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Rapport d'enquête aéronautique A00H0007

Atterrissage train rentré
Beechcraft King Air A100 C-FDOU
Services des aéronefs du ministère des Transports
Aéroport d'Ottawa / Gatineau (Québec)
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le Beechcraft King Air A100 de Transports Canada portant le numéro de série B-112 a décollé de l'aéroport international d'Ottawa / McDonald-Cartier (Ontario) avec deux pilotes à son bord pour effectuer un vol d'entraînement selon les règles de vol à vue. L'avion s'est dirigé vers l'aéroport d'Ottawa / Gatineau (Québec) pour y faire des exercices d'approche et d'atterrissage à vue. Vers 14 h 30, heure normale de l'Est, l'avion a effectué un circuit et une approche à vue de la piste 27 avec le moteur gauche à faible puissance pour simuler une panne moteur. Le train d'atterrissage n'a pas été sorti avant l'atterrissage, et la partie arrière du fuselage ainsi que les deux hélices ont raclé la surface de la piste. Le commandant de bord a fait une remise des gaz et a déclaré une situation d'urgence et est allé atterrir à l'aéroport international d'Ottawa / McDonald-Cartier. Personne n'a été blessé. L'avion a subi des dommages importants.

Renseignements de base

Il s'agissait d'un vol d'entraînement dans le cadre de la formation périodique du copilote. Ce dernier était en place gauche et remplissait le rôle du pilote aux commandes (PF); ses compétences n'étaient pas à jour. Le pilote en place droite était un pilote instructeur de Transports Canada. Il agissait comme commandant de bord et assumait les fonctions du pilote non aux commandes (PNF). Les conditions météorologiques suivantes prévalaient à Gatineau : vents du 230 degrés magnétique à 5 noeuds, ciel couvert à 24 000 pieds au-dessus du sol (agl) et visibilité de 15 milles terrestres.

L'avion a effectué un posé-décollé sur la piste 27 de l'aéroport d'Ottawa / Gatineau et alors qu'il franchissait environ 500 pieds agl en montée, la puissance du moteur gauche a été réduite pour simuler une panne moteur. Le klaxon du train d'atterrissage s'est fait entendre et il a été aussitôt arrêté. On coupe le klaxon du train d'atterrissage lors des manoeuvres sans volets lorsqu'on réduit les gaz pour ne pas gêner ou distraire les membres de l'équipage lors des communications et lorsqu'ils exécutent d'autres tâches dans le poste de pilotage lors des phases critiques de vol. La liste de vérifications d'urgence en cas de panne (simulée) d'un moteur en vol a été exécutée, et l'avion est demeuré dans le circuit de la piste 27. Le commandant de bord a ensuite demandé au PF de faire un posé-décollé sans volets en plus de la panne du moteur gauche. Les deux moteurs devaient être utilisés pour le décollage qui suivrait. Aucun des pilotes n'a demandé la liste de vérifications avant atterrissage ni n'a remarqué que le train d'atterrissage n'avait pas été sorti. Lorsque l'avion a touché la piste, le commandant de bord a augmenté la puissance des deux moteurs et a demandé au PF de faire une remise des gaz. L'avion a parcouru environ 1 400 pieds sur la piste avant de décoller. Une fois l'avion dans les airs, des vibrations modérées de la cellule ont été ressenties, mais il était toujours possible de maîtriser l'avion.

Les procédures d'utilisation normalisées (SOP) sont conçues entre autres pour diminuer les erreurs de mémoire et d'inattention grâce à des marches à suivre bien définies. Les SOP du King Air A100 de Transports Canada, en date de juillet 1998, comprennent des rubriques sur les procédures normales et sur les procédures d'urgence. La rubrique sur les procédures normales comprend une liste de vérifications avant atterrissage dans laquelle figure l'énoncé suivant : Train d'atterrissage - Sorti / 3 verts. Le schéma qui accompagne la procédure montre que la liste de vérifications devrait être exécutée au moment où l'avion s'engage sur le parcours de base. La rubrique des SOP sur les procédures d'urgence comprend une liste de vérifications pour approche et atterrissage sur un seul moteur dans laquelle figure l'énoncé suivant : Train d'atterrissage - Sorti pour l'atterrissage. Cette liste de vérifications stipule que, lors d'un circuit à vue sur un seul moteur, le train d'atterrissage devrait normalement être sorti lorsqu'on amorce la descente ininterrompue vers l'atterrissage. Les SOP ne spécifient pas quand la liste de vérifications pour approche et atterrissage sur un seul moteur devrait être exécutée. Cependant, les pilotes n'ont pas l'habitude de consulter la liste pendant les approches en vue d'un atterrissage sur un seul moteur, même si la liste fait référence aux circuits à vue à deux reprises. La liste de vérifications avant atterrissage et la liste de vérifications pour approche et atterrissage sur un seul moteur se ressemblent mais ne sont pas identiques. Les points concernant le train d'atterrissage et les volets figurent sur les deux listes de vérifications, mais les points concernant la vitesse, le nombre de tours par minute des hélices et les phares d'atterrissage ne figurent que sur l'une ou l'autre des listes. Les SOP du King Air ne comprennent aucune autre liste de vérifications avant atterrissage.

Le King Air A100 est équipé d'un système d'avertissement du train d'atterrissage comprenant un klaxon de train et un voyant sur le levier de commande train. Trois contacts peuvent déclencher le klaxon : il y a un contact sur chaque manette des gaz et un sur le levier de commande des volets. Si l'on réduit la puissance d'un moteur ou des deux moteurs au-dessous du seuil minimum permettant de rester en vol, et que le train n'est pas sorti et verrouillé, le klaxon se fait entendre par intermittence. Si l'on réduit la puissance du moteur en vol, il est possible de couper le klaxon en appuyant sur le bouton « HORN SILENCE » à condition que les volets soient rentrés; toutefois, le voyant sur le levier de commande train reste allumé. Le klaxon retentira de nouveau si on sort les volets ou si la puissance de l'un ou l'autre des moteurs est réduite après avoir augmenté la puissance du moteur qui avait été réduite au départ. Si on coupe le klaxon sans augmenter la puissance du moteur qui a déclenché le klaxon au-delà du seuil de déclenchement, la réduction de la puissance de l'autre moteur ne déclenchera pas le klaxon. Le manuel d'utilisation du King Air A100 décrit le fonctionnement du système d'avertissement du train d'atterrissage, mais il n'explique pas clairement le fonctionnement du système quand la puissance des moteurs est réduite un moteur après l'autre.

Une inspection et des essais faits après l'accident ont montré que le circuit du train d'atterrissage de l'avion, y compris le système d'avertissement du train, fonctionnait comme prévu. Lors des essais, le voyant sur le levier de commande train s'est allumé comme prévu. On a constaté que lorsque le voyant s'allume le jour, il n'est pas assez brillant pour attirer l'attention du pilote, à moins que le pilote n'observe le voyant.

La formation périodique des pilotes de King Air de Transports Canada exige que des atterrissages sans volets et des atterrissages sur un seul moteur soient faits. Transports Canada publie des exercices de formation sûrs dans le manuel des opérations de la Direction générale des services des aéronefs (DGSA). Ces exercices n'interdisent pas les atterrissages sans volets sur un seul moteur.

Transports Canada est titulaire d'un certificat d'exploitation aérienne délivré en vertu de la partie VII du Règlement de l'aviation canadien (RAC) intitulée Services aériens commerciaux. L'article 700.16 du RAC énonce les limites maximale de temps de service de vol et les limites minimales de périodes de repos applicables aux équipages visés par la partie VII. La section 3 du manuel des opérations de la DGSA reprend ces mêmes limites et modifie la définition de temps de service de vol de manière à y inclure les tâches administratives et les tâches liées aux inspections. Le commandant de bord avait fait 26,5 heures supplémentaires au cours du mois précédant l'accident et 295,3 heures supplémentaires depuis janvier 2000. Le 24 novembre 2000, le commandant de bord a fait part à la gestion de la DGSA de ses inquiétudes concernant sa lourde charge de travail et la fatigue que cette situation entraînait. Le commandant de bord n'a pas demandé de jours de congé et a continué à travailler. Après l'accident, il a consulté un médecin et a bénéficié d'un congé de maladie d'un mois pour se remettre du stress lié à l'accident. On a examiné l'horaire de travail du commandant de bord au cours des cinq semaines ayant précédé l'accident et l'examen a révélé qu'il respectait les limites de temps de service de vol et de périodes de repos applicables. On a également fait une analyse détaillée des éléments ayant eu un effet sur le niveau de fatigue du commandant de bord. On a fait une analyse de l'emploi du temps (périodes de travail et de repos) du pilote dans les 72 heures précédant l'accident, mais l'horaire du pilote n'était pas représentatif de sa grande fatigue; l'analyse n'a pas donné de résultats concluants en ce qui concerne la fatigue chronique.

Le King Air A100 est certifié en vertu de la partie 23 des Federal Aviation Regulations des États-Unis, laquelle exige que les démonstrations de performances en montée sur un seul moteur se fassent dans une configuration pour laquelle la traînée est faible (train et volets rentrés). Si le train ou les volets sont sortis et qu'un des moteurs est en panne, il se peut que le moteur qui fonctionne ne produise pas assez de puissance pour assurer un taux de montée positif. Les SOP du King Air comprennent une liste de vérifications avant remise des gaz sur laquelle figure la mise en garde suivante : l'avion NE SERA PAS en mesure d'assurer un taux de montée positif si la traînée excédentaire n'est pas éliminée.

Analyse

Le voyant du train n'est pas assez brillant le jour pour toujours attirer l'attention du pilote. Le klaxon du train est un dispositif de sécurité plus fiable contre les atterrissages train rentré parce que la plupart du temps on peut l'entendre facilement lorsqu'il se déclenche. Le manuel d'utilisation du King Air n'explique pas clairement le fonctionnement du système d'avertissement du train d'atterrissage quand la puissance moteur est réduite un moteur après l'autre. Par conséquent, le fait que le klaxon du train, une fois coupé, ne retentit pas de nouveau si la puissance du second moteur est réduite n'était pas connu de tous. La décision du commandant de bord de couper le klaxon du train était en partie basée sur une mauvaise compréhension du fonctionnement du système d'avertissement du train d'atterrissage.

Vu que les performances de l'avion en montée sur un seul moteur ne sont pas garanties quand les volets sont sortis, il est prudent d'effectuer une approche sans volets lorsqu'un des moteurs est en panne, si l'on juge qu'une remise des gaz sur un seul moteur peut être nécessaire. Pour préparer les pilotes à ce type de situation, les exercices d'approche en vue d'un atterrissage sur un seul moteur se font habituellement sans volets. Cette procédure désactive l'avertisseur sonore du système d'avertissement du train d'atterrissage du King Air.

La liste de vérifications avant atterrissage n'a pas été exécutée; le train d'atterrissage n'a pas été sorti et l'équipage n'a pas observé le voyant indiquant la position du train d'atterrissage. Les SOP en vigueur n'exigent pas d'autre vérification de la position du train d'atterrissage, après que la liste de vérifications avant atterrissage a été exécutée.

La liste de vérifications avant atterrissage et la liste de vérifications pour approche et atterrissage sur un seul moteur qui figurent dans les SOP du King Air se ressemblent, mais elles ne sont pas identiques. Les deux listes devraient être exécutées pour faire toutes les vérifications au moins une fois; ceci permet de faire une deuxième vérification des volets et du train d'atterrissage. Lors d'une approche en vue d'un atterrissage sur un seul moteur, il n'est pas obligatoire d'exécuter à la fois la liste de vérifications avant atterrissage et la liste de vérifications pour un atterrissage sur un seul moteur. Les pilotes n'ont pas l'habitude de consulter la liste de vérifications pour approche et atterrissage sur un seul moteur pendant les exercices d'approche en vue d'un atterrissage à vue sur un seul moteur, même si la liste de vérifications fait état de circuits à vue à deux reprises.

Le commandant de bord avait effectué la valeur de 8 semaines d'heures supplémentaires environ au cours des 11 mois qui ont précédé l'accident. Même s'il avait fait part à la gestion de la DGSA de ses inquiétudes concernant sa charge de travail et la fatigue qui y était associée, il a continué à travailler de son plein gré. Le commandant de bord a fait un grand nombre d'heures supplémentaires, mais son horaire de travail respectait les limites établies dans le RAC en ce qui concerne les temps de service de vol et les périodes de repos applicables. Un examen détaillé des éléments qui ont eu un effet sur le niveau de fatigue du commandant de bord n'a révélé aucun élément convaincant qui pourrait expliquer que le commandant de bord ressentait une grande fatigue ou de la fatigue chronique.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. L'équipage a fait un exercice d'atterrissage sans volets sur un seul moteur à bord d'un avion King Air de Transports Canada alors que le klaxon du système d'avertissement du train d'atterrissage avait été désactivé.
  2. Les procédures d'utilisation normalisées (SOP) du King Air n'exigent pas que l'équipage fasse une deuxième vérification de la position du train d'atterrissage lors des exercices d'approche en vue d'un atterrissage sur un seul moteur.
  3. L'équipage n'a pas exécuté la liste de vérifications avant atterrissage, et le train n'a pas été sorti avant l'atterrissage; du fait que le klaxon du système d'avertissement du train d'atterrissage avait été désactivé, l'avertisseur sonore n'est pas entré en action pour prévenir l'équipage que le train n'était pas sorti, même si selon toute vraisemblance le voyant du train était allumé.

Faits établis quant aux risques

  1. Le fonctionnement du système d'avertissement du train d'atterrissage du King Air A100 n'est pas expliqué clairement dans le manuel d'utilisation de l'avion.
  2. Les SOP du King Air ne spécifient pas quand la liste de vérifications pour approche et atterrissage sur un seul moteur devrait être exécutée.

Mesures de sécurité

Après l'accident, la Direction générale des services des aéronefs (DGSA) de Transports Canada a remis le dossier d'information aux pilotes no 04/2001 à tous les pilotes de King Air de la DGSA. Ce dossier contient des renseignements qui permettent de comprendre plus facilement le fonctionnement du système d'avertissement du train d'atterrissage de tous les modèles d'avion King Air exploités par la DGSA.

La DGSA revoit la liste de vérifications pour approche et atterrissage sur un seul moteur dans l'intention d'obliger tous les pilotes qui utilisent les avions King Air qu'elle exploite à utiliser cette liste pour tous les atterrissages sur un moteur.

La DGSA est en train de modifier toutes les SOP de ses King Air (à l'exception des SOP du King Air A100 qui sont en train d'être supprimées graduellement) de sorte qu'une deuxième vérification (du type question / réponse) de la position du train avant l'atterrissage sera obligatoire.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .