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Rapport d'enquête aéronautique A04C0016

Perte de maîtrise en direction et sortie de piste
du Fairchild SA227-AC C-FYAG
exploité par Bearskin Lake Air Service Ltd.
à l'aéroport régional de Dryden (Ontario)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le Fairchild Metro SA227-AC (immatriculé C-FYAG et portant le numéro de série AC-670B), exploité par Bearskin Lake Air Service, qui avait quitté Kenora (Ontario) pour assurer le vol BLS342 se pose sur la piste 11 à Dryden. Il y a 2 pilotes et 10 passagers à bord. Au cours de la course à l'atterrissage, l'avion sort sur le côté gauche de la piste et finit sa course dans de la neige épaisse. L'avion ne subit aucun dommage à l'exception de deux pneus crevés sur le train principal gauche. L'équipage et les passagers ne subissent aucune blessure. L'incident se produit de jour, à 14 h 57, heure normale du Centre.

Renseignements de base

Le jour de l'incident, l'équipage a effectué plusieurs vols sans incident à bord de C-FYAG et il s'est posé à Kenora à 14 h 12, heure normale du Centre (HNC)Note de bas de page 1. L'avion a été dégivré, et il a fallu demander plus de puissance qu'à l'habitude pour faire rouler l'avion à la sortie du poste de dégivrage, car un ou plusieurs freins avaient gelé pendant le dégivrage. Les freins n'ont pas été inspectés, mais ils ont bien fonctionné durant les vérifications effectuées pendant le roulage. Il y avait des congères sur la piste durant le décollage de Kenora à 14 h 39. L'équipage a suivi les procédures d'utilisation normalisées (SOP) du Metro SA227 de Bearskin Airlines dans le but de réduire les risques de gel des freins. L'équipage n'a pris aucune mesure pour réduire les risques de perte de maîtrise en direction à l'atterrissage ni n'était tenu de le faire en vertu des SOP ou du manuel de vol du SA227-AC rédigé par l'avionneur.

Le copilote était le pilote aux commandes pendant l'approche et l'atterrissage à Dryden. Les freins ont été vérifiés durant les vérifications avant l'atterrissage, et aucune anomalie n'a été découverte. L'avion s'est posé à 14 h 57 sur l'axe de la piste 11, dans la zone normale de toucher des roues, à la bonne vitesse et dans la bonne configuration. L'avion a effectué un lacet vers la gauche immédiatement au moment de l'atterrissage. Le copilote a inversé la poussée du moteur droit et a mis du pied à fond à droite.

L'avion était équipé d'une commande d'orientation de train avant assurant la maîtrise directionnelle au sol. La commande est armée avant l'atterrissage en plaçant sur ARMED (armé) un commutateur situé sur la panneau latéral du commandant de bord. Pendant une course à l'atterrissage normale, le pilote aux commandes centre les pédales de direction et demande SPEEDS LOW (faible régime), et la commande d'orientation de train avant est embrayée lorsque le pilote qui n'est pas aux commandes place les manettes des gaz des moteurs sur LOW (faible). La commande d'orientation peut aussi être embrayée par l'un ou l'autre des pilotes qui n'a qu'à presser un bouton du côté extérieur de l'une ou l'autre des manettes des gaz. La commande d'orientation de train avant fera pivoter le train avant jusqu'au point correspondant à la position des pédales de direction, si ces dernières ne sont pas centrées lorsque la commande d'orientation est embrayée. Même si la commande d'orientation était armée, elle n'a pas été engagée pour deux raisons. Premièrement, l'équipage tentait de contrer le lacet et n'a donc pas placé les manettes des gaz sur LOW. Deuxièmement, le copilote n'a pas pressé le bouton se situant sur les manettes des gaz permettant d'engager la commande d'orientation parce qu'il mettait déjà du pied à fond à droite et que le train avant aurait pivoté jusqu'au point correspondant à la position des pédales de direction. Le fait de centrer les pédales de direction afin d'embrayer doucement la commande d'orientation aurait accentué le lacet vers la gauche.

Puisque le copilote avait les pieds sur les pédales de direction et que ses talons touchaient le plancher, il n'a pas pu déplacer ses pieds vers le haut afin de serrer les freins à droite pendant qu'il mettait du pied à droite. Le fait de centrer les pédales pour permettre le déplacement des pieds vers le haut aurait également accentué le lacet.

