes aux spécifications de l'AAR. On considère toutefois que les discontinuités assez prononcées de la structure des roues sont un facteur déterminant qui pourrait faire augmenter les risques de rupture en service.

CANAC estime que ces irrégularités sont le résultat d'une dégradation du contrôle de la qualité et des procédures d'inspection au niveau de l'usine de fabricationNote de bas de page 4.

On a en effet constaté, lors d'essais effectués pour fins de comparaison, que la teneur en inclusions non métalliques des nouvelles roues de locomotives fabriquées par la Standard Wheel en avril 1995 était tout à fait acceptable et qu'elle satisfaisait à la norme de pureté de l'acier du CN pour les rails.

Le rapport de CANAC signale que l'on ne doit pas s'attendre à ce que les fabricants de roues fournissent de l'acier pur à défaut d'une norme sur la pureté de l'acier. Il souligne que les compagnies ferroviaires comme le CN ont déjà pris des mesures à l'égard d'une situation semblable en adoptant une norme interne sur la pureté de l'acier des rails. Il soutient que les producteurs d'acier seraient en mesure de produire de l'acier pur s'ils prenaient des mesures comme suivre les bons procédés de dégazage, faire plus attention à la réparation des revêtements de fours et de poches, et remplacer régulièrement les busettes et les blindages usés. Selon le rapport, les fabricants de roues et leurs clients doivent se mettre à collaborer et établir ensemble une norme de fabrication qui permettra d'assurer la qualité des roues à un coût raisonnable.

1.15 Autres renseignements

1.15.1 Premiers intervenants

Les premiers intervenants ont été les services policiers et ambulanciers locaux, une équipe de secourisme composée de volontaires de la voirie provinciale, des employés du CN en service et des employés du CN qui n'étaient pas en service. L'équipe de secourisme de la voirie provinciale se compose de résidants des environs qui ont reçu une formation en premiers soins et en sauvetage et qui sont équipés de véhicules, de matériel et de fournitures d'intervention d'urgence.

1.15.2 L'évacuation

Les efforts des premiers intervenants qui ont atteint le lieu de l'accident à bord du train de travaux ont été coordonnés par l'équipe d'exploitation de VIA. Les blessures ont été évaluées et classées par ordre de priorité avant l'arrivée des premiers intervenants.

Les premières tentatives d'évacuation effectuées par les membres de l'équipe d'exploitation et les employés des services de bord de VIA se sont déroulées dans un calme relatif, même si quelques voyageurs étaient affolés et alarmés. Tous les voyageurs sauf deux ont pu descendre du train de leurs propres moyens ou avec un peu d'aide.

1.15.3 Communications radio

Les locomotives de VIA sont équipées de radios de 25 watts avec fonction d'appel pour permettre aux mécaniciens de converser avec le CCF en tout temps.

Les autres membres de l'équipe sont pourvus de radios portatives de trois watts sans fonction d'appel. On ne pouvait pas se servir des radios de trois watts pour contacter le CCF ou pour communiquer avec lui; elles étaient destinées à permettre aux membres de l'équipe d'exploitation de communiquer entre eux.

Pendant l'urgence, il était essentiel, pour que l'évacuation se déroule sans danger et soit efficace, que les membres de l'équipe d'exploitation puissent communiquer entre eux. Les transmissions entre les radios de trois watts étaient embrouillées et parfois complètement coupées, si bien qu'on a dû demander à un employé de se placer à mi-chemin entre l'avant et l'arrière du train pour relayer les messages au mécanicien. Ce dernier se servait ensuite de la radio de 25 watts de la locomotive pour relayer les messages entre les membres de l'équipe d'exploitation et le CCF.

Le 9 avril 1993, un train de VIA a déraillé quand la voie s'est effondrée au point milliaire 17,53 de la subdivision Saint-Maurice du CN près de Rapide Blanc (Québec). L'équipe avait été incapable de contacter le CCF avec ses radios de trois watts dans le but d'obtenir de l'aide médicale d'urgence pour les membres de l'équipe de train et les voyageurs qui avaient été blessés. On a finalement pu communiquer avec le CCF en se servant de la radio de 25 watts de la locomotive endommagée.

1.15.4 Normes de sécurité relatives aux voitures

Le 20 novembre 1994, un train de VIA constitué de matériel roulant léger, rapide, confortable (LRC) a heurté un tronçon de rail placé intentionnellement sur la voie près de Brighton (Ontario). Le tronçon de rail a endommagé les réservoirs de carburant de la locomotive et sectionné des câbles électriques. Le carburant qui s'écoulait des réservoirs a pris feu et l'incendie a mis la vie d'un grand nombre de personnes en danger. Quarante-six personnes ont été blessées (rapport no R94T0357 du BST).

L'enquête du BST sur l'accident survenu à Brighton a permis de relever des manquements en ce qui a trait aux normes de sécurité et d'évacuation des voitures. On y a entre autres relevé les manquements suivants : mauvaise conception des issues de secours; taille, contenu et visibilité inadéquats (notamment de nuit ou dans la fumée) de l'affichage sur les consignes d'urgence; pauvreté des renseignements (oraux, écrits ou sous forme de pictogrammes) fournis au moment de l'embarquement sur la marche à suivre en cas d'urgence; absence d'un système de sonorisation pour l'extérieur des voitures; absence d'éclairage de secours à l'extérieur; et insuffisance d'éclairage portatif, notamment des lampes de poche (voir la section 4.0 pour les mesures prises).

2.0 Analyse

2.1 Introduction

Le VIA 1 était exploité conformément aux instructions d'exploitation de la compagnie et aux normes de sécurité du gouvernement. Le train a déraillé quand la roue L-3 de la locomotive menée s'est fragmentée et a rompu le rail. La locomotive menée avait été entretenue conformément aux normes d'entretien de VIA. La roue défectueuse et fragile n'aurait pas pu être détectée par les inspections et l'entretien réguliers, ni par les dispositifs de détection éélectroniques placés le long de la voie. Les dommages à la voie et le déraillement consécutifs à la fragmentation de la roue ont été presque instantanés, ne laissant pas à l'équipe d'exploitation la possibilité d'arrêter le train de manière contrôlée.

L'analyse se penchera sur les facteurs qui ont entraîné la rupture de la roue et examinera les divers aspects du déroulement de la situation d'urgence après le déraillement.

2.2 Examen des faits

2.2.1 Rupture de la roue

2.2.1.1 Détection

La fissuration externe relevée sur la roue s'y était développée depuis un certain temps si on en juge par les traces d'oxydation sur les plans de rupture. La fissuration n'aurait pas été apparente aux équipes de train ou aux inspecteurs du matériel roulant pendant une inspection de routine en marche. On peut toutefois affirmer qu'à l'époque où le profil de la roue a été refait, soit le 5 mars 1995, la fissure n'avait pas encore atteint la surface de la roue, même s'il se peut qu'il y avait une fissure interne à ce moment-là. Il semble donc que de telles fissures se propagent lentement, mais sans arrêt, tant que la locomotive est en service et que, pour arriver à les détecter en marche, il faudrait employer des méthodes de contrôle plus efficaces que les inspections de routine des trains et des locomotives. Le rapport du Laboratoire technique du BST permet de conclure que même les vérifications aux ultrasons des roues en service ne seraient pas efficaces en raison de la rapidité et de l'imprévisibilité de l'amorçage des fissures.

2.2.1.2 Composition métallurgique

Après examen, le Laboratoire technique du BST a conclu que la rupture initiale de cette roue très peu usée était attribuable à une fissure de surcontrainte interne amorcée sous l'action conjointe de contraintes appliquées et résiduelles et il croit que c'est au moment de la fabrication qu'on a incorporé dans la roue des contraintes alternées localisées ou des contraintes de compression globales plus importantes que prévues. Dans un cas comme dans l'autre, la fissuration peut être attribuée à des lacunes dans le contrôle de la qualité de la production, à l'étape du refroidissement, ce qui a laissé la roue sans la contrainte de compression résiduelle qui lui aurait permis d'avoir le rendement prévu.

Le rapport de CANAC signale que les roues de la CSW examinées, même si elles satisfaisaient à la plupart des normes de l'AAR en matière de composition métallurgique, avaient une teneur élevée en inclusions non métalliques (si l'on en juge par la norme de pureté de l'acier du CN) et que certaines de ces grosses inclusions constituaient des endroits propices à l'amorçage de fissures en cours d'utilisation. L'hypothèse de CANAC, voulant que l'incapacité de la CSW à détecter des défaillances aussi importantes que celles qui ont été relevées suppose des lacunes considérables au niveau de l'assurance de la qualité et des méthodes d'inspection dans l'usine de fabrication, a du mérite.

Les roues de la CSW examinées par les deux laboratoires ont été fabriquées entre août 1993 et décembre 1993, ce qui semble indiquer que les roues fabriquées durant cette période sont peut-être sujettes à se rompre et que cette rupture pourrait être due à un problème de contrôle de la qualité de fabrication qui serait survenu à cette époque.

2.2.1.3 Généralités

Le fait que les deux laboratoires aient fait les mêmes constatations et en soient venus aux mêmes conclusions est particulièrement remarquable. Il semble que l'épaisseur non critique de la jante n'ait eu aucune incidence sur l'amorçage de la fissure parce que la roue en cause dans cet accident n'était pas très usée et que l'une des roues de la CSW examinées a eu un rendement satisfaisant jusqu'à ce qu'elle soit retirée du service après avoir atteint les limites d'usure maximales. De même, il semble que les inclusions non métalliques ne soient pas à l'origine des fissures, même si l'éventualité existe. Il semble donc que la plus importante caractéristique de rendement d'une roue, après la composition métallurgique et la conception, soit la contrainte de traction résiduelle, paramètre essentiellement impossible à mesurer (du moins par des méthodes non destructrices).

2.2.2 Normes de sécurité des voitures

La conception et l'aménagement des diverses voitures du train n'ont pas été un obstacle exagéré à l'évacuation rapide et en toute sécurité des voyageurs, même si un grand nombre des lacunes relevées dans le rapport du BST sur l'accident de Brighton survenu le 20 novembre 1994 ont une fois encore été mises en évidence, comme l'absence d'éclairage extérieur de secours, le peu de renseignements écrits sur les procédures d'urgence, l'absence d'un système de sonorisation extérieur et des difficultés au niveau des issues de secours. Tout semble indiquer qu'on aurait pu être confronté aux mêmes problèmes que ceux de Brighton si on avait eu à évacuer ce train dans les mêmes circonstances dramatiques. Par conséquent, des normes régissant toutes les procédures d'urgence de la sécurité ferroviaire doivent être élaborées et de la surveillance doit être assurée pour faire en sorte que ces normes soient respectées.

2.2.3 Communications

Le train était tiré par deux locomotives et il était donc équipé de deux radios de 25 watts. Le train était aussi équipé de radios portatives de trois watts, mais ces dernières n'ont pas très bien fonctionné. Dans certaines circonstances, par contre, particulièrement s'il s'agit d'un incendie, il se peut que les radios des locomotives soient détruites et que l'équipe de train ne se retrouve qu'avec des radios portatives. Ces dernières devraient non seulement permettre de communiquer avec le CCF, mais aussi permettre aux membres de l'équipe de communiquer entre eux à distance raisonnable. Ainsi, pendant qu'on examine la question des communications radio à bord des trains de VIA, il faudrait aussi se pencher sur les problèmes de communication qui ont été mis à jour par cet accident.

2.2.4 Intervention d'urgence

L'équipe d'exploitation et les employés des services de bord se sont acquittés de leurs tâches de façon professionnelle. L'intervention de l'équipe d'intervention d'urgence, y compris de l'équipe de volontaires de la voirie et de l'équipe composée d'employés de la compagnie qui n'étaient pas en service, s'est faite en temps opportun, de façon organisée et efficace. On estime que l'équipe des volontaires de la voirie a joué un rôle important dans le succès de l'opération de sauvetage

3.0 Faits établis

  1. Le train était exploité conformément aux normes de sécurité du gouvernement et aux instructions d'exploitation de VIA Rail Canada Inc.
  2. La roue L-3 de la locomotive menée s'est rompue, ce qui a fait rompre et déplacer le rail et éventuellement fait dérailler le train.
  3. La roue s'est rompue en raison de fissures de surcontrainte internes amorcées sous l'action combinée des contraintes appliquées et résiduelles.
  4. Il se peut que la roue n'ait pas été fabriquée avec suffisamment de contrainte de compression résiduelle pour pouvoir résister aux rigueurs du service.
  5. Il se peut que le contrôle de la qualité du procédé de fabrication n'ait pas été adéquat à l'époque où la roue a été fabriquée.
  6. On ne peut pas mesurer la contrainte de compression résiduelle, essentielle pour que la roue puisse résister aux hautes vitesses d'utilisation, par des méthodes non destructrices.
  7. Certains aspects de la conception et de l'aménagement des voitures classiques de VIA ne satisfont pas complètement aux normes de sécurité en cas d'urgence.
  8. Les radios portatives de VIA n'ont pas été aussi efficaces que prévu.
  9. L'intervention d'urgence et l'opération de sauvetage se sont déroulées d'une façon opportune, efficace et professionnelle.

3.1 Cause

La roue L-3 de la deuxième locomotive s'est rompue de façon catastrophique, puis elle a heurté, brisé et déplacé le rail. On a déterminé qu'une fissure de surcontrainte interne était à l'origine de la rupture.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures prises

4.1.1 Communications

VIA Rail Canada Inc. (VIA) a remplacé les radios de trois watts par des radios portatives de cinq watts puisqu'il semble que les radios de trois watts étaient insuffisantes lors des situations d'urgence. VIA utilisera des radios de 30 watts à bord des trains qui sont affectés dans des régions éloignées, et les trains transcontinentaux ouest et est seront équipés de téléphones cellulaires et de téléphones cellulaires fonctionnant par satellite.

4.1.2 Rupture de roue

L'enquête du BST sur cet accident a permis de déterminer qu'il se peut que la qualité du procédé de fabrication des roues ait été inadéquat durant la période où la roue a été fabriquée. VIA a laissé savoir qu'il ne faisait plus appel à la Canadian Steel Wheel (CSW), le fabricant de la roue qui s'est rompue dans l'accident, et qu'il achetait maintenant des roues neuves en acier forgé d'outre-mer qui sont conçues précisément pour les trains de voyageurs à haute vitesse.

4.1.3 Sécurité des voyageurs

Pendant l'enquête sur cet événement et l'enquête sur l'accident survenu à Brighton au mois de novembre 1994 mettant en cause un train de VIA (rapport no R94T0357 du BST), plusieurs manquements à la sécurité concernant la sécurité des voyageurs ont été relevés. Donc, au mois de décembre 1994, le Bureau a fait des recommandations précises au sujet des marteaux d'issues de secours, et d'autres recommandations au mois de juillet 1996 au sujet d'une norme détaillée et de la surveillance de l'application des règlements pour régir la sécurité des voyageurs dans l'industrie ferroviaire. Au mois de février 1995, le BST a fait parvenir cinq avis de sécurité ferroviaire à Transports Canada et VIA au sujet de plusieurs autres manquements relevés.

En réaction aux recommandations et avis de sécurité, VIA et Transports Canada ont entrepris plusieurs démarches pour corriger un grand nombre des manquements.

VIA a commencé à installer de la signalisation d'urgence à l'intérieur et à l'extérieur de ses voitures, à ajouter des fenêtres d'issues de secours à bord de ses voitures panoramiques, à placer des dépliants sur les procédures pour les situations d'urgence, des trousses de premiers soins et des lampes de poche dans ses voitures, et à remplacer les marteaux d'issues de secours. En outre, VIA a normalisé ses procédures en ce qui a trait à l'utilisation du matériel d'oxygène de secours, et a offert un programme de formation complet sur l'intervention d'urgence pour les employés des services de bord (ce programme a été suivi par plus de 90 p. 100 des employés des services de bord). De plus, VIA a inclus la configuration de son matériel dans la base de données pour l'Amérique du Nord de l'Operation Respond Institute, ce qui permettra aux organismes d'intervention d'urgence d'accéder rapidement à des renseignements précis sur la sécurité et l'évacuation des voitures de VIA.

Transports Canada a approuvé le Règlement relatif à l'inspection et à la sécurité des voitures voyageurs présenté par l'Association des chemins de fer du Canada; le règlement est entré en vigueur le 1er février 1998. Le Règlement relatif à l'inspection et à la sécurité des voitures voyageurs renferme des dispositions sur les issues de secours, la signalisation d'urgence, les instructions dans les situations d'urgence, et l'arrimage des bagages, et permet un principe de sécurité intrinsèque des systèmes de sonorisation et de l'éclairage de secours. Transports Canada a également laissé savoir qu'il élaborait un règlement sur la capacité d'intervention en cas d'urgence et l'évacuation des voyageurs.

Toutefois, à la fin de l'été 1997, certaines des mesures proposées n'avaient pas été adoptées en entier. Par conséquent, lors de l'accident mortel de VIA survenu à Biggar (Saskatchewan) le 3 septembre 1997, un grand nombre des manquements à la sécurité relatifs aux voyageurs déjà relevés ont fait courir des risques aux voyageurs et aux employés. L'examen des débris effectué par le BST, les entrevues effectuées après l'accident ainsi qu'une inspection des dispositifs de sécurité des voyageurs à bord d'autres trains de VIA ont confirmé qu'il existait toujours de nombreuses lacunes importantes en ce qui a trait aux méthodes actuelles pour assurer la sécurité des voyageurs.

Un peu après l'accident survenu à Biggar, le ministre des Transports a annoncé qu'il allait présenter plus tard les modifications prévues à la Loi sur la sécurité ferroviaire afin de déterminer si d'autres changements à la loi s'imposaient. Transports Canada a aussi laissé savoir que ces modifications pourraient comporter des dispositions en matière de conception des voitures à voyageurs, de normes minimales pour le matériel d'urgence, de procédures normalisées d'exploitation pour les situations d'urgence, notamment les renseignements sur la sécurité communiqués aux voyageurs et la formation pertinente du personnel, de même que l'adoption d'un cadre réglementaire efficace pour s'assurer de l'application de ces dispositions.

Transports Canada a également pris des mesures réglementaires conformément à la Loi sur la sécurité ferroviaire, et a envoyé des avis à VIA sur :

L'industrie ferroviaire envisage elle aussi d'établir son propre règlement en matière d'évacuation et d'intervention d'urgence. L'Association des chemins de fer du Canada a constitué un groupe de travail chargé d'élaborer des règles de sécurité à l'intention des voyageurs; ces règles feront l'objet d'un examen définitif avant la fin mars 1998.

En dépit de ces mesures, et tout en reconnaissant qu'il faudra un certain temps pour mettre en oeuvre des normes détaillées en matière de sécurité des voyageurs, le Bureau croit que bon nombre de mesures pourraient être prises sur-le-champ. L'ensemble des mesures suivantes pourrait diminuer considérablement les risques auxquels sont exposés les voyageurs lors d'accidents ferroviaires :

Par conséquent, le Bureau a recommandé que, de toute urgence :

Le Ministre des Transports exige que VIA Rail finisse de mettre en oeuvre d'ici 30 jours les mesures à court terme énoncées ci-devant nécessaires pour améliorer la sécurité des voyageurs.
Recommandation R97-07 du BST

(, publiée en octobre 1997)

Le Bureau constate avec plaisir qu'immédiatement après la publication de cette recommandation, VIA a annoncé qu'à la lumière de la recommandation provisoire du Bureau, il s'engageait à mettre en oeuvre, dans le délai indiqué de 30 jours, les mesures entreprises à la suite des recommandations du Bureau découlant de l'accident survenu à Brighton. Le Bureau croit que cet engagement pourrait beaucoup= améliorer la sécurité des voyageurs à court terme, et de ce fait même, le Bureau suivra les progrès dans ce domaine avec grand intérêt.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président Benoît Bouchard et des membres Maurice Harquail, Charles Simpson et W.A. Tadros.