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Rapport d'enquête aéronautique A09W0021

Perte de puissance et collision avec le relief
du Robinson R44 (hélicoptère) C-FOBX
exploité par Sarvair Aviation Ltd.
à 20 nm au nord-ouest de Grande Cache (Alberta)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

L'hélicoptère Robinson R44 (immatriculation C-FOBX, numéro de série 0890) exploité par Sarvair Aviation Ltd. est en route entre Grande Prairie et Grande Cache (Alberta) avec à son bord le pilote et un passager. Vers 17 h 2, heure normale des Rocheuses, au moment où l'hélicoptère prend de l'altitude au-dessus d'un relief ascendant, son moteur perd de la puissance et le régime du rotor principal chute. Afin de rétablir le régime du rotor principal, le pilote effectue un virage vers le bas de la pente, mais lorsque cette tentative échoue, il doit exécuter un atterrissage forcé dans les arbres. L'hélicoptère s'immobilise sur son côté droit. Le pilote est grièvement blessé lorsque le passager tombe sur lui au moment de l'impact, mais le passager ne subit aucune blessure. La radiobalise de repérage d'urgence ne se met pas en marche pendant la séquence d'impact, ce qui retarde les recherches et l'intervention des secouristes, et les occupants de l'appareil demeurent plus de 15 heures sur le lieu de l'accident avant qu'on leur vienne en aide.

This report is also available in English.

Renseignements de base

Déroulement du vol

Les dossiers indiquent que l'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. L'appareil ne présentait aucune défectuosité connue avant le vol en cause. La masse et le centre de gravité se trouvaient dans les limites prescrites au moment de l'accident. Il y avait une quantité suffisante de carburant à bord pour effectuer le vol prévu.

L'appareil a décollé de Grande Prairie (Alberta) à 16 hFootnote 1 à destination de Grande Cache (Alberta). Avant le départ, le pilote a donné un exposé de sécurité à son passager, lequel était un employé et le responsable désigné de la compagnie en ce qui a trait aux exposés de sécurité pour les opérations liées à l'exploitation forestière. Le pilote avait apporté à bord un système de positionnement à couverture mondiale (GPS) et de communication par satellite SPOTFootnote 2 dont il venait de faire l'achat, sans savoir toutefois qu'il avait souscrit du même coup à la fonction 911 du système. Ni le pilote ni son passager ne savaient précisément comment utiliser les fonctions du système SPOT.

Pendant le vol, l'hélicoptère a rencontré une zone de précipitation située en bordure d'un front froid en rapprochement, et le pilote a modifié sa route vers le sud pour suivre une trajectoire parallèle à la zone de mauvais temps. À l'approche de Grande Cache, le vol s'est retrouvé très près de la zone de chute de neige accompagnant le front froid. À 17 h, le rendement du moteur (Avco Lycoming O 540 F1B5) s'est détérioré au point d'obliger le pilote à effectuer un atterrissage forcé dans les arbres.

Système GPS de communication par satellite SPOT

Ce dispositif utilise le réseau de satellites GPS pour déterminer ses propres coordonnées et il communique sa position (à l'aide d'un lien vers Google Maps) ainsi qu'un message enregistré au moyen d'un réseau de satellites commercial. Il offre les fonctions d'alerte HELP et 911.

La fonction HELP envoie un message texte au numéro de téléphone cellulaire de la personne contact désignée et un courriel avec un lien vers Google Maps. La fonction HELP envoie un message et une position à toutes les cinq minutes pendant une heure ou jusqu'à sa désactivation.

La fonction 911 alerte les services d'intervention d'urgence d'une situation où il y a danger de mort. Le centre d'intervention d'urgence GEOS Alliance communique avec les organismes publics d'intervention d'urgence à travers le monde, il appelle les personnes contacts désignées pour en apprendre davantage sur la situation, et il tient ces personnes informées du déroulement des opérations de sauvetage. Le centre GEOS Alliance collabore avec les organismes de sauvetage, y compris les centres d'appels 911 urbains et ruraux locaux. La fonction 911 envoie un message et une position à toutes les cinq minutes jusqu'à sa désactivation.

Après être sorti de l'appareil, le pilote blessé a demandé au passager de retirer la radiobalise de repérage d'urgence (ELT) et de la mettre en marche. Puisque l'antenne auxiliaire était introuvable, il a fallu couper le plafond de l'hélicoptère pour en extraire l'antenne externe. À 19 h 7, la fonction HELP du système SPOT s'est mise en marche et a alerté un membre de la famille du pilote, lequel a contacté le Centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage (CCCOS) de Victoria (Colombie-Britannique). Toutefois, en raison de la provenance du message SPOT, le suivi du cas a été confié au CCCOS de Trenton (Ontario). La famille du pilote et le CCCOS de Trenton ont discuté longuement du degré d'urgence de la situation et du niveau d'intervention requis. Comme aucun signal ELT n'avait été rapporté ni détecté, le personnel du CCCOS de Trenton, en concertation avec les membres de la famille, a décidé d'attendre pour voir comment la situation allait évoluer.

Vers 20 h 30, le passager a vérifié si l' ELT fonctionnait, car aucun appareil n'avait encore survolé le lieu de l'accident. Il a alors constaté que le voyant de signal actif de l' ELT ne fonctionnait que par intermittence, et qu'il était impossible de corriger le problème par des réparations sommaires. Ce n'est qu'après avoir frappé l' ELT à plusieurs reprises contre un arbre que le voyant de signal actif est demeuré allumé et que l' ELT a commencé à transmettre normalement. À 20 h 41, le CCCOS de Trenton a reçu un signal ELT. À ce moment là, la fonction 911 du système SPOT a également été activée. Le registre du système SPOT a révélé que les boutons 911 et OK ont été sélectionnés à plusieurs reprises pendant la soirée.

À 21 h 7, un avion CC130 Hercules de la 17e Escadre Winnipeg des Forces canadiennes (FC) a reçu un ordre de mission et l'appareil a décollé à 22 h 12. Un hélicoptère CH146 Griffon de la 4e Escadre Cold Lake (Alberta) a également été désigné pour cette mission, mais aucun équipage n'a été disponible avant le lendemain matin. À 22 h 1, une ambulance aérienne (hélicoptère Messerschmitt-Bölkow-Blohm 117) de la société Shock Trauma Air Rescue Society (STARS)Footnote 3 basée à Grande Prairie a reçu la mission de se rendre sur le lieu de l'accident et a immédiatement décollé. À 21 h 20, on a fait appel aux services de secours médical d'urgence (SMU) et de recherche et sauvetage au sol (GSAR) du détachement de Grande Cache de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et le personnel s'est dirigé par voie terrestre vers le lieu approximatif de l'accident. À 22 h 52, l'équipage de conduite de l'appareil STARS , équipé de lunettes de vision nocturne, est parvenu à localiser l'hélicoptère accidenté. À 23 h 9, l'hélicoptère STARS est parvenu à se poser sur une route de service près du lieu de l'accident. Le passager, qui avait marché jusqu'à la route, a rencontré l'équipage de conduite et l'a informé de l'état du pilote. Toutefois, l'équipage de conduite de l'appareil STARS ne possédait aucun équipement et n'avait reçu aucune formation pour mener à bien tout type d'opération de sauvetage au sol. Le passager est retourné prendre soin du pilote pendant que l'hélicoptère STARS redécollait pour aller se ravitailler en carburant à Grande Cache. Le pilote STARS a communiqué au répartiteur STARS les renseignements sur le lieu de l'accident et ce dernier les a transmis à la GRCet au CCCOS de Trenton.

À 0 h 44, l'hélicoptère STARS a redécollé de Grande Cache pour retourner sur le lieu de l'accident, mais il a dû se dérouter vers Grande Prairie en raison d'une réduction de la visibilité causée par des chutes de neige et de la poudrerie. Au même moment, le personnel de recherche au sol éprouvait de la difficulté à localiser le lieu de l'accident, car il ne disposait pas d'un appareil de repérage ELT fonctionnant sur la fréquence 121,5 MHz. De plus, puisque son équipement radio était incompatible avec celui de l'équipage du Hercules, qui était arrivé à la verticale du lieu de l'écrasement à 2 h 30, le personnel de recherche au sol était incapable de communiquer directement avec l'équipage. En outre, à cause des mauvaises conditions météorologiques, le Hercules ne pouvait parachuter les techniciens de recherche et sauvetage sur le lieu de l'accident. La recherche s'est poursuivie jusque vers 4 h 30, lorsque le passager a rencontré l'équipe de recherche au sol sur la route, à 2 km du lieu de l'accident.

À 9 h 30, l'hélicoptère CH146 Griffon a quitté Cold Lake à destination du lieu de l'accident avec une escale prévue à Edmonton pour le ravitaillement en carburant. Toutefois, vers 10 h, les conditions météorologiques s'étaient suffisamment améliorées pour que l'hélicoptère STARS puisse se poser à moins d'un demi-mille marin du lieu de l'accident où il a pris à bord le pilote blessé qui avait été transporté à cet endroit par le personnel GSAR. Par conséquent, la mission du CH146 Griffon a été interrompue à 10 h 14. Le pilote blessé est arrivé à l'hôpital de Grande Prairie à 10 h 35, soit plus de 17 heures après l'accident.