Le lacet s'est amplifié de façon incontrôlable avant que le commandant de bord ait pu aider à maîtriser l'avion. L'avion est sorti sur le côté gauche de la piste à environ 2900 pieds du seuil de la piste 11 et il a parcouru environ 150 pieds dans la neige. L'avion s'est immobilisé à un cap de au 080 degrés, à environ 30 pieds du bord de la piste. L'équipage a coupé les moteurs et mis les hélices en drapeau avant que l'avion quitte la piste.

Une fois l'avion immobilisé et l'absence de blessé confirmée, les passagers ont été évacués par la porte principale.

Un opérateur d'équipement de maintenance d'aéroport qui se trouvait dans un camion sur l'aire de trafic d'aérogare a vu l'avion quitter la piste et a immédiatement averti Winnipeg Radio. L'opérateur s'est rendu sur le lieu de l'incident et a déterminé que l'intervention des services de lutte contre les incendies et des services d'intervention d'urgence ne serait pas nécessaire.

L'évacuation des passagers a été dirigée par le copilote. Cependant, une fois le débarquement des passagers terminé, le copilote et le personnel de l'aéroport n'avaient pas de contrôle direct sur les déplacements des passagers. La plupart des passagers et le copilote ont formé une longue file et ont traversé la piste, suivi la voie de circulation A et traversé l'aire de trafic d'aérogare pour se rendre à l'aérogare. Un des passagers a accepté de monter avec l'opérateur d'équipement.

Les enquêteurs du Bureau de la sécurité des transports (BST) ont autorisé l'enlèvement de l'avion du lieu de l'incident avant qu'ils arrivent sur place. Lorsque le personnel de maintenance de l'exploitant est arrivé, les freins des deux trains principaux étaient gelés et il n'a été possible de les faire tourner qu'après les avoir dégelés à l'aide d'un réchauffeur portable. Les roues du train principal gauche ainsi que les pneus endommagés ont été remplacés sur le lieu de l'incident, et vers 21 h, l'avion a été remorqué jusqu'à un hangar de l'aéroport où l'exploitant a entrepris une inspection après situation anormale.

Le jour suivant, l'avion, les roues et les pneus ont été examinés dans le hangar par les enquêteurs du BST. Les deux pneus des roues du côté gauche présentaient des méplats comportant des trous traversant les sculptures et le câblé des pneus. Les freins du train principal gauche étaient en bon état de service. Le circuit de freins, le frein de parc et la commande d'orientation de train avant ont été inspectés, et ils étaient tous en bon état de service. Les pneus du train principal droit n'ont pas subi de dommage, ce qui indique qu'ils tournaient normalement pendant la course à l'atterrissage. Plusieurs cycles de rentrée et de sortie du train ont été effectués, et aucune anomalie n'a été découverte. L'inspection après situation anormale effectuée sur l'avion par le personnel de la compagnie n'a révélé aucun dommage structural.

Les dossiers indiquent que l'équipage de conduite possédait les licences et les qualifications pour effectuer le vol conformément à la réglementation en vigueur, et que l'avion était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. Il n'y avait aucune inscription de points d'entretien différés pertinents aux circonstances de l'incident.

La réglementation exigeait que l'avion soit équipé d'un enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR). Un CVR de L3 Communications, modèle Fairchild FA2100, portant le numéro de série 000103578 avait été installé. La réglementation n'exigeait pas que l'avion soit équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR). Cependant, un FDR, modèle Fairchild F800, portant le numéro de série 2098 avait été installé. Le CVR et le FDR ont été déposés de l'avion et envoyés au Laboratoire technique du BST pour analyse.

Les conditions météorologiques à Kenora à 14 h étaient les suivantes : vent du 100 degrés vrais à 11 noeuds avec des rafales à 17 noeuds, visibilité d'un mille terrestre (sm) dans une neige légère et dans de la poudrerie, visibilité verticale de 2000 pieds, température de −15 °C, point de rosée de −19 °C, calage altimétrique de 29,97. Une observation spéciale faite à 14 h 33 faisait état des conditions météorologiques suivantes à Kenora : vent du 100 degrés vrais à 10 noeuds avec des rafales à 15 noeuds, visibilité de deux sm dans une neige légère et dans de la poudrerie, ciel couvert à 4000 pieds au-dessus du niveau du sol (agl).

La piste de Kenora a été inspectée à 13 h 14. Un rapport sur l'état de la surface de la piste (RSC) indiquait que la surface de la piste était propre et sèche sur 30 %, couverte de neige compactée sur 30 % et couverte de plaques de neige éparses de ¾ de pouce sur 40 %. Le coefficient canadien de frottement sur piste (CRFI) était de 0,42, et la température était de −16 °C. L'équipage a reçu ce RSC et ce CRFI, et en a accusé réception durant l'approche de Kenora. Les conditions de la voie de circulation et de l'aire de trafic étaient similaires aux conditions de la piste.

Les conditions météorologiques à Dryden à 14 h 33 étaient les suivantes : vent du 080 degrés vrais à 10 noeuds, visibilité de deux sm dans une neige légère, ciel couvert à 1100 pieds agl, température de −18 °C, point de rosée de −22 °C, calage altimétrique de 30,04. L'équipage a reçu ce rapport météorologique et en a accusé réception durant l'approche. À la suite de l'incident, une observation spéciale faite à 14 h 58 faisait état des conditions météorologiques suivantes : vent du 080 degrés vrais à 9 noeuds, visibilité de deux sm dans une neige légère, visibilité verticale de 1000 pieds, température de −18 °C, point de rosée de −22 °C, calage altimétrique de 30,05.

La piste à Kenora a été inspectée à 10 h 35. Un RSC indiquait une bande de 150 pieds de largeur dont la surface était propre et sèche sur 20 % et couverte de neige folle de ¼ de pouce d'épaisseur sur 80 %. Le CRFI était de 0,38 à 10 h 30. L'équipage a reçu ce RSC et ce CRFI, et en a accusé réception durant l'approche. Les opérations d'enlèvement de la neige à l'aéroport s'étaient poursuivies toute la journée, et les opérateurs d'équipement ont quitté la piste peu avant l'atterrissage de BLS342. À 15 h, une inspection de la piste effectuée après l'incident a confirmé que la piste était exempte de débris. Le RSC enregistré indiquait une bande de 150 pieds de largeur dont la surface était propre et sèche sur 60 % et couverte de neige folle de ¼ de pouce d'épaisseur sur 40 %.

La piste 11 de Dryden mesure 6000 pieds de longueur sur 150 pieds de largeur, et sa surface est asphaltée. Une bande de piste est décrite dans le manuel TP 312F de Transports Canada, Normes et pratiques recommandées - Aérodromes, comme étant une aire définie dans laquelle est comprise la piste et qui est destinée à réduire les risques de dommages matériels au cas où un aéronef sortirait de la piste. La bande de la piste 11 comprend une aire nivelée couverte de gravier s'étendant sur 200 pieds de chaque côté de la piste. L'avion s'est immobilisé à 105 pieds de l'axe de la piste dans la zone 1 de la bande de piste, soit dans la zone dont la limite se trouve à 75 pieds du bord de la piste. Pour l'atterrissage de BLS342, la bande de piste nivelée a rempli sa fonction qui était de réduire les risques de dommages au cas où un aéronef sortirait de la piste. Le personnel de l'aéroport et les enquêteurs du BST ont examiné la surface de la piste et ils n'y ont trouvé aucune trace de freinage.

Il n'y a aucun service de contrôle de la circulation aérienne à Dryden. Cependant, un service consultatif d'aérodrome à distance est assuré par la station d'information de vol de NAV CANADA à Winnipeg, dont l'indicatif d'appel est Winnipeg Radio.

Les opérations à l'aéroport de Dryden sont régies par le manuel d'exploitation de l'aéroport de Dryden. La rubrique 1.3.2 du manuel exige qu'on signale immédiatement la présence d'obstacles compromettant la sécurité aérienne à l'aéroport. Le personnel de l'aéroport a avisé immédiatement Winnipeg Radio de l'emplacement de l'avion accidenté. La rubrique 1.3.4 du manuel exige que tout obstacle susceptible de représenter un danger soit enlevé de la surface de l'aéroport. Dans les 30 minutes suivant l'incident, le personnel de l'aéroport a communiqué avec l'exploitant et le BST pour prendre des dispositions en vue de l'enlèvement de l'avion accidenté.

Le manuel d'exploitation stipule que l'aéroport doit être exploité conformément aux normes contenues dans le TP 312F, et que la décision de fermer une piste revient au gestionnaire de l'aéroport ou à la personne désignée et que cette décision nécessite la publication d'un avis aux navigants (NOTAM). La rubrique 3.1.6.8 du TP 312F stipule qu'aucun objet mobile ne doit se trouver à 196 pieds et moins de l'axe de la piste 11 de Dryden pendant l'utilisation de la piste pour des décollages ou des atterrissages. Malgré le fait que la norme ne le stipule pas clairement, cela signifie concrètement que les décollages et les atterrissages ne sont pas permis lorsque des objets mobiles, comme des véhicules, se trouvent à moins de 196 pieds de l'axe de la piste. Le supplément A du TP 312F (documentation d'orientation supplémentaire au TP 312F) offre des conseils aux exploitants d'aéroport, mais ce supplément n'a aucune force de règlement. La rubrique 5.3.2 offre des conseils relatifs aux dangers temporaires dans la zone 1 des bandes de piste et stipule que « la piste sera fermée dès qu'un aéronef sera immobilisé dans cette zone ».

Le gestionnaire de l'aéroport était de service au moment de l'incident et il est arrivé sur les lieux quelques minutes après l'incident. Puisque Dryden ne possède qu'une seule piste, le personnel de l'aéroport a décidé de garder la piste ouverte afin de permettre la poursuite des opérations. La piste est demeurée ouverte et exploitée pendant tout le temps où l'avion accidenté est demeuré à côté de la piste. Au cours des 30 minutes qui ont suivi l'incident, Winnipeg Radio a demandé au personnel de l'aéroport à deux reprises de confirmer si la piste allait être fermée, et à deux reprises, la réponse a été négative. Aucun NOTAM n'a été publié concernant l'état de la piste.

Les opérateurs de véhicule sont tenus d'obtenir la permission de la station d'information de vol appropriée avant de s'engager sur l'aire de mouvement d'un aéroport. Chaque véhicule en direction du lieu de l'incident devait traverser la piste 11/29. Les procédures normalisées de communications entre le personnel de l'aéroport et Winnipeg Radio ont été suivies dans le but de contrôler les nombreux mouvements de véhicule sur l'aéroport pendant que la piste demeurait ouverte avec l'avion accidenté dans la zone 1. Cependant, une analyse de l'enregistrement des communications a révélé que certains mouvements de véhicules n'ont pas été communiqués à Winnipeg Radio.

Plusieurs mouvements d'aéronefs se sont produits alors que des véhicules et un avion accidenté se trouvaient dans la zone 1. Avant chaque mouvement d'aéronef, Winnipeg Radio a signalé aux équipages de conduite la position de l'avion accidenté et celle des véhicules dont on savait qu'ils se trouvaient sur le lieu de l'incident. Cependant, certains des mouvements de véhicules n'ayant pas été communiqués à Winnipeg Radio, il y avait un risque qu'un mouvement d'aéronef se produise au moment où un véhicule se trouvait sur la piste. Aucun de ces aéronefs n'a eu de problèmes de maîtrise en direction pendant le décollage ou l'atterrissage. Cependant, la poursuite des opérations sur la piste alors qu'un avion accidenté et des véhicules se trouvaient dans la zone 1 de la bande de piste a augmenté les risques pour les avions qui utilisaient la piste. Les risques de communications manquées entre les véhicules et Winnipeg Radio, les risques connexes relatifs aux mouvements simultanés d'aéronefs et de véhicules et le risque de dommages aux aéronefs susceptibles de faire une sortie de piste auraient tous pu être éliminés en fermant la piste.

L'avion était équipé de freins de roue multidisques hydrauliques de modèle 5011640-1 fabriqués par Aircraft Braking Systems Corporation. Les freins sont situés entre les roues doubles du train d'atterrissage principal. Il y a un ensemble de frein pour chaque roue. Il n'y avait rien pour empêcher la neige soufflée par le vent d'entrer dans le logement des disques de frein. Le circuit de freinage n'était pas assisté par servofrein, et il ne comprenait pas de dispositif antidérapage. Certains circuits de freinage d'aéronef comprennent un dispositif de protection qui empêche de serrer les freins avant le toucher des roues. Le circuit de freinage du SA227-AC et de la plupart des autres types d'avions utilisés dans des opérations de navette et de taxi aérien n'est pas équipé d'un tel dispositif. L'utilisation des freins pendant le roulage, le décollage et l'atterrissage provoque une accumulation de chaleur dans les freins, et la neige qui entre dans le logement du frein chaud fond et se transforme en eau. Lorsque des freins mouillés se refroidissent à des températures inférieures au point de congélation, l'eau se transforme en glace et empêche les roues de tourner. L'avion était exploité à des températures inférieures au point de congélation, et il y avait de la neige et de la poudrerie à l'aéroport de départ. Il n'y avait rien pour empêcher .la neige soufflée par le vent de se déposer sur les freins, et il est probable que de la neige s'est introduite et s'est déposée sur les freins durant le départ de Kenora et qu'elle a fondu pendant le trajet vers Dryden.

Les freins sont actionnés en exerçant une pression sur la partie supérieure des pédales de direction. On peut serrer les freins, à partir du siège de gauche ou de celui de droite, au moyen de l'ensemble double de pédales de palonnier. Un examen des pédales de direction effectué par les enquêteurs du TSB a permis de déterminer qu'avec les talons au plancher, il n'est possible d'appliquer qu'une très faible pression sur la partie supérieure des pédales afin de serrer les freins. Il était possible de positionner les pieds plus haut sur les pédales afin de commander la gouverne de direction sans appliquer une pression sur les freins, ce qui aurait également permis d'utiliser les freins tout en déplaçant les pédales de direction.

La pression exercée par le pied du copilote sur la pédale de direction droite a empêché le repositionnement du pied plus haut sur la pédale afin de commander les freins. Le copilote n'a pas été en mesure de commander les freins pour la maîtrise en direction parce qu'il n'a pas été capable de relâcher la pression qu'il exerçait sur les pédales de direction sans perdre la maîtrise en direction que lui apportait la gouverne de direction.

Une entrevue effectuée auprès des pilotes et de la gestion de Bearskin a révélé que la compagnie utilisait une pratique non documentée qui consistait pour les pilotes à positionner leurs pieds sur les pédales de direction en appuyant leurs talons sur le plancher et à déplacer leurs pieds de manière à ce qu'ils soient plus haut sur les pédales lorsqu'ils avaient besoin de commander les freins. Cette pratique était utilisée sur tous les types d'avions exploités par la compagnie. La seule exception provenait d'un pilote plus expérimenté qui prônait le positionnement des pieds plus haut sur les pédales afin d'être prêt à serrer immédiatement les freins après le toucher des roues. La position où les talons reposent sur le plancher vise à réduire les risques d'application involontaire des freins avant ou pendant le toucher des roues puisqu'une telle situation pourrait mener à des dommages aux pneus ou à leur défaillance. D'autres exploitants de service de navette ou de taxi aérien utilisent également cette pratique pour la même raison. Cette pratique n'est pas documentée et elle est mise en application sur des types d'avions utilisés pour des opérations de navette et de taxi aérien, dont le SA227-AC.

Le manuel de vol du Fairchild ne contient pas de procédures d'exploitation en cas de situation anormale ou d'urgence concernant le gel des freins. Les SOP de Bearskin Airlines Metro (pages 4 à 2) contiennent une procédure en cas de situation anormale relative au gel des freins qui se lit comme suit :

[Traduction]

Si vous avez des raisons de croire que vos freins sont gelés (avant le départ), relâchez le frein de parc et écartez les disques de freins à l'aide du grand tournevis plat qui se trouve dans la soute à bagages avant. Évitez de serrer les freins pendant le roulage dans de la neige profonde lorsque le temps est froid. Si vous devez rouler dans de la neige profonde pour décoller, utilisez les freins le moins possible. En dernier recours, vous pouvez vaporiser du glycol sur les freins.

Les SOP de la compagnie fournissent peu de conseils aux équipages en ce qui a trait à la gestion des risques liés au gel des freins et elles n'abordent pas les risques de perte de maîtrise en direction à l'atterrissage.

D'autres exploitants canadiens d'avions Fairchild SA227 ont été contactés afin de déterminer comment s'effectue la gestion des risques liés au gel des freins. Ce sondage informel a indiqué que les stratégies de gestion des risques liés au gel des freins mises en oeuvre par l'industrie sont pour la plupart non documentées et appliquées inégalement d'un exploitant à l'autre. Les stratégies de gestion des risques mises en oeuvre par les exploitants étaient les suivantes :

Certaines des stratégies utilisées par les exploitants vont à l'encontre des procédures recommandées par le fabricant des freins. Notamment, ce dernier a exprimé des inquiétudes à propos de l'utilisation de liquide dégivrant sur les freins, puisque certains produits chimiques dégivrant peuvent causer une détérioration importante des freins en carbone et que la présence de liquide dégivrant sur les freins peut réduire le coefficient de friction réduisant ainsi l'efficacité du freinage. Le fabricant recommande les stratégies suivantes pour réduire le risque de gel des freins :

Transports Canada offre des conseils aux pilotes sur certaines questions de sécurité, y compris les opérations hivernales, dans la section « Discipline aéronautique » de la Publication d'information aéronautique. Aucun renseignement relatif aux risques associés au gel des freins ne figure dans cette publication.

Une recherche dans la base de données du Système de compte rendu quotidien des événements de l'aviation civile de Transports Canada a permis de relever 54 cas de freins gelés entre novembre 2000 et avril 2004. Aucun de ces cas n'a entraîné de blessure. Deux cas ont causé des dommages légers aux avions, et dans le reste des cas, il n'y a eu aucun dommage. Dans trois des cas, il y a eu sortie de piste, et dans 26 des cas, un avion accidenté s'est trouvé sur la piste. Cinq cas ont mis en cause des avions de la catégorie transport, 12 cas, des avions utilisés pour des opérations de navette et 37 cas, des avions utilisés pour des opérations de taxi aérien. Un rapport précédant du BST (A94O0055) a déterminé que le gel des freins d'un autre Fairchild SA227 avait mené à la perte de maîtrise en direction et à une sortie de piste, ce qui a légèrement endommagé l'avion.

Le CVR possédait quatre pistes haute qualité de 30 minutes et deux pistes de qualité inférieure de 12 minutes. L'une des pistes de 120 minutes était de piètre qualité. Selon ce qui a été déterminé, les connexions des prises audio/microphone du poste de pilotage avaient été inversées, ce qui a fait en sorte que les signaux de sortie de l'interphone étaient déphasés. La mise en commun de ces signaux déphasés a donné un enregistrement dont certaines parties étaient affaiblies, rendant difficile la compréhension des communications. Les prises audio/microphone sont couramment remplacées par les exploitants, et toute erreur de connexion risque de passer inaperçue durant les opérations normales. Des tests de fonctionnement et d'intelligibilité sont requis chaque année ou aux 3000 heures. La procédure fournie par le fabricant pour les tests de fonctionnement et d'intelligibilité effectués sur le CVR de modèle FA2100 ne comprenait pas de test distinct pour le canal mixte de 120 minutes. Les conséquences de l'affaiblissement du signal étaient minimales pour l'enquête en question, puisque les pistes de 30 minutes contenaient les renseignements nécessaires.

Le modèle de FDR installé dans l'avion était composé d'une unité à bande comportant six pistes qui enregistraient l'altitude, la vitesse indiquée, le cap magnétique, l'accélération verticale et le déclenchement de la radio VHF. L'analyse des données de vol a révélé que l'exactitude de certains paramètres étaient douteuses. Même si la présence d'un FDR n'était pas requise, la compagnie fonctionnait avec une liste minimale d'équipements contenant des dispositions relatives à l'état de fonctionnement d'un FDR ainsi qu'un programme d'entretien de FDR. Le programme d'entretien du FDR nécessitait l'exécution de vérifications de corrélation du système FDR. La dernière vérification de corrélation de l'avion avant l'incident avait été effectuée en octobre 2003, et l'exploitant a indiqué qu'aucune anomalie n'avait été détectée au moment de cette vérification. L'exploitant n'a pas conservé les données provenant des vérifications de corrélation. Les conséquences de l'inexactitude des données ont été minimales pour l'enquête en question, puisque d'autres sources de données ont fourni la corrélation des paramètres nécessaires.

Il existe un risque, dans le cadre d'autres enquêtes, que l'inexactitude des données d'un FDR ou la non-détection de l'affaiblissement du signal d'un CVR causée par des écarts de phase entraînent une mauvaise identification des lacunes en matière de sécurité ou en retardent l'identification.

L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

On peut obtenir ce rapport en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. L'avion était exploité dans des conditions météorologiques propices à l'introduction de neige dans les freins durant les opérations au sol à Kenora.
  2. Les freins du train principal gauche ont gelé, ce qui a empêché la rotation des roues pendant la course à l'atterrissage à Dryden.
  3. La position des pieds du copilote et la pression exercée sur les pédales de direction ont empêché l'utilisation efficace du freinage différentiel et de la commande d'orientation du train avant pour maintenir la maîtrise en direction de l'avion après l'atterrissage.

Faits établis quant aux risques

  1. Même si la technique des pilotes qui consiste à placer leurs pieds sur les pédales de manière à ce que leurs talons touchent le plancher réduit les risques de dommages aux pneus découlant d'un serrage accidentel des freins, cette technique expose les pilotes au risque qu'il ne puisse être en mesure d'utiliser les freins pour maintenir la maîtrise en direction.
  2. Le manuel de vol de l'avionneur ne contient aucune procédure liée à une situation anormale ou d'urgence relative au gel des freins.
  3. Les procédures d'utilisation normalisées de la compagnie offrent très peu de conseils en ce qui a trait au gel des freins, et la Publication d'information aéronautique de Transports Canada n'offre aucun renseignement relatif aux risques associés au gel des freins.
  4. Les stratégies de gestion des risques liés au gel des freins mises en oeuvre par l'industrie sont pour la plupart non documentées et appliquées inégalement. Dans certains cas, ces stratégies vont à l'encontre des procédures recommandées par le fabricant de freins.
  5. Certains mouvements de véhicules à l'aérodrome de Dryden n'ont pas été communiqués à Winnipeg Radio, créant le risque qu'un mouvement d'aéronef se produise alors qu'un véhicule se trouvait sur la piste.
  6. La poursuite des opérations sur la piste tandis qu'un avion accidenté et des véhicules se trouvaient dans la zone 1 de la bande de piste a augmenté les risques pour les avions qui utilisaient la piste.
  7. Les passagers ont traversé les surfaces de manoeuvres en service pour se rendre à l'aérogare sans que leurs déplacements fassent l'objet d'un contrôle direct.
  8. Il existe un risque, dans le cadre d'autres enquêtes, que l'inexactitude des données d'un FDR ou la non-détection de l'affaiblissement du signal d'un CVR causée par des écarts de phase entraînent une mauvaise identification des lacunes en matière de sécurité ou en retardent l'identification.

Autres faits établis

  1. La bande de piste nivelée ayant pour but de réduire les risques de dommages aux aéronefs qui sortent de la piste a rempli sa fonction en ce qui a trait à l'atterrissage dans le cas du vol BLS342.
  2. Il est très probable que la mesure prise par l'équipage, à savoir de couper les deux moteurs avant la sortie de piste, a prévenu une défaillance structurale des hélices et d'éventuels dommages ayant une incidence sur l'intégrité de la cabine.

Mesures de sécurité prises

L'exploitant a corrigé les connexions des prises audio/microphone du poste de pilotage et a confirmé le bon fonctionnement du CVR. L'exploitant a signalé qu'aucun autre problème ne s'est présenté en ce qui concerne le canal mixte.

L3 Communications, le fabricant du CVR FA2100, s'efforce présentement de réviser les procédures à suivre pour les tests de fonctionnement et d'intelligibilité qui se trouvent dans le manuel d'installation et d'utilisation du CVR afin de s'assurer que les exploitants vérifient le bon fonctionnement des canaux de 120 minutes.

Le Bureau de la sécurité des transports a envoyé l'avis de sécurité aérienne (615-A040037-1) à Transports Canada lui suggérant d'étudier la possibilité de prendre des mesures pour s'assurer que les pilotes comprennent les risques associés au gel des freins et qu'ils sont bien préparés pour conserver la maîtrise en direction à l'atterrissage.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .