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Rapport d'enquête ferroviaire R94E0062

Déraillement
Train de marchandises numéro 716-23 du CN
Point milliaire 57,50,
subdivision Camrose du CN
Duhamel (Alberta)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Les 33e à 55e wagons derrière les locomotives d'un train de marchandises de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) qui roulait en direction sud ont déraillé au moment oû le train franchissait le passage à niveau public situé au point milliaire 57,5, près de Duhamel (Alberta). Personne n'a été blessé. La voie a subi des dommages considérables sur 1 350 pieds.

This report is also available in English.

Autres renseignements factuels

Vers 10 h 15, heure avancée des Rocheuses (HAR), le train de marchandises no 716-23 du CN, composé de 3 locomotives et de 99 wagons à soufre vides, franchissait un passage à niveau public en direction sud au point milliaire 57,5 lorsque les freins d'urgence se sont déclenchés. L'équipe du train a pris les mesures d'urgence voulues et déterminé que 23 wagons à soufre vides avaient déraillé juste au sud du passage à niveau.

La subdivision Camrose du CN est une voie principale simple qui s'étend d'Edmonton à Mirror, au sud, dans la province d'Alberta. Le mouvement des trains y est régi par la régulation de l'occupation de la voie (ROV) autorisée par le Règlement d'exploitation ferroviaire du Canada (REF) et y est dirigé par un contrôleur de la circulation ferroviaire (CCF) posté à Edmonton. Les automobilistes qui roulent en direction est ont à monter une pente de 4 p. 100 avant le passage à niveau, puis à descendre une pente de 3 p. 100.

Vers 9 h 45 HAR, une semi-remorque porte-engins surbaissée à huit roues qui transportait une chargeuse-pelleteuse a franchi le passage à niveau public en direction est. L'ensemble tracteur-remorque mesurait 27,74 mètres de long, et la garde au sol était au maximum de 20,32 centimètres sous la semi-remorque chargée. Le service des transports routiers de la province d'Alberta délivre des permis aux entreprises de camionnage pour les autoriser à circuler sur les routes de l'Alberta. Les permis fournissent aux entreprises de camionnage d'autres renseignements sur les routes interdites et les gabarits de chargement, mais non sur les passages à niveau. L'entreprise de camionnage détenait un permis du service des transports routiers.

Le conducteur de l'ensemble tracteur-remorque a franchi la voie à petite vitesse, mais la semi-remorque a frotté au passage à niveau. Le conducteur s'est arrêté et a inspecté le passage, mais n'était pas sûr de l'importance des dommages ou même d'avoir endommagé la voie. Il s'est rendu ensuite à destination, a déchargé la chargeuse-pelleteuse et a informé son superviseur de l'incident vers 10 h 10 HAR.

À 10 h 17 HAR, le superviseur de l'entreprise de camionnage a appelé le contremaître des ponts et bâtiments du CN à Hobbema (Alberta) et l'a informé de la nature et de l'endroit de l'incident. Le superviseur de l'entreprise de camionnage n'avait pas de renseignements facilement accessibles sur la personne à joindre dans les cas intéressant la compagnie ferroviaire. Le contremaître des ponts et bâtiments a décidé d'inspecter le passage à niveau, mais le train y a déraillé pendant que le contremaître s'y rendait.

Après le déraillement, l'examen du passage à niveau a révélé une perturbation importante de l'infrastructure de la voie. La route en gravier portait des éraflures sur une distance de 1,22 mètre à partir du rail ouest. Le platelage extérieur ouest était fendu, et le platelage ainsi que le rail ouest portaient clairement les marques d'un objet émoussé. Le côté extérieur du champignon du rail ouest, adjacent au platelage fendu, portait plusieurs marques d'écrasement qui paraissaient s'estomper vers le côté intérieur du champignon du rail ouest. On a observé que le rail ouest s'était écarté des selles et des crampons.

Après l'incident, on a déterminé par l'examen de la semi-remorque surbaissée que le bord avant inférieur du sous-châssis présentait un sillon du côté du passager.

Analyse

Les marques trouvées sur la route en gravier, le platelage, le champignon du rail et la semi-remorque confirment qu'il y a eu un contact au passage à niveau. Compte tenu de la garde au sol de la semi-remorque et du fait qu'une pente descendante succédait à une pente ascendante, il était inévitable que la semi-remorque touche le rail.

Le rail ouest s'est détaché, et a bougé immédiatement, entraînant ainsi un surécartement de la voie, ou s'est écarté sous le poids du train. Le déraillement s'est produit lorsque les roues ont perdu le contact avec le rail. Dans le cas à l'étude, les dommages causés à la voie n'étaient pas suffisants pour que l'équipe du train qui approchait puisse les voir.

Le camionneur a senti que son véhicule avait touché le rail, mais il n'était pas capable de bien évaluer l'importance des dommages et ne savait pas qui informer dans ces circonstances. Il s'est écoulé environ 30 minutes entre le moment oû la voie a été endommagée et le déraillement du train. Le permis du service des transports routiers ne fournit pas de renseignements sur les passages à niveau, ni les numéros de téléphone des compagnies ferroviaires avec qui communiquer en cas d'urgence. On aurait évité le déraillement en prévenant la compagnie ferroviaire sur-le-champ.

Faits établis

  1. Le train était exploité conformément aux méthodes de la compagnie et aux règlements du gouvernement.
  2. Une semi-remorque porte-engins surbaissée a frotté contre le sol au passage à niveau et endommagé le rail ouest.
  3. Le rail ouest s'était détaché, et le camionneur n'était pas capable d'évaluer les dommages causés à l'infrastructure de la voie.
  4. La voie s'est écartée de sa position ou a bougé sous le poids du train, ce qui a entraîné un surécartement qui a déclenché le déraillement.
  5. Le camionneur n'a pas prévenu immédiatement la compagnie ferroviaire des dommages, alors que s'il l'avait prévenue sur-le-champ, l'accident aurait pu être évité.
  6. Ni l'administration routière ni la compagnie ferroviaire n'ont établi de méthodes pour sensibiliser les usagers des passages à niveau aux dangers possibles du contact de voies ni fourni de moyens d'aviser d'urgence la compagnie ferroviaire.

Causes et facteurs contributifs

Le déraillement s'est produit à cause du surécartement de la voie dû au déplacement du rail causé par une semi-remorque qui avait franchi le passage à niveau en frottant contre le sol.

Mesures de sécurité

Le Bureau de la sécurité des transports a envoyé un Avis de sécurité à Transports Canada pour lui suggérer d'étudier, en collaboration avec les compagnies ferroviaires de compétence fédérale, les moyens de fournir à l'industrie du camionnage des renseignements facilement accessibles sur les passages à niveau et les numéros de téléphone des compagnies ferroviaires avec qui communiquer en cas d'urgence.

Transports Canada a répondu que le CN s'était doté d'un numéro de téléphone d'urgence 1-800 dans le district du sud de l'Ontario dans le cadre d'un projet pilote. Ce numéro sera affiché aux passages à niveau publics et sur les guérites de signalisation. On compte que cet affichage évitera la confusion sur l'identité de l'administration à joindre en cas d'urgence. Transports Canada surveille ce projet pilote et il abordera les autres compagnies ferroviaires de compétence fédérale pour qu'ils réalisent un programme identique si ce projet est couronné de succès. Avec ses homologues provinciaux, Transports Canada étudie aussi la possibilité d'ajouter des renseignements sur la garde au sol à avoir aux passages à niveau sur les permis délivrés à l'industrie du camionnage.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau, qui est composé du Président, John W. Stants, et des membres Zita Brunet et Hugh MacNeil.