Renseignements sur le pilote et l'exploitant

Sarvair Aviation Ltd. est une compagnie privée qui offre des services d'affrètement d'hélicoptères et qui possède des bases à Williams Lake et à l'aéroport de 108 Mile Ranch en Colombie-Britannique.

Les dossiers indiquent que le pilote possédait les certifications et les qualifications requises pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. Au 29 janvier 2009, il totalisait 16 454,1 heures de vol, dont 275 heures sur le type d'aéronef en cause. Dans les 90 jours précédant l'accident, il avait accumulé 15,1 heures de vol; 3,9 heures dans les 30 jours précédant l'accident; et 3,9 heures dans les 7 jours précédant l'accident (à l'exclusion du vol en cause). Il était qualifié sur huit types différents d'hélicoptère, et la grande majorité de ses heures de vol avait été accumulée sur des hélicoptères à turbine.

Le 13 novembre 2008, le pilote avait subi l'examen d'exploitation de la compagnie, lequel portait notamment sur les situations d'urgence, les tâches reliées au suivi des vols, et les scénarios de survie. Du 28 octobre au 14 novembre 2008, le pilote a suivi la formation au sol et en vol sur le Robinson R44. L'examen écrit comportait notamment une question sur le réchauffage carburateur qui demandait qu'elle était la plage des températures de l'arc jaune sur l'indicateur de température d'air du carburateur (−19 °C à 3 °C).

Conditions météorologiques

La zone du vol était sous l'influence d'un système de basse pression ayant son centre dans le nord-ouest de l'Alberta et qui était accompagné d'un front froid se prolongeant vers le sud le long de la frontière entre l'Alberta et la Colombie-Britannique. La carte des nuages et du temps des prévisions régionales graphiques (GFACN32) publiées à 16 h 31, le 30 janvier 2009, et valide à compter de 17 h, prévoyait des cumulonimbus isolés ayant leur sommet à 20 000 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl), ainsi que des éclairs dans la région de Grande Prairie avec des rafales locales pouvant atteindre 45 nœuds. On prévoyait de fortes rafales pouvant atteindre 35 nœuds après le passage du front. On prévoyait également de la turbulence mécanique d'onde orographique modérée à sévère entre la surface et jusqu'à 12 000 pieds asl dans la région des contreforts des Rocheuses (Alberta). Le niveau de congélation dans la région du vol présentait une forte pente (100 km de largeur) à partir de 5000 pieds asl jusqu'à la surface le long des contreforts. L'auto-observation pour Grande Cache à 17 h était la suivante : température de 2,8 °C, point de rosée de 3,7 °C, et vent du 300° vrai (V) à 7 nœuds. Une heure plus tard, la température était de 0 °C, le point de rosée de 1,1 °C, et le vent du 270° V à 25 nœuds. Le Manuel de pilotage – Avion (TP 1102) de Transports Canadaindique que, lorsque la température est comprise entre 0 °C et 3 °C et que le point de rosée est compris entre −4 °C et −1 °C, un givrage sévère du carburateur peut survenir à tous les régimes moteur.

Givrage du carburateur

Dans l'hélicoptère R44, la mise en marche du réchauffage carburateur se fait de concert avec les changements de réglage du pas collectif au moyen d'un embrayage à friction, et ce, afin de réduire la charge de travail du pilote. Le fait d'abaisser le collectif augmente mécaniquement le réchauffage carburateur alors qu'on le réduit en soulevant le collectif. Le pilote peut toutefois surpasser l'embrayage à friction s'il désire augmenter ou diminuer le réchauffage carburateur. Un loquet sur le bouton de commande permet de couper le réchauffage carburateur lorsqu'il n'est pas requis. Le pilote doit surveiller l'indicateur de température d'air du carburateur et il doit mettre en marche le réchauffage carburateur au besoin afin de maintenir l'aiguille dans la plage de températures (−19 °C à 3 °C) indiquée par un arc jaune sur le cadran.

Formats de géolocalisation

Les divers organismes de recherche et sauvetage (SAR) canadiens n'utilisent pas un format commun de géolocalisation. La plupart des organismes SAR terrestres et la GRCutilisent le système de coordonnées de la projection universelle transverse de Mercator (UTM), tandis que l'aviation civile et l'aviation militaire utilisent l'un des trois systèmes de latitude et de longitude. La plupart des instruments GPS peuvent passer de l'un à l'autre de ces trois derniers systèmes, au choix de l'utilisateur.

Lors des activités SAR liées à l'accident en cause, on a utilisé les trois formats de géolocalisation en usage dans l'industrie aéronautique : Degrés, Minutes, Secondes (DD MM SS.ss); Degrés, degrés décimaux (DD.dddd); et Degrés, Minutes, minutes décimales (DD MM.mm). La position de l'hélicoptère a été consignée de la façon suivante dans les divers registres des événements SAR :

Position SPOT (DD.dddd) : N54.1597° W119.2696°
Position GRC (DD MM SS.ss): N54° 9′35.64″ W119° 16′ 8.04″
Position STARS (DD MM.mm): N54° 09.56′ W119° 16.14′

Peu après avoir localisé l'appareil accidenté, les membres de l'équipage de conduite STARS ont contacté leur service de régulation des vols pour lui communiquer la position de l'appareil. Toutefois, plutôt que d'indiquer la position sous le format DD MM.mm, soit N54° 09.56′, on a utilisé le format DD MM SS, soit N54° 09′ 56”. Ce qui a été fait une première fois vers 23 h 25 et de nouveau à 1 h 25, lorsque la GRCa appelé pour clarifier la position de l'hélicoptère. La différence entre ces deux formats a entraîné une erreur de position d'environ 2200 pieds.

L'équipe GSAR local a utilisé un système de cartographie UTM , soit le système de référence de carroyage militaire du Système géodésique de référence nord-américain de 1927 (NAD27). L'enquête a révélé que les grilles de localisation utilisées par le groupe SAR de Grande Cache et le détachement local de la GRCont produit, en moyenne, une erreur de distance horizontale de quelque 750 pieds une fois converties en latitude et longitude à l'aide d'un outil de conversion ordinaire obtenu dans l'Internet.

En novembre 2007, un groupe de travail du National SAR Committee (NSARC) (comité SAR national) des États-Unis a créé une matrice de géolocalisation que doivent utiliser tous les organismes membres du NSARC lors d'une intervention menée par divers organismes (voir le Tableau 1). Ce tableau a pour but d'établir des formats de géolocalisation communs lors des opérations demandant l'intervention de divers organismes SAR aux États-Unis.

Tableau 1. Matrice de géolocalisation du comité SAR national des États-Unis Footnote 4

Utilisateur de système de
géolocalisation
United States National Grid
(USNG)
Latitude/Longitude
DD-MM.mmm
GARS Footnote 5
Intervenant SAR terrestre Primaire Secondaire S/O
Intervenant SAR aéronautique Secondaire Primaire Tertiaire
Résolution des conflits dans l'espace aérien
S/O

Primaire

S/O
Interface entre les intervenants SAR terrestre / SAR aéronautique
Primaire

Secondaire

S/O
Commandement des interventions :
Coordination SAR aéron.
Coordination SAR terrestre

Secondaire
Primaire

Primaire
Secondaire

S/O
S/O

Radiocommunications de recherche et de sauvetage

Le Secrétariat national de recherche et de sauvetage (SNRS) est un organisme gouvernemental autonome sous la responsabilité du ministre chargé de la recherche et du sauvetage (le ministre de la Défense nationale). Créé en 1986, le Secrétariat a pour mandat d'appuyer et de promouvoir les activités du Programme national de recherche et sauvetage (PNRS) afin d'assurer l'efficacité et la rentabilité des diverses ressources et capacités du Programme SAR à travers le Canada.

Le SNRS coordonne les activités centrales de ses partenaires fédéraux en recherche et sauvetage, lesquels regroupent six éléments : les Forces canadiennes (ministère de la Défense nationale); la Garde côtière canadienne (ministère des Pêches et des Océans); la Gendarmerie royale du Canada (Sécurité publique Canada); Transports Canada, le Service météorologique du Canada (Environnement Canada); Parcs Canada (Environnement Canada).

L'une des initiatives du SNRS est la Fréquence interagences de recherche et de sauvetage (FI-RS)Footnote 6 qui est un canal de radiocommunication simplex à très haute fréquence (VHF) situé dans la bande mobile terrestre émettant sur 149,080 MHz. Industrie Canada a rendu cette fréquence disponible à titre de fréquence de communication commune entre les répondants SAR de première ligne terrestres, aériens et maritimes durant les opérations SAR interagences. Le Groupe de travail national sur les radiocommunications de recherche et de sauvetage, qui considère que ce dossier est une priorité absolue, a recommandé cette fréquence parce que, selon lui, la majorité des radios utilisées pendant les opérations SAR au Canada opèrent déjà dans cette gamme de fréquences.

Le SNRS et le Conseil national de recherche et de sauvetage au sol (CNRSS) du Canada ont fait connaître l'existence de cette fréquence et ont fait la promotion de son utilisation auprès de tous les fournisseurs de services SAR au CanadaFootnote 7. Toutefois, l'utilisation de la SAR-IF s'est révélé problématique dans le cas des aéronefs civils. Ces derniers, y compris ceux qui participent au programme de l'Association civile de recherche et de sauvetage aériens, n'ont généralement pas l'équipement requis pour utiliser cette fréquence. Au Canada, le principal moyen de radiocommunication aéronautique est la radio VHF-AM (modulation d'amplitude) qui fonctionne dans la gamme de fréquences de 118 à 137 MHz. Le personnel et les aéronefs SAR militaires canadiens peuvent utiliser la fréquence 149,080 MHz, mais ils s'en abstiennent généralement, lui préférant les fréquences VHF (métrique) et UHF (décimétrique) de 123,1 MHz et 282,8 MHz qui sont les fréquences internationalement reconnues comme fréquences communes sur les lieux des opérations SAR. Dans l'environnement SAR maritime, les radiocommunications se font généralement sur le canal 16 (156,8 MHz), qui est la fréquence internationale de détresse ou sur le canal 06 (156,3 MHz), qui est la fréquence SAR internationale pour les communications SAR sur placeFootnote 8. De plus, les personnes ou les organismes SAR qui désirent utiliser la FI-RS doivent faire une demande de nouvelle licence radio au bureau d'Industrie Canada ou modifier la licence qu'ils détiennent en y ajoutant cette fréquence à leur licence de station de base, ce qui entraîne des frais additionnels.

Le 25 février 2009, le CNRSS a unanimement appuyé le renouvellement des efforts visant à adopter la SAR IF. Jusqu'à présent au Canada, 50 des juridictions de recherche et de sauvetage au sol sur au moins 300 ont fait de même. Un seul exploitant aérien de la Colombie Britannique a installé de l'équipement pouvant utiliser la SAR-IF dans ses hélicoptères. L'information recueillie au cours de l'enquête a révélé que plusieurs juridictions provinciales adoptent présentement leurs propres fréquences VHF et UHF pour les opérations SAR. Certaines des fréquences proposées ne sont généralement pas accessibles aux aéronefs civils et ne sont pas d'usage courant parmi les aéronefs SAR canadiens.

Pendant les opérations de sauvetage en cause, l'équipe GSAR a dû utiliser plusieurs fréquences de la police pour communiquer avec les répartiteurs, lesquels ont dû téléphoner au CCCOS de Trenton, lequel a dû communiquer avec l'avion CC130 Hercules et/ou l'hélicoptère STARS en passant par leur service de régulation des vols respectif.

Recherche et sauvetage du ministère de la Défense nationale

Le ministère de la Défense nationale, par l'intermédiaire des FC, est l'organisme ayant la responsabilité principale des services SAR au Canada pour tous les incidents et accidents aéronautiques. La zone que doit couvrir les FC mesure plus de 15 540 000 km2, ce qui comprend la masse continentale canadienne, les eaux territoriales et les sections océaniques de l'Atlantique et du Pacifique. C'est une tâche considérable, et de nombreuses régions du Canada se trouvent à une grande distance de tout aéronef SAR de première ligne.

L'accident s'est produit dans la région SAR de Trenton. Le personnel de cette région a la responsabilité d'intervenir dans tous les cas qui surviennent dans la zone comprise entre la frontière de l'Alberta et de la Colombie-Britannique et le milieu du Québec. Il y a deux unités SAR principales : le 424e Escadron Trenton (avions CC130 et hélicoptères CH146) et le 435e Escadron de Winnipeg (avions CC130). Dans l'accident en cause, le 435e Escadron était la ressource SAR primaire située la plus près du lieu de l'accident. Puisqu'il ne dispose pas de ses propres hélicoptères, le 435e Escadron doit souvent faire appel à des hélicoptères de l'extérieur. Les hélicoptères peuvent en effet voler beaucoup plus bas que les aéronefs à voilure fixe et ils peuvent demeurer en vol stationnaire au-dessus d'un point donné. De plus, les hélicoptères SAR des FC peuvent déposer ou récupérer des personnes sur le lieu d'un accident à l'aide d'un treuil. Par contre, les aéronefs à voilure fixe conviennent parfaitement au déploiement rapide de personnel et d'équipement SAR à de grandes distances. Les deux types d'aéronef sont essentiels pour mener efficacement des opérations SAR. Lorsque aucun hélicoptère SAR primaire des FC n'est disponible, le CCCOS confie généralement la tâche à une ressource SAR secondaire des FC. Toutefois, ces dernières ressources ne sont pas disponibles en permanence sur appel (24 heures par jour/7 jours par semaine), c'est pourquoi leur délai d'intervention à la suite d'événement est parfois beaucoup plus long, comme cela s'est produit pour le CH146. Tous les aéronefs SAR des FC sont normalement en disponibilité sur appel dans un délai de deux heures après 16 h, heure locale.

Le système SAR national repose en grande partie sur des organismes civils. Lorsque aucun aéronef SAR des FC n'est disponible, ou lorsqu'il faudrait trop de temps à un tel aéronef pour se rendre sur le lieu d'un accident, il est fréquent que le CCCOS fasse appel à un organisme civil. Dans le cas présent, on a fait appel au STARS en raison de sa proximité du lieu de l'accident et parce qu'il dispose d'ambulances aériennes. Toutefois, contrairement aux équipages des hélicoptère SAR des FC, les équipages STARS ne sont ni formés ni qualifiés pour effectuer un sauvetage au sol, pas plus que pour déposer ou récupérer du personnel au moyen d'un treuil de sauvetage.

En 2002, un énoncé du niveau de service des FC proposé indiquait que : « Un aéronef SAR principal des FC sera en mesure d'arriver au début du circuit de recherche (point de départ des recherches) de tout incident SAR maritime ou aéronautique se produisant dans une région de recherche et de sauvetage canadienne dans les 4 heures suivant son affectation pour 90 % des incidents SAR et dans les 11 heures suivant son affectation pour 100 % des incidents SAR. Le délai d'intervention susmentionné pourrait toutefois être prolongé en raison de conditions météorologiques exceptionnelles, de bris mécaniques, ou de conformité à la réglementation aéronautique. » Cet énoncé du niveau de service proposé visait à quantifier un intervalle entre le moment où l'avis de détresse est reçu et celui où un aéronef SAR primaire se trouve à la verticale du point de départ des recherchesFootnote 9 pour amorcer ces dernières. Les deux principaux facteurs à considérer dans cette proposition sont la distance entre le lieu de l'accident et une ressource SAR primaire, de même que les conditions environnementales. La proposition ne tient pas compte du temps requis pour la recherche, pour effectuer le sauvetage ou l'intervention médicale sur place, ni le temps nécessaire pour évacuer les personnes ayant besoin d'aide. L'énoncé du niveau de service proposé n'a pas été approuvé. En l'état actuel des choses, le seul énoncé de niveau de service en vigueur pour les opérations SAR des FC est le respect du temps de lancement prescrit de 30 minutes pendant les heures normales de travail (entre 8 h et 16 h, du lundi au vendredi) et de 2 heures pendant la soirée et la fin de semaine.

Radiobalise de repérage d'urgence

L'hélicoptère était équipé d'une radiobalise de repérage d'urgence (ELT) de modèle 4000-10 de Pointer Avionics Sentry, munie d'une batterie Pointer C2020, et elle avait été fabriquée en novembre 2007. La batterie devait être remplacée en décembre 2009. L'avion possédait un contacteur à distance d' ELT situé dans le poste de pilotage. Le pilote n'a pas mis l' ELT en marche pendant la séquence d'écrasement. On a déposé l' ELT de l'aéronef immédiatement après l'accident.

On a envoyé l' ELT au Laboratoire technique du BST pour fins d'essais et d'analyse. Les caractéristiques d'émission de l' ELT s'inscrivaient dans les limites prescrites. Rien ne permet de croire que le module d'émission de l' ELT n'était pas en mesure de fonctionner de façon nominale au moment de l'impact.

D'autres essais ont révélé que le circuit d'activation du contacteur à inertie a fonctionné de façon nominale. Le contacteur à inertie de type linéaire monté dans cette ELT était sensible aux forces exercées dans une direction le long d'un seul axe, soit, dans ce cas-ci, la direction longitudinale de l'appareil. La réglementation de Transports Canada stipule qu'à bord d'un hélicoptère, l'axe sensible de l' ELT doit être orienté à environ 45 degrés vers le bas par rapport à la direction normale du vol vers l'avantFootnote 10. L'appareil est descendu au travers des arbres verticalement, puis il s'est écrasé sur son côté. Même si les forces exercées alors étaient peut-être considérables, elles ne se sont pas exercées le long de l'axe sensible du contacteur à inertie de l' ELT. Il existe d'autres types d' ELT qui sont munies de contacteurs à inertie multidirectionnels dont le circuit d'activation est sensible à de multiples axes, mais de telles ELT ne sont pas exigées en vertu de la réglementation actuelle.

Les niveaux de tension mesurée de l' ELT indiquaient que la batterie était chargée presque à pleine capacité. Le connecteur situé entre la batterie et l'émetteur était desserré, ce qui causait un contact intermittent et a empêché l' ELT de fonctionner correctement, même lorsque l'on a réglé l'interrupteur externe en position de marche (ON). La réglementation de Transports Canada stipule que dans le cas d'une ELT installée dans un aéronef, il faut procéder à un essai de fonctionnement annuel de la radiobalise seulementFootnote 11. Un essai au banc du signal émis et de ses paramètres est requis, de même qu'une vérification ou un remplacement de la batterie, à tous les deux ans. Aucune disposition réglementaire n'exige que l'on vérifie l'intégrité ou la corrosion des circuits internes ou des connecteurs.

Analyse

Les conditions météorologiques présentes au moment de l'accident étaient propices au givrage du carburateur. Le pilote avait passé la plus grande partie de sa carrière à bord d'hélicoptères à turbine, des appareils qui ne sont pas sujets au givrage du carburateur. On peut déplacer le levier de réchauffage carburateur de sa position recommandée en sollicitant le levier de collectif en vol. La perte de puissance signalée a sans doute été causée par le givrage du carburateur, une situation que le pilote n'a pas eu le temps de corriger avant l'écrasement.

Les différentes fonctions SPOT utilisées par le passager, de même que l'incertitude des membres de la famille à l'égard de la gravité de la situation lors des discussions avec le CCCOS, ont contribué au délai de l'intervention SAR.

La pleine charge de la batterie de l' ELT laisse croire que l' ELT n'a probablement pas fonctionné, ou qu'il n'a pas émis suffisamment longtemps pour consommer une quantité significative de courant. Le connecteur desserré a empêché l' ELT d'émettre un signal jusqu'à ce que l'on frappe l'appareil contre un arbre, ce qui a rétabli le contact et permis le fonctionnement de l' ELT. De plus, même si le connecteur de la batterie avait été serré, il est probable que les forces d'impact n'auraient pas déclenché le contacteur à inertie compte tenu de l'orientation de l' ELT et du fait que le contacteur n'était sensible que dans un seul axe. Le fait que l' ELT n'a pas émis de signal avant 20 h 41 a contribué à retarder l'intervention SAR. Une exigence d'inspection plus approfondie des ELT pourrait diminuer le risque que des composants défectueux retardent ou empêchent une intervention SAR susceptible de sauver des vies.

Plusieurs organismes SAR ont participé aux opérations de sauvetage. Les différents formats de géolocalisation utilisés par les divers organismes SAR en cause ont forcé ces derniers à convertir leur format privilégié, ce qui a créé des écarts de localisation du lieu de l'accident signalé et retardé l'arrivée des secours sur place. En fin de compte, c'est le passager, qui avait marché de nouveau jusqu'à la route, qui a conduit les ressources SAR jusqu'au pilote blessé. Le pilote a été ainsi secouru plus de 11 heures après l'accident. Une norme de géolocalisation commune aurait pu aider à prévenir cette confusion.

L'absence de fréquence de radiocommunication commune aux divers intervenants SAR a également contribué à retarder les secours. Le délai de sauvetage aurait pu être raccourci par des éclaircissements à propos du lieu de l'accident et une meilleure coordination des tâches. Le risque d'aggravation des blessures et de décès augmente lorsque le délai d'intervention SAR se prolonge.

Le présent accident met également en lumière le long délai que certaines personnes en détresse pourraient avoir à attendre avant d'être secourues par un hélicoptère SAR à cause des conditions environnementales et/ou de la distance à laquelle elles se trouvent d'une base SAR. L'accident souligne également les différences de capacité entre les ressources SAR civiles et militaires. L'appareil STARS a été en mesure d'atterrir à moins d'un demi-mille marin du lieu de l'accident, mais l'équipage n'était ni formé ni qualifié pour effectuer un sauvetage au sol. Par conséquent, une personne grièvement blessée est demeurée sans soins médicaux critiques pendant plusieurs heures supplémentaires après la localisation du lieu de l'écrasement. Les équipages des hélicoptères SAR militaires sont formés et qualifiés pour mener de telles opérations de sauvetage et auraient été en mesure d'atteindre le patient (par voie terrestre ou par treuil) une fois l'épave localisée. Toutefois, comme aucun hélicoptère SAR primaire n'a reçu de mission, et qu'aucun hélicoptère SAR secondaire n'était disponible avant le lendemain, le recours au STARS était la meilleure solution disponible.

Même si les conditions environnementales sont incontrôlables, l'emplacement géographique des ressources SAR peut avoir d'importantes conséquences sur les possibilités de survie à la suite d'un événement aéronautique. Un énoncé de niveau de service qui tiendrait compte du temps nécessaire pour faire le trajet, la recherche et le sauvetage ou la récupération proprement dite des personnes en détresse serait un outil efficace pour déterminer si le niveau de couverture nationale SAR des FC est acceptable.

L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :

Ces rapports sont disponibles sur demande auprès du Bureau de la sécurité des transports du Canada.

Faits établis

Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Il est probable que du givre s'est formé dans le carburateur, ce qui aurait causé une perte de puissance moteur et une chute de régime du rotor principal, et le pilote n'a pas été en mesure de redresser la situation.

Faits établis quant aux risques

  1. Un connecteur desserré entre la batterie et l'émetteur de la radiobalise de repérage d'urgence (ELT) a empêché le fonctionnement correct de l' ELT. Les critères d'inspection actuels des ELT stipulés par Transports Canada n'incluent pas la vérification des circuits internes, lesquels sont susceptibles de causer une défectuosité du circuit d'activation de l' ELT.
  2. Une ELT munie d'un contact à inertie à axe unidirectionnel pourrait ne pas fonctionner sous des forces d'impact se produisant le long de tout autre axe, ce qui pourrait retarder la notification du système de recherche et sauvetage (SAR).
  3. L'utilisation de différents formats de géolocalisation et l'erreur de position que cela a engendrée lors des conversions a contribué à retarder le moment du sauvetage. Les organismes SAR canadiens n'utilisent pas un format commun de géolocalisation, ce qui augmente le risque d'erreur de position et de retard du temps d'intervention lors des opérations qui font appel à plusieurs organismes.
  4. Puisque les Forces canadiennes (FC) ne disposent d'aucun énoncé de niveau de service SAR, il est plus difficile de déterminer si le niveau de couverture nationale SAR des FC est acceptable.
  5. Une mauvaise connaissance des fonctions du système de positionnement à couverture mondiale (GPS) et de communication par satellite SPOT peut retarder le déclenchement des activités SAR.
  6. L'absence d'une fréquence de radiocommunication commune aux divers participants SAR peut engendrer de la confusion pour les équipes de recherche et contribuer à prolonger les délais avant d'atteindre les survivants.

Mesures de sécurité prises

Bureau de la sécurité des transports du Canada

Le 27 avril 2009, le Bureau de la sécurité des transports du Canada a fait parvenir à Transports Canada et aux autres parties intéressées de l'industrie aéronautique le Bulletin sur la sécurité aérienne A09W0021-D1-L1, Consignes de sécurité à l'intention des passagers - Autres dispositifs de localisation d'urgence. Ce bulletin souligne l'importance d'intégrer tout nouvel équipement, comme un autre dispositif de localisation d'urgence, dans les opérations de la compagnie en créant de nouvelles procédures et en offrant de la formation.

Société Shock Trauma Air Rescue Society

La Société Shock Trauma Air Rescue Society (STARS ) a modifié ses procédures d'utilisation normalisées afin de rendre obligatoire l'utilisation du format latitude/longitude DD MM.mm.

Centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage de Trenton

Le présent accident a incité les coordonateurs des missions de recherche et sauvetage (SAR) du Centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage (CCCOS) de Trenton à faire preuve d'une plus grande vigilance afin de réduire les risques d'imprécision à l'égard de la géolocalisation lors des opérations de sauvetage faisant appel à plusieurs organismes en précisant la méthode de référencement utilisée au moment de confier des tâches à de nouvelles ressources.

Secrétariat national de recherche et de sauvetage

À la réunion du 6 octobre 2009 du Conseil national de recherche et de sauvetage au sol (CNRSS) on a adopté une résolution demandant que le Secrétariat national de recherche et de sauvetage (SNRS), en collaboration avec les représentants des provinces et des territoires, dirige les recherches visant à établir une norme de géolocalisation pour les opérations SAR.

Sarvair Aviation Ltd.

La compagnie Sarvair continuera de transporter un système SPOT à bord de ses aéronefs qui ne sont pas équipés d'un autre dispositif de localisation d'urgence. Tous les mots de passe et codes de site Web des autres dispositifs de localisation d'urgence ont été ajoutés à la liste de vérifications « Over Due Aircraft » (aéronefs en retard). Sarvair prépare présentement une fiche de consignes d'utilisation de base du système SPOT qui sera transportée à bord des appareils équipés de ce système et servira à informer les passagers.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .