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Rapport d'enquête aéronautique A11W0144

Perte de maîtrise et collision avec un immeuble
du de Havilland DHC-6-300 Twin Otter, C-GARW
exploité par Arctic Sunwest Charters
Yellowknife (Territoires du Nord-Ouest)
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le de Havilland DHC-6-300 Twin Otter monté sur flotteurs (immatriculé C-GARW, numéro de série 367) était en train d'amerrir à l'hydroaérodrome (CEN9) de Yellowknife (Territoires du Nord-Ouest), le long de la côte ouest du Grand lac des Esclaves, près du secteur connu sous le nom d'Old Town. L'appareil avait à son bord 2 membres d'équipage et 7 passagers, et le copilote était le pilote aux commandes. À l'amerrissage, l'aéronef a rebondi, puis a marsouiné et a atterri brutalement sur le flotteur droit. L'équipage a alors remis les gaz; l'aéronef a décollé à basse vitesse dans une assiette de cabré prononcée, incliné à droite, et a amorcé un virage à droite en direction de la rive. Au cours du virage, l'aile droite de l'aéronef a heurté des lignes et des câbles électriques avant que la partie inférieure des flotteurs ne percute le côté d'un immeuble de bureaux. L'appareil a alors heurté le sol sur le nez et a fait la roue jusqu'au stationnement adjacent. Les 2 membres d'équipage ont subi des blessures mortelles, 4 des passagers ont été grièvement blessés et les 3 autres ont subi des blessures mineures. L'aéronef a été gravement endommagé. La radiobalise de repérage d'urgence de 406 mégahertz s'est activée. Il n'y a pas eu d'incendie. L'accident s'est produit à 13 h 18, heure avancée des Rocheuses.

Renseignements de base

Déroulement du vol

L'équipage a commencé sa journée de service en quittant l'hydroaérodrome (CEN9) de Yellowknife (Territoires du Nord-Ouest) à 10 h 58Note de bas de page 1 pour un vol de transport de matériel de 45 minutes à destination d'un camp minier de Thor Lake (Territoires du Nord-Ouest). C-GARW a quitté Thor Lake à 12 h 48 pour le vol de retour à destination de l'hydroaérodrome CEN9 avec 7 passagers à bord et est monté à une altitude en route de 3500 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl). Pour le vol de retour, le copilote était le pilote aux commandes (PF) et occupait le siège droit du poste de pilotage, et le commandant de bord était le pilote qui n'est pas aux commandes (PNF) et occupait le siège gauche. L'équipage a obtenu des renseignements météorologiques du service automatique d'information de région terminale (ATIS) de l'aéroport de Yellowknife (CYZF) et a discuté de son approche prévue à CEN9. En prenant l'étape de base gauche pour l'amerrissage, C-GARW a été informé par la tour de contrôle CYZF, située à environ 6 milles marins (nm) à l'ouest de CEN9, que les vents à l'aéroport étaient variables et soufflaient du sud-ouest à 10 nœuds avec des rafales à 30 nœuds. CEN9 n'est pas visible depuis CYZF.

En raison de la présence de vagues (rouleaux) de 2 à 3 pieds sur le lac, l'équipage a prévu son approche de manière à amerrir près de la rive et éviter de pénétrer dans le passage entre la rive et l'île Jolliffe (Figure 1). Le commandant de bord a indiqué également que l'appareil devait maintenir une vitesse indiquée supérieure à 80 nœuds (KIAS), soit 10 KIAS au-dessus de la vitesse d'approche normale de 70 KIAS pour une approche et un amerrissage pleins volets (37,5°). Durant l'approche, le commandant de bord a averti le copilote à 2 reprises que la vitesse indiquée était trop basse. L'aéronef s'est posé dans la zone d'amerrissage prévue et a rebondi, puis est retombé à la surface de l'eau sur le flotteur droit d'abord. Le flotteur a pénétré dans l'eau, et l'aéronef a fait un mouvement de lacet sur la droite, en déviant vers la rive. L'avertisseur de décrochage a retenti durant 0,3 seconde environ.

Figure 1. Hydroaérodrome de Yellowknife.
Aerial photo of crash site near Great Slave Lake

Sans déclarer qu'il prenait les commandes, le commandant de bord a posé la main droite sur la manette de poussée que tenait déjà le copilote de la main gauche et a donné la puissance maximale pour la manœuvre de remise des gaz. C-GARW a décollé avec une assiette de cabré prononcée, incliné à droite, en prenant un virage à droite à basse altitude au-dessus de la rive en direction des immeubles du secteur Old Town (Territoires du Nord-Ouest). À ce moment, le commandant de bord a demandé de sortir les volets à 20°, et le copilote a répondu. Cependant, les volets n'ont pas été réglés avant l'impact. L'aile droite a alors heurté les lignes électriques, ce qui a engendré un mouvement de rotation qui a mis l'aéronef en position de piqué. La partie inférieure des flotteurs a percuté le côté d'un immeuble de bureaux de 3 étages. C-GARW est ensuite tombé sur le sol sur le nez, puis a fait la roue sur la gauche pour s'arrêter dans un stationnement adjacent. L'avertisseur de décrochage a retenti de façon intermittente tout au long de la manœuvre de remise des gaz pour s'arrêter tout juste avant l'impact.

Il s'est écoulé au total 4 secondes environ entre le début de la remise des gaz et la commande de réglage des volets à 20°, et 6 secondes environ entre cette dernière commande et l'impact final. L'altitude maximale gagnée a été de 50 pieds environ au-dessus du sol.

De nombreux témoins de l'accident se sont précipités immédiatement sur les lieux pour évacuer les passagers. Il n'y a pas eu d'incendie, malgré le déversement considérable de carburant.

Renseignements sur la photo

Au sud-ouest de la zone d'amerrissage et du lieu de l'accident, dans le secteur Old Town, se trouve un affleurement rocheux appelé The Rock qui culmine à 70 pieds environ au-dessus du niveau du lac et à 60 pieds environ au-dessus du niveau de la rue. Au sommet, on trouve un belvédère public, une station météorologique privée et le monument des pilotes. L'aéronef a été photographié depuis le belvédère durant l'approche, l'amerrissage, la remise des gaz (Photo 1) et l'impact avec l'immeuble. Sur les photos prises avant et après la Photo 1, on aperçoit un indicateur de direction du vent sur un immeuble situé à côté de la zone d'amerrissage qui permet d'observer les variations de la vitesse et de la direction du vent tout au long de l'amerrissage. Au moment où l'aéronef a touché la surface de l'eau pour la première fois, un vent de travers soufflait de l'ouest. Au début de la remise des gaz, un vent contraire soufflait du sud-ouest; le vent a de nouveau changé de direction pour souffler de l'ouest pour le reste du vol.

Photo 1. C-GARW survolant les quais durant la remise des gaz (photo utilisée avec l'autorisation de l'auteur)
Photo de l'hydro port montrant les deux points de contact avec l'eau de l'hydravion

Conditions météorologiques

Enregistré à 13 h, le message d'observation météorologique régulière pour l'aviation (METAR) de NAV CANADA pour l'aéroport CYZF faisait état des conditions suivantes : vent de 230° vrai (V) à 10 nœuds avec rafales à 17 nœuds, visibilité de 15 milles terrestres (sm), quelques nuages à 25 000 pieds au-dessus du sol (agl), température de 16 °C, point de rosée de 1 °C et calage altimétrique de 29,20 pouces de mercure.

À 11 h 42, NAV CANADA a émis une carte de prévision de zone graphique (GFA) qui était valide à 12 h le jour de l'accident. La GFA indiquait la présence d'un courant-jet à basse altitude dans la région et la possibilité de turbulence mécanique modérée et de cisaillement du vent à basse altitude depuis le sol jusqu'à une altitude de 3000 pieds agl.

La station météorologique privée du monument des pilotes a enregistré les vents à intervalles de 1,5 minute environ. À 13 h 15 min 46 s, les vents soufflaient du 167° magnétique (M) à 19,1 nœuds avec des rafales à 31,3 nœuds. À 13 h 17 min 08 s, les vents soufflaient du 159 °M à 24,3 nœuds avec des rafales à 31,3 nœuds. Enfin, à 13 h 18 min 16 s, les vents soufflaient du 195 °M à 21,7 nœuds avec des rafales à 31,3 nœuds. Les vents n'ont pas été enregistrés à 13 h 20, ni durant 1 heure et 38 minutes par la suite, en raison d'une panne de courant résultant de l'impact de l'aéronef avec les lignes électriques.

Composante de vent de travers

Le cap approximatif suivi par C-GARW pour l'approche et l'amerrissage était de 195 °M. La direction du vent était variable, mais était approximativement du 273 °M à 24 nœuds avec des rafales de 31 nœuds au contact de l'eau, produisant ainsi une composante de vent de travers de 20 à 30 nœuds. La direction du vent au moment de l'amerrissage est vérifiable par l'observation de l'indicateur de direction du vent (Photo 1).

La section 2.6.2 du manuel d'utilisation de l'aéronef (AFM) du DHC-6-300 stipule ce qui suit :

[Traduction] Avec les volets complètement sortis (37,5°), les atterrissages par vent de travers ont été démontrés avec une composante de vent de travers maximale de 20 nœuds mesurée à 6 pieds, ce qui équivaut à 27 nœuds à 50 pieds. Il s'agit du maximum rencontré durant les essais d'atterrissage par vent de travers, bien que cela ne soit pas considéré comme une limite. La technique privilégiée exige d'abaisser l'aile exposée durant l'approche en appliquant une compensation opposée suffisante de la gouverne de direction pour aligner l'aéronef avec la piste. À mesure que la vitesse indiquée diminue durant l'arrondi et la course à l'atterrissage, il faut augmenter l'application de ces 2 commandesNote de bas de page 2.

Cisaillement du vent

[Traduction] Le cisaillement du vent désigne un changement brusque et radical de la vitesse et de la direction du vent, ou des deux, qui peut se produire à toute altitude sur le plan vertical ou horizontal. Il peut soumettre un aéronef à des composantes extrêmes de vents horizontaux, ce qui provoque une perte de portance ou des variations violentes de vitesse verticale ou d'altitudeNote de bas de page 3. [Traduction] Si un aéronef est en approche pour atterrir à une vitesse indiquée près de la vitesse de décrochage, la trajectoire d'approche peut s'accentuer ou un décrochage peut survenir étant donné qu'une perte de vitesse indiquée se traduit par une perte de portanceNote de bas de page 4.

Lorsque le pilote prévoit des conditions de cisaillement du vent, il devrait, à titre de précaution, corriger sa vitesse indiquée d'approche pour compenser les conditions de vent comme il le ferait pour compenser des rafales.

Remise des gaz après un atterrissage interrompu

L'AFM du DHC-6-300 recommande que la décision de remettre les gaz soit prise, si possible, durant l'approche avec les volets sortis à 10°. Il faut alors amener les manettes de poussée en position de décollage, et la vitesse indiquée minimale doit être de 1,3 fois celle de la vitesse de décrochage avec les volets sortis à 10° en fonction de la masse de l'aéronef; ceci correspond à 81 KIAS pour une masse d'aéronef de 11 000 livres dans le cas qui nous occupe. En l'absence d'obstacle sur la trajectoire de l'aéronef, et avec un taux de montée positif, les volets doivent être rentrés à 0°, et la vitesse indiquée doit être portée à 87 KIAS. L'AFM comporte également les mentions suivantes :

[Traduction] REMARQUE DE L'AFM : avec les volets sortis à 37,5°, l'assiette en tangage durant la remise des gaz sera de 0° environ (assiette de vol en palier). [Traduction] AVERTISSEMENT DE L'AFM : avec les volets sortis à 37,5°, une assiette en tangage durant la remise des gaz supérieure à 0° (assiette de vol en palier) peut provoquer une baisse rapide de la vitesse indiquée et éventuellement un décrochageNote de bas de page 5.

Comme l'indique la liste des conseils sur la sécurité et sur l'exploitation de la section 10 du manuel du DHC-6-300 de Viking Air Ltd. :

[Traduction] Si, par inadvertance, le pilote laisse l'appareil prendre un angle d'attaque élevé, pour en sortir, le pilote doit réduire l'assiette en tangage et augmenter la vitesse indiquée. Dès que l'assiette en tangage est réduite et que la vitesse indiquée commence à augmenter, le pilote peut accroître la puissance s'il y a lieu pour éviter que la descente se poursuive. Il n'est pas acceptable de maintenir un angle d'attaque élevé, d'augmenter la puissance et de tenter de sortir d'un angle d'attaque élevé par une augmentation de puissance. Il est essentiel d'abaisser le nez de l'appareil pour augmenter la vitesse indiquéeNote de bas de page 6.

Rapport d'accident AAR-91/01 du National Transportation Safety Board

Dans son rapport d'enquête AAR-91/01 sur un accident similaire impliquant un DHC-6-300 survenu en 1989, le National Transportation Safety Board (NTSB) déclare ce qui suit :

[Traduction] Le manuel d'utilisation du DHC-6… de la compagnie Grand Canyon Airlines donne l'avertissement suivant : au cours d'une manœuvre de remise des gaz avec les volets sortis, le nez de l'appareil pointera sous la trajectoire de vol réelle. Des pilotes ont signalé que s'ils ajoutaient de la puissance à basse vitesse indiquée lorsque les volets étaient sortis complètement, l'aéronef prenait une assiette de cabré. Les pilotes ont également indiqué qu'il fallait appliquer une pression positive sur le volant de commande pour stopper ou prévenir cette tendance à cabrer. Malgré le fait que certains pilotes ont signalé qu'à l'occasion, il était nécessaire de tenir le volant de commande à 2 mains pour empêcher l'aéronef de cabrer, personne n'a signalé que la force exercée dépassait la limite maximale de 50 livres stipulée par la Federal Aviation Administration (FAA). L'enquête du NTSB a cherché à établir les facteurs qui ont pu entraîner la perte de maîtrise de l'aéronef par les pilotes durant la manœuvre de remise des gaz. En situation dynamique dans laquelle l'aéronef se dirigeait vers le côté de la piste avec l'aile droite basse, la réaction du pilote a peut-être été de relever le nez et d'augmenter la puissance en prévoyant une remise des gaz. À une vitesse indiquée s'approchant de la vitesse de décrochage, la déflexion vers le bas sur le stabilisateur horizontal a tendance à relever le nez de l'aéronef, ce qui oblige le pilote à pousser le volant de commande vers l'avant pour maintenir une assiette en tangage normale avec le même réglage de compensation. Si le pilote a tiré sur le volant de commande en augmentant la puissance, l'aéronef a peut-être décollé dans une assiette de cabré prononcée en décrochage avec moteur ou en quasi-décrochage. En outre, les repères visuels ont peut-être été trompeurs. En effet, selon le manuel d'exploitation du DHC 6, avec les volets sortis à 40° (souvent, la position des volets sortis à 40° est appelée pleins volets, mais en fait, les pleins volets correspondent à 37,5°), l'angle d'inclinaison de l'aéronef se situe sous l'angle de la trajectoire de vol durant une remise des gaz. En conséquence, une accentuation du cabrage menant à une assiette de référence type en cabré lorsque les volets sont sortis à 40° augmente le risque de décrochage aérodynamique et de perte de portance qui s'ensuitNote de bas de page 7.

Renseignements sur l'équipage

Les dossiers indiquent que l'équipage de conduite possédait les licences et les qualifications nécessaires au vol en vertu de la réglementation en vigueur.

Le commandant de bord était titulaire d'une licence de pilote professionnel et d'une qualification sur aéronefs terrestres et hydravions monomoteurs et multimoteurs. Sa qualification de vol aux instruments de groupe 1 était valide jusqu'au 1 juin 2012, et son certificat médical de catégorie 1 était valide jusqu'au 1 novembre 2011. Il avait accumulé 5817 heures de vol, dont 4893 heures à titre de commandant de bord, avec 1106 heures sur aéronefs multimoteurs et 1562 heures sur hydravions. Il avait accumulé 1037 heures de vol sur un DHC-6, dont 285 heures sur un DHC-6 monté sur flotteurs. Le commandant a suivi la formation initiale sur le DHC-6 en mai 2010 et a réussi la vérification de la compétence du pilote (PPC). Au cours de la formation, le pilote a démontré qu'il était capable d'amorcer un décrochage, de le reconnaître et d'en sortir dans les configurations suivantes : lisse, volets sortis en approche et volets sortis en approche dans un virage. Le commandant de bord a également pu interrompre un atterrissage avec volets d'atterrissage au maximum.

Le copilote était titulaire d'une licence de pilote professionnel et d'une qualification sur aéronefs terrestres et hydravions monomoteurs et multimoteurs. Sa qualification de vol aux instruments de groupe 1 était valide jusqu'au 1 août 2012, et son certificat médical de catégorie 1 était valide jusqu'au 14 mars 2012. Il avait accumulé 570 heures de vol, dont 111 heures à titre de commandant de bord, avec 343 heures sur aéronefs multimoteurs et 136 sur hydravions. Il avait accumulé 323 heures de vol sur un DHC-6, dont 135 heures sur un DHC-6 monté sur flotteurs. Le copilote a réussi la PPC initiale sur le DHC-6 en août 2010 et, au lieu d'une épreuve en vol, il a suivi une formation périodique en juin et en juillet 2011. Deux vols de formation, totalisant 4,1 heures, ont été effectués et portaient sur les décrochages à partir de configurations lisse, pleins volets et volets sortis à 20° en virage. La capacité du copilote à gérer ces situations a été jugée satisfaisante. Il n'a pas suivi la formation sur l'atterrissage interrompu avec volets d'atterrissage au maximum.

Renseignements sur l'aéronef

Les dossiers indiquent que l'aéronef était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. Il a été établi que la masse et le centre de gravité se trouvaient à l'intérieur des limites prescrites.

C-GARW, un de Havilland DHC-6-300 Twin Otter (numéro de série 367), a été fabriqué en 1973 et était équipé de flotteurs CAP 12000. Les heures totales depuis la mise en service initiale se chiffraient à 33 355. L'appareil avait subi le 4 septembre 2011, à 33 282 heures, la plus récente inspection numéro 16 dans le cadre du programme d'inspection de maintenance équilibrée pour une disponibilité maximale (EMMA) ainsi qu'une inspection de la cellule après 2000 heures.

Rien n'indiquait une défaillance de la cellule, du moteur ou d'un système avant ou durant le vol ayant mené à l'accident.

Renseignements sur l'épave

Le fuselage avant et le poste de pilotage ont été détruits, alors que le fuselage principal, la cabine et l'empennage sont demeurés intacts. Les 2 ailes étaient toujours fixées à l'aéronef, et l'aile gauche était intacte. Il manquait environ 4 pieds de la partie extérieure de l'aile droite et la moitié de l'aileron extérieur. Les volets étaient complètement sortis, comme l'indiquaient les instruments du poste de pilotage. Le vérin du compensateur de profondeur et le vérin de liaison du compensateur des volets étaient tous deux en position maximale de piqué. Il n'a pas été possible de déterminer la continuité et le déplacement des autres commandes en raison du dommage. Les 2 moteurs et leurs nacelles s'étaient détachés des ailes, mais y étaient toujours reliés par les tuyaux et les câbles. Les sections d'échappement des 2 moteurs présentaient une déformation considérable dans le sens contraire de la rotation des hélices, ce qui indiquait que les 2 moteurs produisaient une puissance considérable au moment de l'impact. Les pales des hélices étaient toujours fixées à leurs moyeux, mais présentaient d'importants dommages. Les flotteurs et leurs montants étaient détachés du fuselage.

L'enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR) a été récupéré, et les renseignements qu'il contenait ont pu être téléchargés. Par contre, l'aéronef n'était pas doté d'un enregistreur de données de vol (FDR), et n'était pas tenu d'en avoir un selon la réglementation en vigueur.

Le rapport du laboratoire du BST suivant a été élaboré :

Analyse

Aucun élément n'indique que l'événement a pu être causé par une défaillance d'un système de l'aéronef. L'analyse portera principalement sur la coordination de l'équipage et sur la technique de pilotage durant l'amerrissage et la tentative de remise des gaz.

Lorsque les membres de l'équipage ont discuté de leur approche, ils étaient au courant des forts vents du sud qui produisaient des rouleaux sur le lac. Ils ont décidé d'adopter une vitesse d'approche supérieure à 80 nœuds, soit 10 nœuds au-dessus de la vitesse d'approche normale à pleins volets, afin de compenser les conditions de vent. La vitesse indiquée avant l'amerrissage était égale ou inférieure à 80 nœuds, comme l'indiquent les 2 avertissements du commandant de bord. Les forts vents de l'ouest présents juste avant l'amerrissage ont créé des conditions de vent de travers et de cisaillement du vent dans la zone d'amerrissage prévue, conditions qui ont probablement été aggravées par la turbulence présente autour du secteur The Rock immédiatement en amont de la zone d'amerrissage. Cette combinaison aurait produit des fluctuations de la vitesse indiquée et causé le premier amerrissage brutal et le premier rebond au moment où le copilote effectuait l'arrondi pour l'amerrissage.

Après le premier rebond, l'aéronef se serait alors trouvé en vol lent. Le fort vent de travers de droite ainsi que la compensation aux ailerons qu'a effectuée le pilote ont probablement causé la prise de contact du flotteur droit avec l'eau avant le flotteur gauche lorsque l'aéronef a touché l'eau une deuxième fois. L'aéronef a alors fait un mouvement de lacet vers la droite et a piqué du nez. La commande de profondeur vers l'arrière a été utilisée pour corriger le mouvement en piqué et remettre les gaz. Cette manœuvre, combinée à l'effet de cabré produit par le passage en puissance maximale, a fait décoller l'aéronef de la surface de l'eau dans une assiette de cabré prononcée, incliné à droite. Les volets étant complètement sortis et les deux ailes se trouvant en décrochage ou en quasi-décrochage, l'aéronef n'a pas pu accélérer ni reprendre de l'altitude pour le reste du vol. Étant donné que le commandant de bord a pris les commandes sans déclarer qu'il était aux commandes, il est possible que les 2 pilotes aient manipulé les commandes durant la remise des gaz.

Du fait que les pilotes ont relevé le nez de l'aéronef, ou ont laissé l'aéronef prendre cette assiette en cabré au moment de remettre les gaz à pleine puissance, la vitesse indiquée n'a pas pu augmenter. Ceci a provoqué le décrochage des ailes et la perte de maîtrise.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Les fluctuations de la vitesse indiquée au contact de l'eau, combinées aux vents en rafales, ont provoqué un rebond à l'amerrissage.
  2. Les techniques de remise des gaz inadéquates employées durant la sortie du rebond à l'amerrissage ont provoqué une perte de maîtrise.
  3. Il est possible que la confusion dans la coordination entre les membres de l'équipage durant la tentative de remise des gaz ait contribué à la perte de maîtrise.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le . Il est paru officiellement le .